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Vie quotidienne

Je suis agoraphobe – Témoignage

Être agoraphobe, qu’est-ce que c’est ? Comment vit-on avec ? Voici le témoignage d’une madmoiZelle qui souffre de cette maladie et qui essaie de guérir, petit à petit.

Article publié le 3 février 2013

À chaque fois que j’annonce à quelqu’un que je suis agoraphobe, on pense que c’est « juste » une simple peur de la foule. C’est un peu plus vicieux que ça…

Qu’est-ce que l’agoraphobie ?

Être agoraphobe, c’est une peur irrationnelle de sortir de chez soi.

C’est une véritable épreuve pour moi : pourtant, habitant dans un petit village, il y a peu de risques que je croise une foule de gens en allant à la boulangerie.

Mais chaque sortie de mon appartement est une croisade, une guerre contre mes peurs et mes angoisses.

Au début, je mettais ça sur le compte de la flemme Oh non, j’ai la flemme d’aller faire les courses, de toute façon il me reste quelques pâtes, ça suffira pour manger »), mais au fur et à mesure, j’ai réalisé que ce trouble avait une emprise beaucoup plus grande sur mon quotidien.

En fait, mon agoraphobie est ce qui a construit mon style de vie.

Ma vie d’agoraphobe

Ça s’est installé progressivement, de manière très pernicieuse, de sorte qu’encore aujourd’hui, je réalise que j’ai pris la plupart de mes décisions dans ma vie en fonction de ce handicap.

Sans même m’en rendre compte, dès ma préadolescence, j’ai commencé à ressentir de l’angoisse à chaque fois que je sortais ou que je prévoyais de sortir.

À mes 14 ans, en plein cours de physique, j’ai eu ma première vraie crise d’angoisse. Ce jour-là, j’ai cru que j’étais en train de devenir folle : j’ai fait une crise de déréalisation.

Brusquement, le monde autour de moi m’est apparu très différent, hostile, bizarre. Pourtant, tout était comme avant, les tables, les chaises, les murs, le prof et les élèves. Mais quelque chose de très angoissant était en train de se produire, sans que je puisse expliquer quoi.

Dans ma tête, ces phrases tournaient en boucle : « Je suis là… je suis vraiment là… c’est moi qui suis là… », et à chaque fois, je me sentais de plus en plus en danger

, comme si ma carapace se brisait.

Jusqu’au point où c’est devenu insupportable. Le bruit et la luminosité, tout était trop fort. J’ai bouché mes oreilles, caché mes yeux et baissé la tête sur la table.

Le plus « drôle » dans tout ça, c’est que le cours de physique a continué comme si de rien n’était. Je ressemblais juste à une élève de 3ème qui se faisait royalement chier en cours.

L’agoraphobie, puis la dépression

À partir de ce moment-là, les crises ont continué.

Je n’arrivais pas à me dire que j’étais agoraphobe, à expliquer. J’avais beau essayer, tous les gens à qui j’en parlais s’éloignaient petit à petit de moi en pensant que j’étais cinglée.

Au fond, je le pensais aussi. Progressivement, j’ai remarqué que les crises n’arrivaient jamais lorsque j’étais chez mes parents, et c’est là que le cercle vicieux s’est mis en place : j’étais bien à la maison, et à chaque fois qu’il fallait sortir, c’était l’épreuve, car il y avait de grandes chances pour que la crise arrive.

Et même si je la dissimulais très facilement aux yeux des autres, elle était horriblement éprouvante pour moi.

Au fil des années, c’est la dépression qui s’est installée : à force, on se sent incapable de faire quoi que ce soit qui implique de sortir (même aller ouvrir la boîte aux lettres), on anticipe chaque sortie (prévoir le chemin, ne pas y aller seule, éviter l’heure de pointe, prévoir les conversations, penser à tout ce qui pourrait mal tourner…) et on finit par en perdre toute confiance en soi.

Agoraphobie, le diagnostic

Aujourd’hui, j’ai 22 ans. Cela fait maintenant 10 ans que j’ai eu pour la première fois l’envie de mettre fin à ma vie.

Pendant mon adolescence, j’avais souvent essayé de voir des psychologues et des psychiatres, mais sans succès, étant donné que je n’arrivais pas à expliquer mes crises de déréalisation (c’est un grand soulagement pour moi, 8 ans après, de pouvoir leur donner un nom).

Mais fin 2012, j’étais sur le point de craquer, pratiquement incapable de sortir de chez moi, incroyablement irritable, et très en proie aux idées noires.

J’ai parlé à mon médecin généraliste, j’ai vu une psychiatre qui m’a donné des antidépresseurs et des anxiolytiques. J’ai ensuite vu un autre psychiatre, spécialisé dans l’angoisse, et au vu de mon récit, il m’a dit que je souffrais d’un trouble panique avec agoraphobie et que ça se soignait très bien.

Je n’ai pas pu retenir mes larmes, j’ai pleuré de tout mon corps : enfin un nom sur cette maladie, enfin l’espoir, enfin la reconnaissance de ma souffrance, et enfin ce mot, « guérir ».

