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Vis ma vie de control freak

Jack Parker est control freak. Ce n’est pas une maladie, mais elle vit avec au quotidien, et elle se soigne.

— Initialement publié le 13 septembre 2012

Avant, je croyais qu’être control freak, c’était être maniaque, obsédé du rangement et de la propreté – alors quand on a commencé à me dire que j’en étais peut-être une, j’y ai pas cru.

J’aime vivre dans la crasse et la vaisselle sale, je m’épanouis dans les moisissures et ma douche sert tellement peu souvent qu’elle fait office de penderie (nan j’déconne, vous êtes malades). Mais disons que je suis plutôt du genre bordélique et pas vraiment portée sur le ménage.

Et puis j’ai grandi, je me suis posé les bonnes questions, et j’ai commencé à déceler un gros problème au niveau de la peur de la perte de contrôle. C’est très probablement l’origine de mon émétophobie, ça se voit au quotidien, dans mon comportement, dans ma façon de gérer mes relations aux autres, et plus personne ne peut l’ignorer. J’ai donc décidé de l’accepter, de l’assumer, et de m’y intéresser de plus près.

Tout d’abord, qu’est-ce qu’un-e control freak ?

Dans le jargon psychologique, dixit Wikipedia, “control freak” est un terme utilisé pour décrire une personne qui essaye par tous les moyens de contrôler tout ce qui se passe autour d’elle. Le terme a fait son apparition à la fin des années 60, époque à laquelle on insistait lourdement sur l’importance de faire ses trucs dans son coin, et de laisser les autres en faire de même.

Ça veut dire qu’un-e control freak essaye de contrôler les gens, leurs réactions, les évènements plus ou moins importants du quotidien, son apparence, l’apparence des choses et des gens qui l’entourent, bref, tout ce qui n’est généralement pas facile à contrôler.

Tout ce qui se déroule sous ses yeux se doit d’être contrôlé, dirigé, remanié, pour atteindre une perfection qui n’existe pas

. L’idée même de laisser les autres vivre leur vie sans rendre de compte à personne n’est pas envisageable.

Un-e control freak est forcément perfectionniste, mais c’est un perfectionnisme paralysant – rien n’est jamais comme il faudrait, les réponses qu’on nous donne ne sont jamais satisfaisantes, les bonnes choses ne suffisent jamais longtemps (il en faut toujours plus, il faut toujours mieux), notre environnement ne nous convient jamais longtemps et finalement, on arrive plus à se satisfaire de grand-chose sur le long terme.

On part du principe qu’avoir le contrôle sur tout et tout le monde, c’est réduire nos chances de souffrir d’au moins 98%. En contrôlant notre environnement, on augmente nos chances de voir nos plans se dérouler comme prévu (scénario pré-conçu au centimètre près pendant des jours et des nuits, dialogues et décors compris).

Du coup, on vit dans un état de stress et de déception permanent – parce que, les autres gardant malgré tout leur libre-arbitre, rien ne se passe jamais comme prévu. Alors on s’énerve, on fait des caprices, on fait bien chier tout le monde et surtout, on se sent excessivement mal. Mais on peut frôler la crise d’angoisse à cause d’un tout petit détail.

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La vie de control freak au quotidien

Exemple : au bureau, je suis assise à côté de Sophie-Pierre Pernaut qui laisse toujours son sac traîner par terre, entre nous, ce qui fait qu’il se retrouve bien souvent dans nos pieds ou sous les roues de nos chaises.

Et si elle semble s’en tamponner le coquillard comme de l’an 40, moi, ça me fait vriller. Je passe mes journées à lui dire “Sophie, ton sac !” comme si j’étais sa daronne, alors que c’est SON sac, et que si elle veut le laisser traîner, ça la regarde.

Moi, ça me fait péter une durite parce que non seulement il s’en retrouve forcément maltraité, mais en plus il entre en contact physique avec moi, contact que je n’ai ni prévu ni demandé, et je vois ça comme une intrusion insupportable. Et le jour où elle a eu le malheur de poser son sac et sa veste PAR TERRE à mes pieds, j’ai cru que j’allais faire une syncope.

Quand un plan ne se déroule pas comme prévu, quand une perte de contrôle quelconque se fait ressentir, on se retrouve complètement démuni. Si ma mère, mon mec ou ma voisine répond à une de mes questions par une réponse que je n’avais pas prévue, ou qui ne convient pas à ce que j’attendais, je me sens totalement impuissante, vulnérable, à vif – et ça se termine généralement dans les larmes et la mauvaise humeur.

Au quotidien, ça se manifeste environ 600 fois par jour. Mes surligneurs/feutres/stylos doivent être classés par couleur, dans leurs emballages respectifs. Si je fais une rature dans un carnet, je dois arracher la page et tout recommencer en respectant mes codes de couleur. Si mes cheveux sont dans un mauvais jour, je passerai la journée à m’en plaindre, au bord des larmes, et annulerai tous les plans de sortie que j’avais pour ne pas me montrer comme ça.

