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J’ai tout sacrifié pour ma passion — Témoignages

Suivre une passion dévorante demande souvent des sacrifices, plus ou moins conséquents. Des madmoiZelles nous parlent de leur passion et de ce qu’elles ont fait pour pouvoir s’y consacrer.

— Cet article a été rédigé dans le cadre d’un partenariat avec Wild Bunch. Conformément à notre Manifeste, on y a écrit ce qu’on voulait.

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Pour suivre une passion dévorante, il faut parfois tout quitter. Laisser sa famille, ses amis, sa ville voire son pays, son confort et ses habitudes… Des sacrifices plus ou moins grands, qui génèrent plus ou moins de regrets.

À l’occasion de la sortie du film La Danseuse, des madmoiZelles passionnées nous ont raconté la genèse de leur passion et leur parcours pour pouvoir s’y consacrer.

La naissance de la passion

La passion de Camille, 25 ans, est née quand elle avait une dizaine d’années, et est d’un genre qui peut surprendre : il s’agit de l’horreur — « dans le sens de ce qui fait peur, ce qui est gore, un glauque particulier ». Ça a commencé avec le premier film d’horreur qu’elle a vu, et dont elle se souvient plutôt très bien :

« C’était Le Vaisseau de l’angoisse. Ma mère était en train de le regarder à la télé, et moi, haute comme trois pommes, je regardais aussi (c’était la scène où un des mecs de l’équipage se faisait broyer tel un hachis parmentier par les hélices du bateau… Bon appétit !). Je n’ai eu le temps de voir que cette scène car déjà ma mère me disait de retourner dans ma chambre… Mais heureusement (malheureusement ?) pour moi, mon père l’avait en dvd et je n’ai eu qu’à me servir pour satisfaire ma curiosité… »

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Une curiosité qui lui a fait faire de belles découvertes et a nourri sa passion.

« Suite à cela, j’ai enchaîné les films d’horreur en découvrant des réalisateurs mythiques dans leur domaine, tels que Tim Burton, Guillermo del Toro, Georges A. Romero, Rob Zombi. Puis vint le temps des cathédraleuuuh des jeux vidéo où je jetais mon dévolu sur des jeux types survival horror (comme Resident Evil, Project Zero, Slender, Silent Hill, Rull of Rose… ). »

À lire aussi : « Now You See It » t’explique pourquoi les films d’horreur font peur

Cela a finalement pris le dessus sur son plan d’orientation original.

Je savais que je voulais en faire mon métier.

« Ayant toujours eu un coté créatrice, je savais que je voulais en faire mon métier. De dessinatrice de manga, j’ai progressivement dévié jusqu’à vouloir travailler dans les jeux vidéo. J’ai donc fait des études en arts plastiques à l’université Paris 8, avant de pouvoir atteindre la filière arts et technologies de l’image. »

Pour une autre madmoiZelle de 28 ans, sa passion est également apparue dès l’enfance :

« Dès toute petite, je voulais être soit prof d’art, soit prof de ski (le sport préféré de papa et maman). Vu que j’habitais dans le Nord et que les montagnes étaient à quelques centaines de kilomètres de la maison, les arts ont vite pris le dessus sur les skis. Étant également fille unique, dessiner me permettait de m’épanouir dans un monde imaginaire et de passer le temps. »

Et cette passion a été tout de suite encouragée par ses parents.

« Mes parents, enseignants de formation, m’ont toujours laissé faire ce que j’aimais sans me mettre de restriction. Ils m’ont même encouragée dans cette voie en m’inscrivant dans un collège avec une option artistique dès mes 12 ans.

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Il s’agit d’ailleurs du premier obstacle que j’ai dû affronter pour ma passion. Toutes mes copines étaient dans un autre établissement scolaire et je ne connaissais personne dans ce nouveau collège.

Honnêtement, sur le plan relationnel, ça a été les pires années de ma vie (harcèlement, peur, dépression, etc.), mais au niveau de l’apprentissage, les cours à option étaient vraiment intéressants. Ils m’ont permis d’apprendre différentes techniques artistiques et de découvrir l’histoire de l’art. »

Si ce temps des choix et sacrifices est arrivé très tôt pour cette madmoiZelle qui a dû choisir entre épanouissement artistique et bien-être relationnel, pour la plupart des autres madmoiZelles qui ont témoigné ce fut au moment des études supérieures, puis de la fameuse vie active.

