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Société

Vis ma vie d’homme trans, de la prise de conscience à la transition

Être un homme trans, en France, aujourd’hui, ça ressemble à quoi ? De la prise de conscience à la transition en passant par les galères administratives, tour d’horizon d’un changement salvateur.

 

Publié le 29 juin 2016

Les personnes transgenres présentées le plus souvent dans les médias déclarent avoir toujours connu leur identité de genre. Même celles qui ont commencé leur transition tard dans leur vie « savaient ».

Mais alors… comment ai-je pu passer totalement à côté pendant si longtemps, moi ? Et que fait-on après avoir réalisé qu’on est trans ? 

Je suis un damoiZeau trans (donc un homme trans), et lorsque je parle de mon passé avant ma prise de conscience, j’ai tendance à parler de moi au neutre voire au féminin (je trouve cela plus compréhensible selon le contexte).

Attention, toutes les personnes trans ne procèdent pas forcément de la même manière ! Le plus simple, si vous craignez la bourde, reste de demander aux personnes concernées les pronoms à favoriser.

Mon enfance, celle de tous les possibles

J’ai eu une jeunesse plutôt classique, totalement heureuse. J’ai pratiqué de nombreuses activités (GRS, judo, basket, saxophone), peu importe à quel genre la société les liait traditionnellement.

Enfant, je joue à raconter des histoires, à la marelle tracée à la craie sur le sol, au foot dans le quartier, à la corde à sauter, aux billes sur le relief des plaques d’égout de la cour de récré…

J’ai des potes, un petit copain, une sœur et des parents adorables, de mignonnes poupées, un mini-panneau de basket sur la porte de ma chambre, de bonnes notes.

J’aime lire, Ydriss, les bonbons, les vacances à la campagne chez mes grands-parents, les BN qui font un clin d’œil (parce qu’ils me donnent le droit d’en manger un en plus).

Je n’aime pas les WC à la turque en colonie de vacances, les animaux (désolé), l’heure de rentrer, « Chou de Bruxelles » (le grand méchant de la récré aux cheveux frisés), les quenelles, les BN à la fraise.

Sur mon petit chemin de vie, tout roule.

À l’adolescence, quelque chose cloche

Il faut bien qu’à un moment les choses se gâtent, non ?

À partir de 10-11 ans, j’ai l’impression constante et insidieuse que quelque chose d’absolument capital ne va pas chez moi… Sans arriver à savoir quoi. Maintenant, je sais que de nombreuses personnes trans passent par cette période de tourmente sans nom.

Tu ne peux pas savoir que tu aimes le chocolat si tu ne sais pas que le chocolat existe. Tu ne sais pas que tu es trans si tu ne sais pas que tu peux t’identifier à autre chose qu’au genre qu’on t’a assigné à la naissance.

Les choses se sont peut-être compliquées parce que la pression dans notre société atteint davantage les enfants au fur et à mesure qu’ils grandissent. Mais n’ayant pas des goûts stéréotypiquement « masculins » ni une éducation extrêmement genrée, je ne me suis confronté à aucune difficulté ou interdiction.

Alors qu’est-ce qui a changé dans ma vie à ce moment-là ? Rien ! J’ai toujours une sœur et des parents adorables, un groupe d’amis et amies soudé, des étagères blindées de livres, un nouveau petit copain, des profs sympas, de bonnes notes, une excellente équipe de basket… Mais quelque chose ne va décidément pas.

Sans entrer dans les détails, j’ai commencé à m’automutiler et à essayer de me suicider régulièrement. J’ai besoin d’extérioriser cette chose qui me pique sans cesse et que je ne vois nulle part. Ma sœur a peur de rester seule à la maison avec moi, mes parents s’inquiètent et je suis dans un flou total lorsqu’il s’agit d’expliquer mon mal-être.

