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Des millions de vues pour cette vidéo virale sur la détresse étudiante… et après ?

Dans une vidéo intitulée Les meilleures années de nos vies, le vidéaste Gaspard G s’inspire de témoignages pour interpeller sur la situation des étudiants depuis le début de la pandémie. Mais la viralité ne suffira pas à changer les choses.

« Si on a pas d’espoir, pas de perspectives d’avenir quand on a 20 ans, alors que nous reste-t-il ? »

Alors que la détresse étudiante s’aggrave et que les réponses gouvernementales peinent à donner des solutions pertinentes à ces enjeux, les témoignages affluent sur les réseaux sociaux et dans les médias. La jeunesse française y raconte la précarité, le décrochage scolaire et l’isolement qui durent depuis le début de la crise sanitaire, il y a maintenant bientôt un an.

Les meilleures années de nos vies, un relai pour les témoignages d’étudiants en difficulté

De ces témoignages, Gaspard Guermonprez, 23 ans, a décidé de se faire le relai dans une vidéo intitulée Les meilleures années de nos vies.

Sur Instagram, le jeune diplômé et vidéaste s’est inspiré des messages de détresse qu’il lit et reçoit pour mettre en lumière le mal-être des étudiants depuis 2020. Il y interpelle sur la dégradation de la santé mentale des jeunes, la solitude, le stress économique créés par la pandémie et la réponse politique qui lui été donnée. Il pointe du doigt l’hypocrisie de l’envolée du Président quand il regrettait « C’est dur d’avoir 20 ans en 2020 »… pour que la jeunesse se voie ensuite accusée par le gouvernement de la propagation du virus.

En quelques jours, son message a été vu presque 2 millions de fois.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Une publication partagée par Gaspard Guermonprez (@gaspard_g)

Gaspard a accepté de répondre à nos questions, et nous a raconté ce qui lui a inspiré cette vidéo.

Son travail de vidéaste et de créateur de contenu tournant principalement autour des grands enjeux qui touchent sa génération, il était assez naturel pour lui de prendre la parole sur ce que traversent les étudiants et étudiantes en ce moment. Mais ce qui a déclenché sa décision, c’est avant tout d’être confronté aux nombreux témoignages envoyés par sa communauté.

 « Diplômé depuis décembre, j’étais encore étudiant pendant l’année 2020 et les deux premiers confinements. Sur les réseaux sociaux, dans mes stories, j’ai partagé mon vécu : j’ai exprimé mon mal-être personnel, mon isolement. Je me filmais en disant à mon audience, “Aujourd’hui, ça ne va pas de ouf.”

Assez naturellement, les gens me répondaient en DM, et certains témoignages m’ont énormément marqué : ils mettaient en avant des pensées suicidaires assez lourdes, ils me racontaient à moi, un parfait inconnu, un mal-être si profond que ça en devenait une question de vie ou de mort. Face à ça, je me suis dit qu’il fallait que j’en parle, que je relaie ces voix. »

Interpeller et faire comprendre la souffrance étudiante

Bien conscient que son discours n’est qu’un relai parmi d’autres, Gaspard n’a pas la prétention de représenter tous les jeunes, ou de s’en faire le porte-parole.

 « À aucun moment je n’ai envie d’être un porte-parole ou un représentant de la jeunesse. Je voulais juste utiliser mon audience, même si elle était réduite, pour faire en sorte que ces vécus aient un peu d’écho, qu’il y ait une forme de reconnaissance de ce que vivent les étudiants aujourd’hui.

Au final, j’ai touché plus que les gens qui me suivaient car la vidéo a été énormément partagée : c’est positif, ce message a été porté plus loin. »

Face à l’urgence de la situation, les réseaux sociaux, souvent utilisés pour mettre sa vie en scène de la manière la plus glorieuse possible, deviennent aujourd’hui un lieu de vulnérabilité. Gaspard souligne la force des étudiants qui témoignent, et qui mettent en lumière leur souffrance dans l’espoir d’être entendus.

