Depuis quelques saisons, la sneaker squatte le devant de la scène mode. De chaussure de sport, elle est devenue une icône et parfois un phénomène culturel. Autrefois réservée aux terrains de basket et aux odeurs de vestiaires, elle est maintenant portée par les fashion victims les plus classes. Bon, entendons-nous bien, je ne te parle pas de mettre une paire de Kalenji de Décathlon avec une robe du soir…
Parmi les sneakers qui se vendent comme des petits pains, certaines sont carrément devenues des objets cultes de la mode et de la pop-culture. Analyse du phénomène avec trois baskets indémodables : la Converse All Star, la Air Max de Nike et la Stan Smith d’Adidas.
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« Les chaussures, c’est chiant. Porte des sneakers. » — Campagne du Pub Converse, 2013
La Chuck Taylor All Star par Converse
La Chuck Taylor All Star est le modèle culte de la marque Converse, si bien qu’on l’appelle communément la Converse. Créée en 1917 par la compagnie américaine Converse Rubber Shoe Company, c’est une chaussure en toile, avec une semelle en caoutchouc conçue pour ne pas glisser. À l’origine appelée All Star, elle a été renommée d’après Chuck Taylor, un joueur de basketball qui a adopté la chaussure et en est devenu l’égérie.
Le basket était à l’époque un sport plutôt méconnu et les joueurs n’étaient pas des stars au look bien travaillé comme aujourd’hui. Les constructeurs de chaussures de sport étaient peu nombreux et les joueurs avaient un réel besoin de paires adaptées à leur activité tout en étant fonctionnelles. Ainsi, quand le joueur Chuck Taylor a découvert les All Star de Converse, il en a fait sa chaussure culte et a grandement aidé à la renommée de la marque.
Soutenue par le gouvernement américain pendant la Seconde Guerre Mondiale, la marque a continué à s’agrandir jusqu’à devenir partenaire de la jeune ligue officielle de basket, la NBA. À partir des années 1960, elle devient une chaussure prisée par les jeunes, symbole des modes rock, puis punk et enfin grunge.
Portées par les joueurs de basket puis par les sportifs de façon générale, les Converse sont ensuite adoptées par des musiciens comme les Ramones ou Kurt Cobain. Le groupe The Who a même créé une paire ornée du drapeau du Royaume-Uni, l’Union Jack.
La marque Converse a toujours eu un lien particulier avec la musique. Modèle phare du rockeur qui la porte comme une seconde peau (ou un second pied, mais on ne va pas se lancer dans ce débat), la Chuck Taylor a eu pour égéries des musiciens cultes, comme Santogold, Pharrell Williams et Julian Casablancas (le chanteur des Strokes), qui en plus d’avoir posé pour la marque ont composé une chanson pour le centenaire de Converse.
Dans les années 1980, le cinéma a commencé à utiliser les Chuck Taylor All Star dans des films musicaux comme West Side Story ou Grease. Les Converse sont souvent l’accessoire du personnage un peu rebelle (comme le méchant gamin Sid, dans Toy Story), un peu rockeur, deviennent la marque de celui qui s’en fout de la mode, puis du geek : Marty les inaugure dans Retour vers le Futur et passera ensuite le flambeau aux personnages de The Big Bang Theory, Wayne’s World ou encore Californication.
Mais la propriétaire de Converse la plus décalée reste la Marie-Antoinette de Sophia Coppola.
Dans ce film sorti en 2006, la Reine de France est une fashion-victim et porte des baskets de toile ! Anachronisme quand tu nous tiens, mais l’idée est là : toute personne portant des Converse est une personne cool, qui se fiche des modes et des normes.
Les publicités Converse, toujours très esthétiques et musicales, véhiculent ce message par le biais d’images de gens stylés sans vraiment vouloir l’être. Une feel good shoe, en gros.
La Air Max de Nike
La Air Max a fêté son 28ème anniversaire hier et, au même titre que la All Star, elle est un équilibre parfait entre chaussure de sport et accessoire de mode. Créée en 1987 par Nike, elle est un des modèles cultes de la marque, et tranche avec les paires précédentes, plus classiques.
Dessinée par Tinker Hatfield, la Air Max est inspirée par l’architecture du centre d’art moderne parisien George Pompidou, les tuyaux sur la façade du bâtiment ayant été cités par Hatfield comme source d’inspiration pour la bulle d’air de la sneaker.
En effet, la particularité de la Air Max, c’est sa bulle d’air entre la semelle et le pied : permettant une meilleure foulée, elle participe aussi au design original de la basket. Si la bulle d’air était utilisée par Nike depuis 1979, c’était la première fois qu’elle était apparente dans une chaussure.
