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De l'art d'échouer...

J’ai essayé plusieurs cursus avant de trouver ma voie — Témoignages

Trouver le métier qui nous convient, c’est pas toujours simple. Des madmoiZelles ayant testé plusieurs cursus avant de trouver leur voie témoignent.

*Certains prénoms ont été modifiés.

La question de l’orientation est responsable chaque année de stress et d’angoisse pour beaucoup d’adolescents, d’étudiants, de parents. Si certain•e•s sont illuminé•e•s de leur vocation dès l’âge le plus tendre avant de suivre un parcours relativement tracé, pour d’autres cela ressemble plutôt à un sacré parcours du combattant, entre faux espoirs, échecs, déceptions… Des madmoiZelles qui ont essayé plusieurs cursus avant de trouver leur voie vous livrent leurs galères et témoignent de la façon dont elles ont enfin trouvé la voie qui leur convient.

Une première voie qui ne fonctionne pas

Si les madmoiZelles qui ont témoigné ont essayé plusieurs cursus, c’est souvent que les premiers ont été choisis un peu par défaut. Ne sachant pas trop quoi faire et voulant donc que son cursus reste général, Rebecca a ainsi visé large :

« Dès la terminale, je souhaitais passer les concours de Sciences Po : le journalisme m’intéressait bien, et j’avais envie d’un cursus me permettant d’avoir des tas de possibilités. Bon, j’avais aussi un peu envie d’en baver et de rester studieuse. L’année avant le bac j’ai donc fait une prépa Sciences Po qui était proposée dans mon lycée public. Je suivais en effet une filière littéraire qui me laissait pas mal de temps libre. Cette prépa était très intéressante, avec des sujets variés et des professeurs plein d’humour. Puis j’ai passé le bac et les concours, que je n’ai pas eus ; j’ai filé en classe prépa pour retenter ma chance plus tard. Cela me donnerait toujours pas mal de possibilités et allait m’occuper un peu.

Ça ne s’est pas si bien passé. Au bout de six mois, je ne dormais que deux heures par nuit, voulant suivre l’exemple de mes amis qui étaient majors de promo. Sauf que je n’ai pas tenu ; j’ai donc atterri en droit grâce à la passerelle prévue par ma prépa. Avant le bac, j’hésitais en effet entre la prépa, ce cursus et la fac de psycho. Mais ça ne m’a pas non plus convenu. »

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Ça a un peu été la même chose pour Alice, qui a suivi les conseils de sa mère :

« Depuis très jeune j’ai toujours été bonne à l’école, du coup les professeurs ont réussi à mettre dans la tête de ma mère que j’irais loin. Sauf que ma mère, c’est une passionnée, : quand ils lui ont dit ça, elle s’est directement imaginée que j’allais finir ingénieure. Dès la cinquième, ma mère (et donc moi, étant très manipulable) s’est mis en tête que j’allais finir ingénieure du son (j’étais musicienne depuis toute petite).

Seulement arrivée en première SI (sciences de l’ingénieur), je ne me suis pas sentie du tout à ma place. J’étais dans un lycée scientifique et technique, avec seulement des garçons, pas très faciles à côtoyer, dans une ville pas cool. J’ai fait une dépression en six mois : j’ai fini par ne plus m’alimenter, j’ai fait une phobie sociale et scolaire et je me suis cloîtrée chez moi. Je voulais vraiment faire plaisir à ma mère, tout en me rendant compte que ça ne me plaisait absolument pas et que j’étais en train de gâcher mon avenir, le tout dans un environnement pas adéquat et assez violent.  » juno-school

J’étais en train de gâcher mon avenir.

« Par conséquent, la CPE et l’assistante sociale m’ont changée de lycée au milieu de l’année scolaire. C’était parti pour une première L ! J’étais très contente mais malheureusement complètement paumée, car je ne savais plus quoi faire de mon avenir et ma dépression était bien installée.

Résultat : j’ai été déscolarisée, au grand dam de ma mère. J’ai été en hôpital de jour, suivie par des psychiatres et des éducateurs, puis comme je n’aime pas rester à rien faire, mes grands parents m’ont payé le BAFA. Et là, révélation ! En six mois j’ai passé mon BAFA, puis je suis devenue adjointe. Je suis sortie en très peu de temps de ma dépression. Je me sentais enfin utile, j’avais trouvé ma voie, les enfants ! »

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Cependant entre trouver sa voie et exercer le métier qui nous correspond, il y a parfois un fossé difficile à franchir…

« Du coup j’ai fait un BPJEPS (Brevet Professionnel de la Jeunesse de l’Éducation Populaire et du Sport) option Loisirs pour tous. Ce fut la plus belle année de ma vie. Puis après avoir été diplômée, comme je n’avais toujours pas de bac et qu’à part des petits contrats par-ci par-là je ne trouvais pas de boulot, j’ai commencé un DAEU (Diplôme D’accès aux Études Universitaires) tout en cherchant encore un boulot. J’en ai trouvé un mais il ne correspondait pas à mes attentes. Moi je voulais être directrice d’un accueil périscolaire, mais il n’y avait pas beaucoup de postes, surtout pour les jeunes (j’avais 20 ans).

Puis dans le cours de cette année-là je suis tombée amoureuse, et j’ai déménagé dans un coin avec un taux de chômage très élevé, où tous les postes que j’espérais avoir étaient réservés à des habitants de la ville. Habitant dans un tout petit village en marge de cette ville, je n’avais le droit à rien ! Le seul poste qui m’a été proposé était un contrat de quatre heures par semaine… Du coup, je me suis dit que c’était l’occasion de reprendre mes études. J’ai choisi de faire dans le social car j’avais travaillé entre autres avec des enfants en difficultés et que ça m’avait plu. Mon rêve était de travailler pour Emmaüs. Cependant je n’ai pas eu de contrat en alternance, et j’ai donc décidé de m’orienter vers autre chose… »

Pour Erika, le problème était surtout qu’elle avait du mal à se décider :

« Depuis toute petite, je n’ai jamais su me décider en termes de vie professionnelle : je voulais être à la fois écrivaine, coiffeuse, fleuriste et commissaire de police, tout un monde ! Peu décidée et mauvaise en sciences, je me suis dirigée vers un bac ES spécialité économie, que j’ai obtenu. Durant toute mon année de terminale, j’étais sûre de moi : je voulais faire du droit et devenir avocate. J’ai donc foncé tête baissée vers cette filière ! Ma maman, inquiète, m’a suggérée de faire plutôt un DUT Carrières Juridiques, mais on m’avait dit que les DUT et BTS étaient pour les cancres ! Par acquis de conscience, je me suis tout de même renseignée auprès de la conseillère d’orientation de mon lycée qui m’a clairement découragée, m’expliquant que j’avais de trop bons résultats pour ce genre de cursus. Ce serait donc une licence de droit. Mon objectif : la licence, un master puis le métier d’avocat…

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Je m’y voyais déjà.

