En partenariat avec l’UCPA (notre Manifeste).
Je crois qu’au fond de moi, j’y croyais pas. Ou plutôt, ça me paraissait tellement incroyable que je n’y croyais pas. Pas vraiment, pas complètement, pas sérieusement.
Et je ne l’aurais pas cru si je ne l’avais pas vu de mes propres yeux, embués par les larmes d’émotions qui me submergeaient à ce moment précis.
Quand tu franchis la ligne d’arrivée, les jambes lourdes d’avoir bouffé 42 kilomètres et gravi deux montagnes le long du chemin.
Marathonienne : sur la route d’un exploit
42 kilomètres est une distance abstraite. C’est pas une distance qui se marche, tu prends forcément un transport quelconque pour parcourir 42 km. Sauf si l’on est un ou une athlète aguerrie : 42 kilomètres, effectivement, ça se court. C’est une distance mythique.
La légende raconte que le premier à l’avoir couru en est mort. Je dis ça…
Ils m’impressionnent et m’intimident, ces corps de muscles et ces têtes d’aciers, capables de repousser les limites de la physique, et les leurs au passage, pour accomplir des exploits.
Puissante
Tu ne m’en voudras pas je pense, Marion, de ne pas avoir vu en toi le profil-type de ces extraterrestres.
Moi je m’en veux un peu, tu sais, d’avoir cru si longtemps que la puissance était réservée à ceux qui en héritaient de naissance.
Tu m’as prouvé que c’était faux, en franchissant la ligne d’arrivée du Marathon du Mont Blanc, dimanche 1er juillet 2018, après 9 heures et 26 minutes de course.
Tu franchis cette ligne d’arrivée quatre minutes avant la barrière horaire initialement prévue, qui a finalement été repoussée de quinze minutes à cause des conditions de chaleur dantesques.
Ils étaient 345 à avoir été arrêtés par la barrière horaire. À l’arrivée, ils étaient 1902 finishers seulement, dont toi. 1752ème.
Marion L, marathonienne !
Ce qui m’impressionne autant dans cette performance, c’est que je sais d’où tu viens : pas d’une expérience de marathon, ni même de course sur longue distance.
Lorsque je t’avais rencontrée à Lyon, en juillet 2017, en plein casting pour recruter ma future équipe de trail, tu m’avais parlé de tes quelques expériences en triathlon, sur des distances raisonnables.
Pas d’Iron Man, aucune de ces courses où performent ces aliens dont je parlais juste avant.
Mais le marathon du Mont Blanc est pourtant l’une de ces courses, où l’on ne s’inscrit pas à la légère.
Et parce que c’est ton parcours qui m’inspire tant, Marion, je tenais à le raconter dans cet article, pour que d’autres « p’tites meufs » qui te ressemblent puissent se dire que c’est possible : devenir marathonienne.
#TrailXperience : making of d’un exploit
Quand l’UCPA m’a proposé de participé à une expérience de découverte du trail, c’était avec l’objectif de participer au marathon du Mont Blanc. Une course mythique, très difficile, qui rassemble les stars de la discipline. Kilian Jornet, la star du trail, était au départ, aux côtés du français Xavier Thévenard.
J’allais recruter 6 à 8 lectrices de madmoiZelle, des « sportives du dimanche » disciplinées et motivées, pour préparer l’une des 2 courses : le 23 ou le 42 km. Le Cross, ou le Marathon.
L’UCPA allait aussi sélectionner des participant·es, et un troisième partenaire de cette expérience, Mont Blanc Médias, complèterait le casting.
Marathon du Mont Blanc : au départ, ils étaient 14
Marion H, Marion P, Maya et moi-même composions l’équipe madmoiZelle de Paris, complétée par Yassine, Nina, Steve et Pauline pour l’UCPA.
Marion L, Charlotte et Léopoldine formait l’équipe madmoiZelle de Lyon, renforcée d’Erwann, JC et Valentin, sélectionnés par Mont Blanc Médias.
Les finishers du 23km, de gauche à droite : Marion P, Valentin, Léopoldine, Marion H, Charlotte
Nous avions des profils très différents, à tous les niveaux. Origines, formations, passé sportif, régularité d’entraînements, attentes et capacités…
Nous n’avions pas grand chose en commun, il faut le dire, au début de cette aventure, excepté cette curiosité pour le trail.
Je n’y serais probablement pas allée de moi-même, mais puisque vous me proposez d’essayer, de découvrir, d’expérimenter : pourquoi pas ?
