C’est un tournant historique pour les droits des femmes en Argentine. Ce mercredi 30 décembre, le sénat a voté la légalisation de l’avortement jusqu’à quatorze semaines de grossesse. Une belle façon de commencer cette nouvelle année !
A majorité conservatrice, le vote qu’on annonçait serré ne l’a pas été avec 38 voix pour, 29 contre et une abstention. Un vote déterminant qui a divisé la population : tous et toutes étaient regroupées aux abords du Congrès à Buenos Aires.
A l’annonce de résultat, les manifestantes pro-avortement ont laissé exploser leur joie à Buenos Aires.
Émotion et admiration face au combat mené. Ça y est, l’Argentine légalise l’avortement.
Images via @ParisPasRose pic.twitter.com/sT1YE3UvWZ
— Aurore Lalucq (@AuroreLalucq) December 30, 2020
Des images impressionnantes qui traduisent l’émotion d’une longue lutte pour les femmes.
#EsAhoraSenado ?️? | Por las miles de niñas y mujeres que mueren en la clandestinidad, por las que no tienen alternativa; que sea ley para eliminar el miedo, la desesperación, el dolor y para hacer justicia, porque sin ley, somos cómplices.#AbortoLegal2020 #SeráLey ✊? pic.twitter.com/SdA4uEgay7
— Daniela R Sebastiani S (@DSebastianiS) December 29, 2020
Selon l’AFP, entre 370.000 et 520.000 avortements clandestins sont pratiqués chaque année en Argentine ; à l’évidence, ce projet de loi est une avancée majeure pour les droits des femmes.
Un vote historique grâce aux soutiens politiques
Malgré la pandémie, les Argentines en faveur du droit à l’IVG se sont mobilisées pour vivre cet instant jusqu’au moment de délivrance, vers quatre heures trente du matin.
Réclamé depuis des années par les mouvements féministes, ce vote du congrès est un soulagement et l’aboutissement d’un long combat.
Depuis une loi de 1920, l’avortement n’est autorisé en Argentine (un pays de 45 millions d’habitants majoritairement catholiques) qu’en cas de viol ou de danger pour la santé de la personne enceinte et avec l’autorisation d’un juge.
Il y a deux ans, un projet de loi similaire à celui qui vient d’être voté par les sénateurs avait vu le jour, mais n’avait pas abouti : les sénateurs avaient finalement voté contre. Afin de convaincre un hémicycle conservateur, cette fois-ci la loi dispose d’un article permettant aux médecins de faire valoir leur « objection de conscience ».
Car cette année, la donne est différente : les pro-choix ont pu compter sur le soutien de l’exécutif, à savoir le président Alberto Fernandez et la vice-présidente Cristina Fernández de Kirchner. Tous les deux ont porté à bout de bras le projet alors que le projet cristallise la société.
« Le monde est injuste, mais la réponse n’est pas dans notre utérus »
Ce vote a lieu vingt jours après celui du parlement, le vendredi 11 décembre : 131 voix contre 117 ont suffit pour basculer dans l’histoire et donner l’espoir aux argentines d’un futur changement avant la concrétisation du Sénat.
Au sénat et au parlement, les élus ont débattu dans un climat tendu — à l’image de l’ambiance qui règne dans le pays. En effet, depuis des années le sujet divise le pays.
Au cours des échanges au sein de la chambre basse, le discours de la député Gabriela Cerruti a marqué les esprits. Dans un plaidoyer en faveur des droits des femmes, elle a affirmé :
« Ce que nous sommes venues vous demander aujourd’hui, c’est d’arrêter de faire du corps des femmes l’objet de litiges que l’économie ou la politique ne peuvent résoudre. […]
Le monde est injuste, mais la réponse n’est pas dans notre utérus. Au contraire, le monde est injuste parce qu’il est construit depuis 500 ans sur un système fondé sur l’exploitation des femmes et de la nature ».
"Le monde est injuste, mais la réponse n'est pas dans notre utérus."
Les députés argentins viennent de voter la légalisation de l'avortement. Un débat marqué par le vibrant discours de la députée @GabiCerru… pic.twitter.com/Y27grfzlxh
— Brut FR (@brutofficiel) December 11, 2020
Le virage que prend l’Argentine bouscule toute une région du monde : avec l’adoption de ce texte, le pays rejoint le cercle très fermé des nations ayant autorisé l’IVG en Amérique latine, qui actuellement compte seulement quelques membres, à savoir Cuba, l’Uruguay, le Guyana et la province de Mexico.
En espérant que cette mobilisation qui a porté ses fruits, donne espoir au reste du monde !
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