Loin de moi l’idée de dresser un portrait définitif et exhaustif des éditeurs. Ce papier est appuyé sur du vécu, ainsi que quelques témoignages recueillis depuis 5 ans maintenant…
(Petit avant propos — entendons-nous bien : je ne me considère pas comme un « auteur » hein, à la limite comme un gars qui a mis ses tripes sur son clavier dans une période un peu étrange de son existence et qui s’est retrouvé fort chanceux qu’on lui propose de mettre tout ça sur du papier, vendu dans des magasins…)
Avant la publication
Ne me demandez rien sur l’avant-publication : je-n’en-sais-rien. Je n’ai jamais voulu éditer quoi que ce soit, moi. Ça n’a jamais été un but dans ma vie d’écrire un livre. Quand ma femme m’a annoncé qu’elle était enceinte, j’ai pris une grosse tarte. Même si on forniquait depuis quelques semaines dans le but de procréer, ça fait bizarre. Vite convaincu que le festival des baffes dans ma tronche n’allait sans doute pas s’arrêter là, j’ai commencé à écrire.
"À l'insu de mon plein gré !"
Et j’ai commencé à écrire sur un blog, histoire d’avoir un feedback de mes potes. Quelques jours plus tard, m’est venue l’idée de l’offrir en cadeau à ma femme. Et c’est elle, qui a cette idée saugrenue, quand je lui ai demandé de ne pas aller lire ma prose : « je ne vais pas le lire à condition que tu envoies ce que tu as écrit à des éditeurs si tu écris encore à la moitié de la grossesse ». Voilà. La fourberie féminine. J’ai donc envoyé à deux contacts, histoire de lui faire plaisir… une semaine après l’accouchement, je signais un contrat avec Timée Editions pour sortir Futur Papa.
Le contrat, justement
Ma triste expérience avec Timée (cf dernier point) m’oblige à vous hurler dans les oreilles MUNISSEZ-VOUS D’UN AVOCAAAAT ! Ca vous coûtera une petite partie de votre à-valoir, mais au moins :
- Votre contrat est relu par un pro. Pas d’entourloupes possibles.
- Les avocats connaissent les pratiques du milieu.
- Votre éditeur sait d’emblée que vous êtes équipé d’un avocat. Ça peut servir.
Attachée de presse, mon amour
Ne mettons bien sûr pas tout le monde dans le même sac à merde, il y a d’excellentes RP (le petit nom pour définir des attachés de presse) qui font leur boulot à merveille (par exemple, Pénélope Bagieu en a une fantastique – et je bosse personnellement avec quelques très bons), mais les différents retours que j’ai de moult auteurs vont pas mal dans le même sens : y’a quand même de l’embobineur de très haute volée et, à l’image du reste de l’aventure, je suis tombé sur une championne du monde toutes catégories. La preuve, elle a été virée 6 mois plus tard. Pas de bol, elle était encore en poste au moment du lancement de mon bouquin.
https://www.dailymotion.com/video/x1s9pq_elie-kakou-attache-de-presse_fun
(C’est SI peu caricaturé………)
Vous imaginez le cliché de l’attachée de presse parisienne, 45 berges, ayant trop fumé, la voix hyper-rauque, qui agite du vent dans tous les sens et te sort tout le tralala en mode « AH MAIS OUAIS ON LE POUSSE TON LIVRE ! » quand tu lui passes un coup de fil ? Si vous tombez sur un spécimen pareil, fuyez.
Ou non, plutôt : faites comme moi, ne comptez pas sur elle et démerdez-vous vous-mêmes.
- J’ai décroché mon téléphone, j’ai parlé à des journalistes (repérez les journalistes qui écrivent les papiers en rapport avec votre sujet – les numéros directs / les emails des journalistes sont dans les magazines, souvent dans « l’ours », à la fin ou au tout début)
- Les journalistes adorent parler aux auteurs directement, ça l’fait.
- J’avais préparé un mail de présentation du bouquin, que j’ai envoyé à chaque journaliste. Pas de copier coller de bourrin, je personnalisais chaque mail au maximum.
- Ensuite, j’envoyais les demandes de service de presse (les envois de livres) à la RP, en mettant systématiquement son supérieur en copie.
- S’il y a des rendez-vous à prendre etc, je la laissais gérer.
Ca a plutôt bien marché, j’ai décroché 95% des premiers papiers, le reste est venu ensuite en « appel entrant », que l’autre illuminée gérait. Mais disons que globalement, avec un(e) attaché(e) de presse efficace sur un sujet pareil, on aurait pu tout éclater.
