« Soit je bouffe les autres, soit je me fais bouffer. »
C’est sur ce dilemme que s’ouvre l’échange entre des harceleurs et des victimes de harcèlement scolaire que le vidéaste HugoDécrypte a provoqué dans son format Hexagone.
HugoDécrypte met face-à-face harceleurs et harcelés
Dans Hexagone, 6 abonnés d’Hugo sont invités à témoigner de modes de vie opposés.
Dans ses trois premiers épisodes, des jeunes urbains ont échangé avec des jeunes ruraux, des végétariens ou véganes ont débattu avec des omnivores, et des addicts aux réseaux ont confronté leur vision à celle de personnes déconnectées.
Le sujet de ce 4ème épisode est un peu plus sensible puisqu’il s’attaque à un sujet qui concerne aujourd’hui un enfant ou ado sur dix : le harcèlement scolaire.
Avant que tu ne cliques sur cette vidéo, je te préviens : elle contient des témoignages difficiles et des descriptions de situations de harcèlement scolaire.
Le harcèlement, un phénomène complexe
De multiples problématiques ressortent de ces 18 minutes d’échanges, grâce à 3 questions morales assez profondes :
- Peut-on participer au harcèlement d’une personne sans s’en rendre compte ?
- Être témoin sans stopper un harcèlement, est-ce y participer ?
- L’École a-t-elle un rôle à jouer ?
Si le harcèlement scolaire a toujours existé, il prend aujourd’hui des formes nouvelles qui dépassent les frontières des collèges et lycées.
Une des témoins raconte par exemple son cyberharcèlement sur Whatsapp, et une autre explique que des faux profils ont été créés sur des sites pornos en utilisant son identité.
Quelques années après les faits, le traumatisme reste tenace. Il se perçoit dans la voix des anciennes victimes et dans le choix minutieux des mots des anciens harceleurs ou harceleuses.
Le harcèlement scolaire, un problème encore mal adressé
Comme souvent dans la vie, tout n’est pas tout noir ni tout blanc. Alice raconte par exemple qu’ancienne harcelée, elle est devenue harceleuse pour se fondre dans la masse et ne pas « redevenir un mouton ».
À travers ces échanges, on comprend aussi plus facilement pourquoi certaines situations peuvent déborder.
Alors que certains harceleurs ne pensent pas faire de mal en « s’amusant », d’autres assistent impuissants à des violences dont
ils redoutent qu’elles se retournent contre eux s’ils venaient à réagir.
Du côté des établissements scolaires, le constat est accablant.
« J’en veux énormément à l’Éducation nationale. » (Wilfried)
Les victimes qui interviennent dans cette vidéo, en plus de se sentir incomprises, se sont vues punies et culpabilisées…
Face à elles, des administrations qui préféraient couvrir les faits pour éviter que les parents ne s’affolent.
Comme dans des cas de violences sexuelles dans l’enceinte des établissements, la réputation des écoles passe parfois avant le bien-être des victimes de ces violences.
Et les conséquences vont bien au-delà d’une baisse des résultats scolaires.
De la phobie scolaire au difficile chemin vers la confiance en soi, en passant par l’impossibilité de nouer des amitiés, en allant parfois jusqu’à la tentative de suicide, le sujet du harcèlement scolaire est grave.
Mais il souffre encore d’une prise en charge variable.
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Pourquoi la discussion autour du harcèlement scolaire est nécessaire
Donner la parole a des personnes qui ont harcelé, c’est loin d’être une évidence.
D’ailleurs, notre démarche avait provoqué beaucoup de débat en 2013, quand des harceleuses avaient témoigné sur madmoiZelle.
Donner la parole aux harceleurs et harceleuses ne revient pas à légitimer les actes passés ni à les pardonner. Le pardon appartient aux victimes et à elles seules.
En revanche, mettre en lumière les raisons de ces comportements permet deux choses.
D’une part, identifier les raisons qui poussent des groupes de personnes à harceler est un moyen de prévenir ce phénomène dans le futur.
Une abonnée d’Hugo raconte ainsi que dans son ancien collège, des ateliers sont désormais programmés dès la sixième pour enrayer les dynamiques de harcèlement avant même qu’elles ne prennent racine.
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D’autre part, comprendre les pressions sociales qui poussent des ados (ou des adultes, remember la Ligue du LOL) à descendre leurs congénères permet selon moi de replacer l’empathie au bon niveau.
Il en faut du courage pour venir témoigner devant des caméras des violences que l’on a subi, il en faut du courage pour réussir à sortir de cette position de victime.
Les témoins d’Hugo peuvent être fiers du chemin qu’ils ont parcouru et de la force qui les a poussés, malgré tout, à venir raconter leurs histoires, si profondément ancrées dans leur vie et dans leur personnalité.
Mais il faut aussi du courage, bien qu’il soit différent, pour avouer devant des milliers d’internautes qu’on a sacrément merdé, qu’on a fait du mal à quelqu’un, plus ou moins consciemment.
Qu’à un moment de sa vie, on a fait preuve de cruauté parce qu’on craignait l’isolement, on avait peur de ne pas avoir d’amis.
De l’empathie, de la compassion et de la nuance, c’est ce qui ressort dans ces échanges capturés par Hugo. Et à mon sens, tout le monde en sort grandi.
Un peu de nuance dans ce monde de brutes, ça ne fait pas de mal. Parole d’ancienne harcelée.
- Le site du gouvernement pour les victimes, témoins, parents et professionnels de l’éducation : Non au harcèlement
- Un numéro vert à contacter : 3020
- Pour signaler un cyberharcèlement : Netecoute
Les Commentaires
Edit: quand je dis "punir les coupables", je parle aussi des activités en ligne, trop d'établissements font l'impasse dessus parce que "gna gna gna c'est pas nos affaires". Sauf que si en fait, ça vient de leur établissement, donc il faut qu'ils prennent des mesures pour que le cyber harcèlement stoppe.