En partenariat avec Sophie Dulac Distribution (notre Manifeste)
Qu’est-ce que t’as appris, à l’école ?
Qu’est-ce que tu retiens des heures que t’as passées au lycée, en cours ou au C.D.I. ?
Qu’est-il important d’apprendre au lycée ?
Lorsque j’ai vu le film Premières Solitudes, un film qui sort le 14 novembre 2018 au cinéma, j’ai redécouvert le lycée à travers ses couloirs, ses discussions dans les toilettes des filles, ses questionnements de cours de récré, et surtout, à travers le regard de ses lycéen·nes.
Je me suis rappelé à quel point ces moments non-scolaires, entre le self et les bavardages en cours, ou les passages à l’infirmerie plus ou moins motivés, avaient forgé celle que je suis devenue. Alors j’ai eu envie d’écrire sur les enseignements que j’ai tirés de cette étape de ma scolarité, des leçons « hors programme », loin d’être académiques, mais qui ont eu le mérite de faire de moi une adulte.
Le lycée m’a appris à savoir ce qui est bon pour moi, et à défier l’autorité
Je t’avais déjà raconté dans ma « lettre à l’ado que j’ai été » comment j’avais été plus ou moins écartée de mon lycée parce que je souhaitais sauter une classe ; puis comment je l’avais quitté, sans regrets, pour réaliser mon projet.
Voilà l’une des fois où j’ai du aller contre l’autorité, et où j’ai compris que ce qui était bon pour moi était le plus important. Plus important que faire la « bonne élève », même.
Ça n’a pas été la seule fois où cela a eu lieu.
J’évoluais alors dans un contexte familial assez désastreux. Le jour où j’en ai eu marre de me sentir en danger, ainsi que ma sœur ; le jour où je me suis sentie éreintée de voir l’accablement de ma mère face aux services sociaux, j’ai tiré la sonnette d’alarme et j’en ai référé à l’assistante sociale de l’établissement.
Si elle a réalisé un travail incroyable, ses collègues du conseil général vers qui elle m’a renvoyée ont empiré la situation dans laquelle ma sœur et moi nous nous trouvions.
Moi qui avais grandi sans faire trop de vagues, je me suis indignée et soulevée, parce qu’il était temps que les choses changent, et que je n’avais plus la patience d’attendre que les adultes et leur système tout pété comprennent que nous étions en danger. J’étais en colère, je l’ai fait entendre.
C’était peut-être une des premières fois où j’ai agi en adulte, de manière aussi responsable et aussi pertinente.
Clamer mon mécontentement envers ceux et celles qui non seulement ne me venaient pas en aide, mais en plus m’enfonçaient dans ma détresse en provoquant l’ire de mon père toxique, c’était juste, c’était osé, et c’était avant tout la meilleure chose à faire.
Ce sont avec ces expériences que j’ai appris à contredire les affirmations à l’air implacable des adultes lorsque je ne suis pas d’accord, à lutter et à continuer d’exprimer mon opinion tant que la situation ne me convient pas.
C’est aussi ce qui m’a permis de comprendre à quel point j’ai raison lorsque je pense que tel ou tel choix est le meilleur pour moi, et combien je dois m’y accrocher, sans jamais rien lâcher, malgré les obstacles.
Au lycée, j’ai appris combien j’étais angoissée… Et comment le gérer
Je ne veux pas dire avec tout cela que je ne doutais jamais quant à mon avenir.
Au moment où on te demande de le choisir d’une manière présentée comme ferme et définitive, le futur est souvent plus source d’angoisses qu’autre chose.
Justement, j’étais — et je suis encore — quelqu’un d’anxieux, terriblement. Je ne m’en étais pas vraiment rendu compte, puisque à la fin du collège, j’avais bloqué en moi tous les sentiments et ressentis, précisément parce que je ne savais pas comment les gérer.
Sans que je ne sache exactement pourquoi ni comment, cette coquille s’était fragilisée, jusqu’au jour où elle a éclaté. Ça s’est traduit par une sorte de phobie scolaire : je ne pouvais plus vraiment aller en cours, je faisais des crises d’angoisse plusieurs fois par semaine, je n’arrivais pas à me concentrer, je ne pouvais même plus réviser.
Et si tu commences à me connaître, tu sais à quel point j’aime l’école (puisque je déteste les vacances), et à quel point mon perfectionnisme me tient à cœur. À ce moment-là, j’aurais voulu faire la femme forte, et ne pas avoir besoin d’aide.
Force était de constater que ce n’était pas possible. Une crise d’angoisse me réduisait à néant, et sans disposer de mes pleines capacités, je n’avais d’autre choix que d’accepter l’aide qui m’était proposée.
J’ai recommencé une thérapie, j’ai appris à respirer, à trouver des pistes pour me détendre, j’ai commencé à, parfois, faire confiance.
J’ai appris que j’étais capable de tout grâce au lycée
Dans de telles conditions, et même si avant cela j’excellais à l’école, avoir mon bac s’annonçait difficile.
