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Culture

La chorale du collège, entre grâce, volupté et fausses notes : instant nostalgie

Amélie a fait partie de la chorale de son collège. Cette époque est resté gravée dans son coeur et dans son âme… comme une bonne vieille chanson de Goldman.

Il y a, dans tout parcours professionnel, un moment où notre route ne semble pas encore toute tracée. Au collège, je voulais soigner les girafes du zoo de Thoiry. J’ai vite compris qu’il fallait plus qu’un certain talent au compas pour être acceptée en prépa véto. J’ai abandonné l’idée.

Loin de me miner le moral, j’ai donc décidé de me lancer dans une carrière de chanteuse professionnelle (mais il n’y a que moi qui le savait). Ça tombait bien, mon sympathique prof de musique avait relancé la chorale du collège, une occasion en or pour parfaire mon organe ! Ni une, ni deux, je rassemblai mes fidèles compères de classe et nous nous inscrivîmes pour l’expérience qui allait changer notre vie… à jamais.

Je me rappelle de la première fois où j’ai donné de la voix au milieu d’une cinquantaine de personnes. Ça n’avait rien à voir avec la torture du cours de chant, celle où l’infâme prof tirait au sort le nom de celui ou celle qui allait chanter le premier couplet de la chanson à apprendre par coeur (pire encore : qui allait recevoir une note pour ça).

C’était cet instant où ta voix n’est plus une voix, mais une sorte de grosse bête puissante, portée par la même note. Je me rappelle des frissons qui ont parcouru mon dos, du regard émerveillé et complètement ridicule que j’ai échangé avec ma meilleure amie. Je me suis promis de continuer, même si mon temps pour manger à la cantine était amputé de moitié tous les lundi. Et tu sais quoi ? Je n’ai jamais regretté.

La chorale, tu l’aimes ou tu la quitte

Dans la chorale de mon collège il y avait plusieurs clans : ceux qui étaient là par envie et ceux qui avaient été forcés. Certaines classes dites « difficiles » ou « en insertion » étaient obligées de participer ; du coup, pendant qu’une moitié du groupe s’égosillait en choeur, les autres s’efforçaient de pourrir le groove général.

« Casser la… croûûûûûte. » Nope. 

Entre rire et fusillade du regard, notre pauvre professeur ne savait à quelle corde vocale se vouer.

Du talent d’élire les bons morceaux

Ce qui était cool, dans mon collège, c’est que nous avions le droit de choisir quelques chansons dans notre récital. Pour ça, un vote plus ou moins équitable était mis en place. Une fois, ma meilleure amie et moi avions proposé du Rohff ; malheureusement, notre offre a été rejetée. Depuis, j’avoue, je ne suis que larmes et grisaille.

Ne JAMAIS sous-estimer le pouvoir du rap français circa 2004. 

Heureusement pour nous, lors de ma première année de chant collectif, plusieurs morceaux de Kyo avaient été retenus. Nous étions des ménestrels heureux.

(Bien évidemment, dans un esprit de vengeance sans doute, nous avions droit à Jean-Jacques Goldman dans son oeuvre intégrale pour compléter nos concerts).

Alto VS Soprano

Au départ, pour rentrer dans le cercle très privé de notre chorale, il fallait passer le test d’entrée (non, rien à voir avec ceux du Glee Club). En fait, on devait chanter un petit bout de texte afin que le prof détermine si nous ferions partie de la voix 1 (la plus aiguë) ou la voix 2 (la plus grave).  En gros, les premiers chantaient les chansons normalement tandis que les seconds s’occupaient « des notes étranges mais qui rendent le tout trop stylé ». Inutile de préciser qu’il FALLAIT être en voix 1.

ron

« Pitié, laisse-moi psalmodier du Tal, les notes chelou et les accompagnements c’est pas mon truc. Allez, fais pas ton tarba. »

Malheureusement pour moi, la nature ne m’a pas dotée d’un organe cristallin. Le couperet est donc rapidement tombé : je faisais partie de la voix 2. Après avoir vu ma pote entonner des variations étranges pour prendre un ton de femme des cavernes (j’ai toujours pu compter sur son soutien infaillible), nous étions deux dans cette galère.