Le moment des choix et sacrifices

Camille et son goût pour l’horreur se sont vus incompris par beaucoup, et elle a dû aller contre les opinions de son entourage pour vivre sa passion jusqu’au bout.

Il était difficile de faire comprendre la beauté que je pouvais trouver dans l’horreur.

« Ayant un univers pour le moins glauque et effrayant dans mes créations (dessins ou créations 3D), il était difficile de faire comprendre la beauté que je pouvais trouver dans l’horreur — que ce soit à mes professeurs d’arts plastiques qui me regardaient un peu comme une folle, ne sachant pas comment interpréter mes œuvres (serais-je une aliénée sortie de l’asile ? Va savoir !), ou à une partie de ma famille.

Notamment ma grand-mère qui me traitait, pardon, me traite toujours de sauvage car je sors selon elle de la « norme » avec mes « goûts et manies bizarres ». Mais qu’importe, c’est mon univers et je sais que j’ai raison car les monstres se font de plus en plus une place dans les films d’animation ou les jeux vidéo (c’est là que je parle de Monster High ou de Martin Mystère ?). »

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Puis est venue la fin de ses études et l’envie de se dépasser… pour laquelle elle a dû faire un sacrifice de taille.

« Lors de ma dernière année en master, il fallait choisir un sujet de mémoire à bosser pendant toute une année. Et en bonne perfectionniste qui n’a pas confiance en elle, je souhaitais savoir ce que ça donnerait si je donnais absolument tout pour finir mes études en beauté.

Alors j’ai bossé comme une dératée sur mon mémoire. Pendant un an je suis restée enfermée (sauf si les sorties concernaient mon mémoire), je ne voyais plus ni mes amis, ni ma famille (merci à eux, ils ont été compréhensifs pour ma dernière année) mais surtout je délaissais complètement mon conjoint pour cette passion, car enfin je pouvais me donner à 2000% sur quelque chose que j’aimais… Malheureusement.

Alors j’annonce, j’ai eu mon master mention Très Bien, j’ai pu étudier et rencontrer des gens qui m’ont beaucoup appris sur l’horreur tel que Bernard Perron (sans doute un des chercheurs les plus connus dans le domaine de l’horreur), qui passait justement en France en conférence cette année-là…

Mais le prix que j’ai payé est bien trop lourd. Pendant un an je n’ai fait que ça, je suis devenue folle ; je voulais tout envoyer paître, ma vie, mes études… et mon couple a fini par voler en éclats en grosse partie à cause de ça .

Aujourd’hui j’ai donc mon master mention Très Bien… Et je dois aussi recoller et réparer les morceaux avec mon conjoint. »

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La madmoiZelle passionnée d’art a elle aussi dû sacrifier sa vie personnelle et sociale pour vivre sa passion :

« Après sept années de travail acharné et deux maîtrises dans le domaine culturel, j’étais à titre officiel muséologue, artiste et enseignante. Je me suis dit : « Ça va être trop fastoche pour trouver du boulot. » Ben, en fait, non.

J’ai compris que le secteur culturel est non seulement bouché, mais surtout, qu’il ne recrute absolument pas.

Pendant six mois de recherches intensives, j’ai compris que le secteur culturel est non seulement bouché, mais surtout, qu’il ne recrute absolument pas.

À lire aussi : J’ai décidé de ne pas travailler – Témoignage

Mon amoureux, qui possédait « uniquement » une maîtrise en arts depuis trois ans, accumulait des petits contrats précaires. Une idée m’est alors venue à l’esprit : et si on bougeait ? Genre de l’autre côté de l’Atlantique ?

C’est à ce moment qu’on s’est lancé dans plein de démarches administratives pour s’établir au Canada. On nous avait proposé un visa vacances-travail d’un an. Mais non.

Ce qu’on voulait, c’était faire ce qu’on aimait en ayant un vrai statut fixe. C’était parti pour un an et demi de paperasses compliquées pour obtenir le Saint Graal : le statut de résident permanent. Avec ce papier-là, on peut aller dans n’importe quelle province canadienne, y rester à vie et bénéficier de l’assurance maladie.

À peine les documents reçus, nous avons acheté nos billets d’avion et tout laissé derrière nous : parents, frères, sœurs, amis… Certains nous ont pris pour des fous parce qu’on partait sans savoir si ça marcherait, sans savoir si on réussirait à vivre de ce qu’on aimait. Heureusement, la plupart d’entre eux nous soutenaient et croyaient en notre projet.