Mais arrivée en licence, ça a été la douche froide : ce n’était pas du tout ce que je croyais. Je ne me plaisais pas du tout à la fac, où j’étais isolée et où il y avait trop de monde, trop de compétition. Certains cours m’intéressaient, d’autres non. Je n’arrivais à travailler que les modules qui me branchaient, pour le reste il m’était même impossible d’ouvrir le cahier. Je ne me reconnaissais pas, où était passée l’élève studieuse que j’étais ? J’ai commencé à sortir, à arrêter de bosser, j’ai commencé une dépression. J’ai terminé l’année avec 9,6 de moyenne générale. Ma fac n’autorisait pas le redoublement, alors que faire ? La réponse était simple : arrêter, trouver autre chose, malgré les protestations de mon entourage. Mais que faire d’autre ?  »

Il fallait que je fasse autre chose, mais quoi ?

« Je me suis décidée trop tard et par défaut, je me suis retrouvée en prépa pour les concours d’orthophoniste après un test de personnalité douteux au CIO de ma ville. La désillusion a été grande, la compétition était trop violente compte tenu de mon état psychologique, et rien ne m’intéressait. Un nouvel échec, après lequel ma famille m’a lâchée, et la dépression a gagné du terrain. Pourquoi était-ce si compliqué pour moi, alors que pour les autres tout roulait depuis le bac ? »

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Marjorie a quant à elle choisi « le moins pire », qui s’est révélé bien plus difficile que prévu :

« Au lycée, je n’étais pas la plus cancre mais j’étais loin d’être la plus investie. J’ai choisi une filière S parce que les maths étaient la matière qui me déplaisait le moins, et je m’y suis ennuyée royalement. En terminale, n’ayant absolument aucune idée d’orientation possible, j’ai choisi une prépa PCSI ; mon lycée proposant cette prépa, je n’aurais même pas à changer de ville, de logement et d’habitudes ! Parfait ! Une idée qui me paraît incroyablement folle en y repensant.

Ma première année post-bac a été un fiasco total : des cours totalement hors de la portée de mon cerveau, une méthode de travail qui n’était pas du tout adaptée à ma personnalité, une pression psychologique intense autant de la part de mes professeurs que de mes parents (comme si la réussite en dehors de la prépa dans notre société était totalement inexistante). En plus j’ai commencé à sortir avec mon copain au tout début de cette année-là, et j’avais bien plus envie de passer mes journées (et mes nuits) avec lui qu’à apprendre des équations différentielles de mes fesses. »

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Amélie aussi pensait viser la facilité :

« Bien décidée à ne pas trop galérer pour mon bac (et dans ma vie professionnelle après), j’ai décidé de faire un bac L pour ensuite partir en fac de lettres et faire des langues (autant exploiter ses facilités). À l’époque j’étais fascinée par le Japon et j’avais pour ambition d’aller y vivre. Je me suis lancée dans une LEA anglais-japonais, parce qu’il y avait aussi des matières qui, je pensais, faciliteraient mon insertion en entreprise plus tard (comme le droit, l’économie etc).

Au départ, je pensais pouvoir faire de la traduction mais en discutant avec d’autres élèves et des profs, j’ai appris que la traduction chez l’éditeur était un domaine saturé. Je me suis dit que je pourrais toujours faire de la traduction en entreprise et je ne me suis pas découragée. Mais ne pas être accompagnée tout au long de l’année comme au lycée, devoir ingérer des masses incroyables de cours pour seulement deux partiels dans l’année (surtout que vu comment je travaille, tout se faisait à la dernière minute), ça me rebutait à un point pas croyable. En plus j’ai commencé la fac une année où il y avait beaucoup de grèves, et je me suis rendu compte qu’on pouvait sécher sans aucun problème…  »

J’étais trop livrée à moi-même à la fac.

« Cette année-là, j’ai commencé à découvrir l’univers des cosmétiques et quand j’ai raté mes examens, j’ai décidé de ne pas m’obstiner dans un système scolaire qui ne me convenait pas. J’ai réfléchi tout l’été et j’ai fini par être séduite par l’idée de travailler en laboratoire cosmétique. Mais je ne voulais pas faire une fac de chimie, parce que ça restait la fac, et je me serais plantée aussi sûrement qu’en LEA (sauf qu’en plus je n’aurais même pas eu de facilités particulières en chimie). Et j’ai vu sur Internet qu’on pouvait travailler en labo avec le BTS esthétique. Comme l’été touchait déjà à sa fin, je n’ai pas pu m’inscrire en BTS où il n’y avait plus de places ; j’ai donc fait un CAP en un an pour ne pas perdre l’année et arriver avec des bases en BTS.

J’ai eu mon CAP et j’ai entamé mon BTS. La première année, c’était facile parce qu’on refaisait tout le programme de CAP. Et en deuxième année, j’ai déchanté. J’ai compris, en discutant avec les profs, que le BTS esthétique nous permettait seulement d’être testeuses en labo, mais pas de travailler à la formulation des cosmétiques. Ou alors, en intégrant la L3 de chimie, ce qui n’était pas une option pour moi. J’ai été très déçue et déboussolée. Mes parents avaient payé très cher ces écoles privées (5000 euros par an, pendant trois ans d’études…), et moi j’allais aux cours la boule au ventre tous les matins.

