Cet article a été écrit dans le cadre d’un partenariat avec Nos Futurs (chez Gaumont). Conformément à notre Manifeste, on y raconte ce qu’on veut.
*Certains prénoms ont été modifiés.
À l’occasion de la sortie du nouveau film de Rémi Bezançon, Nos Futurs, au cinéma le 22 juillet prochain, qui parle notamment de cette étrange période de transition entre fin d’adolescence et début de vie d’adulte, des madmoiZelles ont témoigné sur ce qu’elles rêvaient d’être quand elles étaient enfants, et ce qu’elles sont devenues – du moins pour le moment.
Des rêves plus ou moins réalisables
Les rêves des madmoiZelles sont très variables. EdocSil se souvient :
« Quand j’étais enfant, je disais à qui voulait l’entendre que je serai ostéopathe équin et si je n’y arrivais pas, ermite dans le Montana. Ça faisait beaucoup rire les adultes, et l’adulte que je suis maintenant aussi, mais au final je pense que ça montrait déjà mon côté borné. Par la suite, j’ai décidé qu’un jour je serai présidente. Je pense que ça correspondait vraiment à un besoin de justice : je voulais changer le monde et ses tares !
Pour le reste, je me voyais grande aventurière qui voyagerait à travers le monde, et côté vie affective il ne me semble pas m’être déjà imaginé faire ma vie avec quelqu’un, même lorsque j’étais au lycée. Au contraire, je me voyais comme une Indiana Jones au féminin ! »
« Quand j’étais enfant, je disais à qui voulait l’entendre que je serai ostéopathe équin et si je n’y arrivais pas, ermite dans le Montana. Ça faisait beaucoup rire les adultes, et l’adulte que je suis maintenant aussi, mais au final je pense que ça montrait déjà mon côté borné. Par la suite, j’ai décidé qu’un jour je serai présidente. Je pense que ça correspondait vraiment à un besoin de justice : je voulais changer le monde et ses tares !
Pour le reste, je me voyais grande aventurière qui voyagerait à travers le monde, et côté vie affective il ne me semble pas m’être déjà imaginé faire ma vie avec quelqu’un, même lorsque j’étais au lycée. Au contraire, je me voyais comme une Indiana Jones au féminin ! »
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C’était le contraire pour Rachel* :
« J’ai grandi dans une petite ville de province, dans un milieu très modeste, avec quatre frères et sœurs bien plus âgés que moi. Dans ma famille, on se marie (ou on se met en couple) jeune et on fait des enfants. Pas étonnant que l’un de mes plus grands rêves d’enfant ait été de fonder une famille ! J’imaginais une vie digne d’une (desperate) housewife des années 50 aux États-Unis, comme on en voit dans les films : toujours apprêtée avec de jolies robes et un brushing impeccable, un mari aimant, des enfants espiègles et adorables. Je visualisais les soirées entre copines, les barbecues du dimanche et les gâteaux d’anniversaire avec glaçage. Pour résumer, je voulais donc un pavillon en banlieue, un labrador, une famille. »
EdocSil et Rachel vous raconteront un peu plus loin dans cet article ce qu’elles sont devenues aujourd’hui…
Anej, aujourd’hui fonctionnaire, avait quant à elle des rêves plus qu’exigeants :
« Quand j’étais ado, je rêvais d’être la plus belle, la plus riche, la plus brillante. Je crois que c’était comme une revanche à prendre sur la vie nulle que je menais à l’époque (je ne me sentais pas aimée, moche, sans argent). Je voulais être vétérinaire, et je m’interdisais de faire des trucs « inutiles » (soit qui ne me rendent pas plus belle, plus intelligente, plus cultivée, plus riche).
Pendant la période de révision du bac, je me suis créé une routine quotidienne calculée comme du papier à musique ; je révisais, mangeais sans gras, sans sucre (que des fruits, légumes et féculents complets), je dormais. Après le bac je suis allée en classe préparatoire agro-véto dans la première de France, à Paris. Je mangeais à la cantine matin, midi et soir : le matin, un demi bout de pain (sans beurre), du lait, un fruit. Le midi et le soir uniquement des crudités en entrée, des légumes en plat et un fruit en dessert : je ne voulais pas manger de céréales puisqu’ils étaient systématiquement raffinés.
Je maigrissais à vue d’œil (je n’étais déjà pas grosse), si bien que l’infirmière du lycée s’est inquiétée et m’a parlé d’anorexie… Je bossais comme une dingue, dormais six heures par nuit, ne me lavais que quand je devais laver mes cheveux, révisais même en marchant. Et j’avais des mauvaises notes quand même, et je ne comprenais quand même rien. »
Les rêves d’enfants semblaient ainsi plus ou moins accessibles, plus ou moins lointains. Mademoiselle Papillon se souvient quant à elle de ses envies avant de découvrir les ressources humaines :
« J’ai eu de multiples vocations : fleuriste, prof, juge d’instruction (je suis très éclectique, je sais). Le rêve dans lequel je me suis le plus projetée et pour lequel j’ai même fait des projets, c’était d’être chanteuse.
Depuis toute petite, je chante. Quand je jouais toute seule dans ma chambre, je chantais mes histoires ! Et puis j’ai découvert que j’avais une belle voix. Pas parce que je suis mégalo mais parce qu’on me l’a dit : amis, famille, profs… J’ai même fait des représentations. »
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La découverte des embûches
En grandissant, les rêves conçus enfants sont confrontés à la réalité, et prennent souvent un autre dimension. Mathilde s’est par exemple rendu compte qu’elle avait avant tout envie de grandir, sans pouvoir bien réaliser ce que cela signifiait vraiment :
« Quand j’étais plus jeune, je rêvais d’être plus grande pour pouvoir faire des études post-bac qui ne pourraient que me plaire davantage que ce que j’étudiais au collège. Je n’avais alors aucune idée fixe du métier que j’avais envie de faire (ça oscillait entre médecin des brousses et trapéziste), mais j’étais persuadée qu’atteindre la majorité signifiait forcément pouvoir faire absolument tout ce que je voulais (y compris manger des patates douces aux marshmallows au petit déjeuner si l’envie m’en prenait).
