La France apprenait hier une information grave : Hervé Gourdel, retenu en otage par des jidahistes algériens, a été exécuté par décapitation.
Ce nouvel acte de barbarie vient s’ajouter à la liste des exactions violentes et barbares perpétrées par l’État Islamique en Irak et au Levant (également désigné par les acronymes « ISIS » en anglais, ou « Daech »).
Pour comprendre ce qu’est l’État Islamique, vous pouvez regarder cette vidéo du Monde, qui est fort bien faite :
#NotInMyName, contre les amalgames
L’État Islamique est en réalité islamiste : c’est une dictature religieuse qui est certes basée sur la religion musulmane, mais l’interprétation appliquée par les djihadistes est très éloignée de l’Islam tel qu’il est pratiqué par des millions de croyants.
Personnellement, j’ai appris en classe de 5ème la différence entre « musulman » et « islamiste », mais ce n’est visiblement pas le cas de tout le monde. Trop de gens font encore l’amalgame entre les croyants, soit l’écrasante majorité des gens, et la poignée d’extrémistes barbares – soit l’écrasante majorité des sujets d’articles et de reportages vus dans les médias.
En réaction, des musulmans anglais ont lancé une campagne sur les réseaux sociaux : avec le hasthag #NotInMyName, les musulmans se désolidarisent de l’État Islamiques, des discours et des actes de ces groupes extrémistes.
C’était pourtant une évidence. En tant que personne civilisée, je me doute que d’autres personnes civilisées n’ont rien à voir avec les barbaries des terroristes, même si ces derniers se revendiquent de la même religion.
Je suis catholique et je ne ressens pas le besoin de me « désolidariser » à chaque fois qu’un Pape condamne le préservatif ou qu’un curé est accusé de viol. Alors pourquoi faudrait-il que les musulmans le fassent ?
Le sondage du jour, sur Le Figaro…
Ah ne cherchez plus, j’ai trouvé : en tombant sur ce sondage proposé par Le Figaro ce matin, j’ai mieux compris le mouvement #NotInMyName…
Je voudrais piger le rapport entre les djihadistes algériens qui capturent et décapitent des otages, et les musulmans de France. Si c’est juste « la religion », c’est vraiment léger comme point commun.
Aux 87% d’internautes qui ont répondu « non » à cette étrange et insultante question, j’aimerais quand même savoir ce que vous attendiez de plus : génuflexion ? Auto-flagellation ?
Devant l’indignation suscité par ce sondage fort indélicat (alerte euphémisme), Le Figaro a procédé à son retrait, sans toutefois s’excuser convenablement.
Je ne sais pas trop comment « interpréter » ce tweet. C’est nous qui avons mal compris le sondage, c’est ça ? Il n’était pas vraiment islamophobe ? Je suis circonspecte.
Pour celles et ceux qui pouvaient encore en douter, les musulmans de France n’ont rien à voir avec l’État Islamique, ni avec les terroristes qui se prévalent de l’Islam pour commettre des actes barbares.
La campagne #NotInMyName permet de mettre en lumière le poids des amalgames et des préjugés qui pèsent sur la communauté musulmane. Si des musulman•e•s choisissent de montrer publiquement leur condamnation des exactions de l’État Islamique, ce n’est certainement pas une raison pour leur réclamer des excuses.
La nuance est de taille.
« On n’a pas demandé… »
Un autre hashtag a déferlé sur Twitter aujourd’hui, lancé par Rue89, en réaction utile à l’infâmeux (contraction d’infâme et de fameux) sondage du Figaro.
La rédaction du site pointe le fond du problème : d’où et de quel droit vient-on demander aux musulmans de se désolidariser de quoi que ce soit ? Comme s’ils étaient par défaut solidaires ? D’où vient ce présupposé ?
Déjà, en 2012, lorsque Mohammed Merah avait tué de sang-froid plusieurs enfants, Jack Parker avait écrit ce vibrant témoignage : Je suis Arabe et je ne vous veux aucun mal, en réaction à la vague d’amalgame qui avait déferlé, puant le racisme et l’islamophobie.
Et de fait, l’islamophobie est encore bien trop répandue dans la société :
À lire aussi : L’islamophobie ordinaire — Vos témoignages
Pourquoi demander aux musulmans de se désolidariser de l’État Islamique ? Il suffit pourtant de remplacer « musulmans » par toute autre communauté, et « État Islamique » par toute autre calamité pour se rendre compte de l’absurdité de la proposition. Rue89 en a d’ailleurs imaginé toute une liste, que les Internautes ont depuis continuée sur Twitter, sous le hashtag #OnAPasDemandé :
- on n’a pas demandé aux philosophes de se désolidariser de BHL
- on n’a pas demandé aux sandales de se désolidariser des Crocs
- on n’a pas demandé à Beaumarchais de se désolidariser du Figaro
- on n’a pas demandé aux chauffeurs de bus de se désolidariser d’Émile Louis
La liste continue sur Rue89, et sur Twitter avec #OnaPasDemandé
Pour aller plus loin…
- Les musulmans priés de condamner les terroristes : quelle folie ! — Rue 89
- État Islamique : cessons de demander aux musulmans de se justifier — Libération
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Les Commentaires
Je suis tout à fait d'accord avec toi.
Simplement :
justement derrière des Etats et des diplomates, il y a des populations entières qui s'expriment. C'est le principe même de démocratie.
Je suis absolument d'accord avec toi sur l'intervention en Irak des USA. Mais je pense quand même qu'ici le conflit peut prendre une proportion exponentielle, parce qu'un terroriste ou plusieurs peut frapper dans n'importe quel pays. Ce qui donne une dimension particulière à la situation par rapport à ce qui se passe au mali par exemple. Je parle de guerre mondiale dans le sens ou les zones de destruction pourraient se trouver dans des pays sans frontières communes (n'importe ou sur le globe).