La Air Max originelle de 1987 est aussi appelée Air Max 1 et plus de quarante variantes ont été créées depuis, de la version plus large à la version féminine, en passant par des motifs et des tissus originaux. Parmi celles-ci, la Air Max Liberty, designée avec le grand magasin londonien Liberty à partir du motif fleuri du même nom, a été un énorme succès auprès des amatrices de sneakers.
Très vite adoptée par les sportifs pour son confort et son ergonomie, la Air Max s’inscrit aussi rapidement dans la culture populaire, particulièrement dans les milieux du hip-hop et dans les classes moyennes. À l’époque de son lancement pourtant, Nike avait choisi la chanson Revolution des Beatles pour la première publicité…
https://youtu.be/p3sjW5LTm9c
La Air Max est aujourd’hui un modèle culte de Nike, et pourtant à l’époque de sa création, elle n’avait pas convaincu les dirigeants de la marque, qui l’avaient lancée sans grande conviction. C’est pourtant grâce à ce modèle que Nike s’est relevé d’une mauvaise passe économique. Merci Tinker Hatfield, qui est aussi un des papas de la Nike Air Jordan.
La Stan Smith d’Adidas
Contrairement à la Chuck Taylor et la Air Max, la Stan Smith n’a pas été créée pour les joueurs de basket mais pour les tennisman ! En 1964, Horst Dassler est à la tête de la marque allemande Adidas et fait appel à Robert Haillet, alors joueur numéro 1 français, pour créer la première chaussure de tennis en cuir, plus solide et pratique que les Springcourt en toile.
Commercialisée sous le nom d’Adidas Robert Haillet, cette paire de tennis est blanche et son cuir est aéré par trois rangées de trous ; elle dispose également à l’arrière d’un système de protection du tendon d’Achille, le fameux volet vert portant le logo de la marque. En 1973, le tennisman Stanley Smith devient égérie de la basket, et cinq ans plus tard elle est renommée Adidas Stan Smith.
Elle passe au cours des années 1980 d’une chaussure sportive à un accessoire quotidien, grâce à la simplicité de son design. Elle plaît aussi bien aux hommes qu’aux femmes et est adoptée par les mouvements punk, hip-hop ou même reggae. En 1986, le groupe américain Run DMC chante My Adidas, à propos du modèle Superstar né en 1969 : si la chanson ne concerne pas les Stan Smith, elle participe à sa place dans la culture street.
https://youtu.be/dA8DsUN6g_k
En 1993, c’est IAM qui met la Stan Smith à l’honneur dans le tube Je danse le Mia, dont le clip a été réalisé par Michel Gondry. La chanson revient sur la mode des années 1980, où l’uniforme était inspiré par les grandes marques de streetwear :
« Stan Smith au pied, le regard froid, ils scrutaient la salle, le ¾ en cuir roulé autour du bras. Rayban sur la tête, survêtement Tacchini ; pour les plus classes des mocassins Nebuloni. »
Deux ans plus tard, c’est dans La Haine de Matthieu Kassovitz que Vincent Cassel traîne sa paire de Stan Smith, qui confirme sa place dans la culture urbaine. Pendant encore vingt ans, la Stan Smith affirmera son statut de sneaker culte, tant elle sera portée par des artistes musicaux mais aussi des figures de la mode comme Gisèle Bündchen. Et pourtant, elle est tuée par Adidas en 2011.
En effet, la marque allemande réalise que la sneaker est culte, certes, mais uniquement en France. La Stan Smith disparaît du commerce et le mythe est créé : la sneaker est introuvable et sa rareté fait son statut de it-shoe. Ce coup marketing prend fin en mai 2013, date à laquelle la Stan Smith refait surface dans les magasins Adidas : le phénomène est intact et la chaussure se vend comme des petits pains.
Aujourd’hui, il est impossible de ne pas voir une Stan Smith dans le placard d’une fashionista ou d’une amatrice de sneakers tant elle est devenue la basket culte, sobre et classe à la fois. Elle a, parmi tant d’autres propriétaires, pris ses lettres de noblesse mode grâce à Phoebe Philo, directrice artistique de Céline, qui les porte avec un look minimaliste, la touche de street nécessaire au chic façon 2014.
Et toi, c’est quoi ta sneaker culte ?
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Les Commentaires
Cela dit j'ai aussi porté des Air Max mais pendant une période vestimentaire, humm disons peu glorieuse ... Ou comment au collège j'ai mélangé le style rockeuse et le style rappeuse
Sinon article très intéressant. Même si aujourd'hui je ne suis plus très sneakers j'ai beaucoup aimé en savoir plus sur ces chaussures cultes qu'on porte souvent par effet de mode sans connaître leur petite histoire !
Oh et oui les Stan Smith ça en devient presque lassant à force de les voir à tous les pieds... Même si c'est vrai qu'elles sont plutôt canon !