Je m’appelle Catherine Cainq, j’ai 26 ans et je suis photographe.
Il y a deux ans, j’ai contracté un prêt et ouvert ma propre galerie dans une ancienne usine. Une belle usine avec des voutes, des toits en verre et des recoins. J’ai du mal à joindre les deux bouts certains mois mais ça en vaut la peine. J’expose des petits artistes, des peintres, des photographes, des inconnus. Des concepts. En ce moment, la galerie est sublimée par une exposition faite de jeux de lumières et de projections. Rien de tangible, de solide, rien à saisir.
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été une artiste de l’image. A huit ans j’ai découvert Mick Rock et ma passion pour la photographie. Je ne suis plus jamais sortie de chez moi sans un appareil photo depuis lors.
J’ai aménagé mon loft dans une partie de l’usine. C’est un espace aéré, plein de lumière et de couleurs. Enfant, je rêvais de vivre dans un endroit comme celui-là. C’était exactement ce que j’imaginais être le lieu de vie d’une artiste.
Et pourtant, je risque de gâcher tout ça parce que je joue au Jeu. Vous devez sans doute vous demander pourquoi, puisque j’ai tout pour être heureuse, puisque je me bats à chaque instant pour conserver ce bonheur volatile.
Je connais Kydd depuis dix ans et j’ai été sa première victime. Lorsque le Jeu a commencé, j’étais déjà prise dans sa toile. Depuis lors, je fais semblant d’être libre.
Je ne parviens pas à me détacher de cet homme. Il est magnétique. Il est la malédiction qui manquait à mon statut d’artiste.
Je me redresse dans mon lit, une clé tourne dans la serrure de la galerie et la porte s’ouvre. Un courant d’air. Le soleil baigne ma chambre et j’observe mon reflet dans le miroir accroché au plafond. Mon carré désorganisé de blonde colorée est répandu sur l’oreiller et mes yeux bruns m’observent. On dirait un animal apeuré. Des pas dans la galerie. Il est là.
Je m’étire, légère comme un chat, pour avoir l’air naturel et la porte du loft s’ouvre sur Kydd. Il a l’air fatigué, il a sans doute passé la nuit avec les autres, à fêter la survie des joueurs d’hier soir.
« Tu n’es pas venue. »
Sombre, il constate. Je ne réponds rien.
« J’ai été très déçu. »
Je suis son ainée de trois ans et pourtant, c’est lui qui m’a en son pouvoir. La douleur serait moindre s’il me tenait captive dans sa cave. Je vis dans un espace aérien parfaitement assortit à mon âme d’artiste, je m’élève, éthérée pour mieux retomber, lorsqu’il vient me rendre visite. Il suffit qu’il passe la porte pour que la galerie se fasse menaçante, ombrageuse et que ces jeux de lumières se fassent ombres.
« Tu viendras, la prochaine fois ? »
Il a l’air d’un enfant qui supplierait sa mère de venir le voir jouer dans la pièce de son école. Mon cœur fond et quand il s’approche du lit, penchant légèrement la tête sur le côté, je sens mon corps battre et je me fais violence pour ne pas l’entraîner sous les draps.
Kydd est une torture. Une chose que je voudrais quitter mais que mon corps désire trop pour que j’en trouve la force. Ma tête et mon cœur voudraient que je m’en aille mais même s’ils sont en majorité, ils ne gagnent jamais.
Je n’aime pas cet homme, pourtant je suis irrésistiblement attirée par lui comme un papillon de nuit le serait par la lumière. J’ai beau savoir qu’il ne m’apportera que la mort au bout du compte, il m’est impossible de me défaire de Kydd.
« Tu sais que je reviens toujours. », je murmure, pour moi-même.
Il sourit et se penche sur moi, saisissant une mèche de mes cheveux entre ses doigts. Je crois que je tremble.
Il pince les lèvres et embrasse la commissure de mes lèvres. Je ne suis plus moi et j’ai l’impression de m’observer depuis le plafond, d’être sortie de mon corps.
Il me mord la lèvre et je perds définitivement pied. Doucement, je sombre. Je contemple nos deux corps qui s’enlacent, s’étreignent, se perdent, se cherchent et se retrouvent pour s’oublier dans l’extase.
Je ne me libèrerai jamais de Kydd. Je suis condamnée, victime consentante qui en redemande et personne ne viendra me sauver. Ma galerie est l’envol, il est la cage. J’ai perdu.
Le prince charmant n’existe pas vraiment, c’est juste une histoire qu’on raconte aux enfants.
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Les Commentaires
Carnaby_street: u're right. Cela dit, si je devais me la jouer cliché en parlant de moi, je dirais que j'ai commencé à 13 ans et que je n'ai jamais lâché mon clavier depuis. Je suppose que c'est une façon de parler ?
Mais je te l'accorde clairement, Catherine est un peu cliché, comme mes autres personnages... En fait je crois que j'aime les clichés ?
Et puis à propos de blog, sur GSTPrincess, je poste des petites choses sur Alive, comme les "cinq chose que vous ne saviez pas à propos de..." ce genre de choses