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Déclic

Damiana, 43 ans : « Je suis devenue féministe sans m’en apercevoir »

Dans Déclic, le nouveau format de Madmoizelle, des personnes nous racontent leur prise de conscience féministe et ce que cela a changé pour elles. Aujourd’hui, Damiana raconte comment le féminisme s’est imposé naturellement à elle, alors qu’elle grandissait dans un pays « du bloc de l’Est », marqué par son histoire politique.
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  • Prénom : Damiana
  • Âge : 43 ans
  • Occupation : Artiste interprète, flûtiste, chanteuse et animatrice radio
  • Lieu de vie : Paris

Comment décririez-vous votre rapport au féminisme ?

Je pense que mon rapport au féminisme est caractérisé par une évolution inconsciente : au fil des années, je me suis affirmée comme féministe sans pour autant m’en apercevoir. J’ai été confrontée à la violence dès mon plus jeune âge, au sein du foyer et dehors… Aujourd’hui, je ne supporte plus de voir une femme soumise et dominée. Qu’on lève une main sur une femme me révolte.

Dans quel contexte avez-vous grandi ?

J’ai grandi dans un pays du bloc de l’Est. Je suis fille unique et on m’a toujours dit que je devais être plus forte que les garçons. J’ai été élevée un peu comme un « garçon manqué », à faire énormément de sport, à avoir une discipline de travail rigoureuse. Les femmes de ma famille ont longtemps navigué entre le féminisme et la soumission… Nous vivions sous une dictature communiste, dans un contexte où les gens avaient peur de faire trop de bruit, avec des services de renseignement qui gardaient des dossiers sur chaque citoyen.

Les femmes de l’est sont braves, elles ont du caractère, mais elles se sont effacées par peur du régime. Au sein du cocon familial, le divorce était extrêmement mal vu, et beaucoup de femmes supportaient la violence de leurs conjoints pour ne pas détruire leur famille.

À quel âge avez-vous découvert le féminisme ?

J’ai eu très tôt affaire au machisme, que ça soit dans la cour de récré où à l’école de musique, où j’apprenais la flûte traversière. J’ai subi beaucoup de harcèlement scolaire, de la part des garçons. Cela s’est transformé en violence, de mes 6 à 11 ans. Au bout d’un moment, j’en ai eu marre et je me suis défendue comme je pouvais. J’étais très sportive, donc je me suis mise à rendre les coups. Je ne supportais pas l’injustice, je défendais toutes les filles rondelettes ou à lunettes timides qui se faisaient embêter sans arrêt. Je jouais les justicières, défendant la cause des plus faibles.

À l’époque, porter plainte ne se faisait pas. On ne se plaignait pas, on ne bronchait pas, on subissait. Les mœurs ont sacrément changé, on ne vit plus dans cette époque du silence et du non-dit , il y a un réel éveil des consciences.

Ma première « rencontre » consciente avec le féminisme a peut-être été une télénovela brésilienne dont je me souviens : cela s’appelait L’esclave Isaura et ça montrait la maltraitance infligée à une jeune femme gentille et douce. Ça me révoltait.

Comment le féminisme infuse-t-il votre vie aujourd’hui ?

Je suis très sensible aux violences faites aux femmes. Je l’ai vécu, dans ma famille et dans ma vie affective. Ça m’a poussé à développer une certaine force de caractère, à être combative, mais ça fait aussi que je suis souvent tombée sur des personnes violentes. Comme si, dans le couple, on attirait forcément ce dont on avait souffert le plus. Malheureusement, je crois qu’on n’échappe pas au schéma initial.

Ma première histoire a été avec un garçon violent. J’ai mis du temps à comprendre que dès la première gifle, il faut partir et ne pas attendre une amélioration qui n’arrivera jamais. J’ai d’ailleurs aidé plusieurs femmes à s’en sortir et à accepter la solitude au détriment du couple violent dans lequel elles évoluaient.

J’ai également créé une émission de radio sur l’ésotérisme, et dans les prochains numéros, j’attends la venue de figures féministes qui prônent l’égalité des sexes.  Je suis souvent amenée à participer à des colloques sur le sujet et participe à des concerts de musique féminins. 

Avez-vous laissé de côté certaines habitudes, défait certaines croyances, ou posé de nouvelles limites ? 

Je ne laisse plus les hommes m’aborder facilement comme à une époque. Je me méfie davantage, j’ai pris mes distances…

Je ne laisse plus ceux qui se croient plus forts asseoir leur domination. Quand j’avais 18 ans, j’ai été confrontée à un professeur qui se pensait tout-puissant. Il a voulu m’écraser en me diffamant à propos d’une chose extrêmement grave qu’il avait commise. À l’époque, j’étais trop jeune pour être consciente de la gravité de la situation. Mais aujourd’hui, je ne laisserais jamais passer une chose pareille.

Comment votre entourage a-t-il accueilli votre déclic ?

Je constate que mon point de vue féministe est encore souvent source de friction. Les mœurs ne sont encore pas tout à fait en faveur des femmes, je me bats pour cela tous les jours, même dans la vie quotidienne.

Avez-vous l’impression d’être arrivée au bout de votre éveil féministe ?

Non. Nous changeons constamment. On a des opinions qui peuvent évoluer ou changer radicalement tout simplement car on aborde différemment le sujet ou qu’on côtoie une personne qui se trouve dans une certaine situation.  

Je pense que nos idées évoluent et avancent avec le temps. Donc si mon féminisme a toujours été là, je pense que ma prise de conscience va continuer à évoluer ! 

Violences conjugales : les ressources

Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

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