Article initialement publié le 22 mai 2019
C’est un énième manque de considération envers ma pratique sportive qui m’a poussée à écrire ce témoignage.
Je pratique le cheerleading depuis deux ans dans l’équipe des Centaures de Grenoble. Ce sport je l’ai découvert par hasard sur YouTube pendant l’été 2017.
Et en ce merveilleux mardi 14 mai 2019, alors que je me balade sur Instagram, je tombe sur une interview de Pierre Trochet (propos recueilli par Alexis Venifleis), relayée par ma coach et un grand nombre d’athlètes…
J’en ai marre qu’on discrédite le cheerleading
Je n’ai pas retrouvé la publication originale, mais dans cette interview le cheerleading est décrit par Pierre Trochet comme :
« Un formidable outil d’éveil pour les jeunes filles. Cela leur permet de s’épanouir au travers d’une pratique sportive collective, rythmée, renvoyant à l’imaginaire de la féerie. »
Pour commencer : ce sport est mixte. Et « l’éveil des jeunes filles » ? Est-ce que j’ai besoin de détailler à quel point cette phrase est étrange ?
« L’imaginaire de la féérie » ? Quoi ?
Cette publication m’a heurtée, venant de la bouche d’un représentant de la Fédération Française de Football Américain (FFFA), car Pierre Trochet y est Head Of Business Operations & International Relationships.
Qu’il ne connaisse visiblement rien de notre discipline passe encore, même si le cheerleading dépend de la Fédération Française de Football Américain, mais qu’il se permette d’en parler sur un ton infantilisant et réducteur à mon sens…
C’est non.
Je ne veux pas propager de haine envers cet être humain, mais ses propos me blessent, comme ils ont blessés mes coéquipiers et coéquipières, alors je veux le faire remarquer pour que ce ne reproduise plus.
Nous ne sommes pas des jeunes filles en train de s’éveiller, nous somme des athlètes, au même titre que les joueurs de football américain !
Cet article est une énième contribution pour discréditer notre pratique. Comment pouvons-nous sortir des clichés sexistes si notre propre fédération ne nous prend pas au sérieux ?
Le cheerleading est peu médiatisé et quand il l’est, c’est le plus souvent pour répandre des préjugés. Alors j’aimerais faire connaître ma discipline autrement, telle qu’elle est vraiment.
L’occasion de montrer toute la badasserie qui se dégage de ce sport !
Comment le cheerleading est devenu MON sport
Je suis restée comme une quiche devant mon téléphone en 2017 quand je suis tombée sur le passage d’une équipe au championnat du monde.
Le lendemain je cherchais où je pourrais pratiquer en France, et BIM l’univers répondait à mon appel. En septembre j’étais dans le gymnase pour le premier entraînement de la saison.
J’avais trouvé mon truc, c’était bon. C’est hyper drama mais le sport fait cet effet-là parfois…
Les entraînements continuaient et je tombais amoureuse de cette pratique, de ce qu’elle implique, de ce qu’elle me procurait.
Le cheerleading c’est un mélange de gymnastique acrobatique, de sauts, de danse et de sueur. Mélange tout ça sur une musique de 2’30’’ et tu obtiens une routine.
Les vidéos seront sûrement plus explicites donc voici un petit exemple de ce qui se fait de mieux en France :
Attention : le cheerleading et la danse pompom sont deux disciplines différentes, la confusion est courante.
Comme tu peux l’imaginer, de telles performances demandent un entraînement intensif durant de longues années. Tout est question de technique, de timing, et de puissance.
Comment se pratique le cheerleading ?
Le cheerleading est un sport accessible à tous et toutes à partir de 5 ans. Un certificat médical d’aptitude est demandé pour des raisons d’assurance mais chacun pratique en fonction de sa condition physique.
Il existe 5 niveaux de difficultés en France (1 étant le plus facile, pour les enfants de 5 à 8 ans environ, 5 le niveau le plus complexe), il y a aussi des catégories d’âges (youth, mini, junior, sénior) mais pas d’âge maximum pour pratiquer.
Enfin il existe des équipes All-girl (féminines) et Co-ed (mixtes). La catégorie All-boy arrive doucement aux USA.
Il est donc possible de pratiquer quel que soit l’âge, la condition physique et l’investissement physique qu’on souhaite y consacrer.
Les clubs sont généralement organisés avec une section loisir (ouverte à tous et toutes) et une section compétition qui peut être sur try-outs (sur sélection). Aucun background sportif ou artistique n’est demandé, c’est un plus mais tout s’apprend !