Les finishers du 42km, de gauche à droite : Pauline, Steve, Marion L, Yassine, Nina, et Erwann au sol !
#TrailXperience : Pourquoi pas ?
Cette expérience a donné lieu sur madmoiZelle à une série d’articles « Journal de bord », et donnera lieu dans un second temps à une websérie. Tout au long de cette année, nous avons été suivi·es par les caméras de Spicee.
La diffusion de la websérie réalisée par Spicee sera bien entendu l’occasion de partager les coulisses de cette préparation : rendez-vous mercredi 28 novembre pour les deux premiers épisodes, et mercredi 5 décembre pour le troisième !
En attendant, je n’ai que mes mots et quelques images pour retranscrire la folie qu’a été cette expérience, et l’apothéose qu’aura été ce week-end de marathon du Mont Blanc.
Au cours des dix mois de préparation du 23km pour les uns, du 42km pour les autres, il y a eu des blessures. Moi-même, j’y suis passée en fin d’année, et j’ai dû renoncer à prendre le départ du 23km quelques semaines avant l’échéance, pour cause d’inflammation persistante au genou.
Au départ des 23km, samedi 30 juin, ils étaient 5 : Marion H, Marion P, Charlotte, Valentin et Léopoldine.
Et au départ du 42km, dimanche 1er juillet, ils étaient 7 : Nina, Pauline, Marion L, Steve, Erwann et JC.
Les conditions de chaleur étaient particulièrement éprouvantes, et elles ont poussé JC à l’abandon, après avoir enduré plus de la moitié du parcours.
Maya et moi-même étions blessées, nous n’avons pas pris le départ.
Toute la journée, j’ai bondi d’un point à l’autre du parcours pour encourager l’équipe UCPA #TrailXperience engagée sur ces 42 km du Marathon du Mont Blanc.
À mes côtés, les coureuses du 23km zappaient une récupération bien méritée pour repartir à l’assaut des sommets, tout au long du parcours.
Elles en témoignaient : nous avoir vu·es pendant la course avait été un boost précieux pour le moral. Aujourd’hui, les coureuses du 23 rendaient aux coureurs du jour ce soutien parfois décisif.
#TrailXperience : récit d’un marathon
Erwann a pris la tête du groupe, et a rapidement creusé l’écart. Sitôt le départ donné à Chamonix, le crew des supporters s’est rabattu vers le TER en direction de Vallorcine.
Les Praz de Chamonix, les Tines, les Bois, Le Lavancher, Argentière, et en gare de Montroc, deux stations avant Vallorcine, la tête de course est déjà passée. Nous sommes à environ une heure et vingt minutes du départ, les premiers n’ont laissé qu’un nuage de poussière.
Mais alors que le train était arrêté en gare, nous reconnaissons le maillot jaune fluo de la team UCPA #TrailXperience, ainsi que la tête brune qui en dépasse : Erwann est déjà là.
Si ce train ne repart pas bientôt, il risque de nous devancer à Vallorcine !
Temps de passage à Vallorcine : première montée
C’est à Vallorcine que les choses sérieuses commencent, avec le départ d’une montée jusqu’à l’Aiguillette des Posettes, 2201 mètres, par le col des Posettes, à 1997 mètres.
Erwann ne nous aura pas fait attendre longtemps : nous ne sommes au bord de la route que depuis quelques minutes lorsque la flèche fluo déboule du dernier virage. 8h51.
L’ambiance est survoltée : un orchestre de percussions donne le rythme et la pêche pour attaquer la côte en lacets. Les riverains, touristes et supporters s’agglutinent le long du serpent qui grouille vers le sommets.
Des cloches, des gris gris de supporters et un concert de voix se mêlent à l’écho des montagnes. Je répète « ALLEZ ALLEZ ALLEZ » en boucle, et en hurlant.
Pauline passe en deuxième, quelques minutes seulement devant Yassine, avec Steve dans sa roue.
Nina suit, un bon quart d’heure derrière. Marion et JC ferment la marche du groupe, vers 10h30 passées.
Au Col des Posettes : premier ravitaillement
On se précipite vers les oeufs qui amènent les promeneurs du dimanche au col des Posettes : quelques minutes d’ascension mécanique pour nous, des litres de sueurs pour les coureurs qui serpentent en-dessous de la remontée mécanique.
Erwann est annoncé au ravitaillement du col des Posettes à 10h48, et nous arrivons quelques minutes trop tard : nous voilà devancées !
