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Le formidable discours d’une femme enceinte face à des manifestants anti-IVG

Cette vidéo a fait le tour du Web : une femme enceinte houspille des manifestant•e•s brandissant des photos « choc » devant une clinique pratiquant des IVG. Et non, ce n’est pas au fin fond du Texas, mais… à Londres.

Des activistes d’une association anti-IVG ont exposé devant une clinique pratiquant des avortements une grande bannière avec une photo plutôt graphique et sanglante censée représenter un foetus de 10 semaines. Le but de la manœuvre est de faire culpabiliser les femmes qui se rendent à la clinique pour avorter, et celles qui en ressortent.

Dans les premières secondes de la vidéo ci-dessous, on découvre d’abord un homme en grande discussion avec un autre à propos de la caméra qu’il porte sur la poitrine ; le premier, à droite, lui demande de partir et d’arrêter de filmer les femmes qui entrent et sortent de la clinique, alors que l’homme à gauche se défend sans trop de conviction. Celui à la caméra prétend qu’elle est éteinte, qu’il n’a rien enregistré… alors qu’on peut quand même voir une lumière rouge clignoter.

Les anti-IVG ne sont pas très nombreux : il y en a trois ou quatre en arrière-plan. On voit aussi une femme enceinte qui se tient en retrait, plus observatrice qu’actrice. La femme à la chapka prétend qu’ils enregistrent seulement pour prouver qu’ils ne sont pas agressifs et qu’ils ne perpètrent aucune attaque physique, aucun « harcèlement ». Le problème, c’est qu’en enregistrant ces scènes, ils immortalisent aussi les visages de ces femmes qui ont le droit à l’anonymat.

À 1:17, la femme enceinte intervient ; elle est visiblement là depuis un moment car elle a entendu la femme postée à droite de la bannière demander au porteur de caméra de l’éteindre, ce qui prouve qu’elle était bien allumée et qu’elle enregistrait. Elle part ensuite dans une tirade prenant les activistes anti-IVG à parti, un par un, alors que ceux-ci restent bouche bée et impuissants.

Trigger Warning : l’image utilisée par les anti-IVG, assez gore, est visible dans la vidéo.

— Elle a dit « éteins la caméra », ça veut dire qu’ils ont filmé ! […]

— Madame…

— « Madame » quoi ? Je suis en train de parler. […]

Je suis d’accord avec ce qu’ils disent, c’est mal ce que vous faites, vous ne savez pas pourquoi les gens qui viennent ici font ce qu’ils font et vous venez là, vous jugez, et vous les filmez. Je viens juste d’entendre cette femme-là dire « j’ai avorté ». Tu es une hypocrite, une grosse hypocrite ! Tu as avorté mais parce que tu n’es pas « heureuse » de ce que tu as fait, tu pousses les autres à se sentir coupables. Et je peux dire que beaucoup de gens ont été maltraités, tu ne connais pas leurs raisons. Je pense que tout ça [en parlant de la bannière], c’est mal, à tellement de niveaux. Parce que je l’ai entendue dire « éteins la caméra ». Alors sois honnête, mec, sois honnête avec les gens. […]

Tu ne sais pas si elles ont de l’argent — il y avait un bébé dont on a parlé aux infos, qui a été trouvé dans une poubelle, une putain de poubelle ! Et peut-être que si sa mère ne s’était pas sentie comme ça à cause de gens comme vous, ce bébé ne serait pas mort dans une poubelle. Vous croyez que c’est quoi le pire : de s’en débarrasser à 10 semaines, ou d’accoucher et ensuite de tuer le bébé ? Je pense que c’est mieux avant, c’est aussi simple que ça. Et je pense que vous leur faites du tort. Alors que vous n’avez même pas fait vos recherches : il y a une association en bas de la rue avec plein d’enfants, et vous ne savez même pas où vous vous êtes placés ! C’est un mauvais endroit où se mettre, surtout quand il y a des gens qui ont des problèmes, et qui viennent là pour voir des femmes qui peuvent les aider. Et ils doivent regarder ça ?! Les gens avec qui on travaille, ce sont des gens qui ont été maltraités, et vous croyez que c’est bien ? De se faire violer par des soldats et d’être enceinte ? […]

[S’adressant à la femme] Et ton avortement, c’était TON choix, alors que tu sois ici, à faire culpabiliser d’autres femmes, c’est mal. Tellement mal, putain.

Le discours de cette femme enceinte n’est pas spécialement dans la revendication politique ; elle ne dit pas explicitement qu’une femme peut avorter, qu’elle soit en situation de détresse ou pas. Une IVG n’est pas nécessairement le fruit d’un viol, une nécessité amenée par une situation socio-économique, ni un drame humain : c’est la raison pour laquelle il était important que la mention de détresse soit retirée de la loi sur l’avortement lors de  l’adoption définitive de la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes le 23 juillet 2014.

