J’aurais voulu rester là à pleurer comme un enfant. J’aurais aimé laisser couler ces peurs, ces injustices, me déverser jusqu’à ce qu’un vigile consciencieux me foute dehors à grand renfort de coups de pieds au cul. J’aurais souhaité attendre. Immobile. Comme un bateau oublié des eaux, dénigré des hommes. Seul vestige sur une plage immense. Une ruine. Un désert.
Nous sommes en Angleterre dans les années 70. Hailshare est un pensionnat très singulier, avec en son sein des élèves non moins singuliers. Parmi eux, Ruth, l’opportuniste perfide, cruelle mais fragile. Kathy, la force douce, résignée mais courageuse. Tommy, l’espoir naïf, réservé mais bouillonnant. Ils jouent, ils dessinent, ils s’aiment, se découvrent. Amours avortées, trahisons enfantines. Ainsi va la vie. Sauf que leur vie à eux est particulière. Ils ne seront jamais vieux, ne travailleront jamais dans un supermarché, ni ailleurs, d’ailleurs. Ils grandissent coupés du monde réel, en quête d’identité, de repères. Leur destin est tout à fait différent. Ils le savent mais n’ont qu’une idée vague de ce en quoi il consiste.
Inspiré d’un roman de Kazuo Ishiguro, qui est l’auteur du scénario par ailleurs, Never let me go sème dans son sillon des avis épars. Si tu veux tout savoir, ce film m’a mis une claque comme j’en ai rarement reçue. Une bonne correction même. En revanche, à deux fauteuils de moi, un spectateur s’est distingué par ses ronflements sonores. Certains sont même partis avant la fin, alors que moi, scotchée sur mon fauteuil je savourais chaque plan, chaque couleur, chaque seconde, envoutée par le rythme lent et fluide mis en place par Mark Romanek.
Le trio Keira Knightley, Carrey Mulligan, Andrew Garfield fonctionne à merveille. La mise en scène met le spectateur au même niveau que les trois personnages principaux : on traverse les mêmes doutes, on ressent les mêmes angoisses, on partage les mêmes espoirs, on zone dans le même mystère et on se noie dans les non-dits.
ATTENTION SPOILER ! J’aurais voulu rester là à pleurer comme un enfant. Je les aurais observées. Admirées. Je les aurais aimées, ces âmes si parfaites, prisonnière d’un corps qui leur appartient pas. Un corps de seconde main, élevé au grain pour sauver des vies qui ne sont pas les leurs. J’aurais prié pour un miracle. C’est idiot, le miracle est déjà là : c’est eux. Leur corps, ce remède miraculeux, ce jardin d ‘organes où l’on fait cueillette quand le fruit est mûr. Je les aurais réconfortées. J’aurais sorti ce cri déchirant du fond de mes entrailles. J’aurais crié de toute mon âme pour sauver les leurs. FIN DU SPOILER
J’aurais voulu rester, mais il faut bien partir. Sans un mot, dans une larme ou dans un cri.
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Les Commentaires
Il avait l'air vraiment bien. Et les acteurs me plaisent grave