Vous l’avez reconnue cette voix, hein ? vous savez très bien à qui elle appartient. Ce 8 mars, Eric Zemmour, puisque c’est de lui dont il s’agit, a livré un message aux femmes qui le soutiennent lors d’un meeting spécialement fait pour elles. Quelle chance, hein ?
Pour info, et sans aucune surprise, c’était écrit « journée de la femme » sur son pupitre, car visiblement, on n’a pas reçu le mémo dans l’équipe du candidat, mais franchement qui est encore étonné ? Et quand bien même il aurait écrit « journée internationale des droits des femmes » comme il se doit, en vrai ça ne change pas grand-chose. On le sait : le feu brûle, l’eau mouille, Eric Zemmour est misogyne, raciste et homophobe.
C’est quand même savoureux d’ironie de voir un personnage qui s’évertue à clamer la supériorité des hommes sur les femmes depuis un bon paquet d’années, tenir à ce point à faire un meeting en s’adressant aux femmes un 8 mars. Franchement, quand on s’appelle Eric Zemmour, c’est vraiment se donner beaucoup de peine.
Elle semble bien loin l’époque où il n’était que chroniqueur et qu’il n’en finissait pas d’affirmer qu’hommes et femmes sont non seulement différents, mais surtout pas égaux, que les femmes ne sont pas capables de diriger, que la sexualité des hommes est forcément conquérante et violente…
Alors oui, ce meeting c’était l’occasion pour lui de dire tout le bien qu’il pense des femmes françaises, des femmes libres et fortes, celles qui détestent qu’on leur dicte ce qu’elles doivent penser.
Sa marotte du moment sur les femmes, c’est de louer notre capacité de choix, celle de faire ce qu’on veut, à être des mères si on le décide, à accomplir les tâches ménagères si on le souhaite…
La veille du 8 mars, il a tenu cette ligne dans l’émission Face aux Françaises sur LCI et ça ne manque pas de piquant
Ce petit malin d’ Eric Zemmour, qui met de la liberté de choix, un vocabulaire hautement féministe, là où ça l’arrange, par exemple, au hasard, dans le foyer. « Dictature », hurle-t-il, en comparant donc la journaliste Ruth Elkrief à Staline, quand on lui parle, Ô scandale, de répartition équitable des tâches au sein du couple et de la cellule familiale. Bah oui, on n’est plus à une outrance près.
Avec une logique aussi imparable que « c’est comme ça et puis c’est tout », Eric Zemmour défend sans rougir une approche totalement essentialisante des hommes et des femmes, et bien sûr, la pseudo appétence de ces dernières pour les métiers du soin et la tenue du foyer.
Oui, c’est minable, c’est inepte comme raisonnement, mais c’est pourtant à peu de choses près ce qui tient lieu de démonstration à Eric Zemmour pour justifier les inégalités. Elles sont là, et c’est comme ça, et même quand on tente d’en venir à bout, les femmes vont naturellement vers les tâches et les métiers auxquelles elles sont traditionnellement assignées.
Face à ces « néo-féministes », vous savez, celles qui sont contre les hommes donc pas les vraies féministes , Eric Zemmour se plait à défendre la sphère intime. On ne touche pas au foyer, on ne touche pas à la vie privée. Et ce n’est pas le seul endroit où celui-ci abuse de son joker.
« Je n’ai pas à répondre. Parce que c’est ma vie privée, je ne parle pas de ma vie privée. Ces femmes-là m’accusent sans aucune preuve, comme ça, c’est parole contre parole »
Eric Zemmour
Voilà la seule réponse qu’Eric Zemmour donne après l’enquête de Mediapart de ce même 8 mars. Il ne dément rien.
Une enquête qui revient sur plusieurs témoignages de femmes ayant croisé sa route et dépeignant un individu qui considère qu’il peut à sa guise se servir du corps d’une femme, mais surtout qui use de sa position hiérarchique et de sa notoriété pour poser sa main sur sa jambe, lui caresser le dos, la pousser contre un mur et l’embrasser de force.
À chaque récit, on peut voir que les victimes sont des petites mains, elles ne sont pas comme lui dans la lumière : ce sont des stagiaires, des assistantes, des hôtesses d’accueil.
Aucune n’est au même rang que lui et par conséquent, aucune ne peut parler à ses supérieurs ou porter plainte sans prendre un risque pour sa carrière. Toutes font part du même sentiment d’écœurement et de découragement : qui les aurait crues à l’époque ? qui aurait prêté attention à leur toute petite voix face à la star des polémistes ?
On nous a longtemps parlé de Zemmour comme du « Trump à la française », mais il nous manquait son « grab them by the pussy » (son « il faut les attraper par la chatte », l’ultime violence misogyne d’un homme capable de considérer les femmes comme des objets dont on dispose et non comme des personnes.
Il en faut du culot pour invoquer la vie privée, mais comme le relèvent les journalistes de Mediapart, l’argument est récurrent dans les affaires de violences sexistes et sexuelles.
Et tant que la justice ne se saisira pas de ces témoignages ou que les médias continueront d’éviter le sujet et ne confronteront pas le candidat à la présidentielle sur les accusations qui pèsent sur lui, Eric Zemmour pourra continuer de prêcher son rejet tout théorique des violences faites aux femmes, et les victimes de violences sexistes et sexuelles de la part d’hommes tout puissants continueront de se terrer dans le silence.
Un coup de pied dans les urnes est un podcast de Madmoizelle écrit et présenté par Maëlle Le Corre. Réalisation, musique et édition : Mathis Grosos. Rédaction en chef : Mymy Haegel. Direction de la rédaction : Mélanie Wanga. Direction générale : Marine Normand.
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