Publié initialement le 22 décembre 2014
Il était une fois Cindy Sander…
En 2008, Cindy Sander débarque, toute parée de strass, faux ongles XXL et crinière peroxydée crêpée au vent pour sa première grande apparition télé au casting de Nouvelle Star. Cindy Sander chante avec cœur et conviction, on sent qu’elle y croit. Malheureusement, elle devient rapidement la risée de la télé et du Web.
Retour sur son parcours dans une vidéo bien kitsch avec une voix off garantie 100% relou.
Toute considération artistique mise à part, Cindy Sander dégage une telle candeur : elle y croit, on sent qu’elle est sincèrement gentille. Révoltée par les propos tenus par les juges de la Nouvelle Star, elle assure interview sur interview et défend son rêve. À l’époque, Yann Barthès du Petit Journal ironisait même en organisant un comité de soutien à Cindy Sander…
Caroline Parlanti du Nouvel Obs illustre très bien ce sentiment dans son article Cindy Sander star de Thierry Mugler : la revanche du papillon de lumière, une belle leçon :
« Ce qui était cruel, avec Cindy Sander, c’est qu’on avait l’impression, à chacune de ses apparitions, qu’on était dans Le Dîner de cons. C’était la « beauf provinciale » complètement à côté de la plaque qui amusait la galerie. Plus elle croyait en son talent, plus on se moquait d’elle. »
C’est peut-être cette candeur qui lui a permis de survivre à cette avalanche de critiques : avec le recul et les enseignements de ces dernières années concernant ces « stars » de la télé-réalité, moquées de toutes parts, qui le vivent très mal, il est bon de se réjouir que Cindy Sander n’ait pas plus mal fini.
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Après avoir eu sa propre émission de télé-réalité, Bienvenue chez les Sander (dont le seul épisode que j’ai regardé pour le besoin de cet article m’a peu convaincue), et l’échec de son passage éclair dans Les anges de la télé-réalité pour tenter de réaliser son rêve aux zétazunis, on aurait pu penser que Cindy Sander était finie. Mais c’était sans compter sur cette sacrée coquine qu’est la vie.
La nouvelle chance de Cindy Sander
Le couturier Thierry Mugler (devenu entre-temps Manfred Thierry Mugler, producteur de spectacles) la repère en 2010 et lui propose un deal en or : Cindy Sander va bosser comme une folle, prendre des cours de chant et abandonner faux ongles et crêpage de bouclettes pour devenir la soliste de sa revue/super-production rétro-futuriste The Wyld, à l’affiche du très célèbre Friedrichstadt Palast à Berlin.
Elle-même croit à un canular, mais la voilà quatre ans plus tard en vedette d’un show à 10 millions d’euros, qui rencontre un gros succès outre-Rhin. Inconnue en Allemagne, elle a pu y faire ses preuves et réussit maintenant là où personne ne l’imaginait !
D’esthéticienne dans une onglerie à phénomène télévisuel puis meneuse de revue, voici le fabuleux destin de Cindy Sander, raconté dans le Supplément du 21 décembre 2014 sur Canal+ — avec une interview d’elle sur le plateau de l’émission à la fin.
Je suis à la fois surprise, interloquée et dubitative après avoir vu ce reportage.
Impressionnée par la transformation de Cindy Sander — au niveau physique, mais aussi dans son attitude. Adieu, les mimiques trop appuyées et le look 100% strass : elle s’exprime avec fermeté et lucidité sur son passé, n’hésitant pas à instiller une légère pointe d’esprit de revanche dans son discours.
Cindy Sander, chenille devenue papillon ?
Cindy Sander se trouve belle comme une Barbie , et quelque chose me dérange un peu dans ce côté « relooking extrême » : c’est un drôle de Happy End qu’on nous donne là. Le ton un peu robotique de son discours à 3:10 (« j’ai été muglerisée ») m’a mise légèrement mal à l’aise, même s’il semble assez logique qu’elle soit très reconnaissante envers celui qu’elle désigne comme son papa et son Pygmalion.