Mes parents étaient assez sévères, et j’ai dû attendre jusqu’à la fac pour pouvoir enfin sortir sans le fameux couvre-feu de minuit, et jusqu’alors je me gavais de films pour ados où les gens paraissaient faire la fête à longueur de temps. Je regardais aussi pas mal les films de Klapisch, du type L’Auberge Espagnole ou Le Péril Jeune, et ça me confortait vraiment dans l’idée qu’avoir la vingtaine allait être super cool.
« Quand j’étais plus jeune, je rêvais d’être plus grande pour pouvoir faire des études post-bac qui ne pourraient que me plaire davantage que ce que j’étudiais au collège. Je n’avais alors aucune idée fixe du métier que j’avais envie de faire (ça oscillait entre médecin des brousses et trapéziste), mais j’étais persuadée qu’atteindre la majorité signifiait forcément pouvoir faire absolument tout ce que je voulais (y compris manger des patates douces aux marshmallows au petit déjeuner si l’envie m’en prenait).
Mes parents étaient assez sévères, et j’ai dû attendre jusqu’à la fac pour pouvoir enfin sortir sans le fameux couvre-feu de minuit, et jusqu’alors je me gavais de films pour ados où les gens paraissaient faire la fête à longueur de temps. Je regardais aussi pas mal les films de Klapisch, du type L’Auberge Espagnole ou Le Péril Jeune, et ça me confortait vraiment dans l’idée qu’avoir la vingtaine allait être super cool.
Camille Cottin et Kyan Khojandi lycéens dans « Nos Futurs »
Finalement aujourd’hui je suis un cursus qui me convient, mais j’ai l’impression que le temps n’est pas aussi extensible que dans les films de mon adolescence : il est difficile de sortir tous les soirs en boîte de nuit, d’aller faire le tour du monde avec un sac à dos ou de tout plaquer du jour au lendemain pour aller vivre en Malaisie lorsqu’on n’a pas envie de se retrouver diplômée à 35 ans (ni de voir sa mère faire une syncope par semaine).
J’aime ce que je fais et je suis certaine que le métier sur lequel ça débouchera me plaira, mais j’ai l’impression qu’à trop privilégier les études longues pour lutter contre ce foutu chômage, je suis passée à côté de quelque chose sur lequel il sera difficile de revenir sans sacrifier tout le travail que j’ai fourni pour arriver là où je suis maintenant. Je suis beaucoup plus épanouie aujourd’hui que lorsque j’étais plus jeune car la vingtaine m’a accordé la liberté dont j’ai toujours rêvé, mais j’ai l’impression de ne pas l’utiliser assez. »
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Il est ainsi difficile de rendre ses rêves possibles. Shun se souvient :
« Quand j’étais petite, le tout premier métier que j’ai voulu faire était… astronaute ! Je voulais voyager dans l’espace, voir la terre depuis là-haut… J’étais très souvent dans la lune !
Ensuite j’ai voulu faire ethnologue, parce que je me disais que si on étudiait toutes les cultures du monde, on pourrait garder ce qu’elles avaient de meilleur et regrouper toutes ces belles choses pour faire disparaître les trucs pourris de l’humanité (oui, à 9 ans, on y croit encore…). Je me disais que cette méthode n’ayant pas encore été testée, elle pourrait marcher.
Un peu plus tard, vers le collège, j’ai compris que ce n’était pas possible de faire ethnologue comme je le voulais, alors j’ai voulu en savoir plus sur les animaux et leur organisation sociale, pour voir s’il y avait des choses intéressantes à copier, voir s’ils étaient aussi « bêtes » qu’on le disait, si inférieurs aux humains, ou si on pouvait au contraire apprendre d’eux. Je passais des heures à observer tout ce que je pouvais observer, humains comme animaux. Je n’étais pas très sociable !
Arrivée au lycée, j’ai compris que pour faire ça, il fallait être chercheur, et plutôt en sciences. Du coup j’ai complètement abandonné l’idée, en me disant que je n’en étais pas capable parce que j’étais une fille pas bonne en maths (alors que j’étais très bonne en bio et en physique/chimie), et je me suis tournée vers la littérature. J’ai voulu faire une fac de lettres, parce que je rêvais de travailler dans une bibliothèque. Mais ma mère m’a dit non : elle pensait qu’il n’y avait pas de débouchés suffisants. Du coup, après un tirage au sort, je me suis retrouvée en droit.
Là on était très loin des astronautes… Mais passé le cap de la première année que j’ai redoublée, ça a été le coup de foudre, le droit est devenu une vraie passion. Tellement que je me suis inscrite en école de notariat (que j’ai réussie avec mention).
Mais la vie étant ce qu’elle est, et le milieu du notariat un tout petit peu sexiste, lorsque je suis tombée enceinte, qui plus est hors mariage (quelle horreur !), on m’a gentiment remerciée. Du coup je me suis tournée vers les banques, parce qu’une clerc de notaire, ça les intéressait bien rapport à mes connaissances en droit des sûretés et des biens. Je m’occupais de la paperasse administrative pour que tout soit dans les clous (ce qui est quand même vital question contrôle de gestion et audit financier). Mais au bout de quelques mois, on m’a dit qu’« une belle jeune fille comme moi ne devait pas rester dans l’administratif, mais devait absolument passer commerciale, parce que sinon ça serait du gâchis ».
J’ai donc atterri en agence comme commerciale, et là ça a été le début de la fin. Le travail ne correspondait pas du tout à mon éthique, mais alors pas du tout. Le harcèlement était permanent, aussi bien moral que sexuel, je n’en pouvais plus. Un jour j’ai craqué et j’ai démissionné d’un coup, sans m’expliquer, à cause du harcèlement sexuel de mon patron. C’en était arrivé à un point où j’ai eu peur qu’il me viole un jour où j’étais toute seule avec lui dans l’agence.
Je me suis mise au vert, et j’ai réfléchi à une reconversion. J’ai repris une année d’études, et je suis passée dans la fonction publique territoriale. Après des galères et des contrats en CDD, j’ai réussi mon concours : je suis en cours de titularisation et je vais bientôt être embauchée comme responsable juridique et financière d’une commune touristique.
