« Après avoir été impliquée dans une grande enquête comme celle dans laquelle je suis impliquée maintenant, j’ai vraiment commencé à comprendre pourquoi les gens se retirent des enquêtes, pourquoi les victimes reviennent sur leurs déclarations, pourquoi elles avancent puis reculent. »
C’est ce qu’a confié Evan Rachel Wood au micro de la comédienne engagée Jameela Jamil, dans le podcast féministe I Weigh, paru ce 8 février.
La courageuse prise de parole d’Evan Rachel Wood
De 2006 à 2010, Evan Rachel Wood et Brian Hugh Warner alias Marilyn Manson, de 18 ans son aîné, étaient en couple. Mais en février 2021, l’actrice fait des révélations fracassantes. Elle accuse le musicien de violences sexuelles et notamment de l’avoir violée lors du tournage du clip de sa chanson Heart-Shaped Glasses en 2007.
Peu de temps après que l’actrice et activiste a dénoncé son agresseur présumé, le département de police de Los Angeles a annoncé que Warner faisait l’objet d’une enquête pour violence conjugale. Plusieurs voix ont rejoint celles de Evan Rachel Wood… Marilyn Manson est aujourd’hui accusée d’une douzaine de viols, de violences conjugales et d’agressions sexuelles.
À l’occasion du deuxième anniversaire du podcast de Jameela Jamil, sur lequel se sont succédé des invitées de qualité telle Gloria Steinem, Roxane Gay ou encore Jane Fonda, Evan Rachel Wood a fait le choix courageux de partager son expérience de plaignante dans une enquête judiciaire pour violences sexuelles.
Les difficultés d’être témoin dans une enquête pour violences sexuelles
Face aux enquêteurs, la présumée victime réalise que « ce n’est pas une blague » de se remémorer les évènements avec des « détails atroces » et des questions jamais posées auparavant. « Et devoir y retourner encore et encore, être manipulée publiquement, à grande échelle ou même à petite échelle, c’est très, très re-traumatisant », constate-t-elle, entre désolation et amertume.
Evan Rachel Wood a continué son plaidoyer, assurant qu’elle est « assise ici » en sachant qu’elle dit « la vérité ». Mais à chaque audition, les questions de la part des forces de l’ordre sont nombreuses, insistantes et redondantes.
« Les gens vous font vous sentir folle, je dois donc m’asseoir là et méditer et passer en revue les choses qui me sont arrivées et dire : “Est-ce que cela vous est arrivé ? Oui ! Est-ce arrivé ? Oui.” Et je passe en revue les détails et je les rejoue dans ma tête juste pour que personne ne puisse m’enlever ma vérité, parce qu’ils essaient, ils essaient vraiment de te briser ! »
Intenter une action en justice pour aller de l’avant
Dans le podcast I weight, Evan Rachel Wood a également partagé longuement son soulagement d’être enfin libérée de ces auditions judiciaires. Enfin, surtout de cette relation destructrice !
« J’étais si heureuse d’être sortie que j’ai tout lâché, et je voulais oublier que c’était même arrivé. Parce que la dernière chose que vous voulez faire quand vous êtes enfin sorti d’un cauchemar, c’est de vous asseoir et de l’étudier, de le revivre pendant des années. Je veux juste sortir avec mes amis, je veux aller à Disneyland, je veux danser, je veux à nouveau connaître la joie ! »
Evan Rachel Wood a aussi révélé qu’initialement, elle n’avait pas l’intention d’intenter une action en justice contre Manson mais sa relation suivante l’a fait changer d’avis. Elle a compris qu’elle devait sortir du silence pour protéger sa propre santé mentale et physique. Et pour aller de l’avant…
« Je pensais que je me dirigeais vers ma tombe avec tout ce qui s’était passé… Et je n’étais pas non plus sortie depuis longtemps pour éviter d’être encore manipulée publiquement, éviter le lynchage qui s’était déjà produit. J’ai vraiment intériorisé les choses que les gens avaient projetées sur moi comme : “Elle est putain de folle, qu’est-ce qu’elle fait, qu’est-ce qui ne va pas avec elle ?” … Je pensais que je le méritais. »
Le gaslighting, cette manipulation mentale dangereuse
L’actrice explique s’être rendu compte aujourd’hui qu’elle était alors victime de « gaslighting ». Pour faire simple, il s’agit d’une forme d’abus mental dans lequel l’information est déformée, présentée sous un autre jour, parfois même omise sélectivement afin de favoriser l’abuseur, ou de faire simplement douter la victime de sa mémoire, de sa perception et santé mentale.
Par exemple : c’est quand votre agresseur (ou tout autre interlocuteur) vous fait douter activement d’un drame que vous avez vécu, à un tel point que la victime finit par réellement remettre en cause la véracité de ce qu’elle a pourtant éprouvé.
« Dans ma relation suivante, je me sentais complètement indigne. J’ai eu la chance de rencontrer quelqu’un qui m’a aidée après que j’ai été si mal. Je n’avais pas réalisé que j’avais autant de travail à faire jusqu’à ce que j’essaie d’avoir une autre relation. J’ai réalisé que l’intimité était vraiment difficile, je fermais juste les yeux et je me déconnectais… Des douleurs chroniques dans tout mon corps, j’avais l’impression d’avoir 80 ans. Je me réveillais en hurlant, j’avais ces terreurs nocturnes folles, je ne pouvais pas dormir… »
Le 7 mars dernier, Evan Rachel Wood a dévoilé son documentaire sur HBO, Phoenix Rising, retraçant son combat pour faire adopter, au Sénat de Californie, le Phoenix Act — un projet de loi qui revendique l’extension du délai de prescription en matière de violence conjugale.
Brian Warner nie avec véhémence toutes les allégations d’agressions et d’abus sexuels dont il fait l’objet. En mars dernier, il a même intenté une action en diffamation contre Evan Rachel Wood et sa compagne IIIma Gore affirmant qu’elles l’avaient « publiquement affiché » comme un « violeur et agresseur, un mensonge malveillant » qui aurait fait « dérailler » sa carrière.
À lire aussi : Pourquoi Evan Rachel Wood (Westworld) parle de ses viols au Congrès américain
Image en Une : © Wild Bunch
Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :
- Le 3919 et le site gouvernemental Arrêtons les violences
- Notre article pratique Mon copain m’a frappée : comment réagir, que faire quand on est victime de violences dans son couple ?
- L’association En avant toute(s) et son tchat d’aide disponible sur Comment on s’aime ?
Ajoutez Madmoizelle à vos favoris sur Google News pour ne rater aucun de nos articles !
Les Commentaires
Il n'y a pas encore de commentaire sur cet article.