Je ne sais pas quoi penser de certains passages du reportage. Changer de look, c’est une chose. Mais changer radicalement d’apparence physique, c’est quelque part nier qu’il est possible de réussir sans correspondre à un idéal, aux canons de beauté. Cela voudrait dire que Cindy Sander taille 46, avec strass et faux ongles, on en veut pas, mais qu’en 38, les cheveux teints et la frange bien taillée, elle peut potentiellement devenir une grande artiste ? Se transformer du point de vue de la musculature, pour la danse par exemple, est tout à fait logique, mais bien des critiques se focalisaient sur l’apparence de Cindy Sander, alors que son évolution artistique est tout aussi remarquable.
Cela dit, on peut aussi voir cette transformation comme une partie de cette évolution artistique, une amélioration de la Cindy Sander découverte il y a quelques années sur le plateau de Nouvelle Star. Elle a abandonné le gloss et les papillons pour se métamorphoser en artiste de cabaret. C’est l’éternelle histoire du vilain petit canard, devenu cygne grâce à un relooking.
Si Cindy Sander est heureuse de cette transformation, alors tant mieux. Il faut juste espérer que cela envoie un message positif, plutôt que de prouver qu’il faut changer pour être aimé : à l’époque, avec ses kilos et ses centimètres d’ongles en plus, elle y croyait déjà !
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Même si le côté « tout le monde a droit à sa chance, même cette esthéticienne de Moselle devenue risée du Web parce qu’elle croyait en son étoile » fait un peu gnangnan, moi j’ai envie d’y croire. Je veux croire qu’on peut tomber sur quelqu’un d’un peu fou qui fait un pari, celui de pousser une personne anonyme ou presque et de voir en elle ce que personne n’a pris la peine de chercher.
Haters gonna hate, hate, hate, hate, hate…
Cindy Sander n’a rien de snob, même après sa transformation en meneuse de revue à Berlin : elle s’émerveille de la chance qu’on lui a donnée, son idole est Céline Dion, et elle a rencontré une étoile. Elle pourrait faire un gros doigt d’honneur à tout le monde, mais elle préfère la revanche tempérée.
Pour le coup, elle pourrait légitimement parader face à ses anciens détracteurs et régler ses comptes avec ceux qui se moquaient de son physique, de ses performances, du côté amateur de ses vidéos, de leur aspect un peu surjoué. S’il y a une artiste qui n’était pas donnée gagnante pour remplir les salles et convaincre la critique, c’est bien Cindy Sander.
Elle ne semble pas pleine de rancœur, loin de là, et c’est tout à fait louable. Mais certains ont du mal à réprimer un sourire narquois face à cette réussite aussi inattendue que surprenante. C’est le cas d’André Manoukian et Sinclair, qui la taclent quand même entre deux phrases de félicitations.
Qu’elle soit vedette de cabaret ou non, l‘important c’est que Cindy Sander soit heureuse, au fond. Elle pourrait être esthéticienne en Moselle, remplir la salle des fêtes de son village et y trouver son compte. En restant simple et plus reconnaissante qu’haineuse, elle gagne le respect, assume tout ce qu’elle a été, et prouve qu’à force de travail et de volonté, avec un petit coup de pouce du destin, il est possible de réussir.
Cindy Sander donne une sacrée leçon : sur la candeur et le mépris, les notions de « ringard » et de « branché », d’échec et de réussite. Elle a réalisé son rêve envers et contre tou•te•s et mérite, à mon sens, le label de licorne véritable et authentique. Comme le dit Karl Lagerfeld, lui aussi invité du Supplément :
Si tu ne crois pas en toi, personne ne va le faire pour toi.
Et c’est pas tout à fait con.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
J'ai l'impression qu'elle continue de s'assumer malgré le bad buzz "Nouvelle Star" ou "Papillon de Lumière", elle a continué à garder son nom alors que d'autre aurait ptet pris un pseudo pour se recréer (comme par exemple Thierry Mugler qui s'appelle désormais Manfred Thierry Mugler ... hum soit, et cette tête, je suis d'accord avec Karl Lagerfeld sur ce coup)
Moi je trouve que cela illustre le fait qu'il faut croire en ses rêves et croire en sa bonne étoile, et que les gens changent/peuvent changer.