La clé :
je ne me suis jamais embrouillé avec elle. JAMAIS. Elle avait les boules que je récupère des contacts à sa place au départ mais quand elle a compris que ça servait son intérêt (une revue de presse balèze), elle a effectué correctement le suivi.
Dans les rayons : du rêve à la réalité
Vous avez cravaché pour écrire votre bouquin pendant des années ? Vous estimez donc normal que pour récompenser cet accouchement douloureux, votre livre soit un minimum visible dans les rayons de la FNAC ? Que nenni, il sera éventuellement dispo dans les rayons mais c’est bien tout. Faut avoir conscience d’un truc : il y a TELLEMENT d’offre et si peu de places disponibles.
L’erreur fatale : vous pointer l’air de rien dans le rayon et foutre le dawa dans l’organisation en mettant en avant votre bouquin vous-même dans les têtes de gondoles. Les vendeurs détestent ça, c’est même un coup à se faire boycotter. N’oubliez point : tricard rime (assez souvent) avec connard.
La réalité bizness de l’édition
J’ai sorti ma calculette : selon mes savantes additions, une sortie « classique » (sans investissement publicitaire particulier et avec un à-valoir dans la norme) est rentabilisée pour l’éditeur aux alentours des 1 000-2 000 exemplaires vendus. Autant dire que tout le reste, c’est du gras. Et que le gras, dans le milieu de l’édition, on n’aime pas ça. Donc on arrête de « travailler » le bouquin qui se vend pour passer à un projet suivant.
Et réimprimer des livres, c’est un investissement, mais aussi le risque de rester avec si ça ne fonctionne pas. Donc une fois le « point mort » atteint, mon éditeur a pris zéro risque et a réimprimé quand vraiment ses stocks étaient à sec sur l’ensemble du réseau.
Réimprimer des livres au moment de Noël ? À quoi ça sert ? Bah oui, après tout, Futur Papa est vraiment le cadeau idéal à offrir, ça aurait pu permettre de vendre des bouquins. Donc à peu près tous les ans, mon bouquin était en rupture au mois de novembre/décembre. Lol j’ai envie de dire.
Autant vous dire que venant du milieu de la grande distrib’, cette logique d’entreprise m’a paru… étrange.
Les dédicaces
J’ai fait peu de dédicaces, mais ça restera du souvenir lourd de chez lourd ! Je me suis retrouvé invité au Festival de Romans, une sorte de réunions de blogueurs, pour faire une dédicace en compagnie de William Réjault (infirmier à l’époque, qui va continuer une brillante carrière de gratteur), j’ai fait un festival du livre dans la région de Tours où j’ai dû signer deux livres en une après-midi – ça m’aura au moins permis de faire la connaissance d’auteurs polar funky, et j’ai fait quelques « Salons du Bébé » où j’ai écoulé des bouquins par pelletées de douze et croisé des fans de la première heure qui levait le bras en guise de reconnaissance de Frères d’Armes, t’as vu.
La thune
Sachez-le : les maisons d’édition sont connues et reconnues pour ne pas raquer, et encore moins quand il s’agit de payer ceux qui leur permettent pourtant de tourner, les auteurs. Merci donc de vous référer au point 1 et de ne jamais tergiverser. Il est inscrit dans votre contrat une date de paiement, avec des échéances, faites-les respecter DIRECT, sans quoi vous allez être étiqueté « couillon à plumer ».
J’ai d’ailleurs la Ceinture de Champion du Monde du GGCAP – Gros Gros Couillon à Plumer, puisque Timée Editions me devait la bagatelle de 20 000 euros, avant de partir en liquidation judiciaire. Je ne recevrai donc jamais ces nombreux $$$. Mon problème ? Je n’ai jamais fait de cette histoire de bouquins une affaire d’argent. DMC.
(Oui oui, c’est du conseil appuyé sur du vécu que je vous offre)
J’ai bien conscience qu’il existe forcément quelque part un chouette éditeur, honnête et droit, qui sait embaucher des gens compétents et talentueux tout en ne refusant pas l’idée de gagner de l’argent et d’en faire gagner à ses auteurs. Si c’est le cas, que vous êtes intéressés par un livre un peu vieux mais qui continue toujours à se vendre en poche, contactez-moi, je vous cherche depuis bien trop longtemps.
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