Mais j’attrape tout de même les passages de Pauline, Yassine et Nina, pas trop échauffées par la montée, qui n’est d’ailleurs pas terminée : juste après le ravitaillement, l’ascension se poursuit jusqu’à l’Aiguillette des Posettes.
C’est une autre histoire pour Steve, Marion L et JC. La chaleur combinée à l’effort requis par cette première longue montée a sérieusement attaqué la tête et les jambes. Ils ne sont pas encore à la moitié, mais la jauge des réserves est déjà bien plus avancée.
La Flégère : suspense et contre-la-montre
Le crew des supporters est reparti en train, direction Chamonix, et une hésitation : se rendre à l’arrivée comme prévu ? Ou se poster à un autre point de passage intermédiaire, pour prodiguer ce soutien moral si précieux à un moment où il sera plus que nécessaire ?
Nous décidons de diviser pour mieux régner sur le moral des troupes : Charlotte, Valentin et Marion P iront directement à l’arrivée, que l’on soit sûres de ne pas rater Erwann une deuxième fois.
Léopoldine, Marion H, Maya et moi irons à la Flégère : dernier ravitaillement avant la fin du monde l’arrivée, et ses 5 derniers kilomètres fourbes, tout en descente et remontées.
En course pour le marathon : des arrivées, un abandon
JC nous informe de son retrait de la course : la chaleur et l’effort lui filent des palpitations, persévérer dans ces conditions serait imprudent.
Une fois encore, Erwann ne nous aura pas fait poireauter longtemps. Annoncé à 13h24 selon ses temps de passages aux deux intermédiaires précédents, il s’offre une dizaine de minutes d’avance, et faillit nous surprendre.
Ça va, il est en forme, et il passera la ligne d’arrivée une grosse heure plus tard : 7h30 de course à l’arrivée !
La Flégère se situe à 1977 mètres d’altitude, mais le soleil cogne si fort que même à près de 2000 mètres, la chaleur nous épuise. Des bénévoles attendent les coureurs des cruches d’eau fraîche à la main, pour les doucher sommairement et faire redescendre leur température.
Lorsqu’ils passent le chrono ici, ils viennent du Tour, par Tré le Champs : plus de 500 mètres de dénivelé. Et très, très peu d’ombre sur le tracé de cette ascension.
La souffrance est palpable dans l’atmosphère, sur le dernier lacet qui mène au ravitaillement. Et sous les douches rafraîchissantes prodiguées par les bénévoles, le soulagement est évident.
Pauline était toujours deuxième, suivie de près par Yassine. Ils sont repartis ensemble, et ont fini la course ensemble, à 15h28 : 8h30 de course.
Le duel contre la barrière horaire
Léopoldine et Marion H étaient reparties pour rejoindre l’arrivée, juste après le passage d’Erwann. Elles ont réussi à y être à temps pour acclamer tout le monde.
Maya et moi sommes restées à la Flégère, parce que les trois membres de l’équipe toujours en course risquaient de ne pas pouvoir la finir.
En effet, les courses officielles ont une barrière horaire : un temps limite au-dessus duquel vous êtes éliminé. Impossible donc de se déclarer finisher d’une course que vous auriez parcourue en marchant. Il faut descendre en-dessous d’un certain chrono.
Nina était annoncée à 14h45, Steve à 14h57, et Marion L à 15h06. Problème : la barrière horaire à La Flégère est à 15h05. Marion sera éliminée ici si elle n’est pas plus rapide, Steve risque de l’être aussi s’il perd du temps entre son dernier chrono et ce passage. Même prédicament pour Nina, qui a tout de même un peu plus de marge.
J’ai mal au genou parce que c’est ma deuxième journée de supportrice itinérante en montagne, et à ce moment, j’ai plus du tout le temps d’avoir mal au genou. Avec Maya, nous nous engageons dans la descente, juste au niveau du dernier virage avant le sommet, pour avoir une meilleure vue de la piste.
Ils marchent courbés sur leurs bâtons : d’ici, les coureurs ressemblent à une longue traîne de galériens, qui rament en cadence pour faire avancer leur vaisseau.
Courir pour rester dans la course !
Chaque T-shirt jaune fluo nous fait hurler « STEVE !!! », et tous les T-shirt bleu clair portés par des petits gabarits nous font encourager des Nina et Marion imaginaires. C’est pas grave, les encouragements c’est gratuit, et tout le monde en profite !
Nina émerge la première de la butte, et finit par nous faire un signe de la main sans lever la tête, confirmant qu’elle a bien entendu nos encouragements. Ça passe.
Elle arrivera à 16h02 : 9h d’épreuve, et tout mon respect.