Et puis, au fil du temps, j’ai compris que sans cette fameuse voix 2, nos morceaux auraient été dignes des chants de Noël de primaire — en deux mots : carrément moches. J’ai appris à aimer notre singularité et notre façon de donner de la profondeur aux chansons.

Qu’aurait-été ce célèbre morceaux des Choristes sans la participation des voix chantant les lignes s’affichant au-dessus de cette vidéo ? Une comptine plate. Voilà.

Finalement, j’ai sacrément kiffé ma condition de voix 2.

La gloire du soliste

Comme tout le monde évolue en même temps, impossible de vraiment faire sortir sa voix du lot quand on chante dans une chorale (d’ailleurs, ce n’est pas vraiment le but de l’exercice). Pourtant, un statut était particulièrement convoité. Un tas d’appelés pour peu d’élus, beaucoup tentaient leur chance pour finalement terminer par pleurer toutes les larmes de leurs corps sur un lit de l’infirmerie.

Les solistes.

Ceux-là étaient des personnes désignées pour mener une ou plusieurs chansons. Elles avaient leur propre micro, des parties où elles étaient les seules à chanter devant tous les autres, et une gloire presque infinie.

J’ai. Été. Soliste. Mieux : ma meilleurs amie et moi, avons été solistes, menant les premiers et deuxième couplets de Je cours de Kyo avec la plus grande fierté du monde.

Je ne puis dire si le prof a reconnu notre talent ou a eu pitié de nous, mais l’année d’après nous avons renouvelé l’expérience, avec le rap de Passi dans Face à la mer. Notre chorale eut l’occasion de se déplacer pour plusieurs concerts dont un à Lyon et un autre en Allemagne (où on nous a demandé un bis). C’est un de mes plus beaux souvenirs de cette époque !

Qui avait dit qu’il ne fallait pas sous-estimer le rap français ? 

En bref, n’imagine pas que la chorale est uniquement réservée à ta grand-mère qui se prend pour la disciple de Verdi et aux enfants de choeur du village d’à côté ! Elle a ce côté puissant que le fait de chanter dans ta douche n’aura jamais. Mieux, elle possède la puissance nécessaire pour te faire apprécier Michel Sardou. Et ça, c’est quand même une sacrée performance.

Aujourd’hui, je crèverais d’envie de refaire un tour dans cette époque, où je me baladais en pantalon noir et chemise blanche, avec une tresse africaine qui me tirait beaucoup trop sur le cuir chevelu, et où mes parents avaient pris leur caméra (à cassette) pour immortaliser mes moment de grâces. Enfin… de grâce, pas tant que ça, car ma voisine chantait faux, car j’avais foutu du mascara pour cheveux sur la chemise de ma fidèle alliée, car on stressait si fort que mon micro glissait dans mes mains et car le prof nous faisait mourir de rire avec ses grands gestes de faux chef d’orchestre.

L’élégance n’était peut-être pas de la partie pour les spectateurs, mais à l’intérieur, on était tous très beaux.

À lire aussi : Ces trucs qui ont marqué mes années collège


Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.

Les Commentaires

8
Avatar de Annesol
25 décembre 2014 à 21h12
Annesol
Ah la chorale! Je me souviens que j'avais fait soliste pour un couplet avec le garçon que j'aimais à sens unique à l'époque.
On chantait le premier couplet de "Quand on arrive en ville". Sauf qu'on disait "frôler les filles" au lieu de "violer les filles". Et le micro marchait pas et j'étais super stressée de me rapprocher du micro car c'était me rapprocher du garçon... ahaha
Les bons souvenirs de la 6éme.
Plus tard, en 3éme, j'étais dans une chorale où la moyenne d'âge était de... 60 ans. ambiance.
0
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