 « Je ne suis vraiment pas le premier à en parler. Mais si tous ensemble, avec toutes les personnes qui ont écrit des lettres, qui ont fait des actions pour faire entendre cette cause étudiante, on a pu servir à éveiller les consciences et à dire aux étudiants “vous n’êtes pas seuls, et nous allons faire en sorte que nos aînés, les médias et les politiques nous comprennent”, on aura déjà fait un grand pas en avant. »

Sur le succès de sa vidéo, il reste sceptique : « C’est une vidéo virale, elle sera vite oubliée ». Il espère simplement qu’elle aura eu un écho utile, en mettant ce message en lumière.

À l’heure actuelle, il espère pouvoir approfondir le sujet et continuer à donner la parole aux étudiants en leur tendant le micro dans sa prochaine vidéo.

Si vous êtes étudiant ou étudiante et que vous souhaitez participer à la prochaine vidéo de Gaspard G., écrivez-lui à durdavoir20ansen2020[at]gmail.com !

Face à la détresse étudiante, quelles réponses politiques concrètes ?

Pour Paola, étudiante de première année en Master de Journalisme Culturel, la portée médiatique de cette vidéo est positive, mais il est capital d’y associer des actions politiques.

« Ce jeune homme utilise sa visibilité pour parler d’un sujet comme celui-ci, et c’est positif. En ce moment, les témoignages succèdent, c’est important !

Son texte est bien écrit et porte une réalité. La détresse des étudiantes et étudiants aujourd’hui est générale, et sans précédent.

Comme Gaspard, je me sens privilégiée d’avoir pu commencer mes études dans un cadre sain, normal. Je connais beaucoup de personnes qui sont actuellement dans des situations extrêmement précaires. Celles et ceux qui vivent dans un 9m², celles et ceux qui ont perdu leur job et peinent à manger, celles et ceux qui décrochent…

Ce genre de vidéo a un côté sensationnel. Ça a tendance à invisibiliser les étudiants et étudiantes en réelle difficulté : le grand public voit la vidéo, c’est bien écrit, les gens likent mais n’agissent pas derrière. L’important c’est d’interpeller le gouvernement : envoyer des lettres, descendre dans la rue. Ce type de contenu viral, ça fonctionne aussi, mais pas seul ! »

C’est aussi l’avis d’Aïcha, étudiante en prépa commerce. Elle rejoint Gaspard sur le fond, mais interpelle sur la réalité concrète des étudiants en difficultés :

« Pour moi, le souci n’est pas tant de “perdre les meilleures années de notre vie” : ça c’est la faute du virus et personne n’y peut rien. Le souci, c’est qu’on n’est pas aidés dans cette situation. Les administrations nous abandonnent, et on a peur que derrière, les entreprises nous reprochent un manque d’expériences qu’on n’a pas eu l’opportunité d’ engranger puisqu’on était coincés chez nous.

On n’a pas eu de stages, pas d’alternance, pas de semestre à l’étranger — tout ça, c’est prévu dans ma filière normalement. C’est censé m’aider à préciser mon projet professionnel, mais rien n’est prévu pour remplacer ces éléments. Et moi, j’ai bâti tout mon parcours scolaire sur ces opportunités…

La crise économique, les problèmes d’emploi, ce sera pour nous, la jeunesse. Quand on sera diplômés, ce sera la merde.

En gros, je trouve que Gaspard dit des choses vraies : on va perdre des choses, nous les jeunes, comme tout le monde, à cause de la pandémie. Mais j’aimerais appeler à de vraies mesures pour les étudiants et étudiantes : il y en a qui n’ont pas d’ordinateur, pas Internet. Comment sont-ils censés faire ?

Il y a eu des avancées : les psy, les cours en présentiel quand c’est possible… mais tout n’est pas réglé.

