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En Argentine, des milliers de femmes manifestent pour le droit à l’IVG

À l’occasion de la sortie du film Femmes d’Argentine (Que Sea Ley), Faustine fait le point sur la situation en Argentine, où l’annonce d’un projet de loi sur le droit à l’IVG et les manifestations de milliers de femmes donnent de l’espoir.

Cet article a été réalisé en partenariat avec Destiny Film (Notre Manifeste)

Mise à jour du 12 mars 2020 par Faustine

Depuis le 11 mars, le film Femmes d’Argentine (Que Sea Ley) est en salle. Dans un pays où l’IVG est toujours interdite, sauf conditions exceptionnelles, ce documentaire poignant retrace la lutte de femmes pour acquérir le droit à l’avortement.

Femmes d’Argentine (Que Sea Ley), un documentaire coup de poing sur la lutte pour l’IVG

Femmes d’Argentine (Que Sea Ley) m’a impressionnée par le courage des femmes qu’il met en scène, qu’elles aillent manifester dans la rue, ou qu’elles osent simplement témoigner de leur avortement en face d’une caméra dans un pays où cela pourrait les jeter en prison.

Malgré leur combat, le Sénat argentin s’est prononcé contre un projet de loi légalisant l’avortement dans la nuit du 8 au 9 août 2018.

Une décision politique profondément douloureuse pour les femmes en Argentine, mais qui ne les a pas découragées ! 

Le président argentin annonce un nouveau projet de loi pro-IVG

Grâce à la mobilisation continue des femmes et à l’élection d’un nouveau président de centre gauche, Alberto Fernandez, en octobre 2019, le vent est en train de tourner.

Ce dernier a en effet promis, le 1er mars 2020, de déposer un nouveau projet de loi en faveur du droit à l’IVG.

Victoria Tesoriero, présidente de la Campagne nationale pour le droit à un avortement sûr, légal et gratuit, se réjouit de cette annonce. Elle confie à l’AFP :

« Avoir un président qui se prononce en faveur [de la légalisation], c’est un succès de nous toutes. C’est un moment historique et nous devons rester mobilisées dans la rue. »

Les manifestations des femmes pour le droit à l’IVG

Lundi 9 mars 2020, au lendemain de la Journée internationale des droits des femmes, des milliers d’Argentines sont descendues dans les rues de Buenos Aires pour réclamer la légalisation de l’IVG et protester contre les féminicides.

Les mouvements féministes ont également appelé à une grève nationale des femmes pour rendre visible le rôle des femmes dans la société et l’économie .

Les manifestantes étaient parées de foulards verts, la couleur qui symbolise la lutte pour le droit à l’avortement, avec pour mot d’ordre, selon le journal La Croix :

« Éducation sexuelle pour décider, contraceptifs pour ne pas avorter, avortement légal pour ne pas mourir. »

Les anti-IVG mobilisés en Argentine

Du côté des opposants et opposantes, la mobilisation était aussi bien présente. 

Brandissant des foulards bleus, des milliers de personnes anti-IVG se sont rassemblées dimanche 8 mars à l’occasion d’une messe organisée à la Basilique de Notre-Dame de Lujan, un important lieu de pèlerinage.

L’Église catholique est officiellement opposée au droit à l’avortement et a annoncé, lors de la Conférence épiscopale argentine, une prise de position pour la « défense des deux vies », celle de la mère et celle de l’embryon, considéré comme un enfant à naître.

Selon la dernière enquête d’opinion sur les croyances et les comportements religieux en Argentine, le nombre de personnes pro-avortement a presque doublé en l’espace de 10 ans, passant de 14,1% en 2008 à 27,3% en 2019. 

Mais ceux qui pensent que l’avortement doit être maintenu sont également plus nombreux… Ils sont passés de 16,9% en 2008 à 18,7% en 2019.