Je vis donc deux passions au boulot : le droit et la finance. Mes autres passions je les vis à la maison, toujours avec l’étude des animaux et des comportements humains (je commence à avoir pas mal de connaissances dans ces domaines et une belle bibliothèque digne d’un professionnel). Je n’ai pas abandonné mon rêve de changer le monde, donc je suis devenue féministe, anarchiste, et j’essaye d’accomplir tous mes actes du quotidien en les réfléchissant.
J’ai des poules réformées d’élevage dans mon jardin, je plante mes légumes, je donne gratuitement mon surplus, je fais du troc, et je me bats régulièrement contre les violences à l’école… Bref j’ai un agenda bien rempli, qui finalement, même si je ne suis pas encore sur la lune, me donne quand même satisfaction. »
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La confrontation à la réalité modifie ainsi souvent les rêves. Maëlle* raconte que quelque part, elle a perdu confiance en ses rêves et en elle-même :
« Je suis une grande rêveuse. Enfant j’avais des rêves plein la tête et ça changeait un petit peu tous les jours. Je voulais être astronaute, pirate, maîtresse d’école, vivre dans les nuages, avoir un palais de bonbons, être une grande médecin renommée, être écrivain, voyager, épouser un brigand au cœur d’or… la totale. En grandissant, je n’ai pas cessé de rêver, mais disons que ces rêves se sont condensés et ont arrêté de partir dans tous les sens.
Je voulais vivre à New York, et c’est toujours l’un de mes grands rêves. Je voulais y être une grande journaliste – du moins c’est ce que je racontais à mes parents. Au fond de moi, j’ai toujours voulu être une grande actrice. Mais attention, pas n’importe quelle actrice : le genre actrice accomplie, à la filmographie plus longue que notre Constitution, au talent fou, reconnue par ses pairs, qui arrive à gérer vie privée et vie publique. C’est ce que j’ai toujours aimé faire, faire semblant, rêver à être quelqu’un d’autre.
Je rêvais aussi d’indépendance, d’un mec plus beau que Leonardo DiCaprio et Ryan Gosling réunis. Je rêvais que je savais jouer de la guitare et que je chantais dans les bars pour me faire un peu de sous de temps en temps. C’était peut-être un peu idéaliste, un peu prétentieux, mais ça m’aidait à m’endormir le soir.
Pour être honnête, je ne sais pas si ces rêves m’ont canalisée, bloquée ou portée. Lorsque j’avais un moment seule à seule avec moi-même, sous la douche, en me brossant les dents, quand je rentrais en vélo de l’école, j’oubliais le moi réel pour me plonger dans cette vie fictive que je m’étais créé, à vivre dans un imaginaire total de petite fille, avec des histoires abracadabrantesques à base de pirates et de confettis. Je me créais des dialogues, des situations auxquelles je réagissais, et je m’oubliais. C’était le pied. Je continue à faire ça de temps en temps, beaucoup moins car je n’ai plus le temps d’avoir l’esprit ailleurs.
À un moment, ça m’a fait peur. Je me suis dit que je finirais comme dans Shutter Island (attention spoiler), que j’allais devenir folle ou schizophrène à force de vivre dans ma tête une vie qui n’était pas la mienne. Ça devenait très intense, et je pense que c’était parce que j’étais très malheureuse. Vivre ces rêves dans ma tête, ça me permettait d’oublier que la réalité n’était pas aussi idyllique, d’oublier que j’avais des complexes et que des choses pouvaient me rendre triste. Ça m’a aidé à oublier que la vie n’était pas aussi rose que mon imaginaire.
Aujourd’hui je vis toujours chez mes parents et toujours en France, donc New York et l’indépendance, ce n’est pas encore ça – quoique l’indépendance est à venir, je déménage en septembre. J’ai bien un mec, certes pas plus beau que Leonardo DiCaprio et Ryan Gosling réunis (j’avais mis la barre un peu haut on en conviendra), mais je l’aime, et j’ai appris que vivre une histoire d’amour était plus agréable que de se loger dans des fantasmes irréalisables.
Pierre Rochefort et Mélanie Bernier dans « Nos Futurs »
Mon grand regret, c’est cette carrière d’actrice avortée avant d’avoir commencé. J’ai présenté les concours des écoles de journalisme cette année après avoir été en classe prépa, j’attends les résultats, et malgré quelques oraux décrochés à la volée, je me persuade que ça n’ira pas plus loin et qu’il faudra que je retente l’année prochaine.
J’ai eu peur de vivre du théâtre, de vivre du cinéma, parce que je ne crois pas en moi et que je ne crois pas en l’avenir. Au lieu d’essayer des études dans la réalisation ou de prendre des cours de théâtre (que j’ai arrêté au lycée car ça ne convenait plus à mes attentes), je me suis enfermée dans une bulle de pragmatisme et de lâcheté. Au final, le journalisme est aussi un métier à risque, mais beaucoup moins qu’une carrière d’actrice.
Aujourd’hui j’essaie d’éviter de me replonger dans ces rêves, parce que ça fait mal, et que ça me rappelle que je n’ai pas accompli tout ce dont je rêvais. La « moi » enfant trouverait la « moi » adulte bien ennuyeuse. Ces rêves représentent des utopies, des idéaux inatteignables, et j’essaie d’en faire le deuil un petit peu. Je ne peux plus vivre mes rêves ni rêver ma vie désormais.
Ça m’a appris qu’il fallait que je me donne les moyens de réussir et d’accomplir mes nouveaux rêves, que je ne pouvais pas rester dans une bulle imaginaire. Les regrets, ça nous bouffe le coeur. Désormais, je vais rendre mes rêves accessibles. J’irai à New York, ça ne changera pas. Qui sait, je referai peut-être du théâtre et peut-être que ma vie recroisera le chemin du cinéma. Si c’est le cas, je ne raterai pas l’opportunité.
