Fin de vacances rime avec portefeuille allégé… et jambes lourdes. Toi qui avais prévu de te détendre, tu as passé quinze jours à fouler les pavés en espadrilles ou à te faire des bleus aux chevilles avec tes chaussures de montagne. À vrai dire, tu as peur de revenir à ton bureau l’esprit léger, mais le corps en marmelade. Pourtant, il te reste encore une journée de RTT — les mollets courbaturés, avec à peine de quoi t’acheter un thon-crudités à la gare. Courage, j’ai peut-être trouvé l’occupation qu’il te faut : la marche… pieds-nus !
Depuis toute petite, la tradition quand je pars en vacances consiste à se rendre à l’office de tourisme le plus proche et à dévaliser les présentoirs de flyers. Accrobranche, baptême de luge d’été, atelier de tissage en roseau ou initiation au yodel, tout est bon à étudier bien au chaud sous la tente ! Cette fois-ci, c’est un étrange tract vert sapin qui a attiré ma rétine avide de sensations fortes.
Il proposait non pas de sauter du haut d’une montagne attachée à une voile colorée (et un moniteur cramoisi), mais de parcourir un sentier d’un peu moins d’un kilomètre, dans un vallon verdoyant… les pieds totalement dévêtus. La pub promettait un grand moment d’apaisement, de ressourcement, une expérience unique.
Je suis de celles qui grimacent au bord de la piscine de peur de marcher sur un gravillon. Je marque un arrêt systématique quand un objet non identifié se loge entre ma chaussette et ma semelle. Il m’arrive parfois d’insulter mon gros orteil, dont le principal hobby est de foncer sur le premier caillou venu quand je porte des sandales. Mais même si mes pieds sont sensibles, ma soif d’aventure l’est encore plus. Je me suis donc jetée vers l’inconnu… à cor perdu.*
Le petit chemin, qui sent la mimolette…
Arrivée sur place, après avoir payé la maigre somme de cinq euros, ce fut enfin le moment de se déchausser. Des sortes d’étagères en bois étaient disposées à l’entrée du chemin. Elles m’ont fait penser à celles d’un bowling (mais façon pleine nature et sponsorisé par Quechua). Je me suis aussi dit que j’avais eu raison de ne pas emporter mes Adidas toutes neuves…
Une fois la voûte plantaire dans son plus simple appareil, nous étions invité•e•s à débuter notre périple. Le rite initiatique pouvait commencer. Heureusement, le sentier boisé était recouvert d’une fine couche de copeaux de bois permettant d’éviter les trous et autres obstacles réservés aux maîtres•ses de la discipline — n’est pas Yannick Noah qui veut !
Dans les arbres, cachés aux regards de ceux qui regardaient un peu trop leurs pieds, justement, des farfadets sculptés nous suivaient des yeux. J’ai eu l’impression d’être le dernier Gelfling de Dark Crystal, perdue au milieu des bois de Brocéliande. C’était pas dégueu.
Afin de garder tous nos sens en alerte, de petits ateliers étaient mis en place tout au long du parcours. Il s’agissait de goûter avec les pieds, de ressentir la matière, la température, la forme (et de ne pas hurler comme un•e candidat•e enfermé•e dans la cage aux serpents de Fort Boyard).
Moi. Environ.
À la place des braises et autres paillassons pour fakir, imagine plutôt du liège, de la boue, des écorces, des galets, des troncs d’arbres et une traversée du ruisseau (très froid, le ruisseau). Le sentier pieds-nus c’est un peu le Mud Day pour les mauviettes, quoi ! Si les premiers pas furent délicats, pendant les derniers mètres du chemin, je me sentais pousser la corne aux orteils et je n’avais plus peur de choper le Tétanos.
Adventure Time. Ou presque.
À la fin du sentier, il était possible de se laver avec une brosse et de l’eau (bon baiser aux phobiques des verrues) : une étape vitale pour le tapis de la voiture, vu l’état de mes jambes à partir du genou. J’ai remis mes chaussettes la mort dans l’âme. Je ne sais pas si j’ai renoué des liens forts avec ma conditions physique et primaire de mammifère, mais mes pieds ont apprécié l’expérience en tout cas ! Je me suis sentie aussi mollasse qu’après une séance de jet au spa thermal.
Marcher nu-pieds, c’est une petite activité peu chère qui ne prend pas plus d’une grosse heure et permet de te détendre tout en étudiant la consistance si intéressante de la gadoue. S’il est très populaire depuis longtemps en Allemagne, Autriche ou encore en Suisse, ce type de sentier est de plus en plus répandu en France. Tu peux notamment en trouver dans les Pyrénées, les Vosges, la vallée de la Loire, l’Hérault, mais aussi près de Rennes, Nantes ou encore Lille !
Forte de cette expérience réussie, j’ai décidé de m’adonner au plaisir du naturisme pédestre plus souvent : dans le jardin de mes parents, d’abord, puis pourquoi pas pour une promenade à la campagne (en évitant les chemins blancs) (je n’ai pas encore mon abonnement au club sado-masochiste du coin). Mon prochain défi est tout tracé : aller glisser pieds-nus ma dernière facture dans la boîte aux lettres du coin de ma rue. En évitant les bouts de verres. Les poussettes. Les chaussures de chantier. Les boîtes de conserve. Les pluies acides parisiennes.
Merci de bien vouloir prier pour moi.
*Oui, je suis très fière de cette blague. Je t’interdis de me juger. C’est mal.
À lire aussi : Quatre idées de lois pour rendre la marche à pied plus sympa
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