Les seules perspectives qui s’offraient à moi avec ces diplômes, c’était essentiellement esthéticienne ou vendeuse en parfumerie. Des métiers que je ne voulais pas faire. Je me suis dit que je pouvais arrêter l’esthétique, mais je ne savais pas pour quoi. Et j’avais aussi très peur de la réaction de mes parents, qui avaient dépensé beaucoup d’argent pour moi. Je me disais que si je leur annonçais que j’arrêtais l’esthétique sans aucun plan B, ça allait être pire. »

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En effet, les parents jouent souvent beaucoup dans le choix de l’orientation, comme Coralie le raconte :

« Quand est arrivée le grand moment de l’orientation au collège, je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire plus tard. Comme j’aimais l’équitation, j’ai trouvé un LEGTA (Lycée d’enseignement général et agricole) qui proposait un BEPA (A pour Agricole) Accompagnateur de randonnée équestre. Je me voyais déjà passer ma vie les fesses à cheval à me promener et à emmener des gens voir des paysages magnifiques. Mais je n’étais pas mauvaise à l’école, et les profs ont convaincu mes parents que j’avais le niveau pour aller dans une filière générale (ah le cliché comme quoi les BEP, CAP et bac pro sont pour les « nuls »…).

Un compromis a été trouvé : j’ai intégré le lycée agricole mais en seconde générale et technologique avec une option hippologie/équitation. Cependant j’étais dans un lycée vraiment nul. J’ai redoublé ma seconde, et pendant ma deuxième seconde, j’ai laissé tomber l’option équitation. Les cours se passaient très mal, et alors que je faisais partie des confirmés, faute de place j’étais avec les débutants. Je n’ai donc strictement rien appris en deux ans.

En fin de seconde je ne savais toujours pas quoi faire, mais étant en lycée agricole, la suite logique était de suivre une première STAV (Sciences et Technologies de l’agronomie et du vivant) avec une option aménagement paysager. J’ai réussi à changer de lycée pour être plus près de chez moi, et dans celui-ci il n’y avait pas d’option équitation. Cette même année mes parents m’ont offert un cheval, et j’ai pu reprendre goût à l’équitation en faisant presque uniquement de la randonnée.

Arrivée au milieu de ma terminale je voulais tout arrêter, car ce que je faisais ne me plaisait pas. C’était extrêmement intéressant mais je me voyais pas travailler là-dedans. J’ai voulu partir dans une formation d’auxiliaire de soin vétérinaire, mais mes parents n’étaient pas emballés et souhaitaient que je continue en BTS Aménagement Paysager. C’est ce que j’ai fait, et au bout de six mois j’ai fait une dépression car ce n’était clairement pas ma voie.  »

Au bout de six mois dans ce cursus, j’ai fait une dépression.

« J’ai dû lutter contre moi-même et faire entendre ma souffrance à mes parents pour qu’ils finissent par comprendre que je devais rentrer à la maison. J’ai alors décidé de faire une pause d’un an et de travailler en attendant d’avoir l’illumination divine. J’ai bossé comme serveuse en saison puis j’ai emménagé à Montpellier pour suivre une formation d’arts plastiques à la fac, tout en travaillant à mi-temps comme serveuse en parallèle. Je suis allée trois fois à la fac avant de me rendre compte que ça ne me convenait pas. C’était intéressant, mais j’avais besoin d’être active, de me rendre utile, de faire du concret. Alors j’ai continué à travailler. »

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Pour Shiroyasha la difficulté a surtout été sa méconnaissance de la filière dans laquelle elle s’est lancée, puis la difficulté de ces études :

« J’ai fait un bac S parce que « là au moins, il y a des débouchés, du boulot ». Et puis on ne m’a jamais vraiment éclairée sur les différentes possibilités, et lorsqu’on est bon•ne élève, l’après-collège est particulièrement vide en conseils et en suivi d’orientation.

J’ai toujours aimé deux choses, les animaux et les livres, et au collège comme au lycée ma matière préférée était la SVT. C’est donc tout naturellement que je me suis dirigée vers une licence de biologie, avec l’intention de partir ensuite en éthologie (étude du comportement animal).

En entrant en L1, j’ai découvert que la différence entre la SVT du lycée et la « vraie » biologie était très importante ! En clair, la SVT ce n’est que du français (et du par coeur) par comparaison avec les matières scientifiques qu’on y étudie (biochimie, maths, écologie, zoologie…) et qui ressemblent plutôt à la physique-chimie du lycée. Première désillusion.

Je me suis tout de même entêtée, ne sachant pas quoi faire d’autre, et j’ai redoublé ma première année. Sans succès. Une amie m’a alors parlé de la prépa qu’elle avait faite après sa première année de médecine pour passer le concours d’orthophonie. J’ai tenté deux semaines de prépa intensive où j’ai renoué avec le français, la grammaire… ça m’a énormément plu !  »

Ne sachant pas quoi faire d’autre, je me suis entêtée dans cette voie.

« J’ai donc commencé une prépa l’année suivante, sauf que le concours est très difficile à avoir… Deuxième désillusion.

L’année suivante, grâce à ma mère qui s’est démenée pour me trouver quelque chose, j’ai intégré une deuxième prépa, en faculté cette fois, associée à une première année de sciences du langage. Cette année a été très difficile pour le moral. C’était déjà ma quatrième année post-bac et j’avais l’impression de ne pas avoir avancé d’un pas. C’était dur. »

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La méconnaissance de la réalité du métier comme des études a également entraîné quelques échecs pour Marie :

« Je voulais devenir architecte. J’ai toujours eu un amour particulier des maisons, des lieux de vie, et je pensais que ça suffisait. Erreur ! J’ai fini l’année avec 2 de moyenne générale, un nombre incalculable de nuits blanches à mon actif, une bande de pote adorables et encore plus de soirées étudiantes que de nuits sans dormir. J’ai réalisé que ce n’était vraiment pas ma voie en rentrant chez moi après le rendu (catastrophique) d’une énième maquette (totalement pourrie). Je me suis dit que je n’avais pas du tout envie de vivre dans un environnement pareil. Et puis bon, vu ma moyenne, je n’avais aucune chance d’y arriver de toute façon.

Du coup, je me suis inscrite à la fac, en psycho. J’ai fait quatre ans de psycho, et je n’ai pas eu ma deuxième année. C’est là que les choses ont commencé à se dégrader. Je n’avais certes que 20 ans, mais mes parents ont commencé à mettre le holà. Un peu plus que ça d’ailleurs. Disons que cet échec scolaire n’est pas franchement bien passé et que mon amie de toujours, la pression, est revenue en force.