J’ai réalisé que je préférais les filles (ce qui faisait de moi une « fille lesbienne » à l’époque) mais cette prise de conscience et acceptation progressive n’est pas le Graal libérateur espéré. Je n’éprouve pas les mêmes désirs que la majorité des femmes, mais finalement ça ne change pas grand-chose pour moi ou ma vie de tous les jours (tût tût les homophobes).

À 18 ans, je suis dépressive et je ne sais toujours pas ce qui cloche.

À lire aussi : Les TED de la semaine − La dépression

Mon genre et moi aux débuts de l’âge adulte

Après avoir emménagé seul•e pour débuter une classe préparatoire, je réalise que je suis totalement incapable de prendre soin de moi, je continue à avoir envie de me détruire et j’arrête même de manger (spoiler alert : ce n’est pas l’idée du siècle).

Un gros semestre de débandade culinaire ne m’empêche pas de devenir major de promo (mais quand on est mort•e, les bonnes notes ça sert pas à grand-chose). Je finis par être hospitalisé•e de force en hôpital psychiatrique. J’y suis resté•e un bon semestre.

Avec l’aide de psys, je finis bien par « guérir» autant qu’il se peut de mon anorexie. Mais je n’ai toujours aucune idée de pourquoi je me torture autant.

Quand j’y repense, je me dis que c’est assez fou : j’ai vu une bonne dizaine de psys de toutes sortes et aucun n’a vraiment questionné mon rapport au genre ! J’y suis sûrement pour quelque chose puisque je deviens une tombe lorsqu’il s’agit de parler de sujets intimes. Mais le manque de formation du personnel médical dans son ensemble sur le sujet y est sûrement aussi pour beaucoup.

Par exemple, je crois que certains ont mis le fait que je tende à me considérer comme un homme sur le compte de mon homosexualité. Alors qu’identité de genre et orientation sexuelle n’ont RIEN à voir ! 

On peut aimer jouer au cerf-volant, mais le faire depuis une plage de la Méditerranée ou au milieu d’un champ en Haute-Loire, ça change tout de même pas mal le tableau (ceci n’est pas une métaphore sexuelle) (enfin je ne crois pas).

La transidentité et moi, histoire d’une découverte

J’ai vu une psy pendant encore un an pour décortiquer tout ça, gérer le quotidien et ne pas retomber dans mes travers (de porc miam), parler de mon rapport à mon corps manifestement compliqué (d’où le symptôme anorexie)…

À côté de ça, je me suis cherché, j’ai fait des collages, des dessins, des tours de parc en courant et en parlant tout seul. J’ai continué à lire beaucoup pour me trouver dans les mots des autres. De même, j’ai continué mon énorme visionnage compulsif de films, documentaires, séries (même en japonais sous-titré allemand !).

Et j’ai fini par tomber sur des personnes trans !

Même si je ne m’identifiais pas particulièrement aux femmes trans représentées la plupart du temps (des personnes assignées homme à la naissance, ayant souvent deux à trois fois mon âge, et une situation bien différente et souvent caricaturale), j’ai au moins découvert l’existence des personnes transgenres et surtout de quelques jeunes hommes trans.

Mais ceux-ci aiment le foot et les tapes dans le dos, ont les cheveux très courts, refusent catégoriquement de porter des « vêtements de fille » depuis leur plus jeune âge…

Je me questionne : qu’ai-je à voir avec eux, moi qui suis plutôt un rat de bibliothèque, travaillant régulièrement en tailleur-jupe, préférant généralement la compagnie des femmes à celles des hommes, plus intéressé•e par les différents points de tricot que les noms des joueurs vendus pendant le mercato ? Pourquoi est-ce que ce ne serait pas plutôt ma sœur qui serait trans, elle qui aime le foot, adore faire de la moto, et traîner avec des mecs ?

Dans le même temps, j’entame une relation amoureuse avec une femme ouverte d’esprit. Avec elle, je peux expérimenter sans être jugé•e mon rapport à mon corps (les vêtements, avoir un torse plat, le fait d’être ou non tactile…), mon rapport au langage (nommer ses ressentis et envies, être genré au masculin…) par exemple.

