La guerre contre le téton n’en finit pas. Enfin, celui qui est « considéré comme féminin », pour reprendre la terminologie foireuse de Tumblr : les mamelons semblant appartenir à des hommes ne créent pas autant de scandale que lorsqu’ils sont posés sur une paire de seins…
Ce double standard, cela fait longtemps qu’il fait couler de l’encre ; il a même donné son nom à un mouvement visant à y mettre fin, #FreeTheNipple. Aujourd’hui, c’est Ponce, streamer très populaire sur Twitch, qui en a fait les frais. Mais au lieu de s’en prendre au puritanisme de la plateforme, certains ont jugé qu’il était bienvenu de… blâmer des femmes.
Oui, je sais, c’est absurde. Le patriarcat l’est souvent.
Ponce, banni de Twitch à cause d’un tout petit téton
Ponce — Aurélien Gilles dans la vie civile — cumule plusieurs centaines de milliers d’abonnés sur Twitch et YouTube où il livre un contenu bienveillant et feel-good ; il a notamment fait parler de lui avec une interview de Samuel Étienne parue à l’automne 2020. Sa communauté est surnommée « les fleurs » : autant dire que ce n’est pas un streameur habitué à la provoc et aux bannissements.
Il a pourtant vu sa chaîne sauter pour la première fois ce 17 juin au soir, parce qu’il a diffusé une bande-annonce de film des années 1970 comportant un téton
. Shocking selon Twitch qui a immédiatement sanctionné l’offense : 24 heures de coupure pour Ponce.
L’histoire aurait pu s’arrêter là ou être une bonne occasion d’interroger à nouveau la dépendance à des plateformes américaines ayant une vision assez problématique des corps féminins ou considérés comme tels. Mais c’était sans compter sur ce bon vieux slut-shaming toujours prompt à pointer le bout de son nez…
Quand le sage montre le patriarcat, les imbéciles pointent les streameuses sexy
Madmoizelle vous en parlait récemment : les streameuses en bikini, souvent installées dans des piscines ou jacuzzis gonflables, ont été accusées de dévoyer la plateforme et de « voler » les vues et abonnés des « vrais » créateurs et créatrices de contenu. Fatigue. Heureusement, Twitch avait réagi plutôt intelligemment à la polémique en ouvrant une catégorie dédiée à ce type de format.
Force est de constater qu’il reste du chemin à faire, car plusieurs personnes ont jugé bon de cibler ces mêmes streameuses pour dénoncer le bannissement de Ponce — alors qu’elles n’ont joué aucun rôle dans cette décision.
Les streameuses en bikini ont-elles décidé que les tétons « féminins » n’auraient pas droit de cité sur Twitch ? Non. Probablement qu’une partie d’entre elles aimeraient d’ailleurs que ce ne soit plus un motif de bannissement. Mais les sexistes ne réfléchissent jamais à cela — ils ne voient qu’une nouvelle occasion de taper sur des femmes juste parce qu’elles font ce qu’elles veulent de leur corps, et osent jouer de leur désirabilité sans y être contraintes par un homme.
Heureusement, Ponce n’a pas laissé ces messages sans réponses : il a adressé un message collégial qui, sans dénoncer précisément le slut-shaming, rappelle vers qui les critiques doivent s’orienter.
En attendant que certains cessent de rebondir sur la moindre actualité pour s’en prendre à des femmes, espérons que Twitch se rende un jour compte qu’un morceau de peau n’a jamais tué personne — sachant que les règles de la plateforme n’interdisent pas les mamelons masculins lorsqu’ils ne sont pas sexualisés mais présentés dans un contexte cohérent, comme une plage par exemple.
Tant que les tétons féminins resteront vus comme sexuels avant tout, et non comme une simple partie du corps ayant une réelle utilité, ce double standard restera malheureusement tenace.
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