Marion et Steve sont toujours en course, mais plus pour très longtemps à ma montre : 14h48, 14h51…
14h53, je hurle : Marion et Steve sont à quelques mètres d’écart. On se précipite dans la pente, Maya rejoint Steve, je viens relever la cadence de Marion L : bravo, bravo, on est fiers de vous, c’est ouf ce que vous avez fait, vous y êtes presque, encore un lacet et c’est le sommet.
Marion et Steve, à quelques mètres de la Flégère
Regarde, à ma montre, 14h55, la barrière horaire c’est dans 10 minutes, et il reste à peine 200 mètres, c’est large, vous êtes larges, ça va passer, et puis c’est le ravitaillement, on est fiers de vous.
Douche, eau, sucre, et surtout, beaucoup d’encouragements sont nécessaires pour attaquer les 5 derniers kilomètres.
Ils étaient encore au ravitaillement, à 15h04, lorsque l’annonce a été faite : en raison des conditions de chaleur exceptionnelle, la barrière horaire a été repoussée à 15h20.
Les 5 derniers kilomètres du Marathon du Mont Blanc
Vous entendez ? Quinze minutes de plus. Quinze minutes dont vous n’avez même pas besoin car il est à peine 15h, que vous devez arriver avant 16h30, mais qu’il ne reste que 5 kilomètres.
Vous avez déjà parcouru 5 kilomètres tellement de fois que ça ne compte plus, encore une fois c’est vraiment pas grand chose. Même en marchant vous pouvez le faire.
Ils partent, et l’on se rue sur le téléphérique pour rallier Chamonix, puis les oeufs de Planpraz, qui nous amènent à l’arrivée.
Nina aura été trop rapide pour nous, mais je suis à nouveau engagée dans la piste, juste avant le dernier virage du dernier sommet, pour attendre Marion et Steve, avec le reste de l’équipe du 23km.
J’ai fondu en larmes en reconnaissant leur profil dans cette foule de galériens, meurtris par l’effort exceptionnel qu’ils sont encore en train de produire.
Ça monte encore, toujours ces rames qui piquent le sol en cadence, toujours ce soleil de plomb à 16 heures passées, et l’odeur de la sueur si forte qu’elle menace de ne plus jamais les quitter.
Marion L, marathonienne en 9 heures et 26 minutes !
9 heures et 26 minutes bordel, vous l’avez fait. Tu l’as fait, Marion : marathonienne !
MARATHONIENNE !
Toi qui stressais sur la ligne de départ, anxieuse face à ce défi dont tu prenais la mesure, entourée de ces athlètes impressionnants, devancée par ces grands noms du trail mondial qui ouvraient la course ce jour-là : Jornet, Thévenard, etc.
Le premier a passé la ligne en 3h54, et toi, tu as passé la même ligne 5h30 plus tard. La même ligne d’arrivée que les ténors de la discipline, et ce n’était pas une promenade de santé.
C’est une course mythique, que tu inscris à ton propre palmarès. Toi, Pauline, Nina, Erwann, Yassine et Steve, vous êtes marathoniens, et marathoniennes.
Bravo et merci à toute l’équipe de #TrailXperience !
Au fond de moi, j’y croyais pas. Ou plutôt, ça me paraissait tellement incroyable que je n’y croyais pas. Pas vraiment, pas complètement, pas sérieusement.
Mais depuis que je t’ai vue le faire, Marion, depuis que je vous ai vus tous et toutes progresser, vous améliorer, vous épanouir dans ce sport cette année, j’ai réalisé que c’était possible.
Je m’étais fait une promesse, il y a quelques années : ne plus jamais laisser quiconque me poser des limites, me dire que je ne suis pas capable de faire quelque chose.
Grâce à vous, je repars de cette année, de ce week-end, de ces deux courses et de vos exploits avec une nouvelle promesse: celle de laisser les autres m’inspirer la force de dépasser mes limites, me prouver que je suis capable, moi aussi, de puissance et d’exploits que je n’aurais jamais soupçonnés.
Et pour ça : merci.
Rendez-vous sur Mont Blanc Média mercredi 28 novembre et mercredi 5 décembre pour découvrir les deux premiers épisodes de la websérie #TrailXperience.
Pendant un an, notre équipe a été suivie dans sa préparation par des réalisateurs de Spicee.
Le résultat, ce sont trois épisodes qui vont être diffusés sur Mont Blanc Média, partenaire de cette opération aux côtés de l’UCPA, de Spicee, et de madmoiZelle !
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