Si mon trait d’eyeliner est foiré, idem. Je ne supporte pas les lacets défaits, les étiquettes qui dépassent ou les fils qui pendouillent. Quand quelqu’un a une mèche qui dépasse, un cil sur la joue, un maquillage qui part en vrille ou quoi que ce soit d’autre qui ne colle pas, je ne vois plus que ça. Si j’arrive le matin au bureau et qu’un objet ne m’appartenant pas est posé sur le mien, je pique une crise et je panique.

Je fais des milliers et des milliers de listes, à longueur de temps. J’ai une dizaine de carnets qui servent tous à quelque chose de précis, de défini et qui ne doit pas être compromis. J’ai des codes de couleurs pour les stylos et les surligneurs qui diffèrent parfois selon les carnets pour être sûre de ne jamais rien mélanger.

Mes favoris sont organisés par catégorie précise, tout doit être à sa place. Je ne supporte rien de ce que je produis, rien n’est jamais assez bien pour moi. J’ai pas le permis, je connais rien au code de la route, mais je ne peux pas m’empêcher de faire des remarques au conducteur si je me sens en danger ou que j’ai l’impression qu’il ne respecte pas les règles (demandez à Fab, il adooore m’avoir dans sa voiture).

Chaque changement me perturbe, même sur moi – j’ai mis beaucoup de temps à m’habituer à mon tatouage par exemple, qui ne ressemble pas au résultat (impossible) que j’avais imaginé. Je ne supporte pas qu’on me fasse un reproche, une remarque ou une suggestion. Quand je regarde la télé, je dois avoir la télécommande.

Quand j’écoute de la musique, je dois choisir ce qu’on écoute et à quel volume. Je prends la mouche très vite, pour n’importe quoi. Tout dans mon apparence se doit d’être impeccable à longueur de temps (note : ça n’est jamais, jamais, jaaaamaaaais le cas). Et tout doit se faire quand je le dis, comme je le dis, immédiatement, sinon je perds patience et je ne suis plus capable de fonctionner correctement.

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Petit animal blessé cherche rôle de Maître de l’Univers

J’ai une peur panique de l’échec et du rejet. Je ne fais pas confiance à grand monde – encore moins à moi – et je suis toujours en train d’épier les moindres faits et gestes de ceux qui m’entourent pour vérifier que tout va bien.

Je lis beaucoup trop entre les lignes, je cogite et ressasse ce qu’on me dit à longueur de journée (souvent même des choses qu’on m’a dites il y a 7 ans et que je n’ai toujours pas réussi à digérer).

Alors la seule façon pour moi d’être rassurée, de me sentir en sécurité, c’est d’avoir l’impression de contrôler ce qui se passe. Ça n’arrive pratiquement jamais, et c’est pour ça que j’essaye de me faire à l’idée que se planter n’est pas nécessairement la pire chose qui puisse m’arriver, mais ça reste excessivement difficile à gérer au quotidien.

Il n’y a qu’à m’observer deux minutes pour constater que je ne suis jamais totalement à l’aise, je tremble toujours un peu et je ne me sens jamais en confiance. Alors je m’impose, je fais la débile, je crie beaucoup et je joue à la dure pour me donner une contenance, et pour donner l’illusion d’être quelqu’un de confiant et d’assuré. En attendant de le devenir vraiment, un jour.

En gros, je suis une sacrée putain de casse-couilles – mais hey, j’me soigne ! J’apprends à me trouver des ancrages positifs, à me sortir la tête de la crasse quand je sens que je pers un peu pieds, à me concentrer sur ce qui compte vraiment.

C’est une bataille de tous les jours, mais je me dis qu’à force d’essayer, je finirai bien par y arriver. Ça remonte à ma toute petite enfance, alors forcément, c’est chaud à éliminer complètement – mais j’en ai pris conscience et j’ai envie de m’en débarrasser, alors tout va bien se passer. Et en attendant, je continuerai à faire chier mes collègues qui adoooorent quand je fais la gueule ou que je prends un air agacé pour la plus petite connerie du monde.

À lire aussi : Téléphoner, c’est votre phobie ? Vous êtes loin d’être seule !


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

Les Commentaires

28
Avatar de Moonforest
14 août 2017 à 21h08
Moonforest
je me reconnais pas mal dans ton témoignage, c'est dingue je ne savais pas que ça avait un nom :o
J'ai toujours besoin de tout contrôler à tel point que quand ce n'est pas le cas je fais des crises d'angoisse. J'aimerai tellement lâcher prise de temps en temps. Ça me pourrie la vie
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