Je regrette cette imagination foisonnante et ces rêves. C’était une époque plus simple. Ce n’est pas pour autant que je n’apprécie pas ma vie « d’adulte », seulement je suis actuellement à un carrefour dans ma vie, en attente de le traverser, toujours dans un entre-deux entre les rêves d’enfance et la vie d’adulte. Ce n’est pas pour autant que je déteste ma vie, il y a plusieurs choses que j’ai réussi à accomplir et dont je suis plutôt fière. Mais je suis consciente maintenant que rêves et vie ne correspondent pas toujours – du moins si on ne se donne pas les moyens pour réussir.
Je sais maintenant qu’il faut que je me donne les moyens pour rendre mes rêves réalité, même si ces nouveaux rêves vont en remplacer des anciens. C’est un peu doux-amer, mais c’est ce qui fait la beauté de l’âge adulte je pense, grandir avec des rêves plein la tête. Tant pis si ce ne sont pas nos rêves d’enfant. »
Et parfois certains obstacles sont insurmontables, comme Anaïs l’explique :
« Lorsque j’ai commencé le tir à l’arc j’avais 7 ans, et ça a été comme une toquade comme on en a souvent enfant. À 10 ans je faisais mes premiers championnats de France, et c’est là que j’ai décidé que : « Un jour j’irai aux championnats du MOOOONDE ! ».
J’ai donc passé mon enfance, mon adolescence et le début de ma vie d’adulte tournée vers le tir. Lorsque j’étais petite je m’entraînais le mercredi soir, le vendredi soir, le samedi après-midi et quasiment tous les dimanches j’avais une compétition. Je le faisais toujours avec plaisir, et mes parents n’étant pas super présents, le tir à l’arc était ma seconde famille. Je n’ai jamais été poussée ou forcée à m’entraîner.
J’ai été vice championne de France deux fois en 2005, et l’année d’après j’ai eu les deux titres.
De 2007 à 2012 je me suis concentrée sur mes études. Je ne voulais pas faire de filière sport-études ; l’olympisme n’étant pas accessible aux arcs à poulie, ça n’avait pas d’intérêt pour moi d’intégrer un pôle. Je m’entraînais toujours mais faisais moins de compétitions.
L’année dernière j’étais de nouveau engagée sur un championnat de France. Mais quelques jours avant j’ai eu un grave accident de travail. Les médecins ont parlé de l’amputation de ma main droite. L’opération n’a été tentée que parce que je faisais du sport à haut niveau, et j’ai gardé ma main. Sauf que c’est arrivé en avril 2014, alors que je devais passer les tirs qualificatifs aux championnats du monde en septembre. Ça n’a donc pas pu se faire, et j’ai eu l’impression de trahir ce en quoi l’enfant en moi avait toujours cru. Du coup maintenant je me sens sans rêves, et c’est dur.
J’allais accomplir ce rêve, c’était comme prendre le petit moi dans les bras et lui dire « ça y est t’as vu, on y est arrivé ! ».
Je ne regrette pas d’avoir un jour formulé ce rêve : il m’a poussé à avancer, à me dépasser et à me sentir fière de moi. C’est important de savoir qu’on est capable, de se rendre compte qu’on peut faire des choses bien. C’est juste que maintenant, je me sens tellement vide. Je ne sais pas si j’aurai de nouveau de la sensibilité dans ma main ou bien même si je serai de nouveau capable de tirer à un tel niveau. »
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Il faut bien souvent adapter ses rêves à la réalité, et peser ce que l’on désire vraiment, comme cette madmoiZelle s’en est rendu compte :
« Lorsque j’étais enfant, biberonnée aux dessins animés et aux contes, je rêvais de me marier, d’avoir une ribambelle d’enfants, d’élever des chevaux, d’être instit et écrivain. Je voulais aussi explorer l’espace, les volcans, le monde, dévorer des tas de livres. J’étais très curieuse et incapable de me fixer sur un seul sujet d’intérêt ; à part écrivain, mes rêves professionnels changeaient souvent.
Aujourd’hui, je suis bibliothécaire : j’ai ainsi pu concilier ma passion des livres avec ma carrière. Et puis, on trouve tous les sujets dans les livres, donc ma curiosité est satisfaite ! Je caresse toujours mon rêve de devenir écrivain et, après avoir publié des nouvelles en anthologie, je pense être sur la bonne voie pour y parvenir un jour.
En revanche, je regrette de ne pas pouvoir voyager autant que je le voudrais, ou vivre des épopées comme je le rêvais enfant. La première contrainte est d’ordre budgétaire, la seconde, plus psychologique et sécuritaire. Voyager à l’aventure quand on est une femme pose un certains nombre de questions à l’heure actuelle. La vie n’est pas un film et là où les héros s’en sortent toujours, dans la vraie vie un voyage aventureux peut vite tourner au drame. Je pense qu’enfant, je ne pensais pas du tout à cela !
Quant à mon rêve d’espace, mes difficultés en mathématiques m’ont vite ôté cela de la tête, même si je regarde toujours le ciel nocturne avec nostalgie. Je regrette parfois de n’avoir pas pu insister davantage dans cette voie, d’être restée une pure littéraire réfractaire aux chiffres – à tel point que je crains de calquer ce regret sur un enfant si j’en ai un un jour.
Je ne suis plus une passionnée de chevaux donc mon rêve d’élevage m’est passé durant l’adolescence, au profit d’un métier du livre. Pour moi, ce rêve-là était vraiment un rêve d’enfant destiné à être oublié, dépassé, et pas à être réalisé, au contraire de celui d’écrire qui m’est resté et sur lequel j’ai sérieusement « travaillé».
Quant au mariage et à la dizaine d’enfants, là aussi tout a changé en grandissant. J’ai été une célibataire de longue date, ne me mettant en couple que tardivement. Cette relation sérieuse arrivée sur le tard a fait que je voulais goûter à cette vie à deux avant d’ajouter un bébé à l’équation. De plus, au fur et à mesure que mes frère et sœurs devenaient parents, le nombre rêvé d’enfants diminuait jusqu’à atteindre zéro quand j’ai rencontré mon compagnon – sans doute parce qu’avec mes neveux et nièces, je prenais la pleine mesure de ce qu’est la parentalité.