Pendant les six derniers mois de terminale je ne suis plus allée en cours, sans les rattraper de chez moi. Mes moyennes en physique et en maths sont passées de 15 au premier trimestre à 1,5 au second, puis remontées à… 2, au troisième.
Pour un bac S, c’était mal barré.
À vrai dire, sans compter les résultats, je ne savais même pas si j’allais être capable de présenter l’examen, vu l’état de stress constant dans lequel je me trouvais alors.
Mais à force de travail, d’accompagnement, d’amitié, de bienveillance, de résilience, à force de ne pas lâcher, je l’ai fait. Non seulement j’ai présenté le bac, mais je l’ai eu, et-avec-mention-s’il-vous-plaît.
Si j’avais surmonté cela, je serais probablement capable de presque tout surmonter. Et la suite de mon chemin m’a montré que je ne m’étais pas trompée.
Comment être populaire au lycée, et comment dépasser ses préjugés ?
Si jusqu’alors j’avais à peu près toujours été entourée des mêmes personnes depuis la primaire, si je n’avais jamais vraiment eu besoin de faire l’effort de rencontrer mes camarades et de m’intégrer, le lycée a changé la donne.
Après une brève expérience d’internat où j’avais déjà dû faire connaissance avec d’autres lycéen·nes, je suis revenue dans mon lycée de secteur, mais en ayant sauté une classe.
Tous les groupes étaient déjà formés depuis plusieurs mois voire années, je ne connaissais personne, j’étais la petite gamine, la nouvelle, et je pense que j’étais morte de trouille.
J’ai appris à aller vers les autres, même si de prime abord nous n’avions pas grand-chose en commun. J’ai appris à créer ma place, à prendre l’air avenant, à nouer des amitiés.
Moi qui avais une vision d’autrui très péjorative de base, j’ai confronté mes préjugés à la réalité, et appris à les dépasser.
Un exemple concret : dès les premiers jours, j’ai rencontré une camarade de classe opposée à moi en tous points — excepté le prénom, car elle s’appelle aussi Mathilde.
Une magnifique blonde à l’air froid, dans un ciré rose Barbie et dont les T.P.E. portaient sur la chirurgie esthétique. Autant te dire que ça m’a très rapidement repoussée, et nous nous sommes courtoisement haïes l’une l’autre pendant plusieurs semaines, d’un commun accord.
Le hasard des choses a fait qu’un jour, sans trop de raison autre que l’oubli d’un livre, nous sommes devenues amies, et ne nous sommes plus quittées pendant deux ans.
J’étais persuadée qu’elle n’était qu’ennuyante et superficielle ; j’ai compris qu’il me faudrait toujours aller plus loin dans les rencontres à venir, et cesser de juger au premier regard de la valeur d’une personne, quelle qu’elle soit.
Le lycée, quand commence l’âge adulte, loin des « socles communs »
Ce ne sont là que quelques exemples de tout ce que m’ont appris mes années lycée.
Elles correspondent aussi à la première fois que j’ai fait des choix déterminants, par exemple concernant mon orientation, ou à l’apprentissage de l’autonomie comme avec les quelques mois d’internat que j’ai faits.
Si ça n’a pas été une partie de plaisir, je sais que plus qu’un simple programme scolaire, j’ai appris pendant les intercours et les pauses café, petit à petit, à devenir une adulte. J’ai appris à compter sur moi parfois plus que sur les autres, et doucement j’ai grandi. Ou plutôt mûri — c’est le terme qu’on utilise lorsqu’on sort de l’enfance, non ?
J’ai retrouvé cela en voyant Premières Solitudes : les questionnements d’ados qui se cherchent, dont la vision sur le monde n’est plus tout à fait naïve et reste pleine de fraîcheur.
Ça m’a rappelé la « moi » de 13 ans, qui se croyait si mature et pourtant n’était encore qu’une enfant. J’imagine que dans 5 ans, j’aurais la même vision de la « moi » actuelle.
Probablement qu’alors, je ferai un bilan de ce que j’ai appris à l’université, hors des bancs des amphithéâtres ; ou sur les sièges de nos bureaux chez madmoiZelle.
D’ici-là, ça me ferait très plaisir d’échanger avec toi sur ce que le lycée a pu t’apprendre, à toi ; ce que tu attends qu’il t’enseigne si tu n’y es pas encore ou ce que tu aurais aimé y apprendre et qui n’est pas au programme.
Tu peux m’expliquer tout ça dans les commentaires. Moi, de mon côté, je t’y raconterai certainement d’autres anecdotes qui n’entrent pas dans cet article déjà bien long… Alors on se dit à tout de suite, de l’autre côté ?
Premières Solitudes est un film réalisé par Claire Simon, avec des lycéen·nes. Il sera en salles le 14 novembre, si toi aussi tu as envie de te plonger dans leur vision du lycée !
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