En partenariat avec le Nikon Film Festival (notre Manifeste)
Ça ne fait pas si longtemps que je « m’expose » sur Internet.
Bien avant cela, j’avais pu voir des personnes qui, sous couvert de l’anonymat du web, s’attaquaient à d’autres sans raison aucune — puisqu’il n’existe pas de raison valable pour inviter quelqu’un à se donner la mort ou lui souhaiter d’être violé·e.
Le cyberharcèlement, rare ?
J’ai cru tout d’abord que c’étaient des cas isolés, des propos désagréables mais pas si graves, et que ça n’arrivait pas tant que ça.
Mais après le cyberharcèlement qu’a souffert Marion Seclin, est venu le tour de Nadia Daam. Puis Nikita Belluci. Dany Caligula. Plus récemment, Bilal Hassani.
Les cas de harcèlement en ligne plus ou moins incompréhensibles mais jamais justifiés se sont enchaînés, et j’étais bien consciente qu’il ne s’agissait là que d’une partie immergée de la malveillance dont peuvent faire preuve les internautes.
Chez madmoiZelle, il est fréquent que nous nous prenions en pleine face qui d’un commentaire insultant, qui d’une shitstorm aux vents plus ou moins violents.
Faire face à des commentaires négatifs en équipe
Nous avons la chance d’être une équipe. Nous sommes informées, nous savons ce que nous risquons, nous apprenons à être les plus irréprochables possibles, à savoir ce que nous défendons, à ne pas se sentir trop affectées par des remarques uniquement malveillantes.
Nous nous soutenons. À chaque commentaire négatif, nous avons le loisir d’aller râler auprès d’une collègue, de parodier ladite remarque, pour extérioriser, quitte à n’être pas très politiquement correctes sur le moment — mais qui l’est toujours ?
Ce fut le jour où je me suis pris une petite déferlante de haine dans la tronche que j’ai réalisé à quel point cela était précieux.
La fois où j’ai compris ce que pouvait signifier se faire insulter sur le net
50 pauvres petits tweets que j’ai perçus comme étant d’une violence incroyable m’ont profondément affectée, alors que je savais, je savais que j’avais raison, que des insultes sans arguments ne doivent pas avoir d’impact, que si l’article que j’avais écrit suscitait tant de haine, c’était que quelque part il avait visé juste.
Mais deux facteurs ont permis que les coups me touchent : je ne m’y attendais pas, et j’étais seule lorsque je les ai découverts.
J’ai eu la chance d’avoir le bon réflexe : j’ai envoyé un message à ma boss pour lui demander de débriefer là-dessus ensemble le lendemain matin, et j’ai coupé mon téléphone pour la nuit.
Le lendemain, elle et mes collègues ont été là pour m’épauler, m’aider à comprendre, et tourner en dérision ces messages sans queue ni tête.
Je sais que c’est une chance, parce que je sais que ce n’est pas le cas pour tout le monde. Et quand je vois comment moi, entourée et victime d’une minuscule poignée d’insultes, ai été touchée par celles-ci, je n’ose imaginer celles et ceux qui n’ont pas ces possibilités.
La solitude face au cyberharcèlement, et ses conséquences dramatiques
C’est exactement de cela que parle le court-métrage de Sophie Jarmouni, Je suis VIRALE, en lice pour l’édition 2019 du Nikon Film Festival.
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2 minutes 20 ont suffi à Sophie Jarmouni pour décrire à la fois la cadence folle des partages et de la viralité d’un contenu ; tout comme elle est parvenue à montrer la balance qui se fait entre commentaires positifs et négatifs… Jusqu’à tourner au cauchemar.
Cette fiction ressemble beaucoup trop à une histoire réelle à mon goût. Parce que je sais les ravages que peuvent causer ces déferlements de haine.
Cela résonne en moi comme la jonction exacte entre un épisode de Black Mirror et le monde qui nous entoure.
Elle est loin, l’époque où je flippais en regardant cette série, mais où je me rassurais en pensant secrètement « heureusement, ce n’est qu’une fiction ».
J’aurais voulu qu’Internet ne soit peuplé que d’être humains sensibles, ou à la limite, par de gentils robots, pas une espèce de pugilat généralisé où les menaces de mort et de viol sont monnaie courante.
Voilà pourquoi il me semble primordial d’inverser la tendance, en partageant sans cesse des contenus positifs sur le net et dans la vie, en commentant avec bienveillance, en disant quand un contenu nous plaît et en refusant des pratiques violentes. Parce que oui, Internet, en 2018, c’est la « vraie vie ».
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