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Le sexe avait l’air fade… jusqu’à ce que j’écrive des textes érotiques

Charlie est lectrice de Madmoizelle, et elle écrit des histoires érotiques depuis l’adolescence. Elle nous raconte comment cette pratique a changé son rapport à la sexualité… surtout quand elle s’est mise à la partager avec une amie !

Longtemps, j’ai considéré l’écriture érotique comme un vice, un secret assez inavouable. Dès l’adolescence, enfermée dans le noir, j’écrivais et je lisais des scènes de sexe plus ou moins explicites, en me laissant aller à des plaisirs solitaires. Et je dois bien avouer que si l’école a fait mon apprentissage intellectuel, c’est la fiction qui a marqué mon éducation sexuelle.

Les fanfictions érotiques, pour faire tomber les tabous

À l’époque, j’étais persuadée de faire quelque chose de honteux, qu’il fallait cacher. Il me semblait impossible qu’une femme puisse se laisser aller à ce type d’écriture ou de lecture sans en avoir honte, alors que j’étais loin d’être troublée à l’idée qu’un homme puisse se mater des pornos sans rougir.

Je n’aurais évidemment jamais osé en parler à mes copines. Mais si je n’en discutais pas dans le monde réel, j’étais beaucoup plus loquace sur Internet : sur les blogs que je possédais, j’échangeais et répondais aux nombreux commentaires laissés par mes lectrices.

Ce sont finalement les fanfictions, ces récits écrits par des fans qui mettent en scène des personnages célèbres, qui ont émoussé mes armes érotiques. J’aimais mettre en scène des artiste que j’aime avec des personnages issus de mon imagination, dans des décors divers et variés. Sur Internet, c’était plus facile : les tabous disparaissaient, et sous pseudonyme, on se sent plus libre de tout écrire.

Ma partenaire d’écriture

Et puis, j’ai rencontré Alexie et nous nous sommes mises à écrire à deux. Alexie, c’est à la fois ma collègue, mon amie, ma binôme de fiction et ma capitaine d’aventure. Nous nous sommes rencontrées sur notre lieu de travail et il ne nous a pas fallu longtemps pour nous rendre compte que nous étions toutes les deux passionnées par l’écriture. À quatre mains, nous avons commencé par créer des univers fantastiques ou de fantasy, initialement très chastes.

Quelques semaines après le confinement on s’ennuyait un peu, il faut bien dire la vérité. Nous avons donc décidé de changer un peu ce que nous écrivions, et avons transposé nos récits dans le monde contemporain.

Nos personnages – qui avaient à peu près le même âge que nous, c’est-à-dire la vingtaine – faisaient face à des préoccupations qui nous tarabiscotaient dans la vie. Dont le sexe, évidemment !

Au début, ce n’était que quelques évocations sexuelles minimes et cela n’avait rien à voir avec de la littérature érotique. Une petite scène de sexe par-ci, une autre par-là… Pas très explicite tout ça, ni très palpitant ! Ces passages sont devenus de plus en plus détaillés, au fur et à mesure que nous osions nous révéler l’une à l’autre. Les premières fois, j’avais très peur d’être jugée.

Mais, comme nous nous envoyions nos histoires scène par scène, nous avions le temps d’en discuter, de rebondir, de commenter et de nous encourager ; toujours avec bienveillance et plaisir partagé. Et nous avons vite compris que nous voulions chacune en lire plus !

Les récits érotiques qui nous manquaient jusqu’ici

De fil en aiguille, nos récits sont devenus de plus en plus chauds bouillants. Nous nous sommes mises à écrire ce que nous aurions aimé lire , et qui nous manquait dans la société : du consentement, des représentations de tous les types de sexualités, la dénonciation des préjugés…

Ce que je préfère écrire, ce sont les scènes homosexuelles entre deux garçons. Je me souviens encore de mon angoisse quand j’ai envoyé la première à Alexie : je me demandais ce qu’elle allait en penser. Mais vu les scènes très peu chastes qu’elle écrivait et ses réactions lorsque j’envoyais mes parties, j’espérais qu’elle serait bien accueillie, ce qui fut le cas.

Alexie a suivi le tempo, avec ses personnages à elle, jusqu’à notre scène préférée. Celle où nous avons explicitement détaillé, en variant les points de vue, une scène de cul entre trois personnages, à l’arrière d’une voiture, en plein milieu d’une rave party !

À partir de là, le rythme était donné. Au début, nous n’avions pas vocation à publier nos histoires, mais nous avons finalement eu envie de partager, parce que nous trouvions que le monde de l’édition manquait de représentativité.

Et comme nous aimons toutes les deux écouter des podcasts, nous avons choisi de publier notre premier récit à quatre mains sous la forme d’une fiction audio, avec un épisode chaque mercredi.

Intitulée Le monde nous appartient, cette histoire est ponctuée de scènes sexuelles. Ce n’est pas un récit érotique, plutôt une histoire d’amitié, avec de la romance en prime et de la sexualité, parce qu’elle fait partie de la vie. Une sexualité diversifiée, et basée sur le consentement et le plaisir.