À lire aussi : IVG : 92 sénateurs UMP affirment une position anti-choix [MAJ]

Elle tient un discours qui tend à parler de situations précaires, de femmes enceintes qui n’ont pas les moyens d’élever un enfant ou qui ont subi un viol ; c’est pour ça que cette vidéo est forte, et intéressante sur plein d’aspects ! Cette femme n’est visiblement pas une militante pour le droit à l’IVG, quelqu’un qui connaît chiffres et textes de loi, ayant l’habitude de se confronter aux anti-IVG. C’est une femme qui travaille au sein d’une association d’aide aux victimes de violences et d’abus : elle parle de ce qu’elle connaît, de son quotidien auprès de victimes qui se retrouvent culpabilisées par ces manifestant•e•s.

Elle confronte ces anti-IVG un peu par hasard, parce qu’elle passe par là pour se rendre au travail. Elle fait preuve d’une grande éloquence parce qu’on sent qu’elle sait de quoi elle parle

, qu’elle est choquée et qu’elle ne laissera personne l’interrompre. Pas un seul des anti-IVG ne parvient à protester : ils sont comme atterrés par cette femme dont la voix s’élève pour leur botter le train sérieusement et les mettre en face de leurs contradictions. Elle dénonce leur hypocrisie, le fait qu’ils filment les femmes sans autorisation, et plus globalement leur message visant à culpabiliser les gens, sans oublier cette photo atroce qui touche non seulement les personnes se rendant à la clinique, mais aussi les passant•e•s dans la rue, et les enfants.

ellenp

Dans Juno, l’héroïne tombe enceinte et se retrouve face à une camarade de classe qui milite devant la clinique dans laquelle elle s’apprête à avorter. Elle finit par faire demi-tour et renonce à l’IVG.

À lire aussi : L’avortement vu par le cinéma et les séries télé

Le droit à l’avortement en Europe

Le droit à l’avortement est encore un sujet qui fâche et qui divise. S’il est largement répandu à l’échelle européenne, il faut se souvenir qu’il est très limité voire interdit dans cinq pays de L’UE. Il est légal depuis 1975 en France, et 1967 au Royaume-Uni (avec un renforcement de la loi en 1969 qui permet aux femmes âgées de 16 ans d’avorter sans le consentement des parents), mais là encore, il subsiste des personnes qui sont contre et souhaiteraient qu’il soit interdit.

Si, en France, les anti-IVG se font relativement discrets (je dis bien « relativement »), dans d’autres pays, les manifestations devant les cliniques sont monnaie courante…

À lire aussi : Tu vois des pubs anti-IVG sur Facebook ? Ce n’est pas un hasard

L’avortement en Grande-Bretagne

Parlons de la Grande-Bretagne, notre voisine d’outre-Manche. On imagine ce genre de vidéos venir des États-Unis, on sait que ces manifestations y sont légion… mais non, il s’agit bien de Londres !

De ce que j’en ai entendu au cours de mes voyages et selon les amitiés que j’ai pu lier en Grande-Bretagne, la contraception et l’avortement y sont des sujets plus tabous qu’en France. D’autres pays qui nous sont proches en terme de culture et de développement sont dans le même cas : le sexe peut être à la fois omniprésent visuellement et très culpabilisé, sale et tabou.

Un jour, une amie britannique m’a annoncé qu’elle était enceinte et qu’elle voulait avorter ; elle m’a dit qu’elle préférait m’en parler à moi car ayant elle-même vécu en France, elle savait que je tiendrais un discours différent de ses amies anglaises et que je ne la jugerais pas. À l’époque, elle m’avait raconté que si elles avaient toutes une sexualité active, elles ne prenaient pas la pilule (ou d’autres formes de contraception) par peur d’être jugées ou à cause de la désinformation, et considéraient l’avortement comme immoral, ou en tout cas pas comme une option. Beaucoup de ses connaissances tombées enceintes très jeunes avaient gardé le bébé et en étaient heureuses ; elles prêchaient donc parfois contre l’avortement et mon amie en était attristée, elle se sentait coupable malgré elle alors qu’elle ne désirait pas d’enfant

À lire aussi : « La plus belle chose au monde… », le non-désir d’enfant expliqué en BD par Nepsie

J’avais dix-sept ans, je ne connaissais rien aux revendications féministes, je ne me sentais pas concernée par l’avortement et j’étais déjà pourtant étonnée que dans des pays développés d’Europe, certaines personnes en viennent à questionner la liberté de disposer de son corps. Il existe des gens qui sont contre le droit à l’IVG, pour diverses raisons, mais leur liberté de penser ce qu’ils veulent doit s’arrêter quand ils influent sur le choix des autres. C’est le cas quand ils exercent une pression psychologique sur des femmes qui sont dans l’indécision, voire la détresse.

Qu’en est-il de ces personnes dont le choix n’est pas évident, dont l’entourage est contre l’avortement, qui n’ont pas de soutien ? Cette IVG, si elle leur apparaît nécessaire, va aussi parfois à l’encontre des principes moraux et religieux, ce qu’il faut respecter : ces photographies mensongères de « foetus » ne font qu’engendrer plus de souffrances pour des personnes qui n’ont vraiment pas besoin de ça.

Pour aller plus loin…


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Les Commentaires

24
Avatar de abou333
7 janvier 2015 à 16h01
abou333
Il faut attendre la 10ème semaine de grossesse je pense pour l'intervention chirurgicale, mais sinon c'est exactement ça : pas de d'IVG médicamenteuse. En tout cas aux dernières nouvelles.
0
Voir les 24 commentaires

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