Pendant un certain temps je n’ai plus voulu du tout d’enfants. Je ne sais pas encore si j’en souhaite un, même si je pense que je sauterai le pas un jour (peut-être). Mais ce ne sera pas tout de suite : j’ai encore envie de voyager, d’écrire, de vivre du temps à deux !
Je ne regrette pas forcément l’époque de mes rêves. D’un certain côté, tout semblait possible : être astronaute tout étant mère de famille, par exemple. Je ne me mettais pas de limite. Mais en même temps je n’avais alors pas conscience de certaines donnés limitantes, justement – difficile de vivre à la manière d’Indiana Jones sans risquer véritablement sa peau ! »
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Des rêves grandis
Mais adapter ses rêves ne veut pas forcément dire qu’il faut les sacrifier. Les rêves d’enfants peuvent évoluer, et grandir. A. ne regrette ainsi rien :
« Enfant, mes rêves se construisaient grâce à mes références : les adultes de mon entourage qui m’inspiraient (mon instit du CE2, ma tante femme d’affaires « self-made woman »), les copines d’école et bien sûr la pop culture (les héroïnes de W.I.T.C.H, les X-men, les héroïnes de Friends…). J’ai même décrit mon moi idéal du futur à une amie en CM2 : cheveux bruns longs, des lunettes, un long trench-coat, un beau sac à main… au volant d’une Ford Ka.
Certaines choses me fascinaient et je voulais qu’elles fassent partie de ma vie. Il y avait tout d’abord le voyage : j’avais une liste des pays que je voulais visiter, des langues étrangères à apprendre. Je voulais un travail qui me fasse voyager, la mode ou le tourisme… malgré une famille à dominante scientifique. Les grandes villes et les capitales m’attiraient. Je voyageais beaucoup et j’aimais beaucoup les aéroports : les destinations défilant sur les panneaux, les hommes et femmes d’affaires, les parfumeries duty free qui me paraissaient luxueuses.
Ensuite, j’étais fascinée par la magie et les horoscopes. J’essayais de lire l’avenir dans les cartes, de chercher des explications surnaturelles. Et enfin j’étais attirée par « le futur » : internet, les ordinateurs et téléphones portables, les jeux vidéos (qui m’étaient interdits). La télé avec le câble était aussi autre chose qui me faisait envie, pour pouvoir voir les séries Disney Channel !
En revanche, je ne rêvais ni de prince charmant ni de mariage contrairement à mes copines qui allaient jusqu’à répéter la cérémonie dans leur jardin. J’imaginais que je me marierais, bien sûr, mais pas de quoi en faire un plat.
Au collège et au lycée je pensais peu à ces rêves, même si l’envie de voyager est restée. C’est au moment de partir à la fac et à mon embauche après ma licence que c’est revenu. Ces moments forts m’ont fait repenser à toute ma scolarité et les ambitions que j’avais eues.
Les rêves que j’ai cités sont globalement en phase avec la personne que je suis aujourd’hui. La seule chose est que les horoscopes ne m’intéressent plus, même si parfois j’y jette un coup d’œil amusé et nostalgique.
Mais sinon, je pense être en train d’accomplir ces rêves. Je voulais l’indépendance, et c’est ce que j’ai choisi en acceptant une proposition d’embauche au lieu de continuer mes études. Dans ce travail je pratique trois langues étrangères et j’en apprends une quatrième à côté, tout cela pour m’ouvrir plus de portes pour la suite. Cependant, pendant longtemps je me voyais comme littéraire et me voilà dans le monde de l’automobile. Je n’ai aucun regret car cela me plaît énormément. Je serai amenée à évoluer dans d’autres pays, et mon intérêt de l’époque pour le futur est là aussi largement comblé avec tout l’aspect innovation. »
« Enfant, mes rêves se construisaient grâce à mes références : les adultes de mon entourage qui m’inspiraient (mon instit du CE2, ma tante femme d’affaires « self-made woman »), les copines d’école et bien sûr la pop culture (les héroïnes de W.I.T.C.H, les X-men, les héroïnes de Friends…). J’ai même décrit mon moi idéal du futur à une amie en CM2 : cheveux bruns longs, des lunettes, un long trench-coat, un beau sac à main… au volant d’une Ford Ka.
Certaines choses me fascinaient et je voulais qu’elles fassent partie de ma vie. Il y avait tout d’abord le voyage : j’avais une liste des pays que je voulais visiter, des langues étrangères à apprendre. Je voulais un travail qui me fasse voyager, la mode ou le tourisme… malgré une famille à dominante scientifique. Les grandes villes et les capitales m’attiraient. Je voyageais beaucoup et j’aimais beaucoup les aéroports : les destinations défilant sur les panneaux, les hommes et femmes d’affaires, les parfumeries duty free qui me paraissaient luxueuses.
Ensuite, j’étais fascinée par la magie et les horoscopes. J’essayais de lire l’avenir dans les cartes, de chercher des explications surnaturelles. Et enfin j’étais attirée par « le futur » : internet, les ordinateurs et téléphones portables, les jeux vidéos (qui m’étaient interdits). La télé avec le câble était aussi autre chose qui me faisait envie, pour pouvoir voir les séries Disney Channel !
En revanche, je ne rêvais ni de prince charmant ni de mariage contrairement à mes copines qui allaient jusqu’à répéter la cérémonie dans leur jardin. J’imaginais que je me marierais, bien sûr, mais pas de quoi en faire un plat.
Au collège et au lycée je pensais peu à ces rêves, même si l’envie de voyager est restée. C’est au moment de partir à la fac et à mon embauche après ma licence que c’est revenu. Ces moments forts m’ont fait repenser à toute ma scolarité et les ambitions que j’avais eues.
Les rêves que j’ai cités sont globalement en phase avec la personne que je suis aujourd’hui. La seule chose est que les horoscopes ne m’intéressent plus, même si parfois j’y jette un coup d’œil amusé et nostalgique.
