L’Assemblée nationale a voté cette nuit le texte de loi qui doit renforcer la protection des mineurs face aux crimes sexuels. Parmi les mesures les plus attendues, celle qui fixe le seuil de l’âge du non-consentement sexuel à 15 ans. Dans le cas d’un inceste, ce seuil est porté à 18 ans.
Dans les deux cas, l’agresseur encourt une peine de réclusion criminelle de vingt ans.
Ce durcissement de la loi intervient quelques mois après une vague de révélations autour des violences sexuelles sur mineurs : celle de Camille Kouchner, autrice de La Familia Grande, qui a dénoncé dans son livre les agressions subies par son frère jumeau et a accusé le politologue Olivier Duhamel, celle aussi Coline Berry, qui accuse son père Richard Berry d’inceste.
Face à cette prise de paroles sans précédent, la sénatrice UDI Annick Billon a présenté une proposition de loi visant à améliorer les réponses de la justice et à mieux protéger les mineurs. Alors que le Sénat avait voté le seuil de non-consentement à 13 ans, la commission des lois de l’Assemblée nationale est finalement revenue sur cet aspect du texte.
La clause Roméo et Juliette, un point de débat à l’Assemblée
Mais une disposition a particulièrement créé du débat au sein de l’hémicycle, la clause Roméo et Juliette. Elle fait bien sûr référence aux adolescents héros de la pièce de Shakespeare, et à leur très courte idylle. Par cette clause, le ministre de la Justice crée un exception qui entend préserver les relations consenties entre adolescents. « Je ne veux pas être le censeur de nos adolescents »
, a insisté Eric Dupond-Moretti qui veut ainsi éviter les plaintes de parents, selon lui infondées :
« Quand il y a une faible différence d’âge, alors évidemment on peut discuter de l’existence d’un consentement. »
La clause s’appliquera dès lors que la personne majeure et la personne mineure de moins de 15 ans auront une différence d’âge d’au moins cinq ans. En résumé : si une adolescente de 14 ans a une relation sexuelle avec un majeur, cela ne tombera pas sous le coup de la loi, sauf bien sûr, dans le cas d’une agression ou d’un viol.
La clause Roméo et Juliette ne satisfait pas tout le monde. « Je ne pense pas que quand on a 13 ans et qu’on se fait racoler par des plus âgés, on a tout le discernement nécessaire », a estimé la députée LREM Florence Provendier.
La députée LREM Aurore Bergé a elle aussi exprimé ses réserves durant la discussion en séance :
Côté association de protection de l’enfance, La Voix de l’enfant a quant à elle expliqué qu’un seuil de trois ans et non cinq ans aurait été plus adapté.
Le débat autour de cette clause vient questionner la façon dont on envisage les relations entre adolescents et jeunes adultes, la différence d’âge à l’adolescence, ainsi que celle de la maturité présumée des jeunes filles par rapport aux garçons.
Le texte doit être examiné à l’Assemblée jusqu’à demain. Comme la proposition de loi émane du Sénat, elle devra y revenir pour une seconde lecture.
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