La première semaine de mai 2021 a eu lieu le vote en plénière, à l’Assemblée nationale, de la loi Climat et Résilience, un jour sombre pour l’environnement et la démocratie.
Un jour sombre… ou une vaste blague : entre les deux, mon cœur balance.
Comme toutes celles et ceux qui sont descendus dans la rue ce dimanche 9 mai, je suis déçue et inquiète des propositions finalement adoptées. Non seulement ce n’est pas suffisant, mais en plus TOUT LE MONDE LE DIT : Le Haut Conseil pour le Climat, le Conseil d’État, le Conseil National pour la Transition écologique, le Conseil Économique social et environnemental, la Convention Citoyenne pour le Climat, les experts des ONG environnementales et même le Boston Consulting Group, l’agence de conseil mandatée par le gouvernement.
Pourtant, un travail incroyable avait été fourni par les 150 citoyens et citoyennes tirées au sort pour proposer des mesures radicales, afin d’atteindre 40% de réduction d’émissions de gaz à effets de serre (par rapport à 1990) pour 2030. On rappelle quand même que dans les accords de Paris ratifiés en 2016, la France s’engageait à atteindre au moins 55%…
Vous avez été tirés au sort et avez accepté de construire notre avenir en relevant son plus grand défi : lutter contre le changement climatique. Bravo pour votre engagement ! Et merci pour votre invitation, je participerai à la Convention citoyenne pour le climat en janvier.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 17, 2019
Mais voilà, le gouvernement, qui avait promis une application « sans filtre » de ces mesures, a tout détricoté.
Adieu au moratoire sur la 5G ! Non, nous ne supprimerons pas les vols intérieurs quand les trajets sont disponibles en train en moins de 4h. On ne supprime les vols que quand l’alternative existe en moins de 2h30 — ce qui ne concerne 5 lignes seulement en France.
Non, la pub ne sera pas interdite pour les produits les plus polluants comme les SUV [Sport Utility Vehicle, ndlr] et la malbouffe. Non, la consigne en verre ne sera pas généralisée d’ici 2025 — alors que des pays voisins le font déjà depuis des années. Non, l’option végétarienne quotidienne dans les cantines scolaires ne sera pas généralisée : elle existera seulement sur base du volontariat. Ahahaha, laissez-moi rire… Celles et ceux qui veulent bien le faire le font déjà. Il n’y aura pas non plus d’interdiction des extensions d’aéroports en cours.
La liste des mesures qui permettraient de contenir le dérèglement climatique et qui ont été abandonnées est longue à pleurer.
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Aujourd’hui, la loi Climat et Résilience proposée par le gouvernement à l’Assemblée hypothèque notre avenir — avec une ambition qui plafonne à 15% de réduction des émissions des gaz à effet de serre dans le meilleur des cas !
Depuis des semaines, des citoyens, citoyennes et associations se sont mobilisées pour demander une application « sans filtre » des propositions de la Convention Citoyenne, comme le Président Macron s’y était engagé.
Mais rien n’y a fait. Pourquoi ? Parce que les lobbys se sont bousculés au portillon dès qu’ils ont compris le sérieux des mesures des citoyens. C’était branle-bas de combat cet été dans les cabinets de conseil pour aller faire un bon travail de sabotage auprès des membres du gouvernement et des députés.
Pour vous l’expliquer de manière plus légère j’ai fait un Reel sur Instagram :
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Celui-ci aussi, pour dénoncer plus précisément l’inaction du gouvernement :
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J’avais l’espoir de voir les choses changer avec cette initiative citoyenne
. J’avais l’espoir de me dire que quand on donne les outils au peuple pour se former, avoir accès à l’information (de tous bords — associations comme industriels), alors n’importe qui prend conscience de l’urgence de la situation et des mesures radicales à prendre. Car oui c’est une nécessité.
Mais non, le gouvernement a montré que cette initiative citoyenne était un écran de fumée. Qu’elle lui a échappé à un moment, mais qu’il a bien vite fait de la remettre à sa place en refusant une à une ses mesures phares et en assénant le coup de grâce ce week-end, alors que le doute commence à monter quant au référendum promis pour la loi climat.
Je me sens démunie. J’avais encore espoir que l’on pourrait changer les choses avec des lois, je réalise que ces lois ne peuvent pas être votées quand on manque de transparence démocratique, et que nos décideurs sont influencés par des lobbys.
