Un pas de plus vers la constitutionnalisation de l’IVG. Mardi 24 janvier dans la soirée, les députés réunis dans l’hémicycle ont largement approuvé le projet de révision constitutionnelle qui préserverait la « liberté garantie » des femmes d’accéder à l’avortement.
Un nouveau vote solennel du texte est prévu mardi 30 janvier, avant que le texte ne fasse la navette parlementaire jusqu’au Sénat.
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Des débats dévoyés par la droite
Les débats ont été âpres dans l’hémicycle entre la majorité et la gauche, qui soutiennent le texte et les élus républicains.
« L’IVG n’est pas une liberté comme les autres, car elle permet aux femmes de décider de leur avenir », a déclaré le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti en ouverture de la séance.
À l’issue des débats, 4 élus LR, 8 RN et une non-inscrite se sont opposés au texte de révision constitutionnelle, qui a finalement été approuvé par 99 voix.
Le député Aurélien Pradié (LR), pour sa part, a bien voté pour l’article unique du projet de loi constitutionnelle. Mais cela ne l’a pas empêché d’accuser les élues de gauche d’être de « mauvaises » féministes desservant la cause des femmes.
Alors qu’il avait la parole, l’élu du Lot a commencé à saluer le travail de Simone Veil qui avait, par sa parole, « réussi à convaincre tout le monde, au-delà même des consciences, des convictions et parfois même des croyances ». Avant de poursuivre :
« Les femmes ont eu de la chance d’avoir Simone Veil pour porter leur parole et leurs droits. Les femmes ont aujourd’hui sûrement beaucoup de chance d’avoir ici, dans cet hémicycle, quels que soient les bancs, des femmes et des hommes pour porter leur parole. Je ne suis pas sûr que le féminisme – le vrai – ait une chance incroyable à avoir comme porte-parole certaines d’entre vous qui ne cessent, depuis des heures, d’hystériser les débats politiques ici. Simone Veil avait fait exactement l’inverse, et c’est pour cela d’ailleurs, elle, cette femme, qu’elle avait réussi. »
Aurélien Pradié
Évidemment, la sortie du député a suscité de vives réactions, à commencer par celle de la tenante du perchoir, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, qui a accusé Aurélien Pradié, par ses propos « de mettre de l’huile sur le feu ». « Ça n’est franchement pas digne de cette Assemblée et de nos débats ».
« Scandaleux » selon Rousseau, « honteux » pour Autain
La députée LFI Clémentine Autain a elle aussi dénoncé le discours d’Aurélien Pradié.
« Que le jour où nous avons un débat sur l’avortement, un élu sur les bancs de la droite, se permette d’accoler le mot ‘hystériser’ aux féministes qui ont défendu le droit à l’avortement, c’est honteux. Et visiblement, pour ce qui est de l’histoire, et de l’histoire des femmes, vous n’avez pas l’air d’être très au courant. Oui, nous pouvons rendre hommage à Simone Veil qui, dans cet hémicycle, a affronté vos prédécesseurs sur vos bancs, qui ont été absolument ignobles en 1975. Oui, elle a été courageuse. Mais la loi de 1975, nous la devons d’abord, et avant tout, aux femmes féministes, aux millions de femmes qui étaient dans la rue, aux 343 femmes qui ont signé un appel qui disaient qu’elles se mettaient hors-la-loi. »
Sandrine Rousseau a elle aussi fait un rappel au règlement suite à l’intervention du député LR :
« Je rappelle juste l’étymologie du mot ‘hystérie’. C’est Hippocrate qui le premier, utilise ce terme. Et dans la médecine, l’hystérisation, c’est quand l’utérus migrait à l’intérieur du corps parce qu’il n’était pas satisfait et qu’il montait au cerveau et le remplaçait dans la tête des femmes. […] Et précisément quand on est en train de parler d’IVG, c’est scandaleux d’utiliser ce terme. »
Adopté par les députés, le texte doit désormais être approuvé dans les mêmes termes au Sénat, ce qui est loin d’être acquis d’avance puisque la chambre haute est dominée par la droite et le centre.
En cas d’adoption du texte par le Sénat, un Congrès réunissant les parlementaires à Versailles serait convoqué le 5 mars, pour une adoption définitive quelques jours avant la Journée internationale des droits des femmes. L’adoption nécessitera que le texte recueille 3/5e des voix.
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