Article initialement publié le 19 avril 2012
Une madmoiZelle nous parle de son expérience sado-masochiste, bien loin des vieux clichés que l’on peut avoir sur cette pratique.
Le sado-masochisme, ça te fait penser à quoi ? L’obscure backroom d’un club gay est-allemand ? Des boudoirs feutrés où des femmes en porte-jarretelles fessent des hommes d’affaires ? Des donjons un peu glauques où s’alignent des engins de torture dignes du Moyen-Âge ? Dépoussiérons ensemble les idées reçues : le sado-masochisme, c’est aussi pour les vrais gens, dans la vraie vie.
Comment arrive-t-on au sado-masochisme ?
Aussi loin que remontent mes souvenirs, mes fantasmes ont toujours tourné autour des relations de domination/soumission qui peuvent naître dans une relation sexuelle. Je ne mettais pas vraiment de mots dessus, mais je savais que je préférerais toujours une partie de jambes en l’air sauvage avec morsures et griffures à un tendre missionnaire (même si c’est pas mal, parfois). J’ai fini par me « renseigner » (chercher des films coquins, plutôt) sur le sado-masochisme, une pratique qui m’intriguait depuis longtemps, mais j’ai été très vite refroidie : je ne tombais que sur des vidéos de mauvaise qualité, tournées dans des caves sordides avec de grosses allemandes qui cravachaient le popotin de gros allemands (il faut dire que je ne connaissais pas encore Kink.com (très très très interdit aux moins de 18 ans et NSFW !), le paradis de tous les aficionados des pratiques extrêmes/bizarres/déviantes/etc.). Du coup, je n’y ai plus pensé et je suis retournée sans regrets à mes griffures dans les dos et autres levrettes claquées.
Mon déclic, en fait, ça a été le bon homme au bon moment. J’étais depuis peu dans une relation amoureuse à distance avec un garçon bien sous tous rapports, qui en savait encore moins que moi sur le sado-masochisme, une pratique qui ne lui avait jamais effleuré l’esprit, mais surtout qui ne s’attendait pas à ce que la timide jeune fille qui lui avait tapé dans l’œil kiffe autant se faire fesser pendant l’amour, si tu vois c’que j’veux dire ! La découverte a été progressive et mutuelle : palier par palier, nous ajoutions à chaque ébat une petite nouveauté, testant les réactions de l’autre. Par exemple, certaines filles aiment se faire « étrangler » (bon, elles tombent pas dans les pommes hein, mais les jeux basés sur la respiration sont assez courants) au moment où elles jouissent, ce qui n’est pas vraiment mon cas. Évidemment, tout cela était assez brouillon au début, puisqu’aucun de nous n’avait la moindre expérience de ces pratiques, ce qui a donné lieu à des actions assez whathefuck (ce classique moment où tu essaies une nouvelle position cool sans avoir aucune idée de l’endroit où ta jambe droite est censée se ranger), mais c’est aussi comme ça qu’on apprend !
Le sado-masochisme, ce truc de riches
Au bout d’un moment, nous avons eu envie de pimenter un peu le jeu avec des accessoires. N’étant pas fan des menottes en moumoute et n’ayant pas confiance dans les coups de ceinture en cuir, j’étais bonne pour un tour au sex-shop aux frais de mon chéri histoire de varier les plaisirs pour sa venue imminente. Là, franchement, c’était l’angoisse : imaginez une jeune fille se glissant subrepticement dans un supermarché du sexe où les seuls clients sont des hommes esseulés errant tristement devant les films pornos, tentant de se glisser, l’air de rien, vers le rayon « trucs chelous en cuir et métal »… Heureusement que mon homme me tenait compagnie par SMS, sinon je serais partie en courant ! Nous avions parlé un peu de ce que nous voulions et que nous considérions comme les accessoires « de base » : des menottes, une laisse, un sex-toy classique (un vibromasseur quoi), un bâillon, des tenues cool (pour moi) et une cravache (pour lui) (parce que le fouet c’est vraiment trop encombrant et compliqué à manier). Eh ben laissez-moi vous dire que pour s’amuser un peu dans ce domaine il faut être carrément pété de thunes : si mes souvenirs sont bons j’en ai eu pour près de 200€, et encore je n’étais pas dans un sex-shop « de luxe » comme on en trouve de nos jours, ni dans un magasin spécialisé. Le moindre truc coûtait un bras, marché de niche oblige, et j’avais l’air bien maline, mes achats dans une main, mon portable-calculette dans l’autre, tentant de choisir entre deux cravaches différentes alors que je n’y connaissais strictement rien.
Une fois revenue à bon port sans que personne, dans le bus, n’ait eu l’idée de lorgner à l’intérieur de mon sac de courses, je n’avais plus qu’à attendre le lendemain pour essayer nos nouveaux jouets.
C’est fou à quel point c’est chaud de trouver une image soft quand on tape sado maso dans Google Images.
Coups de cravache et force mentale : deux clés du sado-masochisme
Je dois dire que je redoutais un peu cette étape, même si j’en avais très envie, car c’est bien beau de faire la maline avec une cravache, mais c’est une autre paire de manches de la sentir claquer sur ton petit boule ! Heureusement, monsieur fut délicat, y allant doucement car lui-même n’était pas bien sûr de la manière dont il pouvait doser sa force. Pour tout vous dire, c’est moi qui ait fini par réclamer plus d’ardeur, parce qu’on avait acheté une cravache, pas un plumeau, non mais.