L’avortement, un droit fondamental

J’espère que le droit à l’avortement sera bientôt acquis en Argentine. Car il s’agit d’un droit fondamental, selon Amnesty International

L’ONG soutient fermement la légalisation de l’IVG dans le pays :

« La légalisation de l’avortement pourrait représenter une véritable avancée historique pour ce pays et permettrait aux femmes d’espérer un avenir dans lequel leurs droits seront respectés et dans lequel elles seront traitées avec compassion. »

Les annonces du gouvernement sur le projet de loi à venir sur l’IVG

Le ministre de la santé, Ginés González García, a donné quelques indications sur le contenu du projet de loi.

Si ce dernier est approuvé par les deux chambres du Parlement, l’avortement légal sera possible jusqu’à la 14ème semaine de gestation

Le ministre de la santé a affirmé son engagement en faveur de l’« accessibilité » et du « droit à l’information ».

Si tu veux en savoir plus sur le combat des femmes en Argentine pour le droit à l’avortement, je te conseille d’aller au cinéma pour voir Femmes d’Argentine (Que Sea Ley) !

À lire aussi : 3 femmes méconnues qui se sont battues pour leurs droits

Mise à jour du 9 août 2018 – Le sénat argentin s’est prononcé cette nuit sur le projet de loi lié à la légalisation de l’avortement.

Comme le rapporte El Pais, les manifestantes ont continué de clamer leur souhait de liberté jusqu’au dernier moment. Elles sont restés dans la nuit, sous la pluie, dans le froid, espérant faire entendre raison au Sénat :

Sans succès, puisque ce dernier a confirmé sa réputation conservatrice en s’opposant à la légalisation, par 38 voix contre et 31 voix pour.

J’ai honnêtement du mal à trouver les mots pour décrire ma déception, et celle que doivent éprouver à l’heure actuelle les Argentins et les Argentines pro-choix qui se sont tant battues pour l’obtention de ce droit fondamental.

Surtout, mes pensées vont à ces femmes, qui vont continuer de devoir se cacher pour avorter, dans la honte.

Qui, comme auparavant, devront avoir recours à des procédés potentiellement dangereux pour leur santé, pour leur vie, que ce soit des médicaments de contrebande, des « faiseuses d’ange », des potions ingurgitées dans l’espoir de déclencher une fausse couche.

Je songe en particulier à celles d’entre elles qui sont isolées, qui n’ont pas de moyens financiers suffisants pour par exemple, voyager en Uruguayseul pays d’Amérique Latine où la procédure est légale, depuis 2012.

Je n’oublie pas non plus celles qui coûtent que coûtent, se battent pour qu’en dépit de la prohibition, les personnes ayant besoin d’avorter puissent le faire dans les meilleurs conditions possibles.

Elles sont médecins, militantes, elles prennent des risques pour accompagner celles qui sont en détresse.

Elles ne baisseront pas les bras. Il faudra certes attendre la prochaine législature pour qu’un tel texte soit de nouveau débattu, mais leur combat en a inspiré des centaines de milliers d’autres, partout en Amérique du Sud et dans le monde.

À titre personnel, c’est une profonde tristesse, et une colère intense qui me saisissent. Encore une fois, on dénie ce droit aux femmes, au prétexte de la vie, alors même qu’elles sont 50 000 dans le monde à mourir chaque année faute de pouvoir avorter dans des conditions sécurisées.

Comme l’ont tant crié les militantes argentines, ce vote n’était pas un vote en faveur ou contre l’avortement. C’était un vote pour ou contre l’avortement illégal, clandestin et dangereux. Un vote pour ou contre un accès légal et sécurisé à l’avortement. Car quoi qu’on dise et peu importe la répression, une femme qui doit avorter avortera. Même si c’est au péril de sa vie et de sa liberté.

Ce résultat maintient l’hypocrisie qui entoure la question en Argentine et dans de trop nombreux endroits dans le monde. Il maintient la vision obscurantiste religieuse qui s’applique à toutes, y compris à celles qui n’ont que faire de la voix de Dieu.

Mais nous n’abandonnerons pas. Nous ne nous résignerons pas. Toutes ces femmes qui ont encore une fois passer une grande partie de la nuit dehors sont désormais visibles. Personne n’oubliera les marées vertes successives qui sont entrées dans l’histoire depuis des semaines.

