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« Je suis épuisée, et on me demande de… pousser ? » : Noémie raconte son accouchement

Dès qu’elle a su qu’elle était enceinte, Noémie a pensé à son accouchement. Un moment qu’elle redoutait, mais qu’elle garde aujourd’hui en mémoire comme celui où elle a rencontré sa fille. Entre phase de désespérance et résilience, Noémie raconte son accouchement.
  • Prénom : Noémie
  • Âge au moment de l’accouchement : 28 ans
  • Bébé attendu le : 13 juin 2021
  • Bébé arrivé le : 6 juin 2021
  • Heure d’arrivée à l’hôpital : 9h30
  • Heure d’accouchement : 20h58
  • Stats : 2,8kg et 47cm

Mon compagnon et moi avons toujours eu envie d’avoir des enfants ensemble, mais nous avons véritablement commencé à essayer en avril 2020, presque à la fin du confinement. Après plusieurs mois sans résultat, je ne m’attendais plus vraiment à ce que ça arrive, jusqu’à ce qu’un dimanche matin, à 6 heures, mon test de grossesse affiche positif.

Ça a été une vraie surprise ! J’étais heureuse, et à la fois totalement chamboulée (je suppose que c’est normal). Je suis allée réveiller mon mari en lui montrant, et il était aux anges de cette annonce. Comme je suis pas mal flippée par l’accouchement, j’ai aussi perçu les choses de la façon suivante : « Ok, c’est le début, maintenant, tu es embarquée et il n’y a plus de retour en arrière, prochain arrêt, l’accouchement ! ».

Une grossesse sereine, et une phobie de l’accouchement

Je suis hypocondriaque, et j’étais donc persuadée — ainsi que tout mon entourage — que la grossesse serait pour moi un grand moment d’angoisse. Je m’imaginais déjà faire un ou deux tours par mois aux urgences, pour « vérifier » que tout va bien. Étonnement, il s’est passé l’inverse ! J’ai eu de la chance d’avoir une grossesse qui s’est très bien déroulée, autant pour moi que pour ma fille. Je me suis sentie pleinement épanouie et sereine.

J’étais accompagnée par deux super sages-femmes de ville très attentives et à l’écoute. La préparation et le suivi ont vraiment été des moments dont je garde de très bons souvenirs.

Pour autant, j’avais une grosse phobie de l’accouchement. Je redoutais particulièrement la poussée, que je voyais comme quelque chose que je ne me sentais pas capable de réussir. J’avais l’impression que je ne m’en sortirais pas, et, pour être claire, j’avais peur de mourir !

Mais une fois embarquée dans cette grossesse, je n’ai de toute façon plus eu le choix… J’avais fait un projet de naissance pas très détaillé que je n’ai finalement jamais donné à la maternité dans laquelle j’ai accouché. Je me souciais particulièrement des questions liées à mon consentement et au bon déroulé des choses, mais je me suis rapidement rendu compte que l’endroit où j’accouchais était très respectueux, au point que j’en ai oublié de le donner.

L’impatience de la fin de grossesse

Sur la fin de ma grossesse, j’étais en train de boucler l’écriture d’un livre, ce qui me prenait beaucoup d’énergie. Environ un mois avant mon terme, la sage-femme qui me suivait à l’hôpital m’a un peu paniquée en me disant que ma fille avait la tête bien appuyée contre le col, et qu’un accouchement pouvait intervenir à tout moment.

Elle m’a conseillé de me reposer, pour dépasser au moins le fameux cap des 37 semaines et de la prématurité avant d’accoucher. Ce que j’ai tenté de faire… Mais passé ce fameux cap des 37 semaines, et impatiente que cette grossesse prenne fin (les derniers temps sont longs et difficiles, pour le corps et l’esprit !), je me suis dit que, finalement, si elle arrivait plus tôt, ce ne serait pas plus mal.

J’ai monté des escaliers, marché, je suis restée active en me disant que cela pourrait accélérer les choses. Et puis, évidemment, rien ne s’est passé comme prévu. Ma fille était bien au chaud et n’avait en réalité aucune envie de sortir ! Au bout de plusieurs semaines, j’ai donc fini par me dire que je risquais de dépasser le terme. Je ne m’attendais pas du tout à me réveiller, ce 6 juin, avec des contractions pas drôles du tout…

Le début du travail

J’ai eu mes premières contractions à 6 heures environ. J’ai été réveillée immédiatement et je me suis mise à les compter, afin de voir s’il s’agissait de contractions de travail. Je me suis rendu compte très rapidement que c’était bien le cas.

À 9h30, les douleurs commençaient à se faire plus présentes. Nous avons donc pris les affaires, direction la maternité. À l’examen de contrôle, j’étais dilatée à 1 centimètre, mais la douleur était déjà très forte. La sage-femme qui m’a examinée m’a suggéré de rentrer à la maison, estimant qu’étant primipare, mon accouchement allait prendre du temps.

