Live now
Live now
Masquer
Source : Capture d'écran
Actualités France

En Essonne, c’est aux ados de rénover les hôpitaux s’ils veulent partir en vacances

C’est une initiative qui existe depuis quelques années déjà et qu’un reportage BFM TV vient de mettre en lumière. En Essonne, une quinzaine de jeunes de quartiers prioritaires repeignent les murs d’un hôpital en échange d’une semaine de vacances. Si la démarche peut paraître innocente, le message inculqué est loin de l’être. Il apprend aux ados qu’à 16 ans, on n’a pas tous le droit de partir en vacances, et que tout dans la vie se mérite. Quitte à gommer entièrement les inégalités systémiques dont ces ados font les frais au quotidien.

« Des vacances en échange de travaux ». C’est ainsi qu’est titré un reportage BFM réalisé dans un hôpital d’Etampes (91) et largement relayé sur les réseaux sociaux. On y voit une quinzaine de jeunes « issus de quartiers prioritaires » effectuer des travaux de peinture. Un « chantier citoyen » qui leur promet, en retour, une semaine de vacances en Espagne.

« La gratuité ça n’existe pas »

Dans la vidéo, Mama Sy, éducatrice spécialisée et conseillère régionale, abonde : « On a un principe assez clair : de dire que la gratuité n’existe pas. Dire à des jeunes: ‘vous voulez partir en vacances, on va vous les financer’, il ne faut pas avoir peur de dire qu’on a rien sans rien ».

La vidéo n’a pas tardé à faire réagir. D’abord, parce que ce devrait être le rôle de l’État d’investir dans l’entretien de son système hospitalier public, plutôt que d’exploiter des jeunes désireux de partir en vacances, comme l’ont souligné de nombreux internautes.

Ensuite, parce que cette vision méritocratique est martelée aux personnes les plus discriminées, comme si la notion même de privilège n’entrait pas en ligne de compte : « les plus discriminés pour stages, formations, emplois, sont ceux-là même à qui on veut inculquer le sens du « mérite » (= faut travailler pour avoir droit à) » peut-on par exemple lire dans un tweet.

Pourtant, les chiffres le montrent : Selon l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, les jeunes âgés de 15 à 29 ans vivant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) sont deux fois plus touchés par le chômage que les jeunes des quartiers environnants (pourquoi, d’ailleurs, ne pas avoir plutôt employé des personnes salariées pour effectuer les travaux de rénovation ?).

Le taux de pauvreté atteint 42 % dans ces quartiers prioritaires contre 16 % dans les villes auxquelles ils appartiennent. Un rapport publié en 2016 par l’Observatoire national de la politique de la ville n’est pas plus optimiste : « un diplômé bac + 5 de plus de 30 ans a 22 % de chances de moins d’occuper un emploi de cadre lorsqu’il est issu des quartiers prioritaires ».

Comme le résume l’autrice et enseignante Sophie Audoubert le résume dans une tribune publiée sur Slate en novembre 2022, la méritocratie, cet idéal instillé dès les bancs de l’école, n’a finalement que très peu de poids dans ce succès :

Le mythe de la méritocratie sert à nourrir l’illusion des bienfaits supposés d’une compétition scolaire dont les règles sont complètement faussées et qui, loin de sélectionner les meilleurs ou les plus méritants indépendamment de leur origine sociale, sélectionne en réalité les plus riches, lesquels sont désignés d’avance, et dès le collège, comme les gagnants « légitimes ».

Et les adolescents enregistrent ce message qu’on leur inculque, comme en témoigne Noah, 16 ans, interrogé par BFMTV « Si on veut quelque chose, il faut se donner les moyens, il faut travailler et on récolte ce que l’on sème » répète le jeune homme.

Aujourd’hui, même le droit aux vacances se gagne quand on est adolescent. Une triste réalité confortée par des phrases comme « la gratuité, ça n’existe pas » qui permettent d’enfoncer le clou des inégalités au nom d’une sacro-sainte méritocratie dont ces jeunes sortent trop souvent perdants.

Pourquoi ne pas leur avoir plutôt inculqué des valeurs de partage et de solidarité en leur permettant de partir en vacances ? Tout dépend, finalement, du modèle de société que l’on veut voir advenir.


Le futur de Numerama arrive bientôt ! Mais avant ça, nos confrères ont besoin de vous. Vous avez 3 minutes ? Répondez à leur enquête 

Les Commentaires

35
Avatar de Solsticesdivers
4 août 2023 à 00h08
Solsticesdivers
@Légitime Immature
Contenu caché du spoiler.
0
Voir les 35 commentaires

Plus de contenus Actualités France

Source : Georges Biard
Société

Sur le plateau de « TPMP », Alex Goude attrape les fesses de Valerie Benaïm sans son consentement

11
La footballeuse Kadidiatou Diani a déposé plainte pour agression sexuelle contre son ancien entraîneur au PSG // Source : Capture d'écran Instagram de @kady944
Actualités France

La footballeuse Kadidiatou Diani a déposé plainte pour agression sexuelle contre son ancien entraîneur au PSG

1
Source : Capture d'écran Youtube
Actualités France

Stéphane Plaza : dans une tribune, des personnalités dénoncent « l’omerta » autour des puissants accusés de violences

Source : Charles Deluvio / Unsplash
Société

90% des vidéos publiées sur les sites pornographiques contiennent des violences physiques et sexuelles

8
metoo
Société

Contre les violences sexistes et sexuelles, la Fondation des Femmes veut multiplier par 15 le budget de l’État

inceste
Actualités France

« On ne peut cautionner une justice qui inverse les culpabilités » : dans une tribune, des personnalités demandent la libération de Priscilla Majani

Source : Capture d'écran Youtube
Actualités France

Stéphane Plaza dément les violences conjugales dont l’accusent 3 ex-compagnes : « Des accusations diffamatoires »

Marwan Berreni // Source : Capture écran Youtube
Actualités France

Ce que l’on sait de la disparition de l’acteur Marwan Berreni, soupçonné de délit de fuite

1990 : Gabriel Matzneff face à Denise Bombardier dans "Apostrophes" | Archive INA // Source : Capture d'écran YouTube
Actualités France

Gabriel Matzneff (toujours sous enquêtes pour viols sur mineurs) s’incruste à une soirée Gallimard, révèle Mediapart

Une étudiante tenant des classeurs devant une université // Source : pexels-andrea-piacquadio
Actualités France

14 président·e·s d’université réclament une « allocation d’études » pour tou·te·s les étudiant·e·s

3

La société s'écrit au féminin