Je ne sais pas comment ça se passe pour les autres couples qui pratiquent ces choses étranges et méconnues, mais en tout cas dans mon cas les accessoires sont principalement un « plus » bien sympa mais pas indispensable. Bon, maintenant on a considérablement enrichi notre collection et ça permet plein de nouvelles possibilités, mais l’essentiel se passe dans ma petite tête, entre mes deux oreilles. Avant d’être un jeu de douleur et de plaisir, le sado-masochisme est une relation de domination et de soumission, ce qui passe par le mental avant toute chose ; on peut très bien se sentir soumis(e) ou dominant(e) sans même faire l’amour. Imaginons une fille très pudique qui recevrait l’ordre de faire un tour en jupe sans sous-vêtements : pour moi, c’est du sado-masochisme, même si personne ne voit son frifri ! Le concept est de dépasser ses limites. C’est quand on trouve du plaisir ou de l’excitation dans des choses qui sont, a priori, désagréables, honteuses ou douloureuses que naît cette drôle de double pensée : « J’aime ça et je ne suis pas fière d’aimer ça, mais le fait d’avoir honte me fait encore plus aimer ça ! ».
Kamoulox et autres conseils dans la pratique du sado-masochisme
Bon, là c’est le moment « Protège-toi et respecte-toi » pour toutes celles et ceux qui, un jour, seraient amenées à tenter des pratiques rigolotes à base de popotins rougis et de poignets menottés.
Il y a quelques règles de sécurité de base qui pourront t’éviter d’être cette meuf qui explique tant bien que mal à un urgentiste blasé que non, en fait, ce n’est pas du tout ce qu’il croit, tu as glissé en sortant de la douche et tu venais justement de finir une partie de pétanque dans ta salle de bains.
Preums : le sacro-saint safeword (remplacé en cas de bâillon par un safegesture). Le safeword, c’est le truc qui prouve que ce « Non, non » ne veut pas dire « Non, enfin si vas-y c’est le jeu » mais vraiment « NONONONONON ». Lors d’ébats comportant des contraintes et de la douleur (mesurée), il n’est pas rare qu’on dise « Stop » mais qu’en fait, on ne le pense pas vraiment. Le safeword permet d’éviter ça, et ça peut être n’importe quoi, de préférence un mot un peu rare ou incongru qui ne sortirait pas vraiment par erreur (et puis c’est toujours rigolo de crier « Kangourou » ou « Kamoulox » pendant l’amour). Le safegesture c’est le même principe : quand on ne peut pas parler, on a un geste qui veut dire que nononononon. C’est un peu plus compliqué à trouver parce que quand on est attachée dans une position bizarroïde, difficile de lever le coude droit trois fois ! Mais avec un peu d’imagination, pas de souci. De toute façon, si les deux partenaires se connaissent bien, le (ou la) dominant(e) se rend rapidement compte que l’autre a arrêté de kiffer.
Deuzio : allez-y graduellement. C’est un conseil issu de mon expérience personnelle : lors de mon dernier ébat, monsieur a vigoureusement testé une nouvelle cravache. Un peu trop vigoureusement. Prenez votre temps et ne vous lancez pas tout de suite à corps perdu dans une nouvelle pratique : il y a souvent une différence notoire entre fantasme et réalité.
Tertio : parlez-en ! Non, pas aux réunions de famille (enfin ça dépend de votre famille hein, je ne juge pas), entre vous. Si vous n’êtes pas gênée par les conversations explicites, allez-y carrément, mais sinon un simple « Et ça, c’était bien ? » ou « Un peu plus à droite la prochaine fois » peut suffire. Vu la nature un peu particulière de ces relations, je trouve ça important, encore plus que pour le sexe « classique », de partager son ressenti. Le sado-masochisme implique de prévoir un petit peu à l’avance, vu que c’est toujours risqué de tenter un truc sans en avoir jamais parlé : autant profiter d’un câlin post-coïtal pour faire un petit debriefing tranquillou.
Et monsieur, il en dit quoi du sado-masochisme ?
Je peux vous dire que mon amoureux est toujours régulièrement surpris de ce tournant inattendu dans sa vie sexuelle. Nous sommes tous les deux d’accord pour penser que si nous devions nous séparer un jour, ce serait vraiment bizarre de faire ce genre de trucs avec quelqu’un d’autre, tant cette pratique nous semble indissociable de notre couple. S’il n’a pas toujours été à l’aise dans son rôle de dominant, s’interrompant parfois en cours de route pour m’embrasser tendrement et vérifier que tout allait bien pour moi, avec le temps il en est arrivé à me connaître si bien que ses inquiétudes ont disparu : il sait que si ça ne va pas, je le lui ferai comprendre. Comme on se voit rarement, c’est vrai qu’on passe une bonne partie de notre temps sous la couette mais il nous arrive aussi de faire ça « normalement » !
En résumé, le SM ce n’est pas seulement pour les gens un peu bizarres qu’on voit dans les reportages sur les clubs libertins. Ça peut aussi être moi, vous, Monsieur et Madame Tout-le-monde, ta boulangère ou ton coiffeur ! Il y autant de pratiques sado-masochistes qu’il y a de fantasmes, sensibilités et préférences sexuelles dans le monde, rien n’est codé et si l’expérience te tente, n’aie pas peur de « mal faire » : c’est toi qui invente ce que tu veux !
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Les Commentaires
Je regrette juste l'image d’illustration qui pour moi ne reflète en rien le thème de l'article (hormis les "machins dans la bouche). Et qui a bien faillit me couper toute envie de le lire. (OUI je déteste Pulp Fiction, rien que pour la scène qui suit cette photo).