En fait, je suis incapable de dire comment j’ai eu « la révélation » car elle est venue  très progressivement. Je réalise que je peux être un homme sans correspondre à tous les clichés du genre (qui y correspond vraiment, d’ailleurs ?).

Donc pas de révélation en forme de feu d’artifice, un matin au réveil, mais une identification qui a fait son chemin et germé sur la durée. J’ai mis longtemps à accepter l’idée d’être différent, d’être très critiquable voire incompréhensible pour la majorité des gens.

Mais à partir du moment où j’ai accepté de me regarder en face et de me laisser exister, je ne me suis plus jamais fait de mal. Coïncidence ? Je ne crois pas !

La transition de genre à l’échelle sociale

En transpirant 5 litres à chaque fois, j’ai donc commencé à faire mon (deuxième) coming-out — à ma sœur, puis mes parents, puis mes différents cercles d’amis.

Les membres de ma famille, inquiets, ont mis un peu plus d’un an à réaliser que cette prise de conscience signait la fin des problèmes cités plus haut et n’en était pas un nouveau ou une fuite en avant. C’est surtout voir tout le reste de notre famille être en mode « peace & love, sois qui tu es » qui les a fait avancer.

Au niveau de mes potes, j’ai fait un petit tri au passage et tout s’est plutôt bien passé : il y a bien eu quelques imbéciles, mais vraiment moins que ce que je pensais.

Pour ce qui est des bisous entre adultes consentants (l’amour, le sexe, tout ça)… Rassure-toi, j’ai toujours autant de propositions indécentes qu’avant !

Aujourd’hui, je ressens vraiment que j’agis plus naturellement, que je suis moins tendu, et ça se répercute dans ma vie sociale. En me basant sur les échos d’autres personnes concernées et sur mon expérience, je dirais que 90 % des gens n’ont aucun problème avec la transidentité… lorsqu’ils sont bien informés.

Le problème, c’est que 99 % des Français et Françaises sont mal informées sur tout ce qui touche au genre, même si le féminisme et la lutte contre les LGBT-phobies permettent déjà d’aborder le sujet ! Du coup, j’ai le sentiment d’être passé de « j’ai un problème avec moi-même » à « les autres ont un problème avec moi / j’ai un problème avec les autres ».

Cependant, je reste particulièrement mal à l’aise dans la sphère publique, notamment à cause de mon cis-passing qui reste relativement aléatoire.

On parle de « (cis)passing » pour décrire le fait d’être vu par les autres comme un homme ou une femme « cisgenre », donc qui s’identifie à son genre déclaré à la naissance — l’inverse de transgenre, donc.

Par exemple, des hommes m’interpellent très souvent dans la rue ou les transports en commun pour me demander « T’es un homme ou une femme ? » — et en bonus « T’aimes les hommes ou les femmes ? ». Toute personne ayant déjà été harcelée dans la rue mesure le niveau d’oppressante bêtise de ce genre d’énergumènes.

Avec le temps, j’ai appris à être moins déstabilisé par ces micro-attaques parce que j’ai réussi à gagner en confiance en moi… Mais on ne s’y habitue vraiment jamais.

La transidentité VS l’administration

Une des grandes (la pire ?) difficultés quand on est trans, c’est de ne plus avoir de papiers concordants avec son apparence physique.

Petit point législation au 1er juin 2016 (source) :
« La condamnation de la France par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour avoir refusé un changement d’état civil (CEC) à Mme B. fait jurisprudence en 1992. Depuis, il est possible de changer la mention du sexe et du prénom sur son état civil par requête à un tribunal de grande instance (TGI) à condition de prouver l’irréversibilité des traitements médicaux engagés.

Dans les faits, la plupart des TGI demandent donc à ce que le/la concerné-e soit stérilisé-e (malgré une circulaire de 2010 qui supprimait le caractère obligatoire de la stérilité et de la chirurgie sexuelle).