Mais sinon, je pense être en train d’accomplir ces rêves. Je voulais l’indépendance, et c’est ce que j’ai choisi en acceptant une proposition d’embauche au lieu de continuer mes études. Dans ce travail je pratique trois langues étrangères et j’en apprends une quatrième à côté, tout cela pour m’ouvrir plus de portes pour la suite. Cependant, pendant longtemps je me voyais comme littéraire et me voilà dans le monde de l’automobile. Je n’ai aucun regret car cela me plaît énormément. Je serai amenée à évoluer dans d’autres pays, et mon intérêt de l’époque pour le futur est là aussi largement comblé avec tout l’aspect innovation. »
EdocSil, qui voulait donc être ostéopathe équin, Présidente ou aventurière, fait un constat relativement similaire :
« Même si c’étaient des rêves d’enfants, ils ont été tenaces et plutôt réalistes. Aujourd’hui je suis en école de commerce, mais je regrette de ne pas avoir suivi le chemin pour faire vétérinaire. Enfin regretter n’est pas forcément le mot approprié : je suis très heureuse dans ce que je fais mais je me sens divisée, j’ai une part de moi qui ne s’adapte pas à ce monde. À mon avis il y a peu de chance pour que je finisse cadre dans une grosse entreprise à la sortie, je serai plutôt du genre à chercher à innover. Ça rejoint mes rêves de présidence qui sont toujours là : j’aimerais m’investir plus pour la société et faire bouger les choses !
Mon rêve d’Indiana au féminin n’a par contre pas bougé : je suis une baroudeuse, et les voyages, la découverte de nouvelles cultures, c’est l’essence qui me permet d’avancer – sauf qu’aujourd’hui je ne rêve plus d’avancer seule, j’ai rencontré quelqu’un qui a chamboulé ma vision de femme célibataire indépendante. Je veux être indépendante, mais accompagnée et soutenue ! Mes rêves ont ainsi évolué, mais ils sont toujours présents, seulement sous une forme plus mure. »
Beaucoup accomplissent ainsi leurs rêves d’enfants, d’une façon différente de celle qu’elles imaginaient. C’est le cas d’Océane :
« Quand j’étais petite, le futur me terrorisait. Mes parents m’ont raconté qu’un soir quand j’avais sept ans, je suis sortie de ma chambre en pleurant parce que je ne savais pas ce que je voulais faire de ma vie. Et cette crainte ne m’a pas quittée avant mes 23 ans – il y a un an. Aujourd’hui je pense que déjà à cette époque je n’avais pas envie de me ranger dans une vie de métro/boulot/dodo. À chaque fois que je voyais une maison abandonnée, je me disais que j’irais vivre et me cacher là-bas. L’été de mes 13 ans, avec ma famille nous sommes partis en road trip en camping car. Mon cher papa qui travaille dans les transports nous a alors montré une photo de bus aménagé. Je l’ai trouvé magnifique, plus beau qu’une maison.
C’était ce que je voulais, je ne voulais pas d’une maison. Je voulais avoir un grand terrain avec ce bus en plein milieu. Je ne voulais pas forcement voyager, mais je pense que je ne voulais pas être fixée quelque part non plus. Mais à l’époque, je n’en avais pas conscience. J’avais des rêves un peu plus communs : partir vivre l’aventure en Australie, travailler dans un aquarium, faire du ski tout l’hiver…
Il y a deux ans, je me suis faite renvoyer de l’école où j’étudiais car je n’avais pas le niveau pour continuer. J’ai sauté sur l’occasion pour faire l’année sabbatique (sympathique) dont je rêvais depuis des années et je suis partie… en Australie ! Premier rêve : done. Là-bas ça été un vrai déclic ! Maintenant je profite de l’instant présent et je me focalise sur ce que je veux aujourd’hui. J’ai passé mon monitorat de plongée, loin des tailleurs que je portais en école d’ingénieur.
Je suis rentrée en France il y a presque un an avec une vision de la vie bien différente. Maintenant j’écoute mes rêves car je n’ai jamais été aussi heureuse qu’en étant partie en Australie. Même si ça ne se passe pas bien, au moins j’essaye car le plus grand regret serait pour moi de ne pas avoir essayé.
Je suis rentrée en France dans le but de faire une licence pro, car la plongée est exigeante physiquement, je ne pourrais pas faire ça toute ma vie.
Pour ma licence pro je dois faire un stage. Entre l’envie de repartir à l’aventure et de garder un lien avec la plongée j’ai trouvé un stage… dans un aquarium ! Deuxième rêve : done. C’est en Irlande, et encore une fois l’aventure a été riche en émotion. Tout comme l’Australie ce n’est pas rose tous les jours, mais quand ça ne va pas je me bats et j’essaye de faire avancer les choses.
Maintenant j’ai fini mes études. La prochaine étape est l’Espagne où je vais bosser pour l’été en tant que monitrice de plongée. Mon prochain rêve? J’ai bien l’intention d’aller bosser dans une station de ski cet hiver. Parfois ça me fait un peu peur de réaliser tous mes rêves si jeune ; je me demande ce que je vais faire après…
Je pense que je suis très chanceuse de pouvoir réaliser mes rêves. Mais surtout, maintenant j’ai l’impression d’être moi et celle que j’ai toujours été dans le fond. Je me pose dans un pays, j’y fais ma vie quelques mois et si le cœur m’en dit je continue mon voyage. Bon, je n’ai toujours pas ce magnifique bus qui me faisait tant rêver, mais je ne suis ni fixée quelque part ni en permanence entre deux sacs à dos, et surtout je m’écoute (ça fait un peu morale Disney mais j’aime bien les Disney). »
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Cette madmoiZelle a elle aussi pu accomplir ses rêves d’enfants d’une certaine façon :
« Mon rêve d’enfant n’a rien de très original : c’est celui de devenir écrivain. Il a émergé très tôt, et, étrangement, avant mon apprentissage de la lecture et de l’écriture. J’étais incapable de déchiffrer une seule lettre de l’alphabet, mais j’aimais par-dessus tout que l’on me lise des histoires, et j’adorais jouer avec les mots : j’ai inventé mon premier poème vers 5 ans, rien que pour m’amuser avec les sonorités. C’était un texte très court et horriblement répétitif où tout rimait avec « ombre » et « sombre » (sûrement un présage de mon futur amour pour l’esthétique gothique et le métal).