Au bout de trois ans et demi d’échecs répétés, de cours séchés, de partiels ratés, de promesses à moi-même que je serais sérieuse le prochain coup et que j’y arriverais, j’ai décidé de regarder les choses sous un autre angle. »

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Comme plusieurs autres madmoiZelles l’ont expliqué, Marie a constaté que le système de la fac ne lui convenait pas du tout et qu’elle ne s’y sentait pas suffisamment entourée et soutenue.

« Le contexte universitaire ne me convenait pas du tout. Trop peu de contraintes, trop peu d’encadrement, des perspectives d’avenir particulièrement floues, bref, j’avais besoin de tout autre chose, et je ne savais absolument pas quoi.

J’ai toujours adoré les livres, et classer des choses faisait partie d’activités honteuses mais ô combien satisfaisantes à mes yeux : j’allais devenir bibliothécaire.

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J’ai trouvé une place en IUT au tout dernier moment. J’ai repris des études de zéro à 24 ans.

Il y avait un énorme décalage entre moi et mes camarades de classe fraîchement sortis du lycée. En trois ans, je me suis fait UNE amie. J’ai passé un temps fou enfermée chez moi, je me suis investie dans mes études, je me suis sentie seule, je me suis ennuyée. Et j’ai décroché mon diplôme. Dans la documentation finalement, car en bibliothèque j’avais trop peur de m’ennuyer très vite et de ne plus avoir le moindre débouché. J’ai donc opté pour la version badass de la gestion de l’information. Et j’ai rajouté par dessus une année de licence professionnelle dans la création web.

Avec ça, je pouvais monter sur Paris, trouver un boulot qui claque, gagner plein de fric et vivre ma vie. Ah, ah, autre erreur.

J’ai trouvé un boulot d’opératrice web, un travail à la chaîne devant un PC. J’y suis restée un an et demi, à voir les conditions de travail et de salaire se dégrader jusqu’à virer au harcèlement moral. À ronger mon frein en me faisant traiter en sous-humaine sans rien pouvoir dire parce que j’avais besoin de bosser pour payer mon loyer. Vous vous en doutez, j’ai fini par craquer. J’ai prévenu ma supérieure que je cherchais du boulot ailleurs, et qu’à l’instant où j’en aurais trouvé ils pourraient aller se faire voir.

Au bout de six mois, j’ai décroché un CDD d’un an à l’INRA, au sein du service de documentation, pour bosser sur un site de valorisation de l’information scientifique. Le rêve. Sauf qu’en fait, c’était ennuyeux. Les conditions de travail étaient ahurissantes comparées à la galère inhumaine dans laquelle j’avais ramé avant. Mais je luttais pour travailler, je n’avais pas envie de faire ce qu’on me donnait. Et je le vivais mal.

Puis je suis tombée malade, j’ai déclaré une maladie auto-immune connue sous le doux nom de maladie de Basedow. C’est une maladie déclenchée par le stress, et qui se déclare très souvent dans un environnement de travail trop difficile. »

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Les choses ont ainsi pris des proportions importantes pour Marie, qui a craqué à force de désillusions. Même en ayant dès le bac une idée qui semble précise de ce que l’on veut faire, le choses se révèlent parfois différentes de ce que l’on pensait. Et d’autres fois, nos envies changent en même temps que l’on évolue. Après un bac STG, Mélaine voulait par exemple devenir professeure d’histoire-géo. Mais d’autres voies l’ont tentée en cours de route :

« Après avoir obtenu ma première année de licence d’histoire, j’ai trouvé un travail de serveuse pour l’été dans un restaurant animé dans un parc de loisirs historiques. À mon retour aux études à la rentrée, je me sentais de moins en moins impliquée dans mon objectif professionnel dans l’Éducation nationale. Je me suis dit que le professorat n’était peut-être pas mon seul avenir, et j’ai découvert le tourisme d’affaires en faisant des prestations. J’allais faire ça : travailler dans un milieu qui me plaisait et organiser des événements au service des entreprises !

J’ai quand même décidé de finir ma licence pour finaliser le tout, et j’ai ensuite intégré une école de communication pour faire un DEES Communication et me spécialiser dans l’événementiel. L’école où j’étais, bien que très chère, n’était pas forcément la meilleure pour apprendre l’organisation événementielle, et au beau milieu de mon deuxième stage j’ai eu une proposition inattendue : intégrer les spectacles dans le célèbre parc où je travaillais déjà en tant que serveuse ! »

Une proposition de travail inattendue a tout changé.

« Après trois jours d’insomnie j’ai décidé de parler à mes parents de mon intention d’arrêter mon année d’étude pour faire ma saison en spectacle. J’avais 21 ans et une opportunité comme celle-ci (interpréter une princesse tout de même !) n’allait pas se présenter à moi lorsque j’en aurais 40 ! Mes parents ont été compréhensifs, et j’ai commencé l’aventure ! J’ai tout de même pris soin de m’inscrire à un master communication.

Une fois la saison terminée, j’ai intégré une nouvelle université à cent kilomètres de chez moi, alors qu’avant je faisais mes études et mes jobs d’été dans mon département de naissance ! Nouvelle école, nouvelle ville, nouveaux camarades de classes… Cela faisait trop de choses nouvelles très éloignées de ma petite vie tranquille en campagne auprès de mes proches et de mes animaux. De plus, je voyais autour de moi beaucoup de personnes emménager en couple, avoir des bébés…

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Je me sentais de plus en plus mal. De plus, mon master était trop centré sur la recherche alors que je m’attendais à une préparation à la vie professionnelle, à me former à un métier de la communication et plus précisément l’événementiel.

Après deux ou trois mois à faire bonne figure auprès de tout le monde, j’ai passé quatre jours à pleurer sans cesse sans savoir pourquoi. J’ai fini par appeler ma mère, en pleurs, en essayant de lui expliquer à quel point j’étais mal et que j’avais envie d’en finir… Une période douloureuse qui m’a laissé des séquelles pendant un petit moment. Ma mère a très vite compris et m’a dit de rentrer immédiatement. »

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Althéa quant à elle était sûre de ce qu’elle voulait faire, mais des obstacles financiers et scolaires l’en ont dissuadée :

« Après mon bac S, j’étais bien perdue. Tout le lycée, je n’avais eu de cesse de déprimer dès qu’on parlait orientation, et pour cause. Je voulais faire ostéopathe, de toutes mes forces, sauf qu’en France, à part des écoles très onéreuses, il n’y a pas de formation universitaire. Et hors de question de faire kiné à la place : ce sont deux métiers différents ! J’ai donc dû choisir une orientation par défaut, faire quelque chose qui ne me permettrait de toute façon pas de m’épanouir. Ayant un dégoût profond de l’entreprise, je suis partie en lettres avec l’objectif de devenir enseignante en fac. Sauf que les places étant chères, après mon M1 j’ai compris que j’allais terminer prof au collège ou au lycée, un métier absolument pas fait pour moi – chose que les stages m’ont d’ailleurs confirmée !  »

J’avais un dégoût profond pour l’entreprise.

