Au coeur de l’Alaska, de petites villes de bric et de broc abritent des peuples comme les Iñupiat, qui vivent à Point Hope. Quand le vent du nord se lève et ouvre une brèche dans la glace, les hommes, comme leurs ancêtres avant eux, sortent bateaux et harpons pour une saison de chasse à la baleine. Mais Shell et d’autres compagnies pétrolières sont très intéressées par des puits d’hydrocarbures situés au large…
Zoé Lamazou, journaliste indépendante, et Victor Gurrey, dessinateur, sont partis passer trois mois à Point Hope pour assister à la chasse à la baleine, mais aussi essayer de comprendre ce que pense la population des forages à venir, à la fois manne financière et roulette russe écologique. Leur expérience a donné Une saison de chasse en Alaska, un beau livre inaugurant une nouvelle collection des éditions Paulsen, dédiée aux reportages en immersion.
Entre traditions et modernité, Point Hope surnage
À Point Hope vivent les Iñupiat, un peuple riche en traditions qui vit au rythme de la nature, mais aussi à celui de l’électricité, de l’alcool bon marché et des aides gouvernementales. Diverses commissions ont permis de sauvegarder leur Histoire et leurs coutumes, y compris celle de la chasse à la baleine, strictement encadrée et quantifiée mais toujours légale.
Ici, point d’animaux mutilés puis rejetés à l’eau, point de trafic ou de destruction de l’écosystème : l’entièreté de la baleine est utilisée. Sa viande nourrira plusieurs familles. Sa graisse savoureuse donnera le maktak bouilli, un en-cas savoureux servi sur un beignet gorgé d’huile qui réchauffe le corps et le coeur. Ses fanons seront des stèles funéraires ou serviront à la construction. Sa peau fera un bel oumiaq
, un bateau de pêche, car même la fibre de verre moderne est trop bruyante sur la glace et éloigne les proies.
Mais Point Hope, c’est aussi une bibliothèque avec des ordinateurs connectés à Internet ; ce sont des jeunes qui préfèrent jouer à la Xbox plutôt que d’apprendre les coutumes ancestrales ; c’est l’alcoolisme qui tue jour après jour et les billets hors de prix pour Anchorage, la plus grande ville de l’État.
Et c’est surtout le ballet incessant des compagnies alléchées par l’odeur du pétrole enfoui loin sous la glace et sous la mer, qui viennent sonder les habitants et négocier avec les commissions protégeant l’héritage des Iñupiat.
Le pétrole, cette alléchante malédiction
De nombreux oléoducs sillonnent déjà l’Alaska, mais l’avenir du pétrole se trouve sous la mer, et suscite l’intérêt de diverses multinationales promettant toutes un respect de l’environnement, de l’écosystème et surtout un apport financier pour la région et ses habitants. Le problème, c’est qu’il suffirait d’un seul dysfonctionnement, d’une seule marée noire pour causer des dégâts quasi-irréversibles sur l’équilibre déjà fragilisé de la nature arctique.
Un oléoduc non loin de Point Hope
Les deux Français savaient qu’en abordant le problème écologique de front, ils risquaient de brusquer les habitant-e-s de Point Hope. Ils tournent donc autour du sujet en rencontrant plusieurs personnes aux professions et aux vies très différentes, s’intégrant à demi chez les Iñupiat et apprenant beaucoup de choses sans perdre de vue leur sujet principal.
Une saison de chasse en Alaska (27,55€ sur Amazon, et 29€ chez votre libraire préféré) est un beau livre à la fois instructif et divertissant, qui permet de découvrir des façons de vivre différentes et des problématiques graves dont on entend trop peu parler. De plus, ça fera un beau cadeau pour la fête des mères ou la fête des pères, si l’un de vos parents est intéressé par les voyages et/ou l’écologie !
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