S’il y a bien une chose avec laquelle je suis à 100% d’accord avec Gaspard, c’est d’avoir mal pris ce “C’est dur d’avoir 20 ans en 2020” de Macron. J’ai trouvé ça hypocrite, je n’ai pas cru à cette compassion.

Parce que derrière, on a par exemple le couvre-feu à 18h, qui empêche des étudiants de travailler à la bibliothèque universitaire : on est dans une situation où des élèves doivent choisir entre pouvoir réviser à la B.U. et faire leurs courses. Je connais un étudiant qui vit avec ses petits frères et sœurs, doit les aider… Clairement il ne peut pas réviser chez lui. Et maintenant, il ne peut aller à la B.U. que deux heures par jour, puisqu’il doit partir plus tôt pour arriver à faire des courses avant le couvre-feu.

La compassion du gouvernement, elle a bon dos. Et encore, là on a le récit de Gaspard, yeux bleus, peau blanche, diplômé d’HEC Montréal… Il va beaucoup moins galérer que Hamid qui vit en banlieue et étudie dans une fac mal cotée. »

Les meilleures années de nos vies permet ainsi de sensibiliser, et de partager des vécus qui demandent à être relayés. Toutefois, les étudiantes et étudiants sont clairs : ce dont ils ont besoin, c’est d’aide, de moyens, et de réponses politiques fortes.

Pour cela, plusieurs syndicats étudiants et enseignants appellent aujourd’hui à la grève, et à manifester à Paris et partout en France.

À lire aussi : Voici les mesures d’aides aux jeunes précaires annoncées par le gouvernement


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Les Commentaires

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Avatar de ChochanaRose
26 janvier 2021 à 22h01
ChochanaRose
Étudiante en master, je ne peux que constater la détresse émotionnelle des étudiants. J'ai des camarades de classe qui prennent des anti-dépresseurs, qui ont des envies suicidaires et qui décrochent. Des amies à moi en Licence ne supporte plus d'être dans 9 mètres carrés. D'autres qui galèrent financièrement car pas de petits tafs. Certains doivent arrêter leurs études faute d'argent. Les cours sont inadaptés, on fait du 8h30-17h30 quasiment non stop. On a pas le temps de sortir prendre l'air après les cours sauf si on se dépêche. Impossible de faire du sport en extérieur. J'ai beaucoup de copines qui commencent à avoir des troubles alimentaires, qui mangent non stop pour calmer leurs angoisses. Moi c'est l'inverse, je ne mange plus qu'un repas par jour. Pas par manque de moyen mais juste parce que je n'en ai plus envie. Voilà où en est. Et dans l'indifférence générale.

On a essayé d'en parler avec notre responsable pédagogique. Et elle n'en a rien à faire. De toute façon, sa place, elle, elle l'a. Elle refuse d'adapter les modalités pour les examens ou d'adapter les cours en ligne. Quand on en parler à des personnes plus âgées, on nous fait comprendre qu'ils s'en foutent. On m'a quand même déjà sorti que les gens pendant la première guerre mondiale ont vécu pire. Amusant d'entendre ça par quelqu'un qui a pu profiter de sa jeunesse et qui n'a pas connu la guerre. Toujours à comparer ce qui n'est pas comparable.

Les étudiants sont les grands oubliés depuis le début de la pandémie. Cela fait presque un an que je n'ai pas mis les pieds à la fac. Je connais à peine ma promo. J'ai changé de ville et je ne connais personne. Je suis isolée, seule et enfermée dans mon appartement et quasiment toute la journée devant mon ordinateur. Le soir je finis trop tard pour pouvoir sortir. Mais visiblement, je dois fermer ma gueule parce je suis étudiante et qu'on s'en fout. Je ne compte pas. Les étudiants ne comptent pas. Ce n'est pas grave si on se gave d'anti-dépresseurs pour tenir. Ce n'est pas grave que des étudiants se défestrent puisqu'on est "une génération de fragile et qu'on doit s'adapter un peu".
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