« La loi n’est pas approuvée, mais je garde cela, ces milliers de personnes autour du Congrès sous la pluie, et tout un jour passé à lutter pour leurs droits, simplement #ÇaFeraLoi »

Et à défaut de faire advenir le progrès maintenant, ce sera un jour, car nous sommes du côté de l’Histoire, du côté du progrès. « Sera Ley » : ça fera loi. SERA LEY !

« Ne croyez pas que nous allons oublier, ces noms sont couverts du sang de chaque femme qui meurt, clandestine. Vous êtes responsables, il y aura un coup politique.

Nous ne nous rendrons pas, nous continuerons de lutter parce que le futur est vert et féministe. #ÇaFeraLoi »

Mise à jour du 8 août 2018 –

Après l’Assemblée Nationale, c’est au tour du Sénat argentin de se prononcer aujourd’hui, mercredi 8 août, sur le projet de loi relatif à la légalisation de l’avortement.

Plusieurs scénarios se dégagent : si le projet de loi est approuvé sans modification, l’avortement sera légalisé. S’il est approuvé avec des modifications, il faudra qu’il repasse devant la Chambre des Députés. S’il est simplement rejeté, il ne pourra pas être débattu avant la prochaine période législative.

Celle-ci dure supposément une année, mais le journal Clarín indiquait il y a quelques jours qu’il y avait peu de chances pour que l’avortement soit de nouveau débattu avant 2020.

Mise à jour du 14 juin 2018 —

Les parlementaires ont voté en faveur de l’avortement ce jeudi. Esther a suivi l’événement en direct, tu peux assister à l’événement comme si tu y étais sur le compte Instagram @madmoizelledotcom, en story !

On y voit les militant·es pro-choix s’y réjouir et fêter ce vote historique. Le combat n’est cependant pas fini, puisque le Sénat, très conservateur, devra à son tour voter la loi.

On t’emmène suivre la manifestation à Buenos Aires en direct sur Instagram !

Esther est toute la journée sur la Plaza Congreso, juste devant le bâtiment où tout se jouera à Buenos Aires. Elle te montre l’ambiance sur place sur les comptes Instagram @madmoizelledotcom et @meunieresther.

– Article paru le 12 juin 2018

Esther est partie recueillir les témoignages des jeunes femmes de plusieurs pays, à travers le monde, avec une attention particulière portée aux droits sexuels et reproductifs : liberté sexuelle, contraception, avortement.

Elle a déjà rendu compte de ses rencontres avec des Sénégalaises, puis avec des libanaises, elle a aussi suivi les débats sur l’avortement en Irlande et sa quatrième étape l’a menée en Argentine !

Tu peux suivre au jour le jour ses pérégrinations sur les comptes Instagram @madmoizelledotcom et @meunieresther, avant de les retrouver ici bientôt !

Ce mercredi 13 juin 2018, les député·es argentin·es vont se prononcer sur un projet de loi lié à l’avortement.

L’avortement à la demande en Argentine est illégal

En effet, comme dans la très grosse majorité des pays d’Amérique du Sud – à l’exception notable de l’Uruguay et des territoires d’outre mer guyanais – l’avortement est interdit en Argentine.

Capture d'écran issue de la World Abortion Laws Map.
Capture d’écran issue de la World Abortion Laws Map.

C’est seulement en cas de risque pour la santé ou la vie de la mère, en cas de viol/inceste, ou de malformation foetale que les Argentines peuvent légalement recourir à l’avortement.

Celeste Mac Dougall, très investie au sein de la « Campagne Nationale pour le droit à l’avortement legal, sûr et gratuit » m’indique cependant que même dans ces cas, l’accès à l’IVG n’est pas automatique.

« Et de toutes façons il y a aussi toutes les situations qui ne correspondent pas à la loi actuelle et qui conduisent les femmes à avorter dans la clandestinité.

Pour elles, ça peut être fait dans des conditions relativement sûres si elles ont les moyens, mais lorsqu’elles n’en ont pas, ce peut être des conditions dangereuses. »

Selon les statistiques officielles, 43 femmes seraient décédées des suites d’avortements pratiqués dans des conditions non-sûres en Argentine en 2016, mais cela serait largement sous-estimé d’après des ONG.