« Et là, à bac + 4, la panique, je ne voulais pas recommencer quelque chose depuis le début. J’avais honte et un sentiment d’échec. J’ai donc cherché ce que je pouvais choisir en admission parallèle, et je suis partie en troisième année de communication. Ouf, je ne perdais donc que deux ans. L’année à l’école s’est avérée très enrichissante, géniale, j’ai appris mille choses. Mais lors de mon stage dans une agence de com’, tout ce que je redoutais des entreprises s’est produit : mépris, sexisme, non respect des horaires et harcèlement si j’osais partir plus tôt… J’ai donc su que définitivement, l’entreprise n’était pas faite pour moi. »

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Ce que je rêvais de faire.

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Marine savait également ce qu’elle voulait faire, mais la rudesse du milieu qu’elle visait l’en a empêchée :

« Quand j’ai eu mon bac littéraire, j’étais très attirée par le métier de libraire. Je me suis inscrite dans une des deux formations de BP Libraire qui existaient en France, et j’ai été acceptée, malgré mon manque d’expérience et mon jeune âge. La formation étant en alternance, j’avais l’été entier pour trouver un patron… Ce que je n’ai pas réussi à faire, malgré la multitude de CV envoyés. Septembre est arrivé, et j’ai donc dû faire une croix sur mon entrée en BP Libraire.

Par défaut, je me suis inscrite en lettres modernes à la fac, où j’ai tenu environ une semaine. Les cours étaient pour moi trop dans la continuité du bac littéraire, et je voulais découvrir d’autres horizons. J’ai alors fait transférer mon dossier vers la fac de psychologie, qui m’attirait un peu plus. J’ai assisté sérieusement aux cours pendant un mois, avant de découvrir la liberté de mon nouveau statut étudiant loin de mes parents… J’ai donc fait l’école buissonnière pendant deux ou trois mois, jusqu’à ce que les partiels arrivent. J’ai alors dû prendre mon courage à deux mains et avouer à mes parents que j’avais abandonné ma licence. Avec du recul, je sais maintenant que ce qui me manquait, c’était non seulement de la motivation, mais aussi un suivi plus régulier que celui que les universités publiques proposent.

Je me suis officiellement désinscrite, et j’ai passé les six mois suivants à l’usine, en tant qu’intérimaire. Le mois de septembre suivant, j’ai décidé de retenter ma chance comme future libraire, en passant cette fois par un chemin détourné, le BTS MUC (Management des Unités Commerciales). Durant cette formation, il me fallait trouver un stage s’étalant sur deux ans. Je voulais trouver un stage en librairie, mais je ne me suis pas assez bougée, et j’ai pris le premier stage qui venait à moi, dans un magasin de jouets.

Les deux ans qui ont suivi ne m’ont pas permis de m’épanouir comme je l’espérais. Je ne me sentais pas à ma place parmi tous ces futurs « commerciaux », l’ambiance ne me convenait pas plus que les cours ni toutes ces séries de chiffres et de tableaux avec lesquels il me fallait jongler.  »

Je ne me sentais pas du tout à ma place.

« Poussée par ma famille qui souhaitait que j’obtienne enfin un premier diplôme post-bac, et totalement perdue dans mon projet d’orientation, j’ai été (difficilement) jusqu’au bout des deux ans. Je n’ai finalement pas eu mon diplôme. »

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Gérer l’échec et rebondir

Après plusieurs déceptions, les madmoiZelles se sont retrouvées loin de ce qu’elles pensaient faire après le bac. Elles ont alors dû accepter leurs échecs, analyser ce qui n’avait pas fonctionné… et tenter autre chose. Après avoir arrêté son master de communication, Mélaine a ainsi fait un gros travail sur elle-même :

« Je suis rentrée la queue entre les jambes chez mes parents, et j’ai passé les fêtes de fin d’année auprès de ma famille et de mes amis. J’étais partagée entre un sentiment de soulagement et des questionnements : qu’est ce que j’allais devenir ? Pourquoi je n’arrivais pas à trouver quelque chose qui me plaisais et dans lequel je m’épanouirais ? Quel était le sens de la vie ?

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Je me suis inscrite à Pôle Emploi, et j’ai pu obtenir une indemnisation mensuelle. Du pain béni, car je ne m’y attendais pas du tout – merci les jobs d’été ! Puis je me suis mise en ménage avec mon petit ami. Comme j’étais désormais indépendante financièrement vis-à-vis de mes parents, je devais travailler ! Mais voilà, avec ma licence d’histoire je n’avais pas vraiment d’offre d’emploi. Je me suis dit que le mieux était de reprendre mes études en alternance : cela me permettrait de gagner de l’argent tout en apprenant, d’allier la théorie à la pratique.

J’ai alors fait un gros travail sur moi-même, sur ce que je voulais et ce que je ne voulais pas, sur ce qui m’intéressait et sur mes capacités. Je voulais aider les autres, mais pas dans le social – plutôt des métiers de vocation à mon sens. Je voulais des challenges et une certaine indépendance. C’est ainsi que les métiers de l’immobilier me sont venus en tête. J’ai donc pris une carte de mon département, mon CV et en route avec ma petite voiture !  »

J’ai fait un gros travail sur moi-même et ce que j’aimais.

« Après 250 visites d’agences, des rencontres motivantes et d’autres beaucoup moins (comme l’agent immobilier qui estimait que son métier était mort, sans débouchés), j’ai décroché cinq entretiens d’embauche. Les quatre premières agences voulaient me prendre mais ne le pouvaient pas financièrement, et la dernière m’a embauchée en contrat de professionnalisation.