Il faut fournir une liasse de papiers : des attestations de médecins (psychiatre(s), endocrinologue, chirurgien(s)), des ordonnances de médicaments et compte-rendu d’opérations, une biographie, des courriers adressés à son futur état civil, des attestations de proches, des photographies…

Les jugements rendus sont très inégalitaires suivant les TGI et les personnes demandeuses. Par conséquent, la procédure dure plus ou moins longtemps (s’il faut faire appel etc) et est plus ou moins coûteuse (entre 1 500€ et 4 000€ environ). »

Je n’aurais jamais imaginé que ce serait une telle galère de vivre sans papiers concordant avec son apparence. Je ne sais pas si les gens « en règle » se rendent compte à quelle fréquence on utilise nos pièces d’identité.

Comme Arya Stark, je peux faire une liste de mes ennemis… Alias toutes les personnes ou administrations qui m’ont demandé mes papiers récemment (transphobie de tous les jours bonjour).

À l’école, j’ai mis plus de 6 mois à faire changer mon prénom sur les listes d’appel, les diverses plateformes intranet accessibles à tous, ma carte d’étudiant… En attendant que ce soit fait, j’ai dû faire mon coming-out à tous mes professeurs, lors de chacun de nos premiers cours.

Prochainement, je vais devoir étudier pendant un semestre à l’étranger et je me retrouve à analyser les droits des personnes trans dans le monde, peu serein à l’idée de passer des frontières ou de me retrouver dans un pays dangereux…

Enfin, j’ai un sale pressentiment, l’impression que je vais bientôt me retrouver sur le marché du travail avec des papiers et des diplômes inutilisables. Et malgré cela, je sais que je suis chanceux car je n’ai pas été éprouvé par cette situation assez longtemps pour décrocher, contrairement à une majorité d’autres.

Aujourd’hui, lors des rendez-vous professionnels, j’essaie de m’arranger pour ne pas sortir ma carte d’identité à l’accueil. Et en entretien d’embauche, je ne dis qu’au moment de remplir les papiers que je suis trans pour ne pas effrayer les recruteurs.

Je vis aussi une grande histoire de haine avec les services publics : la CAF comme la Sécurité sociale ont refusé de changer quoi que ce soit à mes dossiers et j’évite au maximum de me faire livrer des colis à la Poste…

C’est la même galère avec la SNCF et les services de transport qui ont refusé de noter mon prénom sur mes cartes. Je dois donc m’expliquer à chaque fois avec les contrôleurs, dans des trains/bus/tram/métro souvent bondés.

Et ça continue avec ma banque qui a elle aussi refusé de changer quoi que ce soit à mes moyens de paiements, malgré une décision du Défenseur des droits qui devrait aider. De même avec le propriétaire de mon studio, mon opérateur téléphonique, l’EDF…

La transidentité VS le domaine médical

Je garde le meilleur pour la fin : les médecins, toutes spécialités confondues. J’évite au maximum de consulter car c’est à chaque fois le même cirque. Le moindre rhume, mal de ventre, la plus bénigne allergie se retrouve liée au fait que je suis trans.

Il faut ajouter à cela les pharmacien et pharmaciennes qui réfléchissent très (trop) souvent à mon genre à haute voix lorsque je présente ma carte vitale.

Le dentiste qui m’a demandé si je voulais devenir une femme ou un homme puis a disserté pendant tout mon détartrage sur le genre de mes dents. L’ophtalmologue, dernier cas en date, qui me demande « Je peux vous poser une question qui n’a rien à voir avec l’ophtalmologie ? » et… m’interroge, en souriant, sur la nature de mes organes génitaux.

Habitués à tout savoir et diagnostiquer, de très nombreux médecins semblent être en roue libre dès qu’ils sont confrontés à des cas plus rares et se servent de leur position d’autorité pour être les personnes les moins polies du monde. À chaque fois, je suis d’autant plus énervé, blessé et frustré que je suis trop surpris par leurs questions déplacées pour leur rabattre le caquet.