Je fais partie d’une équipe senior co-ed level 4 cette année, mon témoignage s’appuie sur mon expérience, mais chaque club est différent.
Le cheerleading, un sport technique et puissant
Le cheerleading est une partie de moi.
J’ai pratiqué beaucoup de sports, notamment de la natation synchronisée pendant 8 ans (ces deux sports se ressemblent car ils allient pratiques sportives et artistiques), mais jamais je n’ai été passionnée comme je le suis aujourd’hui.
Ma semaine est rythmée par mes entraînements, ce sont des points de repères dans ma semaine. Les compétitions sont des jalons dans mon année. Les techniques acquises sont des marqueurs dans mon parcours d’athlète.
Quand je ne suis pas au gymnase, j’attends d’y être et quand j’en ressors, j’attends d’y retourner. Peu importe la douleur physique (et émotionnelle parfois), le cheerleading est un pilier indispensable à mon équilibre.
J’ai l’amour du geste parfait. Un stunt n’est possible que lorsque chaque personne connaît et maîtrise sa technique, que lorsque le timing est parfait. C’est une synergie incroyable entre 4 personnes.
Il en existe plusieurs différents mais ils peuvent être regroupés en catégories en fonction du niveau (hauteur du porté) et des différentes figures qui peuvent être effectuées dans les airs. (Source)
Lorsqu’un stunt est réussi, qu’il « hit » comme on dit, c’est le résultat d’un travail acharné et une joie immense. Voilà, on est venues, on a appris, on a travaillé, et on a réussi.
C’est un sentiment de puissance et de force
qui se dégage. Ce n’est pas rien de porter une personne au-dessus de sa tête. De l’envoyer à plus de 3 mètres du sol à la seule force de ses bras.
Ces mêmes bras qui deux ans auparavant en auraient été incapables.
Le cheerleading est pour moi une vraie discipline de vie : plus le niveau pratiqué est élevé, plus les entraînements vont être intenses et vont solliciter le corps.
À chacun de l’écouter, et d’écouter (ou non) ses limites. À partir du niveau 3/4, il est nécessaire d’avoir une certaine hygiène de vie, de faire du renforcement musculaire et des étirements à la maison.
Depuis que je pratique, je fais de la musculation un jour sur deux, je fais attention à ce que je mange, je prête attention à mon corps et aux signaux qu’il m’envoie.
Grâce au cheerleading, j’ai appris à écouter mon corps
Le cheerleading n’est pas un sport sans risque, et il faut en être consciente quand on le pratique.
Bien sûr, tout est mis en place pour limiter les chutes et les blessures, mais c’est le sport dans lequel on compte le plus grand nombre de traumatismes crâniens aux États-Unis.
À partir du moment où tu jettes quelqu’un en l’air, il va forcément retomber… et pas toujours comme tu l’avais prévu.
On ne compte plus les coups, les brûlures, les griffures. Les blessures peuvent être graves, mais c’est l’accumulation des coups et des chutes qui est le plus douloureux.
Le plus important est la sécurité de la flyer (celle qui vole, car c’est elle qui tombe du plus haut). Les bases enseignent le réflexe de la rattraper par tous les moyens, même si ça signifie de se blesser soi-même.
On finit par connaitre son corps, par apprendre à le ménager, les techniques apprises visent aussi à réduire l’usure… Mais quoi qu’on fasse, on porte des gens à bout de bras, et faut pas déconner, ça fait mal.
C’est une douleur qu’on accepte parce qu’elle vaut tellement le coup.
Le cheerleading m’a permis d’apprendre à écouter mon corps, je sais maintenant interpréter les signaux qu’il m’envoie.
Je sais quand il est fatigué, quand il a mal, quand il a besoin de repos… Je sais à quel point je peux le pousser. J’ai appris à en prendre soin, savoir quelles articulations je dois échauffer un peu plus, quels mouvements vont l’abimer.
Mon corps est mon « outil de travail », c’est lui qui prend le dessus lors d’un stunt car ce sont les réflexes et la mémoire musculaire qui permettent d’arriver à la perfection.
De la même façon, j’ai appris à dépasser des blocages à ne pas avoir peur car je lui fais confiance.
Il y a deux ans je faisais de magnifiques roulades pendant l’échauffement tumbling, aujourd’hui j’apprends à faire des saltos arrière à l’arrêt. J’ai le sentiment d’exister, d’avoir ma place !
Le cheerleading, c’est avant tout une équipe
C’est bête à dire, mais le fait que 25 personnes se retrouvent 3 fois par semaine pour mélanger leur sueur est… magnifique.