Persuadée du contraire, je l’ai pourtant écoutée et j’ai fait demi-tour direction la maison. Ensuite, tout s’est accéléré : les douleurs ont commencé à se faire de plus en plus fortes, et j’ai commencé à perdre la notion du temps. Je crois qu’il était environ 13h30 lorsque, à quatre pattes sur le sol, avec des contractions toutes les quatre minutes, j’ai indiqué à mon mari que je ne pouvais plus contenir la douleur.

Retour à la maternité dans la foulée, examen : j’étais dilatée à 3 centimètres. J’ai immédiatement demandé la péridurale, mais l’équipe a mis un peu de temps à me l’installer (peut-être estimaient-ils toujours que l’accouchement allait prendre du temps ?). À 15h30, on me pose la péridurale. À 16 heures, je reviens à un état normal, et en profite pour m’endormir, épuisée par les douleurs de la mi-journée.

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Michal Bar Haim / Unsplash

« Vous êtes à 10, on va pouvoir y aller »

À 18 heures, une sage-femme m’examine, et, alors que je somnolais encore, me dit :

« Très bien, vous êtes à 10, on va pouvoir y aller »

Soudain, panique : mais aller où ? J’avais tout lu, tout vu, tout écouté sur l’accouchement, je pensais être renseignée, mais je n’avais pas en tête qu’avec la péridurale, ce besoin « naturel » de pousser au moment propice ne se faisait pas forcément ressentir. La mienne, en tout cas, était trop dosée et je ne sentais purement et simplement plus mes jambes.

La panique s’accélère : je ne sens plus le bas de mon corps, je suis épuisée, et on me demande de… pousser ? Ma fameuse phobie ! C’est à ce moment que je suis entrée dans la phase de désespérance, dont j’ai découvert l’existence bien plus tard et dont personne ne m’avait parlé.

Il s’agit d’un moment, entre la fin de la dilatation et le début de la poussée, lors duquel le corps envoie une forte dose d’adrénaline pour réaliser la phase de la poussée qui est la plus dure. C’est aussi un moment au cours duquel 20 pourcent des femmes font l’expérience d’une angoisse de mort impressionnante : l’impression de ne pas pouvoir y arriver, qu’on va mourir. De mon côté, ce fut un véritable choc. J’avais un mur face à moi, je ne me voyais pas y arriver. Dans mon esprit, c’était la fin (pour moi du moins). Les sages-femmes, compréhensives, m’ont indiqué que nous avions la possibilité d’attendre un peu, le bébé allant bien.

Quand j’ai rencontré ma fille

Dans les deux heures qui ont suivi, j’aurais dû (et pu) accoucher. Mais la seule chose à laquelle je pensais et que je demandais était : « Faites moi une césarienne, ou faites remonter le bébé, mais j’en suis incapable. Trouvez une solution, mais sans moi. »

L’angoisse était d’autant plus forte que, lorsque j’ai tenté de pousser à 18 heures, je m’y prenais très mal, je poussais de façon inutile et cela n’avait pour effet que d’accroître mon angoisse, et aussi mon rythme cardiaque… Rappelez-vous que c’est une hypocondriaque qui vous parle ! Vous imaginez le topo dans ma tête.

À 20 heures, l’équipe change pour celle de nuit. Arrive une sage-femme qui n’a plus pris de pincettes avec moi (et c’est clairement ce dont j’avais besoin). Quand celle qui la précédait était douce, celle-ci n’y est pas allée de main morte :

« Il est 20 heures, si à 21 heures, vous n’avez pas accouché, on appelle le médecin, forceps et compagnie. Madame, vous n’avez pas le choix, votre bébé est trop engagé, il sortira par voie basse dans tous les cas »

Petit électrochoc. À 20h30, je retente la poussée. Ça fonctionne. Et puis, l’adrénaline de voir que ça fonctionne, d’entendre les sages-femmes me dire que ça avance bien, ça me motive, j’y vais à fond, je donne tout, et 28 minutes de poussée plus tard, ma fille était là. Explosion de joie, mon mari et moi fondons en larme.

Je me rappelle que la première chose que j’ai vue a été ses petits yeux très foncés, quasi noirs, qui me regardaient. Et je me suis dit « Mon dieu, c’était un vrai petit être qui me donnait des coups de genoux là, dans mon ventre la veille encore ».

« J’avais l’impression qu’un camion m’avait roulé dessus »

Dans les heures qui ont suivi, j’avais l’impression qu’un camion m’avait roulé dessus, clairement. Ma fille avait avalé du liquide amniotique et avait donc pas mal de glaires à recracher. Les sages-femmes nous avaient montré comment la positionner pour l’aider (et ne pas qu’elle s’étouffe), mais ça a été le début du stress permanent pour moi. Une sage-femme m’a proposé de la prendre pendant quelques heures pour que je puisse dormir, mais impossible. Je me réveillais toutes les 30 minutes. Pourtant, j’ai bien regretté ces quelques heures de sommeil qui m’étaient offertes par la suite…

Les débuts de notre vie de parents ont été une énorme claque, voire pire, pour mon mari et moi.