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Une fois sur place, on s’est vite aperçu que les choses étaient différentes. Le secteur culturel y est valorisé et prospère. Il nous a pourtant fallu patienter quelques mois pour trouver chacun un emploi dans notre branche, car au Canada cela fonctionne beaucoup par réseautage. Nous avons donc été bénévoles pour rencontrer un maximum de personnes, nous présenter, expliquer nos démarches, nos profils, etc.

Puis vint le plaisir de m’épanouir dans un travail qui me correspondait : organiser des expositions, gérer des projets culturels, côtoyer des artistes, diffuser les arts dans des zones rurales et plein d’autres choses.

À présent, je peux faire des projets à long terme, découvrir une nouvelle culture, arpenter de nouveaux paysages et vivre de ma passion. »

Cependant, certain•es ne considèrent pas ces choix de vie faits pour leur passion comme un sacrifice — peut-être parce qu’ils correspondent plus à leurs relations. L’Oiseau Rose, qui a tout quitté pour voyager, remarque :

« Je n’ai pas l’impression d’avoir fait des sacrifices pour ma passion, j’ai même plutôt tout gagné ! Cela me permet plus de liberté, de faire ce que j’aime au quotidien, etc. Et pour les mauvaises langues qui penseraient que voyager autant est incompatible avec le fait d’avoir une vie stable et d’être en couple, j’ai envie de leur dire que j’ai trouvé mon âme sœur depuis maintenant sept ans et qu’il aime autant les voyages que moi. »

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Des regrets ?

C’est pour cela que L’Oiseau Rose conseille avant tout aux passionné•es de « ne pas écouter les autres ! » :

« Quoi que l’on fasse dans sa vie, on ne peut pas plaire à tout le monde et il y aura toujours des personnes pour essayer de nous dicter une ligne de conduite.

Les normes sont faites pour être brisées.

Les normes sont faites pour être brisées ; vivez votre propre vie, pas celle que les autres aimeraient que vous ayez ! »

Cette madmoiZelle maintenant canadienne est d’accord.

« Je ne regrette rien, bien que ma famille et mes amis me manque. Le monde ne se limite pas à ton quartier, à ta ville, ta région ou ton pays. Si l’herbe ne te semble pas assez verte, n’hésite pas à aller voir plus loin. L’important est de ne pas avoir de regrets plus tard. »

Camille tient donc à mettre en garde sur un point :

« Le seul conseil que je peux donner c’est de ne pas vous adonner à une seule et unique passion, car vous pouvez délaisser beaucoup de choses importantes à coté. »

Eugénie, qui a comme L’Oiseau Rose tout quitté pour voyager à plein temps, conclut :

« À toutes les personnes qui ont une passion… Foncez ! Ce n’est pas toujours évident, ça peut ne pas marcher, on peut ne pas réussir… Mais je crois qu’il vaut mieux échouer que ne pas essayer ! »

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– Merci aux madmoiZelles qui ont témoigné !

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Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.

Les Commentaires

2
Avatar de Nacht
29 septembre 2016 à 11h09
Nacht
@Kaus Australis je me retrouve un peu dans tes paroles. J'étais scolaire, et de ce fait, tout le monde (camarades, famille, professeurs de collège et de lycée) me prédestinaient à faire de longues études. J'ai toujours aimé étudier, même dans le supérieur, et j'ai pourtant choisi des études courtes et professionnalisantes. Au final, j'ai ce que je veux : un boulot qui me permet de payer loyer, nourriture et loisirs. Par contre, je ressens une grande frustration en moi. C'est ce qui fait que j'ai entamé une reconversion professionnelle, à peine 2 ans après avoir commencé à travailler.

J'ai fait des recherches, je me suis renseignée, j'ai posé des questions, expérimenté. Au final, je me suis un peu "créé" une passion au fil du temps : les plantes.

Ce serait tellement plus confortable de continuer à occuper le poster que j'ai aujourd'hui ; gagner ma vie bien lotie, au chaud, sans trop de responsabilité. Mais comme le souligne bien l'article, je n'ai pas envie d'avoir de regret. Du coup, je suis en pourparler pour reprendre mes études dans ce sens l'année prochaine, et ça me rend joie
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