Par contraste, dès qu’un médecin m’appelle par mon prénom d’usage, je suis heureux comme s’il me faisait un énorme cadeau, alors que c’est juste… normal !

Finalement, les services RH des entreprises dans lesquelles j’ai travaillé font partie de mes seules expériences positives : mon prénom d’usage y a toujours été utilisé. Comme l’a dit le sage Baloo, « Il en faut peu pour être heureux »…

La transidentité VS la loi : acte de notoriété & autres joyeusetés

Pour faciliter mes démarches, j’ai donc fini par aller faire un « acte de notoriété ». C’est-à-dire débourser une centaine d’euros et traîner deux amis chez un notaire, afin qu’ils attestent que je suis « un homme, un vrai, qui se fait bien appeler Y et pas X au quotidien ».

Grâce à ces témoignages (et à cet argent !), le notaire m’a signé un beau papier. Ensuite, je suis allé supplier la mairie de prendre en compte cet acte (la mairie peut toujours refuser sans se justifier) et d’ajouter une ligne ridicule entre « nom » et « prénom » affichant « Dite : Nom / Prénom-masculin » sur ma carte d’identité.

Grâce à cette mention ridicule j’ai pu mettre à jour mon dossier chez quelques organismes (banque, SNCF, CROUS, partiellement à mon école). Mais honnêtement, c’est comme mettre du scotch sur une chaise de jardin cassée : à chaque fois que quelqu’un s’assoit dessus, elle s’affale de nouveau.

Si, au niveau personnel, je suis beaucoup plus heureux aujourd’hui, le contexte dans lequel je vis désormais me rend vraiment vulnérable.

J’ai l’impression d’être fiché, d’être un citoyen de seconde zone. Je ne vais plus voter (pas envie qu’on crie « Madame X » devant tous mes voisins) et je serais incapable d’entrer dans un commissariat pour faire une simple procuration ou pour déposer une plainte en cas de besoin.

Être trans sans pièce d’identité concordant à son genre, c’est être à la merci de toute personne susceptible de voir tes papiers. C’est constamment dépendre de la gentillesse et la tolérance d’autrui pour être simplement respecté. C’est constamment se justifier. C’est extrêmement fatigant et éprouvant.

La transphobie ordinaire de l’administration française

À côté de ça, je n’ai jamais pensé que je serais si isolé : il est difficile de demander et de recevoir du soutien. En tant que personne trans, je me retrouve confronté à de nombreuses galères (notamment administratives) qui sont difficile à partager en général, car les autres ne les connaissent pas et/ou parce que les partager signifierait m’outer.

Tu vois cette semaine pendant laquelle tu as dû régler un problème avec la CAF pour tes APL ? Chaque jour, il manquait un papier, ou l’établissement était fermé, ou la personne en charge de ton dossier n’était pas là, ou il fallait attendre un mot d’ordre au niveau national. Eh bien j’ai le sentiment de vivre cette semaine encore et encore.

Tu te rappelles cette semaine de vacances que tu as passée avec Tatie Raciste et Tonton Homophobe ? Lorsque je tends l’oreille dans la rue, que j’écoute la radio, que je regarde la télé, que je me balade sur les réseaux sociaux, que je suis l’actualité, j’ai le sentiment de vivre cette semaine encore et encore.

À lire aussi : Pourquoi la communauté trans se recueille-t-elle le 20 novembre à l’occasion du TDoR ?

Heureusement, de nombreux groupes (associations, centres LGBT, groupes sur les réseaux sociaux…) permettent aux personnes trans d’échanger de bons tuyaux sur tous les sujets, et notamment celui des médecins de confiance !

La transition au niveau médical

J’évoque ce sujet en dernier, et sommairement, car à mon avis, les corps des personnes trans sont déjà très réifiés et surmédiatisés par rapport à leur réelle importance et aux progrès qu’il reste à faire dans d’autres domaines (les droits tout ça).