J’avais tellement cassé les pieds de ma grand-mère qu’elle avait fini par le noter pour moi sur une grande feuille que j’avais ensuite abondamment décorée de gribouillis du plus bel effet (du moins, selon les critères artistiques d’une gamine de cinq ans dotée d’un amour particulier pour les feutres fluos !).
Dès que j’ai su lire et écrire, j’ai noirci des cahiers d’histoires de magiciennes et de hobbits. Ma maman m’avait lu Bilbo que je plagiais éhontément en mélangeant l’intrigue avec celle de Princesse Starla et les joyaux magiques (j’en profite d’ailleurs pour présenter toutes mes excuses à J.R.R. Tolkien.). Je dessinais constamment des cartes de mondes imaginaires.
Mes projets professionnels ont ensuite évolué avec le temps. Comme tous les enfants, j’ai voulu exercer une quantité incalculable de métiers, d’archéologue à pilote de chasse, mais je voulais toujours être écrivain en plus, sur mon temps libre. On m’avait expliqué que vivre de sa plume était un rêve quasi-impossible à atteindre, alors j’envisageais tout un tas d’options, mais écrire restait essentiel. Et je n’ai jamais arrêté, tout au long de ma scolarité, d’écrire des histoires et de les faire lire à mes amies.
Aujourd’hui, je passe les concours de l’enseignement (en lettres modernes), et j’espère sincèrement que je pourrai transmettre à quelques uns de mes élèves cet amour que j’ai toujours eu pour la lecture et l’écriture. Je continue bien entendu à écrire : j’ai publié quelques nouvelles chez des éditeurs indépendants, et il y a quelques années j’ai fait partie des lauréats d’un concours d’écriture. Je ne me prétends pas écrivain, loin s’en faut ! Il me reste un (très) long chemin à parcourir et j’ignore si je serais un jour capable de dépasser le stade de la nouvelle pour réaliser un projet plus abouti, dont je pourrais être vraiment fière. Mais j’écris toujours avec autant de joie, et c’est tout ce qui compte ! »
Et parfois, les madmoiZelles n’avaient pas forcément de rêves pour plus tard… car elles n’avaient pas forcément envie de grandir ! Cette madmoiZelle aborde ainsi différemment son avenir :
« Mes rêves d’enfant ne portaient pas vraiment sur mon futur, et encore moins sur ma carrière professionnelle. J’ai voulu être maîtresse parce que je trouvais marrant d’écrire sur un tableau, j’ai voulu être vétérinaire parce que j’adorais les animaux et j’ai même voulu être mécanicienne pendant une période (mais celui-là je ne me souviens plus du pourquoi, sûrement parce que tout le monde me disait que je ne pouvais pas le faire) (apparemment avoir un vagin empêche de réparer des voitures). Bref j’ai enchaîné les vocations professionnelles, comme tous les enfants, mais je ne me suis jamais arrêtée sur une idée.
En fait j’ai toujours eu du mal à m’imaginer adulte, donc je me battais bien les steaks de savoir quel métier j’allais exercer plus tard. Je me souviens que quand j’étais ado, je n’arrivais pas du tout à réaliser qu’un jour j’allais être bachelière ou que j’aurais mon permis par exemple. Ça m’a toujours un peu effrayée de devenir adulte, alors c’était ma façon de faire l’autruche je suppose. Aujourd’hui je fais en sorte de me sortir les doigts afin de me constituer un CV valorisant pour mettre toutes les chances de mon côté quand je postulerai pour des masters ou quand j’entrerai dans la vie active : j’ai validé mon année avec mention, je me suis trouvée un stage dans mon domaine d’étude cet été… Mais en réalité je suis toujours aussi perdue.
Je suis (à peu près) bonne partout (sauf en science, je n’aime pas les sciences et c’est réciproque), mais excellente en rien. Une de mes plus grandes peurs est de terminer avec un boulot plan-plan et de m’ennuyer à mourir, parce que j’ai quand même un minimum d’ambition – notamment celle d’exercer un job qui me plaît. J’aimerais beaucoup écrire par exemple, mais je n’arrive pas encore à écrire pour moi et j’ai l’impression de ne pas avoir d’histoires intéressantes à raconter. Ma vie d’adulte se résume donc pour l’instant à essayer de me construire, de me faire confiance et de trouver ma voie (rien que ça). »
En conclusion
Beaucoup considèrent qu’il n’est pas trop tard pour accomplir leurs rêves d’enfants… ou qu’il n’est pas grave de ne pas les accomplir. Une madmoiZelle explique :
« J’ai encore plein de rêves à réaliser mais ce sont des rêves qui sont venus bien plus tard, alors j’ai encore le temps ! En tout cas j’ai appris à prendre du recul par rapport à mes rêves, ceux réalisés comme ceux impossibles, et à me contenter d’en approcher plutôt que de les réaliser. »
« J’ai encore plein de rêves à réaliser mais ce sont des rêves qui sont venus bien plus tard, alors j’ai encore le temps ! En tout cas j’ai appris à prendre du recul par rapport à mes rêves, ceux réalisés comme ceux impossibles, et à me contenter d’en approcher plutôt que de les réaliser. »
Lise pense qu’ils l’accompagnent, car ils font partie intégrante d’elle-même :
« Selon moi, même si nos rêves d’enfants sont mis de côté ou s’endorment lorsqu’on grandit, ils finissent toujours par resurgir. Quelque part, ils témoignent de nos aspirations profondes, des choses qui nous touchent, de qui nous sommes vraiment avant que la société de nous influence. »
M. a fait de ses rêves d’enfant une force :
« Mes rêves me portent et m’ont permis d’affronter des événements difficiles, et grâce à eux, j’ai découvert ma personnalité, mes attentes : ils font intimement partie de mon cheminement personnel. Sans eux, je serais sûrement une commerciale malheureuse aujourd’hui. »
Sophie continue quant à elle de rêver :
