Un collectif d’organisations militant pour les droits des femmes a décidé de frapper fort, ce 22 novembre.
Quelques jours avant la marche contre les violences sexistes et sexuelles en France, et avant la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, il publie un rapport intitulé « Où est l’argent contre les violences faites aux femmes ? ».
Où est l’argent contre les violences faites aux femmes : un rapport nécessaire
Dans son rapport le collectif explique percevoir la volonté législative de l’État français d’endiguer les violences faites aux femmes.
Il liste des lois votées depuis le précédent de 1994, qui établissait la spécificité des violences dans le couple. Depuis, des textes se sont en effet succédé pour renforcer les sanctions, mieux protéger les victimes, prévenir ces violences…
Pourtant, la législation n’est pas suffisante pour protéger ces femmes. En témoigne les chiffres toujours effrayants dont fait état le rapport :
« En 2016, 123 femmes et 34 hommes ont été tué.e.s par leur conjoint.e ou ex-conjoint.e. Parmi les 123 femmes victimes de leur partenaire, 30 (soit 24,4%) étaient des victimes de violences au sein du couple connues soit par les forces de l’ordre, soit par leur entourage. »
L’étude est circonscrite autour du parcours de sortie des femmes victimes de violences, car le collectif d’organisations ne disposait pas des moyens d’établir un état des lieux exhaustif.
On estime en effet que 84 000 femmes sont victimes de viol ou de tentatives de viol chaque année en France. C’est sans compter les violences commises sur mineures, ou sur femmes de plus de 75 ans.
Il est important de le préciser à mes yeux car cela illustre que les montants nécessaires avancés dans l’étude sont loin d’être suffisants pour enrayer le phénomène globalement, même s’ils constitueraient déjà une hausse conséquente.
Sortir d’un cycle de violences conjugales, un parcours de la combattante
Le collectif établit le fait que les parcours de sortie des violences conjugales ne sont pas tous identiques, mais comportent des étapes clés qui peuvent être accompagnées par les pouvoirs publics.
La révélation des faits d’abord, pour laquelle il est nécessaire de rencontrer un personnel formé aux violences, que ce soit les forces de l’ordre, le personnel de santé, des associations avec des dispositifs d’écoute fonctionnels.
Sache que tu peux t’adresser aux forces de l’ordre près de chez toi, mais aussi à des associations telles que Solidarité Femmes joignables gratuitement et anonymement au 3919, ou bien En avant toutes ! dont le chat est spécifiquement dédié aux jeunes femmes.
Tu peux aussi lire cet article sur madmoiZelle, repris sur le site du Secrétariat d’État à l’Égalité entre les femmes et les hommes : Mon mec m’a frappé pour la première fois, que faire ? Il décrit toutes les démarches que tu peux entamer, que tu souhaites aller en justice ou non.
La mise en sécurité est l’étape suivante, cruciale. Elle peut consister à éloigner le conjoint ou à fournir des dispositifs d’urgence tels que les « Téléphones Grave Danger » (TGD), qui permettent aux femmes victimes s’étant signalées de faire appel à tout moment à un service d’intervention en cas de danger.
Vient ensuite l’accompagnement lors de la phase judiciaire
, que ce soit les procédures de divorce ou celles qui concernent les violences.
Enfin, un accompagnement psychologique et social (soutien, logement, emploi) permet d’éloigner durablement les femmes du cycle de violences.
Combien faut-il pour accompagner les femmes victimes de violences conjugales ?
Le collectif a évalué les coûts de dispositifs permettant aux victimes de trouver un soutien effectif à chacune de ces étapes.
Deux scénarios ont été envisagés : une fourchette basse qui se base sur les chiffres des violences enregistrées par les forces de l’ordre et une fourchette haute qui prend en compte l’estimation du nombre de victimes totales (y compris celles qui ne vont pas en justice, donc).
Campagne de sensibilisation (10 000 000€) et permanence téléphonique (3 500 000€), sont nécessaires rien que pour la première étape du parcours de sortie.
On peut y ajouter entre 193 251 036€ et 449 188 875€ nécessaires pour l’hébergement d’urgence, 1 350 000€ pour les TGD concernant la mise en sécurité.
On atteint une somme de 33 212 104€ pour la formation des professionnel·les de la sécurité, de la santé, de la justice, des intervenants et intervenantes en gendarmerie et commissariat qui sont au contact des victimes à un moment ou un autre.
Il faut aussi compter un accompagnement tout au long du parcours de sortie qui revient à 4000€/victimes, et un dispositif de prise en charge du psycho-traumatisme qui coûterait entre 24 200 000 et 56 250 000€.
Au total, le collectif table sur un minimum de 506 millions d’euros pour mettre en œuvre les mesures nécessaires. La fourchette haute atteint quant à elle 1 106 300 000€.
Des associations en peine pour financer leur lutte contre les violences sexistes et sexuelles
Le rapport explique aussi longuement les difficultés rencontrées par les associations.
Il leur faut allouer des ressources et un temps précieux à la recherche de subventions plutôt qu’au cœur de leur activité…
Cette situation conduit au recours aux dons privés, qui sont plus qu’incertains et nécessitent eux aussi un déploiement de ressources conséquent.
Le collectif a effectué une estimation du budget total déjà alloué à l’égalité et appelle in fine à relever la barre, comme le montre le tableau ci-dessous :
Finalement, rien que pour atteindre la fourchette basse, il faudrait multiplier le budget actuel par six.
La lutte contre les violences sexistes et sexuelles a besoin d’argent
Peut-être que ces chiffres semblent faramineux, mais ils ne sont pourtant qu’un premier pas, comme évoqué au début de cet article.
Pour moi, ils sont une raison de plus de me déplacer dans la rue ce 24 novembre, afin de crier mon impatience de voir les violences sexistes et sexuelles disparaître.
Et j’espère que pour le gouvernement, ils constituent une bonne raison de se pencher sérieusement sur le budget alloué à la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
À lire aussi : Les cyber-violences conjugales, ce danger trop méconnu
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