Le soulagement était total ! J’ai donc fait ma première année de BTS Professions Immobilières dans une agence indépendante. L’agence ne répondant pas à mes attentes professionnelles, l’été suivant j’ai postulé pour un emploi dans une agence à côté de chez moi. Ils ont même accepté de me prendre pour ma deuxième année de BTS en alternance. Les neuf premiers mois ont été difficiles car j’avais l’impression que mes efforts ne payaient pas. Et après avoir passé mes examens, j’ai enfin commencé à faire du chiffre, à avoir plus de dépendances et de responsabilité, d’initiatives…

Depuis le 1er septembre je suis en CDI dans cette même agence et je m’épanouis ENFIN ! Ce n’est pas facile tous les jours et je ne compte pas vraiment mes heures (je tourne entre 40 et 45h par semaine), mais quel bonheur d’aider des gens à trouver la maison de leur rêve, de vendre leur maison suite à une séparation ou un décès. »

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De son côté, Marine a été aidée par une conseillère d’orientation – psychologue :

« Durant l’un des entretiens avec une conseillère d’orientation – psychologue, elle m’a expliqué son parcours à elle, en me disant qu’elle avait étudié dans une fac privée, sans s’arrêter sur ce détail ni le préciser. Pourtant c’est quelque chose qui m’a intriguée.

Je me suis renseignée sur les différentes formations qu’elles proposaient, et l’une de ces formations m’a tapé dans l’œil : une licence de sociologie – anthropologie. Après un échange de mails et deux rendez-vous à l’université, j’étais inscrite officiellement en deuxième année (alors que je n’avais aucune équivalence post-bac officielle).

Il faut savoir qu’une conseillère d’orientation – psychologue ne pourra jamais décider à notre place. Leur métier consiste plutôt à nous guider, nous faire découvrir les différentes possibilités qui s’ouvrent à nous en fonction de nos goûts et motivations. »

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C’est aussi ce qui a permis à Coralie de trouver sa voie :

« J’ai quitté mon job de serveuse à mi-temps pour un contrat avec plus d’heures, et quelques mois plus tard j’ai eu un licenciement économique et me suis retrouvée au chômage. C’était enfin l’opportunité de vraiment me pencher sur mon orientation professionnelle. Tant que je travaillais, j’étais incapable de me lancer dans une formation, je n’arrivais pas à me cerner, à me comprendre ; je savais simplement que j’avais besoin d’être active constamment et de travailler.

Pendant mon chômage, j’ai passé plusieurs heures avec une psychologue du travail de Pôle Emploi, j’ai fait des tonnes de tests pour cerner mes goûts, mes attentes… À chaque debrief, elle me répétait qu’elle me voyait bien dans le tourisme, une idée qui ne me plaisait pas du tout. Je savais juste que je voulais une formation courte qui m’apprendrait un emploi.

Et puis un soir je suis passée sur le site de l’Afpa et je suis tombée sur le descriptif de la formation de conseiller séjours et voyages, et j’ai postulé. Je suis allée aux entretiens les mains dans les poches en me disant que si je n’étais pas prise je m’en moquais, j’écoutais juste la voix de ma conseillère sans trop y croire. Elle avait pourtant raison ! »

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Le hasard des recherches et des contacts a également fini par porter ses fruits pour Amélie :

« J’ai commencé à passer beaucoup de temps sur les sites consacrés à l’orientation. Je me suis demandé ce que je pourrais aimer faire chaque jour de chaque semaine pendant toute ma vie, et je ne trouvais pas trop. Il y avait toujours des inconvénients aux métiers qui m’attiraient au premier abord. Un ami m’a alors filé un lien vers la liste des cours du soir données par les Arts et Métiers (où il était étudiant).

J’ai examiné la liste sans trop de conviction, et puis quelque chose a attiré mon attention. C’était un diplôme en documentation scientifique, qui concernait toute la gestion documentaire, la connaissance de la littérature scientifique – en fait, des littératures scientifiques. Quand j’ai lu le détail du programme, j’ai été super emballée par absolument tout. Et je me suis dit que c’était ça, ma voie. La documentation. Que ça collait super bien avec ma personnalité et avec ce que j’aime faire. À ce stade c’était surtout une intuition.

Cependant je ne voulais pas prendre de cours du soir (qui auraient supposé un job alimentaire pourri dans la journée), alors j’ai cherché le diplôme en cursus normal, et j’ai trouvé plein de diplômes en documentation. J’ai fait un dossier de candidature pour un diplôme de documentation spécialisé en management des ressources numériques, et un dossier pour une licence pro en documentation scientifique à Lyon. J’ai été acceptée aux deux. J’ai fini mon BTS (que j’ai eu), et j’ai préparé mon départ pour Lyon.

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Et là, j’ai eu la confirmation de la justesse de mon intuition : j’ai adoré mes cours. Je me suis aussi sentie super bien avec mes neufs camarades de promo, et même si ça peut sembler puéril maintenant, à l’époque je pensais que me sentir aussi à l’aise avec des gens qui faisaient la même chose que moi ne pouvait que confirmer que j’étais au bon endroit. Mon stage m’a beaucoup plu et j’ai eu ma licence avec la meilleure moyenne que j’aie jamais eue pour un diplôme. »

Après son CDD en documentation dans lequel elle s’ennuyait et sa maladie, Marie a également pris le temps de faire le point puis de chercher sa voie :

« J’ai opéré un tournant à 180° : j’ai quitté la région parisienne, direction les Midi-Pyrénées et la campagne. J’ai pris un chien comme j’en rêvais depuis plusieurs années. J’ai pris six mois pour finir de me soigner et faire le bilan de ces dernières années – et évaluer celles à venir.

J’ai recommencé à chercher du boulot, tout sauf quelque chose qui me forcerait à rester huit heures par jour cinq jours par semaine derrière un ordinateur à enchaîner les tâches ennuyeuses. J’ai envisagé de monter une entreprise, j’ai postulé comme caissière, j’ai songé à passer des concours pour devenir bibliothécaire, j’ai envoyé des perches partout. J’ai désespéré aussi de ne pas trouver de boulot, de voir le temps qu’il me restait avant d’être au RMI se réduire de plus en plus. J’ai déprimé, j’ai espéré.  »

Je ne voulais surtout pas d’un travail de trente-cinq heures par semaines devant un ordinateur.