Grosso modo, se lancer dans une transition médicale en France est compliqué. Il y a deux options principales.

  • Consulter dans une équipe « hospitalière » composée de psychologues, de psychiatres, d’endocrinologues, de chirurgiens…

L’avantage est que tous les frais sont pris en charge par la Sécurité Sociale.

L’inconvénient est qu’on ne choisit pas ses médecins (ce qui est donc contraire au principe fondamental du libre choix de son praticien et de son établissement de santé), que ces équipes imposent leur propre rythme (parfois un minimum de 2 ans de suivi psychiatrique avant toute action médicale) et leurs propres critères (d’âge, de ressources, de statut marital et parental, d’orientation sexuelle, de statut sérologique, de casier judiciaire, de non-prostitution…).

  • Aller dans le « privé » (comme moi !) en choisissant chaque médecin

L’avantage est la liberté.

L’inconvénient est la difficulté à trouver des médecins acceptant de prendre en charge les personnes trans, et des frais médicaux plus élevés (à moins d’obtenir l’ALD « Dysphorie de genre, transsexualisme » (bonne vanne) et d’avoir une TRÈS bonne mutuelle).

Il faut tout de même obtenir une attestation d’un psychiatre certifiant une « dysphorie de genre, transsexualisme » afin d’aller ensuite voir une endocrinologue, qui est habilitée à prescrire des hormones. De rares endocrinologues ne demandent pas d’attestation mais la plupart des chirurgiens l’exigent, et elle est encore capitale pour le CEC…

Donc à l’heure actuelle, mieux vaut s’astreindre à trouver un ou une psychiatre bien informée pour commencer. Enfin, les frais d’éventuelles interventions chirurgicales ne sont remboursés que sous des conditions qui varient selon les situations (attestations de plusieurs médecins, durée de suivi psychiatrique et de traitement hormonal…).

Sinon ce ne serait pas drôle…

Ma transition, moi et… les autres

Il est important de garder en tête que toutes les personnes trans sont différentes, donc toutes n’auront pas une même transition et ne se lanceront pas dans les mêmes changements (pronoms, vêtements, hormones, chirurgie(s)…). Et c’est valable pour tout : l’important, c’est d’être bien dans sa peau !

De la même façon, certaines personnes trans adorent éduquer et parler de leur transition (YouTube regorge de témoignages), alors que d’autres seront plus ou moins à l’aise suivant les sujets.

Pour ma part, je ne suis pas à l’aise lorsqu’il s’agit d’évoquer la partie physique de ma transition avec des amis cis. Mais je reste ouvert pour répondre aux questions générales sur le sujet et pour discuter de leur vision du genre.

Et à l’inverse, entre potes trans nous parlons beaucoup de notre rapport à notre corps, mais aussi de nos histoires de cul et nous arrivons à rire de la transphobie pour évacuer la pression. Pour moi, il est capital de savoir en rire pour garder la tête hors de l’eau.

Enfin, même si tout n’est pas parfait dans la représentation des personnes transgenres dans les médias français, je suis content que les nouvelles générations aient davantage d’opportunités de découvrir dès le plus jeune âge qu’ils/elles ne sont pas seuls ni seules et que tout est possible.

Il n’est pas nécessaire d’être sur le point de mourir pour réaliser qu’on vaut quelque chose et qu’on mérite de vivre sans se cacher. J’espère simplement que la population sera davantage éduquée sur le genre et qu’un changement d’état civil libre (déjudiciarisé et démédicalisé) sera possible dans les années à venir en France.

Adieu la galère et l’outing forcé, bonjour la liberté ! 

À lire aussi : Océan raconte sa transition dans un documentaire émouvant

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Les Commentaires

74
Avatar de Griffith
7 août 2023 à 16h08
Griffith
Très beau témoignage, et j'ai notamment trouvé intéressant le fait que la prise de conscience s'est faîte très progressivement, ainsi que le fait que la personne ne se reconnaissait pas dans les clichés de son genre.
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