J’allaitais, mais ma fille ne mangeait pas. Elle avait un besoin de succion intense, ce qui fait qu’elle me réveillait les premières nuits pour ainsi dire toutes les 20 à 30 minutes pour téter. Ce, sans prendre de poids, et me causant des douleurs très fortes aux seins. Par ailleurs, le choc de la poussée (et ma phase de désespérance) m’ont fait apparaître un herpès sur le menton.

Nous avons mis plusieurs jours avant de nous rendre compte de ce que c’était, deux sages-femmes et une gynéco/dermato ont dû passer avant de pouvoir faire un diagnostic. Sauf qu’entre temps, j’avais eu le temps d’embrasser ma fille à de nombreuses reprises et un herpès plus un nourrisson de quelques jours ne font pas bon ménage.

Une hospitalisation quelques jours plus tard

Des examens ont été pratiqués sur elle, dont nous avons eu les résultats une semaine plus tard. Entre-temps, je ne dormais pas, ma fille non plus, ou très peu, elle passait son temps à réclamer le sein mais ne grossissais pas.

Après quatre jours, épuisée, j’ai pris la décision d’arrêter. Décision qui a été critiquée par les sages-femmes qui s’occupaient de moi, et j’ai extrêmement mal vécu ce moment. Je me suis sentie jugée, j’ai eu l’impression d’être une mauvaise mère, j’ai douté… Et en prime, les équipes n’ont pas voulu me laisser sortir avant d’être certains que ma fille prenne bien ses biberons. Nous sommes donc restés au total six jours à la maternité. Une fois sortis, c’était le soulagement, jusqu’à ce que quelque jour plus tard, on reçoive un coup de fil de la pédiatrie : « Il faut que vous prépariez l’hospitalisation de votre enfant et la vôtre ».

Les résultats avaient démontré la présence du virus de l’herpès sur la paupière de ma fille. Notre vie défile devant nos yeux à ce moment-là : pour un bébé de dix jours, les conséquences de l’herpès peuvent être graves : méningite, décès… L’angoisse est insoutenable.

Retour à l’hôpital, où nous sommes restées deux jours dans une toute petite chambre sous 30 degrés. Ma fille a été mise sous perfusion d’antiviral le temps de réaliser des examens pour voir où ce virus l’avait contaminée. À dix jours de vie, elle vivait déjà des prises de sang et une ponction lombaire.

Les résultats devaient nous permettre de savoir où le virus s’était logé, dans la moelle épinière (le plus grave), le sang, ou la peau. Les minutes passaient comme des heures, et je ne dormais évidemment pas. Pour couronner mon angoisse perpétuelle, les soignants m’avaient demandé de surveiller la perfusion de ma fille pour vérifier que le produit (l’antiviral) ne diffuse pas, ce qui risquait de nécroser sa petite main. J’avais donc, chaque minute, les yeux rivés sur ses petites mains. J’ai compris plus tard que cette situation était loin d’être normale, et qu’elle démontrait à quel point l’hôpital public manque de moyens.

Pendant 48 heures, c’est le défilé des pédiatres qui ne s’accordent pas. « Vous allez pouvoir sortir bientôt », « Vous allez rester deux semaines, car le traitement ne peut se faire en ambulatoire ». Les montagnes russes. Finalement, après toute une batterie d’examens, on s’est rendus compte que ma fille n’avait pas le virus. Par chance, elle n’avait pas été contaminée. Nous avons enfin pu rentrer à la maison, mais l’épopée n’était pas terminée…

Dans le mois et demi qui a suivi, ma fille ne dormait que très peu, toujours dans nos bras, et pleurait sans cesse. Impossible de dire pourquoi (c’est un bébé, après tout, ça pleure, un bébé ? Mais moi, on ne m’avait pas prévenue…). De mon côté, j’en oubliais de manger de me doucher, jusqu’à enchaîner les malaises vagaux. L’enfer. Quant à mon mari, sa boss lui avait tout simplement interdit de prendre un congé paternité (ce qui disons le, est bien sûr illégal). Il faisait donc de son mieux pour me soulager le soir et la nuit. Mais clairement, physiquement et psychologiquement, ça a été très dur.

Environ deux mois et demi après sa naissance, les choses ont commencé à devenir plus faciles. Et par chance, elle s’est même mise à faire ses nuits d’une traite !

Aujourd’hui c’est une petite fille tellement mignonne qu’on a (presque) déjà tout oublié. Et même si je n’ai pas du tout aimé accoucher, je dirais aussi que ce moment reste le plus beau jour de ma vie, car c’est celui où j’ai rencontré ma fille, ce petit être si important et que j’aime tant, et sans laquelle je n’imagine plus vivre.

Crédit photo : Nathan Dumlao / Unsplash


Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.

Les Commentaires

1
Avatar de Matilda Verdebois
30 juillet 2022 à 01h07
Matilda Verdebois
Ah, les injonctions contradictoires à la naissance... On pourrait écrire un bouquin entier.
Son post-partum n'a clairement pas été le meilleur moyen de commencer la parentalité, mais contente de voir qu'aujourd'hui, ça va !
1
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