Le syndrome du choc toxique, ou « SCT », vous l’avez peut-être déjà vu évoqué sur la notice d’utilisation des tampons.
Si le sujet est revenu à la une ces jours-ci, ce n’est pas uniquement grâce à l’action continue de Lauren Wasser, la mannequin amputée suite à son SCT, qui se bat pour sensibiliser le grand public et le personnel médical à cette maladie, très rare et mal prise en charge (lorsque l’équipe médicale ne parvient pas à faire le lien entre les symptômes d’un•e patient•e et leur cause : un SCT).
C’est aussi à cause de l’augmentation des cas déclarés au cours des dernières années : 5 en 2004, 19 en 2001 et jusqu’à 22 en 2014. Ces chiffres restent bien sûr très faibles rapportés au nombre de personnes qui utilisent des tampons ou des coupes menstruelles tous les mois, mais c’est l’absence d’explication à cette variation qui interpelle le professeur Lina, dont les propos sont rapportés sur France TV info :
« Plusieurs pistes pourraient l’expliquer : la nature des composants, l’utilisation accrue de tampons ou une évolution de la flore vaginale due peut-être à l’alimentation, avance le professeur Lina. »
C’est pourquoi le professeur Lina lance avec son équipe une grande collecte pour tenter de mieux comprendre les facteurs favorisant la maladie.
Pour recevoir un kit de don, il suffit d’envoyer un email à [email protected] (plus d’informations sur le site du CHU de Lyon).
Et en attendant d’avoir des réponses, il semble nécessaire de revenir sur le sujet du syndrome du choc toxique, face au nombre d’articles anxiogènes sur le sujet. Si vous avez eu l’idée de lancer une recherche Google Actualités à ce propos par exemple, attention au coup de flip :
Donc pour résumer : le SCT, ça s’attrape par un tampon et on te coupe la jambe ?! Et on panique quand ? Pas tout de suite : arrêtons-nous sur la bactérie responsable du SCT.
Qu’est-ce que le syndrome du choc toxique ?
Le syndrome du choc toxique est une septicémie.
Le SCT est une réaction inflammatoire massive, qui a pour conséquence d’infliger de sévères dommages aux organes, pouvant aller jusqu’à la mort. Il est causé par une bactérie produisant une toxine qui va se répandre dans le corps. C’est en réaction à cette toxine que l’organisme va avoir une réaction « extrême ».
Cette bactérie est très connue, il s’agit du staphylocoque doré. Selon l’Institut Pasteur :
« Le staphylocoque doré est la souche de staphylocoque la plus fréquemment rencontrée en pathologie humaine et vétérinaire. Elle est également au deuxième rang des bactéries responsables en France d’intoxications alimentaires, après les salmonelles. »
C’est donc bien cette bactérie qui est la cause d’un SCT.
Désolée, mais je ne peux pas lire « staphylocoque doré » sans m’imaginer un coq en or.
Comment se déclenche un SCT ?
La bactérie responsable du SCT n’est donc pas « rare ». Cet organisme se retrouve couramment aux abords de nos orifices : au niveau du nez, de la gorge, de l’anus, de la zone périnéale, mais aussi sur l’épiderme pour beaucoup d’individus.
Sur la peau, justement, elle peut provoquer des infections cutanées telles que des furoncles ou des panaris. (Je vous propose de ne pas chercher « staphylocoque doré peau » sur Google Images.) (Je vous ai prévenu•e•s !)
Ceci est une pizza, mais vous saisissez l’idée.
Toxine TSST-1, merci de rester loin de mon vagin
Le staphylocoque doré n’est donc pas une bactérie extrêmement rare, bien au contraire ! Ce qui est plus exceptionnel — et heureusement, au vu des conséquences — ce sont les souches de cette bactérie responsables de la production d’une toxine, elle-même étant la cause du SCT. Toujours selon l’Institut Pasteur :
« Le choc toxique staphylococcique (rare mais souvent mortel), avec sa forme mineure, la scarlatine staphylococcique, sont dus à des souches productrices de la toxine du choc toxique staphylococcique (TSST-1). »
TSST-1, « Toxic Shock Syndrom Toxin », littéralement : la toxine responsable du syndrome du choc toxique.
