Salut !
C’est le retour de la personne qui te raconte sa vie !
J’avais très envie de te parler d’un bol japonais que j’ai acheté la semaine dernière, mais comme je suis payée pour te parler de cinéma, je vais plutôt te raconter tout plein de trucs sur un film.
Ma rencontre avec L’Empire des sens
J’ai une vraie histoire avec L’Empire des sens, un film franco-japonais réalisé par Nagisa Ōshima.
Son histoire sensuelle m’a poussée à le choisir pour mon Classique de la semaine, un rendez-vous que j’ai inauguré dimanche dernier avec L’Exorciste.
J’étais enfant la première fois que j’ai vu L’Empire des sens. Eh oui !
Je passais la nuit chez ma meilleure amie, dont les parents ont une vidéothèque extraordinaire et éclectique. Une sorte de caverne d’Ali Baba de laquelle il est difficile de sortir tant elle regorge de merveilles.
Entre cinq DVD de Star Trek et trois de Jacques Demy, nous sommes tombées complètement par hasard sur L’Empire des sens. Toutes pré-adolescentes que nous étions, le titre ainsi que la couverture nous ont interpellés.
Étions-nous devant un produit érotique ? Voire pornographique ?
Ni une, ni deux, nous avons introduit le disque dans le lecteur, et avons appuyé sur play.
Les deux heures suivantes nous ont vues glousser sans cesse, de gêne peut-être, de surprise sûrement.
Je l’ai filé quelques jours plus tard à une autre de mes amies, qui l’a montré à l’une de ses copines… Très vite, L’Empire des sens faisait partie de la culture cinématographique de jeunes filles émoustillées.
Ou pas, d’ailleurs ? Je n’en ai pas reparlé avec elles. Mais moi j’étais toute chose.
Alors laissez-moi tout vous dire à propos du film qui m’a procuré mes premiers émois.
L’Empire des sens, une ivresse érotique
Dans un quartier bourgeois du Tokyo des années 30, Sada Abe est une jeune domestique qui aime regarder ses employeurs s’ébattre. Parfois, elle soulage des vieillards vicieux rencontrés au coin d’une rue.
Malgré son statut d’homme marié, son patron, Kichizo, va s’éprendre du corps de la jeune femme. Les deux amants vont alors s’entrainer dans une aventure érotique qui ne connaît pas de limites…
Sans trop vous spoiler, le film contient des scènes hautement… étonnantes (pour une enfant).
Je me souviens notamment d’une séquence lors de laquelle Kichizo introduit un oeuf de poule dans le vagin de sa partenaire. Celle-ci s’accroupit et pousse très fort pour l’en sortir.
Du sexe, je ne savais à l’époque que ce qu’avaient bien voulu me dire ma mère et mon prof de sciences. Alors, je vous laisse imaginer ma tronche quand j’ai découvert que l’on pouvait introduire toutes sortes de choses dans « la zézette » !
L’Empire des sens est inspiré de faits réels bien CREEPY
Ce long-métrage relate des faits aussi sensuels que sanglants. Il se penche sur une histoire réelle : celle de l’affaire Abe Sada.
Cette jeune serveuse, anciennement prostituée, entretenait des rapports sexuels avec l’aubergiste pour lequel elle travaillait. Bon là, vous vous dites : « on s’en fiche des potins, wesh ».
Sauf que l’histoire ne s’arrête pas là. Abe Sada, pour une obscure raison, finit par assassiner son amant.
Puis elle lui coupe le pénis ainsi que les testicules et les transporte pendant toute une semaine dans son sac à main avant de se faire arrêter par la police.
Portée devant les tribunaux, elle est condamnée pour meurtre et détérioration de cadavre à six ans d’emprisonnement. Seulement voilà, l’opinion publique n’était pas de cet avis et… soutient la jeune femme !
Pour le peuple, il s’agit d’une folle histoire d’amour. Suite et fin : après son passage en prison, Abe Sada a tenu une maison close pendant quelques années.
Sulfureuse histoire !
Tout cela est en partie expliqué dans un film que je vous recommande grandement : La véritable histoire d’Abe Sada, de Noboru Tanaka. Une merveille de cinéma que tu peux te procurer pour 25,98€.
L’Empire des sens a fait scandale au Japon
Nagisa Ôshima était l’enfant terrible de « la Nouvelle Vague japonaise ». Provocateur talentueux, il a réalisé un film considéré aujourd’hui comme un chef-d’oeuvre mais qui a secoué le Japon au moment de sa sortie, en 1976.
Jugé pornographique, L’Empire des sens a été victime de censure.
Certaines scènes ont été coupées, les sexes ont été floutés et Nagisa Ôshima a même du comparaitre en justice après qu’on lui a collé un procès aux fesses pour obscénité, d’après Arte.
Il a finalement été relaxé en 1982, après trois ans de procédure.
Dévoilé à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, L’Empire des sens a également secoué la Croisette comme vous vous en doutez !
L’Empire des sens a révolutionné l’érotisme au Japon
Tout comme une bonne majorité des films pornographiques actuels, le « Pinku Eiga », cinéma traditionnel érotique japonais, est basé sur l’humiliation de la femme et s’adresse à un public essentiellement masculin.
À l’inverse, le réalisateur de L’Empire des sens voulait, d’après Télérama, que son cinéma puisse également plaire aux femmes. En faisant d’Abe Sada une héroïne dominatrice à la libido assumée, il révolutionne les codes de l’érotisme au Japon.
Je ne peux que trop vous recommander L’Empire des sens. Non seulement parce qu’il relève du sublime (sa photographie est d’une beauté inouïe), mais aussi parce qu’il était novateur. Révolutionnaire, même.
Voyez-le, fantasmez-le, partagez-le, parlez-en. Appropriez-le vous. Faites en ce que vous voulez, mais faites-le vivre. C’est important !
Pour qu’à travers lui continue à exister un peu de Nagisa Ôshima, le cinéaste aux fantasmes…
Et bonne nouvelle, tu peux mater L’Empire des sens à l’infini en te procurant le DVD pour la modique somme de 10€.
À lire aussi : L’Exorciste, le classique ciné de la semaine pour briller en société
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