Article publié initialement le 23 août 2011
C’est en traînant des talons que je me suis rendue hier soir au cinéma pour voir Conan le Barbare version 2011, adaptation par Marcus Nispel sur grand écran du célèbre recueil de nouvelles de Robert E. Howard. Dans la salle, treize spectateurs, et probablement autant de sceptiques. Retour.
[dailymotion]http://www.dailymotion.com/video/xj7sj8_conan-3d-bande-annonce-vost-conan-the-barbarian_shortfilms[/dailymotion]
Si vous avez manqué le début de Conan le Barbare 2011
Lorsqu’il n’est encore qu’un prépubère, le petit Conan (qui ressemble alors à s’y méprendre à Michelle Rodriguez) a les cheveux sales et les joues noires de suie. Quelques années plus tôt, il est né sur un champ de bataille, ce qui semble lui avoir donné des prédispositions certaines pour la fight
. (Note pour moi-même: si je me sens un jour sur le point d’accoucher, penser à aller donner la vie dans une galerie d’art pour que mon descendant ne soit que culture et délicatesse).
Un jour, il se bat dans la neige avec une demi-douzaine de méchants venant d’une autre tribu, et revient dans son village avec leurs têtes dans les mains. Tous ses voisins, son père le premier, sont fiers de lui et le félicitent d’un hochement de tête solennel: Conan est un futur guerrier prometteur. De nos jours, par contre, on se contenterait de diagnostiquer chez lui une tendance à la sociopathie; on sait vraiment plus s’amuser.
Le problème, c’est que les camarades de tribu des méchants ne sont pas ravis de ne retrouver que les corps sans vie et décapités de leurs charmants amis, et viennent donc brûler le village de notre héros, ainsi que son père. Conan se retrouve donc seul, ravale ses larmes, plisse les yeux et grogne. On le retrouve ensuite une vingtaine d’années plus tard, interprété par Jason Momoa (le gentil barbare de Game of Thrones). On ne sait pas ce qu’il a fait entre temps, mais une chose est sûre: la rage sourd toujours en lui.
« Kikoo, la rage sourd toujours en moi »
Conan, ou comment renforcer les clichés
La première demie-heure est divertissante : Conan met un doigt dans un nez, Conan coupe des têtes, Conan fait bouffer une clé, Conan bouge ses pectoraux et relève une de ses ailes du nez pour montre son mécontentement. Conan et sa peau dorée, son brushing faussement négligé et son faciès simiesque sexy à souhait. Le film, jusque-là prometteur, devient, très vite un ramassis de clichés à regarder au 36e degré pour rigoler.
Le plus significatif est, définitivement, le rapport de Conan aux femmes en général et à la prêtresse-au-sang-pur-et-aux-grands-yeux-bleus-innocents (Rachel Nichols, l’agent Seaver d’Esprits Criminels) en particulier.
Tout au long du film, il fait fi de son prénom et ponctue leurs dialogues de « femme »+ injonctions diverses. Exemples : « Femme ! Monte sur ce cheval ». « Femme ! Tais-toi, et mange ». Ca a l’air de marcher, puisqu’à la fin du film, elle lui court après pour qu’ils aillent forniquer joyeusement dans la paille.
L’histoire ne dit pas si celle que l’on appelera « Phame » prenait la pilule et s’ils ont procréé ou non, car Conan le Barbare est un film pour couillus. Surtout que Conan s’en fout, qu’il a d’autres chats à fouetter (genre, sauver le monde simplement pour se faire plaisir), et qu’il continue son petit bonhomme de chemin, tranquillou, des effluves de sueur dans son sillage.
Pour les besoins du film, Rose MacGowan a même gardé ses repères chirurgicaux pour faire joli
Autre fait inhérent au film: Conan est courageux. Les autres sont des femmelettes. Lorsqu’il se bat, il déploie ses muscles et éblouit ses ennemis de ses dents d’une blancheur impeccable, le tout en grognant d’une rage contenue. Pendant ce temps, les autres, – je veux dire, ses alliés les chiffe-molles – crient et l’appellent au secours. Exemple :
– Conan ! Ah, au secours, je suis enfermée dans une cage et j’ai pas la clé, ahhh ! – Gnnnn. (Il se bat à l’épée contre Anaconda version pieuvre) – Conaaan, à l’aide, ahhhh ! – Gnnnnn. (Il se bat à mains nus contre Anaconda version pieuvre) – Je vais mouriiiiir ! – Tu cries comme une femme… (il a tué Anaconda avec ses cheveux et délivre l’empoté)
Conan: 1 – Les autres gentils mais pas braves: -12
J’ai un peu tiqué en apprenant que le film avait nécessité un budget de 90 millions de dollars. J’ai d’abord pensé qu’une grosse partie de la somme avait été utilisée pour transformer le joli visage de Rose MacGowan en faciès de succube aussi aimable qu’Ayem, et puis j’ai vu une de ses dernières photos « au naturel ».
Je m’attendais à des batailles de fouuuu, à une oeuvre épique au pouvoir divertissant et vivifiant, et je me suis retrouvée à bailler comme si je regardais un Lars Von Trier un lendemain de soirée devant une bataille entre Conan, sa princesse, un méchant, et des monstres en sable aux yeux noirs.
Les trente premières minutes sont distrayantes, mais le reste tombe à l’eau (« comme un enfant qu’on jette à l’eau parce qu’il est trop gros et que ses parents voulaient un enfant maigre »*). Pour tout vous dire, au moment crucial, genre grosse bataille, j’ai. Tout simplement. Rien. Compris. Si l’envie vous prend de regarder un film qui pue la testostérone, donc, faîtes comme moi: tournez-vous désormais vers des valeurs sûres, comme Die Hard III pour ne pas la citer.
(*J’ai décidé de faire une référence à l’humour français dans chacun de mes articles, quel que soit le sujet)
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Notez quand même que les scénaristes étaient visionnaires vu que dans un épisode (qui date de bien avant les castings du film) McKay appelle Ronon "Conan Le Barbare" justement... la classe...
J'irai probablement pas le voir au ciné, mais je le verrais ce film c'est sûr.