« Je me rends compte que je suis encore dans mes rêves d’enfant et suis à deux doigts d’en réaliser un (le théâtre m’ouvre les bras !), et que je continue de rêver encore et encore, et de croire que c’est possible. L’enfant en moi est toujours présente, et j’aime cette enfant qui n’a pas abandonné ses rêves, qui aspire à d’autres… C’est une éternelle quête dans l’innocence et la vision que j’ai de la beauté de la vie. Faut croire que je n’ai pas été confrontée à la réalité de la vie, à moins que ma réalité ce soit ça : « L’enfant est un petit adulte qui sait qu’il croit », comme dirait Grand Corps Malade. »
EdocSil a elle aussi encore ses rêves, mais avec de la maturité :
« Je ne regrette pas du tout l’époque de mes rêves d’enfant ; même si elle semble idyllique et pleine d’insouciance, je trouve que j’ai tellement plus de clefs en main pour réaliser mes rêves maintenant. Mes rêves d’enfant, je les trimballe toujours avec moi mais je les aborde avec un côté adulte qui me permet de tous les réaliser en accord avec la vraie vie. Je crois que c’est ce qui fait que j’aime ma vie d’adulte : au-delà de tous les tracas quotidiens, j’ai gardé ces rêves dans un coin de ma tête et ils donnent à ma vie le juste milieu entre le rêve merveilleux et le monde souvent malheureusement un peu terne. Ma réalité d’aujourd’hui, c’est globalement un juste équilibre de « bonjour tristesse » et de rêves de vie fantastique. »
Rachel, qui rêvait d’un pavillon en banlieue avec un mari et des enfants, conclut :
« Ma vie n’est absolument pas conforme à mes rêves d’enfant. On ne sait pas enfant ce que c’est que d’être un adulte, et on ne peut pas prendre en compte les paramètres qui s’imposeront à nous tout au long de notre vie. Je ne me serais jamais imaginée vivre à Paris, dans cette ville de fous que j’adore. Je ne me serais jamais imaginée célibataire à l’aube de mes 30 ans. Je ne me serais jamais imaginée me différencier un peu de ma famille. Je ne me serais jamais imaginée construire des amitiés aussi sincères et profondes. Je ne me serais jamais imaginée si courageuse. »
À lire aussi : Je fais les études/le métier de mes rêves — Témoignages
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Les Commentaires
Mon rêve, c'était d'être comédienne. Jouer, je ne voulais faire que ça. J'ai fait beaucoup de théâtre et puis une prépa littéraire où j'avais des cours de théâtre. Notre prof nous a fait jouer une pièce géniale. C'est une année qui m'a confortée dans l'idée d'être comédienne. Même si je savais que mes parents flippaient, même si je savais que c'était un métier difficile.
Et puis en deuxième année, deuxième pièce, qu'on monte comme des grands avec les copains. Et puis ce malaise à me trouver sur scène. Me demander systématiquement "Qu'est-ce que je fous ici ???!". La sensation de ne pas être à ma place. De pas être meilleure qu'un-e autre. Et puis, plus le temps passait, plus je me rendais compte que j'étais flippé de l'argent. C'est un truc qui m'angoisse, j'angoisse d'en manquer (comme nous tous), je suis malade si je suis à découvert.
Et puis aussi une dispute avec mon père. "T'es brillante et tu pourrais faire plein de choses, mais t'as décidé de devenir artiste. Pour moi, c'est du gâchis." Coup très dur. Déjà que je n'étais pas du tout sûre de moi quant à mon avenir. Que je me posais beaucoup de questions. Je savais juste que le théâtre, c'était ma passion.
Fin de la prépa, nouvelle vie en fac de théâtre, nouvel appart. Je passe les concours d'entrée de plusieurs conservatoires (que je n'ai pas). Et toujours ce malaise en scène. Même malaise quand je vais à mes cours de théâtre (dans une école du 19ème, très axée sur le corps, le ressenti par le corps...). Epreuve même.
Et si j'arrête tout ? Que je dis que finalement non, je ne serais pas comédienne ? Je vais passer pour quoi, pour qui ? Tout mon entourage sait que c'est ça que je veux faire depuis que j'ai cinq ans. Mes amis vont me trouver lâche de ne pas avoir essayé (en plus, on était pendant la période des attentats du 13/11, donc je me martelais de gros "NE RIEN REGRETTER". Si je ne suis pas comédienne, alors je suis quoi ? je me suis menti à moi-même pendant toutes ces années ? Je me suis trahie ? JE SUIS QUOI ? Une fille qui abandonne ses rêves de petite fille ? Qui renonce ? Qui abandonne ? Je lisais en boucle les articles "J'ai testé pour vous...", celui sur l'avenir, les jobs, les rêves. Un coup sur deux, je me disait "Oh, allez, je continue." Un coup sur deux.. Mais je décide d'assumer. je ne peux plus. J'ai besoin d'une vie un minimum stable. Je quitte le nouveau projet de ma troupe (en passant, je fais la pub: http://www.jokle.org/ ), la mort dans l'âme.
Moral très au fond des chaussettes, en mode "Pourquoi je vis, pourquoi je meurs ?" Mon grand-père meurt, en plus, c'était une période où je respirais la joie de vivre.
Et puis en fait, avoir un copain m'a beaucoup aidé. Parce que je me suis dit que quand on s'est rencontrés, on s'est plus sans rien savoir l'un de l'autre. Et que si je deviens pas comédienne, ben il sera là quand même.
Ma passion, c'est le théâtre. C'est l'art, la culture, et le faire partager. J'ai postulé pour des écoles de management culturel. Je voudrais travailler dans les relations auprès des jeunes publics, dans des lieux qui leur sont dédiés. J'ai fait un stage dans un festival de théâtre jeune public et j'ai A-DO-RE! Je veux bosser dans le théâtre jeune public, j'envisage même d'écrire un spectacle (un truc pas long, genre 30 minutes, ce qui est déjà pas mal).
J'ai quitté ma zone de confort, j'ai assumer de ne plus avoir les mêmes envies qu'à l'adolescence. En partie grâce aux nombreux articles sur la confiance en soi de madmoizelle.com .
Vraiment. Merci <3.