Et quand bien même des lois sont votées, alors elles bénéficient de dérogations qui arrangent celles et ceux qui ont le pouvoir. Les députés et députées auraient pu renforcer ce texte. Ils et elles ont reçu des dizaines de propositions de la part des associations, soutenues par une forte mobilisation citoyenne.
Mais le débat parlementaire, hélas, a été fait de telle sorte que rien ne bouge.
Ainsi, beaucoup d’amendements n’ont même pas été débattus et éliminés d’office, considérés « sans lien avec le texte »… alors même que certains d’entre eux reprenaient les propositions de la Convention Citoyenne que le Gouvernement avait écartées.
Face à un tel déni de démocratie je suis très en colère. Je suis abasourdie que nous ne soyons pas des millions dans les rues, à hurler au scandale de voir un président revenir si honteusement sur ses engagements et sur sa parole, alors que des citoyens et citoyennes font à sa place le boulot qu’il aurait dû faire depuis longtemps, et lui présentent une vraie loi climat sur un plateau d’argent.
Je suis en colère en voyant des soi-disant représentants et représentantes sacrifier notre avenir, alors qu’ils et elles avaient une chance de renforcer la loi climat. Je suis en colère de voir la puissance des lobbys auprès de nos décideurs, guidés par le profit et le court terme, au sacrifice du vivant.
Je suis en colère de voir un gouvernement faire fi des engagements de la France sur la scène internationale (les Accords de Paris) et se montrer si aveugle face à l’écocide en cours.
Je suis en colère de voir que pendant cette grande mascarade, la biodiversité s’effondre, nous courrons vers un réchauffement climatique à +4,5° qui va mettre en péril nos conditions de vie sur Terre et toutes les avancées sociales et démocratiques que nous avons acquises sur ce dernier siècle.
Est-ce qu’il faut baisser les bras ?
Non.
Le texte est actuellement débattu au Sénat et sera voté en plénière.
Si le Sénat n’adopte pas le même texte que l’Assemblée nationale, il partira en Commission mixte paritaire pour proposer un texte final. Il faut donc maintenant maintenir la pression sur les sénateurs et sénatrices, et continuer d’interpeller les élus et élues (qui sont quand même, rappelons-le, là pour vous représenter ! ).
Il y a même des associations qui nous mâchent le travail, comme Greenvox ou Extinction Rebellion !
Mais il faut aussi changer d’échelle, et adopter des actions collectives d’envergure. Ne plus se cantonner aux marches, mais accepter la confrontation, les blocages.
Allons sur les ZAD, ces Zones À Défendre qui sont les vrais bastions de défense du vivant. Soutenons massivement les défenseurs et défenseuses du triangle de Gonesse, où plus de 300 hectares agricoles sont menacés par l’urbanisation, ou le collectif STOP CARNET à Saint-Nazaire, où 110 hectares de zones humides sont en danger. Empêchons la destruction des jardins ouvriers d’Aubervilliers pour la création d’une piscine olympique (une piscine olympique… sérieusement ???).
Maintenons la pression, rebellons-nous, bloquons ! Nous avons une fenêtre de tir pour nous faire entendre. Nous jouons notre avenir. Chaque espèce sauvée de la disparition compte. Chaque centimètre de nature épargné et non artificialisé compte. Chaque champ où l’on arrête les pesticides compte.
Et dans cette grande lutte qui nous coûtera certainement sang, eau et larmes, restons attachées à ce qu’elle amène de solidarité, de communion, d’amour et de joie. Engageons-nous dans cette révolution joyeuse au nom de l’amour du vivant et des droits humains.
Amour, rage et ZAD partout.
- Climat, où est passé la colère ? à lire sur Mediapart
- Un projet de loi climat insuffisant pour atteindre les objectifs sur le climat à lire sur Réseau Action Climat
- Projet de loi Climat & Résilience, un texte très loin de répondre au défi climatique, à lire sur France Nature Environnement
- Le Réseau Action Climat dénonce le double échec écologique et démocratique de la loi climat
- Comment les lobbys industriels ont saboté les réformes voulues par les citoyens de la Convention climat, à lire sur Bastamag
- Cette analyse de Datagora sur Instagram
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