La toxine TSST-1 est donc la cause du SCT chez l’Homme. Magnifique. Maintenant qu’on a le portrait-robot de cette enfoirée, qu’on le diffuse largement à l’Interpol de nos frontières corporelles : arrêtez-moi ça avant les muqueuses et à l’entrée des plaies, NO PASARAN !
La « police des frontières du corps » est censée faire barrage.
Je plaisante avec mon histoire de police des frontières, mais c’est un peu comme ça que fonctionne notre système immunitaire. Le staphylocoque doré étant une bactérie très courante, nos défenses sont généralement capables de la repérer, et de lui refuser l’accès au territoire, en bonnes fonctionnaires zélées. Plus précisément, on laisse la bactérie vivre sa vie, mais on la surveille et on ne la laisse pas causer des dégâts. Toujours selon l’Institut Pasteur :
« Le staphylocoque doré est retrouvé, en dehors de toute pathologie, chez environ 30% des sujets sains : bien que porteuses de la bactérie, ces personnes ne présentent pas de symptômes. »
En soi, ce n’est pas le contact avec LE staphylocoque doré qui est à craindre, mais bien un contact avec notre organisme lorsque celui-ci n’est pas ou plus apte à se défendre… Par exemple, en cas de lésion, d’une autre infection, d’une « fatigue » ou de stress du système immunitaire, la présence d’une bactérie peut générer des soucis. Et si la bactérie en question est une souche productrice de TSST-1, on a vraiment un problème.
Hygiène irréprochable impérative
Le plan de bataille contre une invasion de bactéries de cette nature est aussi simple à formuler que complexe à exécuter : une hygiène rigoureuse — « le respect permanent des mesures d’hygiène », pour citer l’Institut Pasteur (à propos de la contamination de patient•es hospitalisé•es).
Vu que ce sont les orifices, permanents ou temporaires (comme les plaies) qui servent d’accès à ces bactéries, « hygiène rigoureuse » signifie :
- nettoyer toute plaie,
- se laver les mains régulièrement,
- et surtout après avoir été en contact avec un environnement potentiellement contaminant.
Des consignes qu’on a répétées et entendues environ un milliard de fois depuis que nos parents nous serinaient « tu t’es lavé les mains ? » avant de passer à table. Nous voilà bien avancé•es.
Et les tampons dans cette histoire ?
Alors oui, revenons-en aux tampons. Si on résume nos explications jusqu’à maintenant, ça donne :
- Le SCT est une septicémie…
- qui se contracte par une souche de staphylocoque doré…
- qui produit une toxine…
- introduite dans notre système sanguin.
Et qu’est-ce qu’on est (très) nombreu•x•ses à introduire au contact de notre sang plusieurs jours environ tous les mois ? Des tampons ! Donc un corps étranger qu’on touche avec nos mains, nids à bactéries s’il en est, et qu’on place en contact avec une muqueuse. On laisse mijoter macérer en place, et on le retire plusieurs heures plus tard.
Effectivement, par ce biais, on s’expose à un risque de contamination bactériologique, et cela, les fabricants de protections hygiéniques en ont conscience : si vous avez entendu parler du SCT en lisant la notice des précautions d’utilisation de vos tampons, c’est parce que ces consignes visent à vous prémunir des risques d’infection. Et donc, dans des cas très rares, des risques de SCT.
Respecter les précautions d’utilisation devrait ainsi permettre de l’éviter — ce qui n’empêche pas de consulter un médecin au moindre doute.
Consulter un médecin au moindre doute !
Contrairement à beaucoup d’idées reçues, le syndrome du choc toxique ne touche pas que les personnes qui ont leurs règles (puisque ce n’est pas le seul mode d’entrée en contact avec l’organisme).
La maladie reste cependant relativement rare, Allodocteurs expliquant que :
« On recense entre 20 à 30 cas de syndrome du choc toxique chaque année en France. »
Forte fièvre, vomissements et vertiges en sont les principaux symptômes, communs à toute une série de pathologies plus ou moins graves. Toujours dans la série « conseils qu’on vous a toujours donné, mais qu’on ne répètera jamais assez » : au moindre doute, consultez un•e médecin.
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Les Commentaires
Je sens la bousculade de ton esprit, viens donc faire le hug avant d'appeler le premier psy que tu trouvera dans les pages jaunes.