Le chiffre de 450 000 avortements pratiqués chaque année dans le pays est souvent utilisé pour décrire la situation. Il date de 2005 mais donne un ordre de grandeur utile pour prendre conscience du problème.

À lire aussi : Interdire l’IVG, c’est mettre la vie des femmes en danger, comme le confirme cette nouvelle étude

Le combat pour le droit à disposer de son corps

C’est donc pour faire évoluer cette situation que les militantes s’organisent depuis 13 ans pour tenter de faire changer la loi.

Il y a déjà 7 ans qu’elles ont fait une première proposition. Cette fois-ci, comme le raconte Celeste Mac Dougall, de grandes consultations ont été faites en amont.

« On a travaillé sur le projet de loi ensemble, on a organisé des assemblées, dans les universités et dans différents lieux publics pour que notre proposition soit élaborée le plus démocratiquement possible.

Par exemple on a changé le mot « femme » pour l’expression « personne enceinte » pour que le texte soit plus inclusif. »

Jusqu’à cette année, le gouvernement s’était toujours opposé à son examen par le parlement.

Mais Mauricio Macri, qui a accédé à la présidence en 2015, souhaite marquer une véritable rupture avec le précédent gouvernement et c’est sans doute ce qui l’a incité à autoriser l’examen de la loi bien qu’il soit lui même opposé à l’idée de la légalisation de l’avortement.

Il n’a pas donné de consigne de vote pour laisser aux membres de son parti et de son gouvernement la possibilité de définir eux-mêmes leur position. D’ailleurs, le ministre de la santé a pris son contrepied en affirmant son soutien au projet de loi.

Mais à la veille de la journée décisive de son examen par le parlement, le résultat demeure très incertain.

Que signifierait le vote de la loi de légalisation de l’avortement en Argentine ?

La proposition faite par les militantes impliquerait de dépénaliser et légaliser l’avortement jusqu’à 14 semaines de gestation sans condition.

Ce délai pourrait toutefois être dépassé en cas de grossesse issue d’un viol, de danger pour la vie de la mère ou de malformation foetale.

À l’origine, le projet de loi ne prévoyait pas d’objection de conscience :

« Le sujet a été très fortement débattu dans nos rangs mais nous avons décidé que nous ne pouvions pas l’inclure car c’est un obstacle, une limite à l’accès au droit à disposer de leur corps pour les femmes. »

Mais de même, que la possibilité pour les jeunes à partir de 13 ans d’avoir recours à l’IVG sans être accompagné·es d’un parent ou responsable légal, cela pourrait changer pour rallier les parlementaires qui doutent encore et dont les votes seront décisifs.

Le droit à l’avortement, une lutte sans fin ?

Alors que la session parlementaire pourrait durer entre 12 et 30 heures selon différentes estimations des médias argentins, les militantes pro-choix ont prévu de se rassembler sur la Plaza Congreso toute la journée, devant le bâtiment où tout se jouera.

Mais même si la chambre basse du parlement vote en faveur de ce progrès, le projet de loi risque fort de se heurter à l’opposition du Sénat, plus conservateur, et qui devra aussi voter le texte en août.

Celeste Mac Dougall ne prévoit pas de baisser les bras pour autant :

« Nous allons continuer de faire ce que nous savons faire et ce que nous sommes légitimes de faire : lutter pour nos droits et sauver les vies des femmes en travaillant avec tout le monde, des professionnels de la santé jusqu’aux enseignants.

Nous allons nous battre pour créer un consensus social sur ce droit, ce qui est la clef pour qu’il soit effectif. »

Merci infiniment à Marie Jacquillard et Mathilde Truong pour à la traduction !


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Les Commentaires

11
Avatar de Neverland90
22 avril 2021 à 10h04
Neverland90
Limite, tu fais une fausse couche en Argentine, t'es soupçonnée d'avoir commis un avortement.
Courage aux Argentine, j'espère que le dialogue est tout de même ouvert.
0
Voir les 11 commentaires

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