« Je voulais simplement quelque chose qui me permette de savourer la douceur de vivre à la campagne, d’un jour m’acheter une maison avec un jardin, d’avoir un deuxième, un troisième, peut-être un quatrième chien. Je me disais que si je ne cherchais rien, je ne risquais pas de trouver, alors même si je ne savais pas trop quoi chercher, j’ai continué.

Un jour, au bout de six mois, ma mère a discuté de mes difficultés avec un ami, qui lui a parlé d’un poste disponible là où il travaillait. Des opportunités sympas, j’en avais eues en six mois, et elles étaient toutes tombées à l’eau. Mais il m’a expliqué qu’il était dépanneur dans une boîte de dépannage automobile et qu’ils cherchaient des gens pour mettre un place un standard de nuit. Il m’a dit que le salaire serait sûrement très bon, que c’était un boulot très intéressant qui me plairait sûrement.

Là, je me suis dit que c’était l’opportunité à ne pas manquer. J’ai mis toutes mes billes, tout ce que j’avais. Je VOULAIS ce boulot.

Depuis deux mois, j’ai ainsi trouvé ma voie. Je suis régulatrice de nuit pour cette entreprise : je prends les appels des gens en panne ou accidentés, ou de leurs assistances. Surtout, je dois décider quel chauffeur envoyer où avec quel camion. Le salaire est mauvais finalement, mais étant débutante, j’en rediscuterai plus tard. »

C’est également une introspection qui a permis à Érika de trouver ce qui lui conviendrait vraiment :

« Vers le mois de février de la prépa, j’ai réalisé que je devais me sortir de cette spirale infernale et j’ai commencé une réelle introspection. Je me suis rendu compte que j’avais beaucoup aimé mon cursus du lycée. J’ai donc fait le point sur tout ce qui m’avait plu, et j’en suis venue à la conclusion que je voulais faire de la gestion. Échaudée par deux années d’échecs cuisants, j’ai décidé d’aller vers une filière courte, un DUT, afin de pouvoir avoir un diplôme rapidement. Je me suis inscrite en DUT GEA, seule formation ayant accepté mon dossier catastrophique.

J’ai compris que c’était ce que je voulais faire quand j’ai recommencé à travailler, simplement. Avant, je devais me forcer, c’était une torture psychologique. Là, j’avais la motivation constante d’enfin décrocher ce diplôme. Ma vie est redevenue simple et intéressante. »

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Althéa, qui avait abandonné son rêve d’ostéopathie, s’est quant à elle décidée sur un coup de téléphone providentiel :

« Un jour, lors de mon stage en agence de com, le téléphone a sonné : « Allô, je suis bien chez madame X l’ostéopathe ? Bonjour mademoiselle, je voudrais prendre rendez-vous ». La dame s’était trompée de numéro, mais à la seconde où elle a parlé d’ostéopathie, je me suis immédiatement projetée : cette ostéopathe, ça aurait dû être moi !

Le soir même, moi qui n’avais jamais rien osé de fou, j’ai décidé de tout plaquer. J’ai enfin trouvé une formation universitaire, en Belgique, et depuis je suis fière étudiante en ostéopathie.  »

J’ai tout plaqué du jour au lendemain.

« Bien sûr je dois m’accrocher, j’ai eu le temps d’oublier les maths et la physique que je n’avais plus touchés depuis le lycée. Il a fallu se recréer un semblant de niveau en sport. De plus, se replonger dans une autre branche, surtout une aussi sélective, c’est un vrai sacrifice au quotidien. Mais je ne regrette rien. À chaque année qui passe, chaque nouveau cours, je sais que je suis faite pour ça, que j’aime ça. »

À lire aussi : Tout plaquer et partir vivre à Madagascar — Témoignage

Comment savoir qu’on a trouvé sa voie ?

Avoir trouvé sa voie, ça fait en effet sacrément du bien, surtout après des années de recherches et d’échecs. Coralie s’est ainsi redécouverte :

« Une fois prise dans la formation de conseiller séjours et voyages, j’ai eu sept mois de formation pour apprendre le métier. C’est court et intense sept mois, mais dès la première semaine j’ai enfin ressenti la lumière divine de l’orientation. Le fait de toucher au monde du voyage, d’être polyvalente, de chercher la meilleure solution, de faire la meilleure proposition au client, de se battre avec le logiciel de billetterie pour trouver le vol au meilleur prix, ça me mettait exactement dans le même état que lorsque j’avais assuré un service de folie un samedi soir en sous-effectif : j’étais satisfaite de mon travail, épuisée mais fière d’avoir réussi à tout gérer !

J’ai été diplômée avec les félicitations du jury, et j’ai été fière de moi et de ce que j’avais accompli ; moi qui étais plutôt fainéante à l’école, je bossais, révisais, je me reconnaissais plus et j’aimais qui je devenais.

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Avant la fin de ma formation j’ai trouvé un emploi pour trois mois et je viens de signer une prolongation de six mois. Je bosse dans un environnement totalement à l’opposé de ce que je souhaitais quelques années en arrière, en open space, sur ordinateur. Et je m’éclate complètement. »

Pour la première fois aussi, Althéa a la rage de réussir :

« Comment je sais que je suis faite pour le métier d’osthéopathe ? Malgré un parcours réussi en lettres et com’, c’est la première fois que je sacrifie à ce point mon temps, mon énergie, mes nerfs et que je me jette à corps perdu dans quelque chose. Quitte à malmener ma santé. Plus rien ne m’importe, sauf réussir. Et quand on a cette rage de réussir, c’est qu’on a trouvé sa voie ! »

Enfin, Marie, régulatrice de nuit dans une entreprise de dépannage automobile, se sent pour la première fois bien dans un travail :

« J’aime ce boulot, les problèmes à résoudre, la gymnastique mentale que ça demande, la bande de mecs très gentils que je réveille la nuit au téléphone pour leur dire d’aller à l’autre bout de la ville changer une roue ou récupérer une voiture en miettes sur l’autoroute. J’aime le fait qu’avec ma collègue de nuit on discute sans fin de mecs, de nos vies, des clients qui nous les brisent…

Je peux amener mon chien au boulot, elle vient quand je bosse douze heures d’affilée. Quand c’est calme (comme on n’a pas tout le temps des appels et des missions en cours), je fais ce que je veux. Le principal est de pouvoir tout lâcher au moindre coup de fil. Je vais pouvoir avancer sur ce bouquin que je rêve d’écrire, sur tous ceux que j’ai envie de lire.