À lire aussi : La pénétration n’est plus au centre de ma vie sexuelle, et c’est pour le mieux

Écrire des textes érotiques a changé mon rapport à la sexualité

Avant d’écrire, je pensais le sexe uniquement à travers la pénétration à cause des stéréotypes propagés un peu partout dans notre société. Ceux qui sont véhiculés au travers des films, des séries, des livres et des conversations…

Dans les livres de mon adolescence, l’histoire était toujours la même. Un garçon rencontrait une fille, et quand ils couchaient ensemble, c’était lui sur elle, et lui à l’intérieur d’elle ! Quant aux films, ils montraient tous la même scène : un lit – parfois un canapé quand c’était plus osé – et un homme sur une femme qui prenait du plaisir en la pénétrant. Le reste n’était jamais montré. Et ne parlons même pas des scènes LGBTQ+ qui étaient complètement invisibles, comme s’il n’y avait qu’une sexualité dans la société.

Comme si on ne pouvait montrer que ce qui entrait dans les codes imposés par notre société hétéronormée.

Tout ça me paraissait être d’un ennui mortel. Mais, en lisant les scènes d’Alexie, j’ai découvert une multiplicité de possibilités, envoyant ainsi valser l’idée que les préliminaires ne seraient que des prémisses destinées à préparer le vagin pour qu’il reçoive le précieux pénis. Désormais, dans nos écrits, les rapports ne sont pas basés sur un rôle déterminé par le genre : ils reposent sur le choix et le désir de chacun.

Une aventure que nous vivons à deux

Le monde nous appartient nous a permis de faire nos armes à deux. Elle comme moi avions besoin d’apprendre à écrire avec l’autre et à être en confiance, pour ne pas se sentir juger ou bridée.

Alexie avait déjà écrit à plusieurs, mais jamais avec autant de liberté, et aussi peu de jugement. Écrire à ses côtés a nourri ma façon d’écrire, m’a permis de m’améliorer et de varier mes scènes sexuelles. De son côté, j’imagine qu’elle a surtout gagné en régularité, car je suis du genre impatiente et que j’aime que mes récits aient une fin. quitte à mettre la pression à ma co-écrivaine préférée pour qu’elle termine… Pauvre d’elle !

Je ne l’aurais jamais cru au début, mais écrire à deux (enfin, écrire avec elle) m’a transformée, et je me rends compte que j’y prends plus de plaisir que seule. C’est comme regarder une série et avoir tous les jours droit à un épisode. C’est stimulant et exaltant !

Fantasmer, s’ouvrir et s’éduquer avec l’écriture érotique

Si j’écris des textes érotiques, c’est d’abord pour me faire plaisir. Parce que ça me rend euphorique, que ça me fait frissonner et parce que c’est grisant. Mais aussi pour faire plaisir à Alexie, et à mes lecteurs et lectrices, lorsque j’en ai !

J’écris aussi parce que je peux faire vivre tous mes fantasmes à mes personnages, d’une manière que la réalité ne pourra sans doute jamais m’apporter. Je peux créer différentes situations en variant les lieux, les positions et les actions et représenter tout un panel de sexualités. Je peux écrire des scènes de masturbation seule, avec un observateur, à deux, à trois, ou à quatre. Qui sait !

Si j’écris des textes érotiques, c’est enfin pour mon éducation sexuelle, et pour celle de mes lecteurs et lectrices. Parce que sans mes érotiques et mon activité d’écriture, mes connaissances sexuelles auraient été très limitées.

Je n’aurais peut-être jamais été faire toutes ces recherches liées à la sexualité : taper « règles et consentement dans le BDSM » sur internet, regarder les différents types de préservatif féminin et masculin, feuilleter le Kamasutra, ou encore vérifier les meilleures positions pour réaliser une orgie (oui oui, ça existe !).

Alors je veux conclure ainsi : écrire du cul, c’est excitant et stimulant. Et je n’ai jamais pris autant de plaisir qu’en lisant et en écrivant des scènes érotiques… Si bien que la réalité parait parfois un peu fade à côté ! Mais, peut-être que c’est justement là le pouvoir de la fiction : donner des idées, ouvrir l’imagination, et influencer ce qu’on pourrait faire dans vie réelle.

À lire aussi : Comment le porno a fait évoluer mes fantasmes

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Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

Les Commentaires

28
Avatar de moldova
20 septembre 2023 à 19h09
moldova
@MissClemence rien à voir avec ta demande mais je serais très intéressée par la lecture de ton mémoire, si tu souhaitais le partager
Sinon, je souhaitais rebondir sur un aspect du témoignage qui m'a beaucoup parlé, à savoir le décalage notable qu'il peut y avoir entre fantasme et réalité sur le plan sexuel lorsque l'on écrit des fanfics. Pour citer la témoignante:
"Alors je veux conclure ainsi : écrire du cul, c’est excitant et stimulant. Et je n’ai jamais pris autant de plaisir qu’en lisant et en écrivant des scènes érotiques… Si bien que la réalité parait parfois un peu fade à côté !"
Le reste en spoiler, car perso
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