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Musique

Meds – Placebo

» EMI – sortie le 13 mars 2006

Je me souviens de la toute première fois où j’ai entendu Placebo. C’était en 1996 et j’étais tombé sur le clip de Teenage Angst dans lequel on voyait trois espèces de rejetons de Marc Bolan jouer dans un étrange cube élastique noir et rouge au milieu d’un pré… Je me disais qu’avec leurs looks androgynes, leurs têtes de vieux ados mal dégrossis et surtout cette voix acérée de Mickey Mouse sous amphétamines, ces petits nouveaux semblaient un cran au-dessus des hordes massives à l’époque d’autres groupes à guitares énervées dont on joue avec deux doigts qui finissaient dans les pubs TV pour Levi’s… (qui a dit clin d’oeil à Commercial ? :))

Mars 2006, soit dix ans plus tard (oups, déjà…), sort le cinquième opus du trio, toujours aussi glam, avec un poil moins de fond de teint qu’à leurs débuts (mais aussi moins d’acné) et bien sûr la ritournelle de la toute nouvelle coupe de Brian Molko (nouvelle promo d’album oblige).

Entre temps Placebo a eu le temps de se faire un nid douillet au creux de la scène rock internationale et compte bien y rester au chaud en nous pondant un album sacrément bien fichu. A quoi ça ressemble donc du Placebo en 2006 ? Une voix tranchante sur des guitares énervées dont on joue avec trois doigts, parfois quatre (oui l’ère du grunge est loin, on lâche du lest…) Alors ce Meds… pas de quoi dépayser le fan de 1996 ? Nous font-ils le coup du retour aux sources dont ils donnent le ton dans toutes leurs interviews du moment ? Pas si sûr que ça…

Pourtant dès les premières secondes du disque on est en terrain familier puisque c’est un riff redondant d’un des anciens tubes du groupe, Every You Every Me qui te saute dessus direct. Mais au fur et à mesure que le morceau se dévoile, on se rend mieux compte de ce qui a changé. Exit la mélodie glam à tiroirs et le schéma pop song sinueuse, Meds est carrée et rigide, Molko déclame nerveusement son texte avec un chant à la limite du parlé que vient seulement adoucir la voix sexy d’Allison Moshart (alias VV des Kills). Les titres qui suivent continuent dans cette voie et sonnent de plus en plus comme du rock industriel à la Trent Reznor jusqu’à Space Monkey, qui ressemble plus à du Marylin Manson (le côté clown en moins) qu’à du Placebo.

Produit par le français Dimitri Tikovoï (le projet Trash Palace, c’est lui) et mixé par Flood (qui a mixé pour Depeche Mode, Nine Inch Nails (tiens donc) ou les Smashing Pumpkins) Meds tire vraiment profit d’un son plus rock que ses prédecesseurs. Même les chansons les plus faibles de l’album sont tirées vers le haut par une production ultra-efficace : les effets électroniques et les samples sur Infra-Red, les guitares froides et noyées dans les effets sur Follow The Cops Back Home ou Post Blue plongent le disque dans une ambiance sombre et lunaire qui rappelle les meilleurs crus cold wave des années 80.

Cette mise en forme sonore est si omniprésente, énergique et confortable, que dans la seconde moitié de l’album, le combo se paie le luxe de pouvoir de ralentir le tempo sans perdre en intensité. Des notes de piano ont été parsemées à dose homéopathique (pas de ballade en accords mineurs au piano, on n’est pas chez Coldplay…) tout au long des treize pistes et mettent en relief les arrangements de six cordes les plus bruts. Pierrot The Clown avec son vibraphone sonne comme une boîte à musique claustrophobe, Broken Promise avec la voix sexy et envoûtante de Michael Stipe (R.E.M.) mêle mélancolie et colère dans une sorte d’imbroglio clair-obscur et In The Cold Light Of The Morning a des airs de B.O. d’Elephant Man. Le temps de nous faire une dernière Chanson Pour Dire Au Revoir pleine de tension et de synthés vintage dans laquelle Brian fait référence aux Beatles et à Neil Young (You were Mother Nature’s son […] Your needle and your damage done) et Placebo remballe son matos pendant qu’un ensemble de cordes synthétiques retient l’accord final.

Alors ce nouvel album ? Vrai-faux retour au rock d’un groupe de chefs d’entreprise qui auraient abusé du mascara ou disque jouissif d’une bande de trentenaires qui n’ont plus que vingt ans, à peine, une fois que les têtes d’amplis Marshall commencent à chauffer ?

La vérité est certainement quelque part entre les deux. Certes, Meds ne prend pas les risques qu’on peut attendre de certains de leurs contemporains qui cherchent sans cesse à se renouveller (comme leur idole de toujours David Bowie). Pourtant, Placebo a su se sauver des expérimentations trop convenues ou franchement ratées de Black Market Music et Sleeping With Ghosts pour nous offrir un Meds en plein dans le mille, puissant et bien calculé, qui confirme que les trois compères ne sont pas arrivés là par hasard.

Ceux qui n’aimaient pas le groupe peuvent acheter le disque et trouver ça franchement séduisant voire devenir accros, les fans intégristes de la première heure hurleront qu’il n’y a là que de la pop déguisée en rock (ben oui mais bon fallait pas attendre dix ans pour faire ce constat). Ca ne les empêchera pas d’acheter l’album et de l’écouter en boucle quand même… Pour les autres fans, simplement fans : c’est de la bonne musique et, pour ne rien gâcher, Brian est toujours aussi beau gosse.

Quant à moi, ça me donne envie de m’acheter une pédale Fuzz et de pousser le volume à 11. Juste pour voir.


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Les Commentaires

6
Avatar de Emotional-Retard
26 février 2010 à 01h02
Emotional-Retard
Placebo ça vaut plus rien et pis c'est tout. "C'était mieux avaaaaaaaaaant."

woah franchement quelle critique constructive! bravo !
0
Voir les 6 commentaires

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