Je sais que je ne suis pas encore installée pour de bon. Mes horaires vont encore changer, et un de ces jours il faudra que mon salaire change aussi, mais, woaw, ça en vaut la peine.

Je n’aurais jamais cru que j’allais finir par tomber sur un boulot que j’aime faire. Qui me permettrait de profiter de la douceur de vivre campagnarde, qui ne se passerait pas huit heures par jour cinq jours par semaines à faire quelque chose qui m’ennuie. Que globalement je n’aurais pas à me forcer pour aller travailler, même si je n’ai pas envie tous les jours. Enfin un boulot un peu à l’écart mais pas vraiment solitaire, qui me protège un peu de tout le magma relationnel que représente le monde du travail ! »

Pour trouver ta voie…

Avec le recul, les madmoiZelles se font rassurantes, et ne regrettent pas d’avoir essayé plusieurs cursus : ça leur a permis de définir leurs envies et ce qui leur convenait. Une réflexion qu’elles encouragent, comme Amélie l’explique :

« Si je devais donner un conseil aux gens qui cherchent leur voie, c’est de faire des stages. Je sais qu’il existe des EMT (Évaluations en Milieu de Travail) qui permettent de passer un peu de temps dans une entreprise pour découvrir les différents aspects d’un métier ; c’est très important, parce qu’il y a toujours un fossé entre l’école et la vie professionnelle.

Et pour les gens qui ont déjà quelques expériences mais qui n’arrivent toujours pas à trouver, ils peuvent faire un bilan de compétences qui les aidera à cerner ce qu’ils peuvent faire en fonction de ce qu’ils aiment ET de ce qu’ils sont capables de faire. Enfin, ça vaut ce que ça vaut, mais me demander si je pourrais faire mon métier tous les jours toute ma vie m’a aidée. Quand je me suis posé cette question, je me suis parfaitement projetée dans le métier de documentaliste, et je me suis même demandée comment j’avais pu ne pas y penser avant tellement c’était évident…

Finalement, il faut beaucoup d’introspection pour cerner ce qu’on aime faire et ce qu’on se sent capable de faire. De plus garder l’esprit ouvert aide, parce que des fois on trouve notre voie de façon un peu inattendue. »

À lire aussi : J’ai testé pour vous… être bibliothécaire

Shiroyasha est d’accord :

« Si j’ai un conseil à donner, c’est : renseignez-vous ! N’attendez pas la fin de la terminale pour chercher. Il existe des structures, comme la mission locale, qui permettent de faire des stages l’été et de découvrir différents domaines. Au lycée, on laisse de côté énormément de disciplines intéressantes, alors n’hésitez pas à regarder, à fouiner de votre côté. Et ne laissez pas les profs vous détourner de votre objectif lorsque vous vous êtes décidé•e•s. »

À lire aussi : Lettre ouverte aux profs dont l’attitude n’a pas su me décourager

Marjorie prône également la persévérance :

« Ma conclusion à toute cette histoire, c’est que d’une part si aucune matière ne te plaît au lycée, ne désespère pas parce qu’il y a des super matières qui n’y sont jamais évoquées comme le droit, la compta ou encore le contrôle de gestion. D’autre part, commettre une erreur (ou même deux) d’orientation, ce n’est pas un drame (malgré ce qu’essaye de te faire croire le reste du monde) ; il vaut mieux essayer autre chose (si c’est possible financièrement bien sûr) que de rester dans une formation qui ne te plaît pas ! »

Pour Marine, il faut surtout bien rester attentive à ce que l’on souhaite :

« Je conseillerais à ceux qui ne trouvent pas leur voie de ne pas s’en faire, de surtout ne pas se précipiter dans une formation en espérant y trouver une motivation par la suite. Il faut un minimum d’attirance, ne serait-ce que pour les cours proposés. Je pense que les débouchés ne suffisent pas pour motiver une personne.

Et si vous souhaitez rencontrer un•e conseiller•ère d’orientation, n’oubliez pas qu’ils ne décideront jamais à votre place. Ne vous faites surtout pas de faux espoirs. Et n’hésitez pas à en rencontrer plusieurs, plus on a d’avis, mieux on est ! »

Érika complète :

« Faites fi des conseils, des expériences des uns et des autres. Gardez en tête que le prestige des études ne vaut rien quand il s’agit de trouver sa voie. Concentrez-vous sur ce que vous aimez vraiment. Le système universitaire permet de faire des passerelles intéressantes entre formations. Essayez également de rencontrer des étudiants de la filière qui vous intéresse, ce seront les personnes les plus objectives pour répondre à vos questions, et ça vous évitera de mauvaises surprises le jour de la rentrée ! »

Coralie se veut rassurante quant au temps qu’il faut parfois pour trouver sa voie :

« À celles qui cherchent leurs voies : ne désespérez pas. Ces choses-là prennent du temps, et parfois la pression de l’entourage nous interdit de rêver et de se concentrer sur soi. »

Marie conclut :

« Le conseil que j’aurais à donner à celles et ceux qui n’ont pas trouvé est franchement banal. Mais au final, c’est le seul qui m’ait été réellement utile.

Pour trouver, il faut chercher, alors surtout n’arrêtez pas. Restez proche de vous-même, de vos envies (elles sont valables), et acceptez de faire quelques compromis. La réalité est moins souple que nos rêves, mais on peut tout de même obtenir pas loin de ce qu’on voulait. Confrontez vos rêves à la dure loi de la réalité, et gardez précieusement ce qu’il en restera, c’est ce qui vous fera avancer. »

– Un grand merci à toutes les madmoiZelles qui ont témoigné !

À lire aussi : Vos rêves d’enfants VS votre vie « d’adulte » — Témoignages

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Les Commentaires

32
Avatar de RosEstivale
12 mars 2017 à 19h03
RosEstivale
Cet article et ces témoignages font beaucoup beaucoup de bien...
Je suis dans un moment où je déteste mon travail actuel, et où je regrette beaucoup mon parcours. J'ai bientôt 24 ans, et je sens que je ne me suis pas suffisamment écoutée avant de faire mes choix d'orientation.
ça fait beaucoup de bien de se rendre compte que ces remises en question concerne beaucoup de monde, que tout le monde n'a pas un parcours ultra linéaire. Merci Madmoizelle
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