On m’a rapidement inscrite à l’hôpital de jour avec d’autres personnes agoraphobes, et nous avons passé de longues séances de groupe à cibler nos sensations corporelles au moment de l’angoisse. On a étudié le cercle vicieux, l’anticipation, l’angoisse, les pensées…

Et surtout, on a appris que ce qui déclenche l’angoisse dans tout ça, c’est l’hyperventilation.

Soigner l’agoraphobie

Là, tout s’est éclairé : cette impression de devenir folle, que le monde était étrange, ne plus me reconnaître dans le miroir… Tout ça, ça venait du manque d’oxygénation du cerveau, dû à l’hyperventilation ! J’ai encore les larmes aux yeux quand j’y repense. Je ne suis pas folle.

Malgré tous mes progrès durant des 3 mois, ça n’efface pas ces dix années de conditionnement. Je ne supporte plus qu’on me mette la pression, et suite à un objectif tout simple que m’avait fixé mon psy, j’ai complètement perdu les pédales et j’ai récemment fait une tentative de suicide.

Maintenant je me repose dans une clinique, j’ai commencé à communiquer avec mes parents sur la pression qu’ils me font subir et j’essaie de devenir plus forte. J’ai énormément de soutien de la part de mon copain, ma famille, mes amis et les madmoiZelles, que je remercie tout particulièrement.

À toutes les madmoizelles qui sont agoraphobes, qui souffrent de ne pas réussir à sortir de chez elles, qui n’ont plus confiance en elles, n’oubliez pas qu’il reste de l’espoir, qu’il reste toujours de la force pour se battre.

À lire aussi : Téléphoner, c’est votre phobie ? Vous êtes loin d’être seule !

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Les Commentaires

28
Avatar de leel0o0
17 juillet 2015 à 17h07
leel0o0
Hello à vous toutes!
Je dépose ici un témoignage, mais aussi quelques aides, parce-que j'imagine qu'on est tous sur cet article dans un même but
J'ai fait une crise d'angoisse dans un bus en 2009, ça n'a pas duré longtemps, et ça n'a pas été violent, mais ça a suffit pour faire naître une peur étrange qui s'est installée, celle d'en refaire! Pendant 3 ans, j'ai commencé à arrêter de prendre le bus, puis le métro, d'aller à des rdv pro, puis même familiaux. En fait, j'ai tenté d'éviter absolument toute situation où je pouvais être enfermée, physiquement ou non. J'ai pensé être claustro, donc j'ai passé mon permis (l'autoroute était une sacrée épreuve!), et me suis mis en tête que partir en voiture à mon rythme serait plus facile... Mais non! M'éloigner de chez moi était aussi devenu impossible! Un panneau de direction bleue me donnait la nausée, et tout un tas de petites chose...
Je me suis donc enfin renseignée, et j'ai commencé à apprendre les mots agoraphobie, trouble panique, anxiété...
J'ai suivi une première tcc, puis une deuxième, je n'ai pas trouvé le bon thérapeute, mais j'ai compris que c'était la meilleure solution, après avoir essayé pas mal d'escroqueries, solutions miracles, thérapies analytiques, hypnoses, etc...
Cette année, je suis tombée sur LE thérapeute qui connait, comprends, et fait avancer. Il faut s'exposer à nos peurs, graduellement, accepter de ressentir des choses désagréable, etc... Je peux aujourd’hui rentrer dans un musée, marcher la moitié de Paris seule, prendre le bus (!!), et il me reste beaucoup de chemin. Sortir de la capitale me terrifie, 5 ans que je n'arrive pas à faire plus de 10 bornes, impossible de prendre les ascenseurs, les routes fermées comme les autoroutes, etc...

Enfin, je vous parle d'un projet qui me tient à cœur, et qui va servir à ceux qui lisent cet article. J'ai été accompagnée de gens géniaux et compréhensifs, mon copain, mes potes, ma famille plus ou moins, mais même avec ça, je me suis sentie bien seule. Ils ne comprennent pas! Les thérapeutes ou médecins non plus, même s'ils sont là pour nous aider. J'ai donc fait quelques recherches, et j'ai voulu créer un groupe sur Paris pour rencontrer d'autres agoraphobes. Je me suis renseignée sur le système de pairs-aidant, sur la manière dont les personnes souffrant d'un même problème peuvent complètement se comprendre, partager et s'entraider sans barrière, sans complexe d'infériorité, etc. J'ai finalement crée une communauté en ligne, et souhaite continuer à la développer. Agoafolk compte aujourd'hui 150 utilisateurs, et est ouvert dans les plus grandes villes françaises. C'est une sorte de réseau social pour agoraphobes. On peut demander en ami, s'inscrire sur les groupes, échanger, et surtout rencontrer des gens. J'organise depuis l'année dernière, de petits apéros pour se rencontrer et échanger sur la capitale. J'aimerai vraiment que les autres groupes puissent faire de même. Ces rencontres sont vraiment chouettes, on se donne plein d'idées, de challenges, on parle très librement, et pour l'instant, je n'ai rencontré que des gens super sympas, certains sont même devenus des copains!

Je vous invite à aller sur Agorafolk, la communauté des agoraphobes optimistes, mais aussi, d'accepter, de prendre le temps, d'apprendre à méditer et d'apprécier ce qui se passe autour de vous, sans aller bien loin!

J'espère à bientôt en vrai chers agoraphobes
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