Jouer dans une série à succès pendant dix ans peut être à la fois une bénédiction et une malédiction. Le jour où elle s’arrête, il est parfois difficile pour ses acteurs d’enchaîner sur une carrière fructueuse quand le public a l’habitude de nous voir dans la peau d’un seul personnage. Les exemples ne manquent pas, de James Van Der Beek à Michael T. Weiss en passant par Brandon Walsh.
C’est le cas de Matthew Perry, qui a connu la gloire en jouant le rôle de Chandler Bing dans la série Friends. Depuis l’arrêt de la série en mai 2004, après dix saisons, il a tenté quelques retours plutôt ratés. Ses problèmes d’addiction aux analgésiques, qui l’ont poussé à entrer en cure de désintox une première fois en 1997, ne l’ont sans doute pas aidé. Il y est d’ailleurs retourné en 2001, toujours pour abus d’analgésiques, mais également pour traiter son addiction à la méthadone, aux amphétamines et à l’alcool. Bonne ambiance.
Il a ensuite joué dans quelques films et séries avant d’effectuer ce qu’on pensait être son grand retour dans la série Mr. Sunshine, qu’il a co-créée. Raté, la série n’a rencontré aucun succès et a été annulée au bout de neuf épisodes. Alors quand on a appris qu’il tentait un nouveau retour cette année, on a tous serré les fesses et croisé les doigts pour que cette fois soit la bonne.
http://www.youtube.com/watch?v=ZkQ8dwI9f-4
Go On, une histoire de deuil et de câlins forcés
C’est donc dans Go On, créée par Scott Silvieri (qui avait déjà écrit et produit pour Friends), qu’il revient cette année. Diffusée depuis le 11 septembre sur la chaîne américaine NBC, cette série nous plonge dans le quotidien de Ryan King, un commentateur sportif qui vient de perdre sa femme dans un accident de voiture
. Persuadé de pouvoir reprendre le boulot quelques semaines à peine après le décès de Janie, il est envoyé en thérapie de groupe par ses patrons qui ne croient pas à sa guérison miraculeuse.
Le groupe est dirigé par Lauren, une psy qui se retrouve bien dépourvue lorsque Ryan débarque avec ses gros sabots et son refus de se confronter à sa douleur. Persuadé qu’il va très bien, et que déblatérer pendant des heures en face de parfaits inconnus ne l’aidera en rien, il se contente de foutre le bordel dans chaque séance en poussant les autres patients à se lâcher, à s’amuser et à mettre leur deuil de côté. Ce qui le pousse, forcément, à faire quelques erreurs de jugement qui ne resteront pas sans conséquences. Heureusement, Super Lauren n’est jamais loin et est toujours prête à réparer ses erreurs en lui claquant deux ou trois leçons de morale au passage.
Le reste du groupe est composé de personnages hauts en couleurs, tous complètement différents les uns des autres – il y a notamment Bill Cobbs, un petit vieux aveugle, aussi drôle qu’il est touchant, ou encore Julie White, une avocate qui tente de se remettre de la mort de sa compagne tout en essayant de contrôler sa colère, et Suzie Nakamura, une jeune femme un peu perchée qui tente de digérer le divorce de ses parents. Chacun gère son deuil à sa façon, qu’il s’agisse d’un décès, d’une séparation, de la mort d’un animal ou d’un frère dans le coma.
Et Ryan King finit par y trouver sa place, bien qu’il ait toujours un peu de mal à respecter les règles imposées par Lauren et qu’il prenne un malin plaisir à secouer un peu tout le monde pour les sortir de leur quotidien morose et leur permettre de craquer un peu leur slip. Sauf qu’on ne sait pas trop si ses actions sont motivées par un mélange de lassitude et d’altruisme ou par un mix de d’égoïsme et de trouille d’affronter son malheur (indice : la réponse à cette question se trouve dans un des tout premiers épisodes).
Un projet vraiment durable ?
La série n’en est qu’à quatre épisodes diffusés à ce jour, mais difficile d’imaginer comment elle va tenir sur la longueur. Si Ryan King n’en est pour l’instant qu’au tout début de son processus de deuil, il y a peu de chance pour qu’on tienne plusieurs années sur le même format. Combien de temps allons-nous tenir sur la base “Ryan n’arrive pas à faire son deuil, alors Ryan va faire une thérapie de groupe, et ils vivent des aventures extraordinaires chaque semaine et c’est drôle et émouvant et youpi” ? C’est un scénario qui aurait super bien fonctionné pour une comédie feel-good en long-métrage, mais en série, j’ai peur que son espérance de vie ne soit fatalement réduite.
http://www.youtube.com/watch?v=tKFNFjglzy0
Pour l’instant ça va encore, on vient seulement de commencer et on sent bien qu’il y a du boulot pour Ryan, qu’il commence tout juste à reprendre le dessus et que tout est encore très frais. Mais dès le troisième épisode, alors qu’il avait tout rejeté en bloc au départ, il se retrouve avec tout le groupe chez lui en pleine nuit, venu pour lui remonter le moral. L’épisode s’achève sur une petite musique douce et une scène pleine de bons sentiments, d’accolades et de rires gras. Comme quoi, ça va peut-être aller un peu plus vite que prévu… Reste à voir s’ils seront capables de rebondir et de faire avancer le schmilblick de façon crédible, durable et agréable. Il y a quand même de grandes chances pour que ça tombe dans la guimauve prévisible et répétitive, donc lassante, mais allez savoir, on aura peut-être des surprises.
De mon côté, c’est avec une pointe de honte que je vous avoue que chaque épisode m’a fait à la fois rire et pleurer à chaudes larmes – mais pour ma défense, il faut savoir que je suis un vrai coeur d’artichaut. Le truc, c’est que je ne peux pas m’empêcher d’imaginer que Ryan King est en réalité Chandler Bing et que c’est Monica qui est morte. Alors forcément, ça plombe un peu l’ambiance et ça force à l’empathie. De plus, Ryan a la langue bien pendue, maîtrise sarcasme et blagounette à la perfection, et possède ce petit grain de folie douce qu’on voyait déjà chez Chandler. Ce qui explique sûrement la crédibilité et le confort visible de Matthew Perry dans ce rôle, ce qui n’est pas désagréable à observer.
C’est pour ça que j’ai décidé de donner une chance à cette série, pour le moment, bien que je ne puisse m’empêche de rester très méfiante. Et c’est donc tout à fait logiquement que je vous encourage à y jeter un oeil à l’occasion, d’abord pour le plaisir de retrouver Matthew Perry, mais parce qu’il y a quand même du bon dans ce qu’on a pu voir pour le moment, et que chaque tranche de vingt minutes contient assez d’humour et de bonne humeur pour vous mettre la patate.
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Les Commentaires
ça fait longtemps que j'ai pas rit aux éclats toute seule devant mon ordi.
J'imagine que le groupe sert à installer les personnages, je ne pense pas que fin de la thérapie = fin de la série. On peut très bien suivre les personnages après non ?