Le 10 novembre 2015
Laisse-moi commencer cet article par une histoire.
La timidité, présente dès l’enfance
Nous sommes en 1996. J’ai 5 ans et je suis en grande section de maternelle, dans une toute nouvelle école puisque mes parents ont déménagé leurs affaires et leurs trois filles de Besançon à Valence.
Au bout de quelques jours, ma mère est convoquée par l’institutrice, un peu inquiète.
« Est-ce que Myriam ne serait pas mieux dans une école spécialisée ?
Je ne suis pas sûre qu’on soit équipées pour l’aider au mieux. Je n’ai pas de formation pour les enfants muets. »
Une erreur de prénom, non ? Ma daronne sait bien que je ne suis pas muette : j’ai passé mes premiers mois à hurler à pleins poumons, et je babille sans cesse chaque jour en rentrant de l’école. Ça n’a pas de sens.
Mais voilà, je suis tellement timide qu’une fois en classe, je ne pipe pas un mot. Je pourrais avoir une tarentule sur l’épaule ou les doigts coincés dans la porte, je ne dirais rien.
Petite souris tétanisée sur sa chaise en contreplaqué vernis.
Est-ce qu’on guérit de la timidté ?
Nouvelle histoire. Nous sommes en 2015. Je vais sur mes 24 ans.
Récemment, j’ai dansé devant 600 personnes à la Grosse Teuf. Avant ça j’ai interviewé Ridley Scott, animé des podcasts, côtoyé le tout-Internet à la Nuit Originale, présenté un CinémadZ Seul sur Mars en impro totale avec Fab…
Et ce n’est qu’un échantillon.
Guérie de ma timidité ? Hum… c’est un peu plus compliqué.
La timidité, cette amie d’enfance un peu collante
La timidité ne m’a jamais quittée. Elle me colle aux basques comme une pote pas vraiment dérangeante mais un peu trop omniprésente.
Elle me tire par la manche pour me ralentir, parfois : quand je dois passer un coup de téléphone, poser une question à un vendeur, demander mon chemin dans la rue.
Elle rend ma gorge un peu sèche et me met souvent en retard.
Car quand j’arrive dans un endroit que je ne connais pas, je fais longtemps mine d’être là par hasard, observant soigneusement les environs avant d’oser sonner ou envoyer un SMS disant « je suis devant ».
Mais grandir, c’est aussi savoir se débarrasser de ses potes relou, au moins de façon ponctuelle.
C’est se rendre compte qu’on est pas OBLIGÉE d’accompagner monsieur « je-tiens-pas-l’alcool » au bar tous les samedis ni d’assister à chaque match de foot hargneux de madame « je-joue-pour-gagner ».
Alors j’ai appris à envoyer un peu péter ma timidité
quand elle me soûlait.
Je n’ai pas le luxe de la timidité
Dans mon boulot, je ne peux tout simplement pas me permettre d’être timide.
Même si je passe pas mal de temps derrière un écran, quand il s’agit de « représenter » madmoiZelle, il serait hautement contre-productif pour moi de rester planquée sous une plante verte à attendre qu’on m’oublie…
Surtout que je passe mon temps à encourager les (jeunes) femmes à se mettre en avant, à dépasser leurs peurs !
J’ai été balancée relativement vite dans le grand bain de la (toute relative) notoriété.
Au bout de quelques semaines de stage, j’allais danser sur scène à la We Are The 90’s, par exemple… alors que la danse et moi, ça fait douze. J’étais pas obligée, mais ça avait l’air cool !
Il a fallu que je trouve très vite une parade à mon écrasante timidité.
J’ai donc repensé à un proverbe anglo-saxon qui résume très bien mon rapport à l’âge adulte : « Fake it ’til you make it », soit « Fais semblant jusqu’à ce que ça devienne une réalité ».
L’idée c’est de faire mine qu’on est totalement bien dans ses pompes et sûre de soi… car au bout d’un moment, quand on aura fait illusion assez longtemps, on se rendra compte qu’on a aucune raison d’avoir peur.
Qu’on est capable de vivre en étant à l’aise dans ses baskets sans souffrir de combustion spontanée ou autre révélation divine du fait qu’en vrai on se sent comme un tout petit chiot apeuré au fond de notre bide.
Cacher sa timidité, un mensonge qui devient réalité
J’ai donc fait semblant.
Du mec qui surveille les coulisses au youtubeur comptant ses abonnés par centaines de milliers, de la dame vendant des pâtes en bas du bureau à la chanteuse collectionnant les disques d’or, je me suis mise à agir avec tout le monde de la même façon.
Toute en cordialité (faussement) spontanée, en intérêt poli et en sympathie chaleureuse.
En fait, c’est la même réaction que j’avais, à la fac, quand je croisais en soirée des camarades d’amphi auxquelles je ne parlais jamais en cours : on est sur un pied d’égalité, c’est juste qu’on ne se connaît pas.
Et plus ça va, plus… eh ben, en vrai, ça va.
Quand on est sympa avec les gens, ils ont plutôt très envie de l’être avec nous (surtout qu’on invite pas des zozos chez madmoiZelle hein).
Tout le monde est pareil, au fond.
Tout le monde a son lot d’insécurités, de coups de stress, de malaise et de réflexions nulles du genre « oh mais non pourquoi j’ai un bouton sur le nez aujourd’hui on va voir que ça et si je ne sortais pas de chez moi pendant huit ans ça me semble être une réaction mesurée ».
Tout le monde fait des bêtises et tout le monde les oublie.
Je suis, délicieusement, banale : si tout le monde a peur, alors personne n’a de raison d’avoir peur !
Ma timidité, je l’ai vaincue
Promis, j’ai jamais été la fille populaire. Ni en primaire, ni au collège, ni au lycée, ni à la fac, ni dans la vie, en fait.
J’ai eu la chance d’être entourée, surtout à l’âge adulte, de gens qui m’ont encouragée à sortir de ma coquille, mais ça n’a pas forcément été facile.
C’est juste qu’une fois qu’on est dehors… on se rend compte qu’on n’avait rien à craindre. Qu’il fait pas froid, que ce n’est pas hostile. C’est même plutôt sympa.
Cela dit, être timide, c’est pas une tare, hein ! Et il est tout à fait possible de n’avoir aucun souci avec ça.
C’est juste que parfois, la timidité devient un handicap, elle ralentit, et c’est bien de pouvoir la mettre en pause quand on le souhaite.
Quitte à l’accueillir à bras ouverts un peu plus tard.
Et toi, ta timidité, t’as réussi à la vaincre ? Comment ?
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