On ne se connaissait pas avant d’être dans cette équipe, et on est là à créer une routine — qui n’a en soi aucune utilité pour le reste du monde, mais on le fait quand même !
Le cheer c’est aussi un univers, les clubs se connaissent entre eux et organisent régulièrement des camps d’entraînements ouverts à d’autres athlètes.
Tout le monde se connait un peu et soutient les autres équipes.
Pendant les compétitions, les équipes concurrentes s’encouragent les unes les autres. La tradition veut qu’on s’échange de petits cadeaux, un bracelet ou un porte-clés à l’effigie de son club.
Bien sûr, au sein d’une équipe il y a des moments de tension et de la frustration, comme dans tous les sports !
À l’approche des compétitions, lorsque les entraînements deviennent plus intense, le stress monte. Participer, c’est représenter son club, montrer de quoi il est capable.
À une autre échelle, lorsque l’équipe participe à une animation (mi-temps pendant un match, représentation dans un forum des sports…) l’envie de réussir est toujours présente.
Le but est de montrer de quoi on est capable, de montrer que le cheerleading est un sport loin des clichés qui lui sont accolés.
Une des athlètes de mon équipe a réalisé des petits vlogs sur les dernières compétitions auxquelles on a participé. On ne voit pas notre routine, mais ça reflète bien l’ambiance :
Le cheerleading c’est une drogue, une fois qu’on tombe dedans on devient accro et il en faut toujours plus.
Ce sport n’est pas très connu et mérite d’être médiatisé ! Il m’a apporté tant de choses : force, courage, endurance, persévérance, esprit d’équipe, détermination…
Mon travail dans l’équipe et dans mon stunt est apprécié, mon implication et ma dévotion à ce sport aussi.
Il m’a permis de grandir et de devenir qui je suis aujourd’hui : une fille forte physiquement mais aussi mentalement !
Tu as envie de tester le cheerleading ? N’aie pas peur et lance-toi !
Si tu as envie d’essayer, vas-y sans hésiter ! Généralement les clubs organisent des entraînements ouverts à tous et toutes en début de saison.
Renseigne-toi sur les horaires et c’est parti !
Une première séance est une initiation, elle ne t’engage en rien à poursuivre et va te faire découvrir l’esprit de la discipline.
Elle commence par un échauffement classique (course sur place, montée de genoux, talons fesses, jumping jack, mobilisation articulaire, quelques étirements…).
Ensuite, un échauffement tumbling, pendant lequel tu vas sûrement faire des roulades. Tout le monde est passé par là, le tumbling ça s’apprend, et tu es là pour ça !
Fais de belles roulades et demain tu feras des rondades flip !
Le ou la coach va ensuite répartir les gens en groupe stunt : 4 ou 5 personnes qui vont former une pyramide. En fonction de ta taille (plus tard en fonction de tes capacités), tu vas te voir attribuer un rôle.
Tu seras mélangée avec des « anciennes et anciens » — pas d’inquiétudes, on va t’expliquer quelques techniques basiques de portés et tu vas faire ton premier stunt.
OUI TU VAS PORTER OU ÊTRE PORTÉE EN L’AIR. Et ça va être chelou ! Parce que ce sont des techniques particulières auxquelles ton corps n’est pas habitué. Mais ça va être bien !
À la fin de la séance, quelques étirements et bim tu rentres gérer tes courbatures.
Je le répète, pour commencer le cheerleading il ne faut pas de compétences particulières, juste de la motivation. Alors si tu hésitais… n’hésite plus !
À lire aussi : Comment je me suis réconciliée avec le sport
Tu fais du foot, de la boxe, du judo, de la course à pieds, du handball ou du skate, tu habites à Paris ou en région parisienne, et pratiquer l’un de ces sports te fait te sentir mieux dans ta peau au quotidien ?
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Il faut que le sport que tu pratiques fasse partie de ceux énumérés ci-dessus !
Spécifie dans ton mail ton année de naissance, et écris quelques lignes qui expliquent ton rapport à ton sport et les raisons pour lesquelles tu aimerais en parler !
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On a hâte de vous lire !
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Les Commentaires
Par contre j'aurai aimé plus en savoir sur la différence entre la pompom dance et le cheerlading (c'est juste qu'on a pas de pompom dans le cheerlading ou y a aussi une différence au niveau des figures ? Parce que dans les séries on voit souvent dans un même groupe des gens avec pompom et d'autres qui font des porter derrière... ^^"