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Culture

Goncourt, Renaudot… un prix littéraire, ça sert à quoi au fait ?

Alors que le prix Goncourt 2017 a tout juste été remis (suivi de près par le prix Renaudot et bien d’autres à venir), c’est l’occasion de se demander à quoi servent véritablement les prix littéraires. Lucie vous explique.

Le lundi 6 novembre 2017, le monde littéraire retenait son souffle.

Comme à chaque fin d’année, les prix déferlent, avec en première ligne le prix Goncourt, remis cette année à Éric Vuillard pour L’ordre du jour.

En parallèle à la remise de ce prix prestigieux se tient historiquement la remise du prix Renaudot, décerné en cette année 2017 à Olivier Guez pour La Disparition de Josef Mengele du côté des romans, et à Justine Augier pour De l’ardeur pour ce qui concerne les essais.

Plus qu’à attendre la remise du prix Femina, du Médicis, du Goncourt des lycéens… Ça finit par donner le tournis tout ça !

Mais au fait, à quoi ça sert concrètement, un prix littéraire ? Explications.

Une meilleure image pour guider l’achat

Un prix est avant tout une question d’image offerte au livre.

Dans le cas du prix Goncourt, c’est le plus flagrant. Sa dotation est purement symbolique puisque le chèque remis au gagnant s’élève à dix euros. Ce qui est parfaitement concret en revanche, c’est la grosse couverture médiatique dont va bénéficier l’ouvrage vainqueur.

À l’image des élu•es des César pour le cinéma, des Molières pour le théâtre ou même des Victoires de la musique, le Goncourt est l’occasion pour un•e auteur•e en particulier d’être propulsé•e sous le feu des projecteurs.

D’un coup d’un seul, son livre est l’objet de sujets dans les journaux télévisés, d’encarts importants dans les journaux papier. On parle de lui sur toutes les radios, à travers une simple mention ou toute une émission.

Alors quand vient le moment de faire un tour en librairie, c’est naturellement que le grand public va se diriger vers le rayon où se situe le livre dont il a le plus entendu parler ces derniers jours. D’ailleurs, même les gens qui ne lisent peu ou pas habituellement vont avoir la curiosité de jeter un oeil au Goncourt. C’est le pouvoir des médias.

Et au delà du Goncourt, du Renaudot et autres prix prestigieux, un simple bandeau annonçant un prix, même quand on n’a aucune idée de ce à quoi il fait référence, reste un argument de vente : puisqu’il a été récompensé, c’est qu’il est de qualité ! La production de livres est telle qu’on ne crache pas sur un petit coup de pouce visuel.

Autant dire qu’à l’approche de Noël, c’est particulièrement malin…

Un soutien à la création littéraire

Un prix littéraire est un événement autour des livres. Comme tout bon objet culturel qui se respecte, il mérite d’être distingué et soutenu quand il fait partie des meilleurs. 

Cet éclairage de la littérature est d’autant plus important à l’heure où c’est un milieu dont l’économie est fragile, et un petit best-seller ne fait jamais de mal à la trésorerie d’une maison d’édition !

À lire aussi : Le monde merveilleux de l’édition en 5 métiers à découvrir

En effet, mettre ainsi en valeur la littérature incite les gens à venir la découvrir en se rendant à la bibliothèque ou en participant très activement à la bonne santé du marché en achetant les ouvrages.

Un prix comme le Goncourt ou même le Grand Prix d’Angoulême peut encourager celles et ceux qui n’en sont pas coutumiers de venir faire un saut en librairie (quitte à se dire qu’on s’y sent drôlement bien et qu’on va y revenir, tiens).

L’engouement autour de la littérature permet aussi de mettre en avant le travail des auteur•es, qui se retrouvent à pouvoir parler de leur démarche, de leurs inspirations, de leurs méthodes, de leur écriture dans les médias.

L’idéal reste encore les prix vraiment dotés (de plus de dix euros j’entends), qui permettent de récompenser et surtout de permettre à un•e auteur•e de se consacrer pleinement à l’écriture (sans avoir besoin d’un boulot alimentaire).

Un conseil : visez le prix Décembre plutôt que le Goncourt, doté à plus de 30 000 € !

Mobiliser et animer une partie de la population

Si certains prix sont remis par des critiques, des journalistes, et des professionnels divers et variés, d’autres sont aussi à l’origine de lecteurs plus lambdas.

C’est par exemple le cas du Goncourt des lycéens, qui mobilise près de 2000 lycéens ! Ce sont donc des jeunes, qui décident de la qualité d’un livre. C’est un signal culturel fort à l’heure où les lycéens sont plutôt l’objet d’un snobisme sinon d’un cynisme, et sont plus naturellement rattachés mentalement à leur smartphone qu’à un livre.

Pourtant, le Goncourt des lycéens est rapidement devenu un prix accessible au plus grand nombre quand le Goncourt peut être considéré comme pointu. Selon un article du 27 octobre 2017 du Monde, le lauréat primé par les jeunes se vendait plus que celui des vieux. En 2016, l’écart était même très costaud selon France Inter :

Par ailleurs, des prix, il y en a aussi partout en France, dans des villes plus ou moins grandes, et souvent dans le cadre de salons du livre.

Ces prix locaux sont une manière d’animer une région, une ville, et que la culture ne soit pas réservée à une élite de grande ville. Les auteur•es sont d’ailleurs amené•es à se rendre dans ces contrées moins centrales que d’autres, mais où le pouvoir d’achat et l’enthousiasme ne manquent pas.

À lire aussi : Hommage aux petits salons du livre, ces colporteurs de culture

Une démarche qui a ses limites

Les prix sont une bonne chose pour le marché du livre, néanmoins, ils ont leurs limites.

Si le Goncourt draine de façon notable les ventes au moment de sa révélation, ce n’est pas le cas de grands prix dans la plupart des autres genres littéraires.

Si le Prix du meilleur album d’Angoulême suscite un réel engouement médiatique et gonfle un peu les ventes, les prix dans le genre de l’imaginaire, du polar, ou même de la jeunesse sont loin d’être concernés.

Pour ce dernier domaine, l’actualité a été particulièrement éloquente.

Le prix Vendredi a connu sa première édition cette année et se revendiquait comme le prix Goncourt de la jeunesse, en récompensant un roman pour adolescents (c’est L’aube sera grandiose d’Anne-Laure Bondoux qui a été sacré en 2017). Il est bien, bien loin d’avoir connu le même sort médiatique que son grand frère, et cela est d’autant plus regrettable que dans son jury figurait la présence de journalistes de grands médias.

Si vous souhaitez creuser le sujet, je vous invite très vivement à consulter l’excellent article Le Prix Vendredi, Goncourt de la littérature Jeunesse – Et tout le monde s’en fout du tout aussi excellent blog Allez vous faire lire.

En guise de bilan, les prix, c’est bien, mais il faudrait une certaine équité. Il sévit encore un lourd snobisme littéraire et l’idée qu’une littérature vaut mieux qu’une autre.

Alors n’oubliez pas que pour vous trouver un bon livre qui vous plaira, ou l’ouvrage parfait à offrir, il vous reste une solution infaillible : consulter votre libraire !

À lire aussi : Si ton libraire est snob, c’est qu’un autre, bien meilleur, t’attend ailleurs


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