Dans une rupture, il y a les non-dits. En général, ça concerne les deux ex-partenaires. Et puis il y a les trop-dits, ces phrases que tu vas devoir subir jusqu’à ce que tu aies à nouveau la force de dire « mais tais-toi-donc » à quelqu’un en toute dignité…
Quand c’est toi qui pars
- Mais t’es sûre de toi ?
Non, absolument pas. C’est juste que j’hésitais entre un golf et détruire mon couple et qu’il faisait trop gris pour un golf. Du coup je me suis dit : autant détruire le bonheur de quelqu’un avant mon rendez-vous chez le dentiste vendredi en 8 ! Il n’est pas impossible que je change d’avis d’ici-là, ça dépendra de mon horoscope.
Ton coeur de pierre résumé en une image.
- Et vous allez faire comment pour le chat ?
C’est vrai qu’on néglige trop souvent, dans les premières heures post-rupture, la question de la facture d’eau et de la collection de jeux vidéo commune. Je veux dire, il est évident qu’ayant pris l’initiative, j’ai déjà eu le temps, dans mon esprit machiavélique et calculateur, de diviser les meubles en deux et de faire le tri dans les CD.
Il est d’ailleurs fort probable que si la question du canapé payé à deux demeure insondable, nous soyons forcés de nous remettre en couple. On restera tout particulièrement sensibles à l’emploi de la deuxième personne du pluriel dont la délicatesse m’évoque une éponge Spontex directement frottée sur MON ÂME.
- Mais pourquoi ? Vous formiez un si joli couple…
Mais parce que tout ce qui est beau me dégoûte, enfin. Et que j’aime profondément la détresse et cette impression de gueule de bois sans alcool que procure la rupture. C’est clairement la meilleure partie du couple !
Que serait l’amour sans toutes ces semaines de remords à l’idée de faire le malheur de quelqu’un, sans toutes ces insomnies à retourner la question dans ta tête ? C’est ce qui fait la saveur d’une relation entre adulte consentants — avec le partage de la télécommande et des impôts locaux.
Quand c’est toi qui restes
- Il/Elle reviendra !
Mais bien sûr. Et sinon, quitte à faire vite, plutôt qu’un couteau tu veux pas une scie sauteuse pour retourner la plaie ?
- T’es tellement géniale, je comprends pas !
Moi non plus. D’ailleurs je songe fortement à m’engager en relation libre avec moi-même tellement je suis merveilleuse. Bon, là tout de suite je ressemble à un goret sous crack qu’on vient d’égorger
, mais je suis sûre que mon intellect et mon humour vont rameuter tou-te-s les célibataires du quartier en file indienne pour contempler mon merveilleux faciès. Décidément mon ex ne sait pas ce qu’il/elle rate.
Ah. Bah. Si, en fait.
- Un-e de perdu-e, dix de retrouvé-e-s !
Très clairement, si ce genre de proverbe bateau pouvait sauver le monde, je pense que ça ferait dix ans que la France aurait arrêté la consommation de psychotropes. Manque de bol, c’est plutôt le contraire… Ça vous dirait pas de changer de disque, du coup ?
Et enfin ma préférée des phrases-post-rupture-qu’on-nous-ressort-à-toutes-les-sauces :
- Faut laisser faire le temps, ça va passer… Là tu peux pas t’en rendre compte mais ça va passer…
Dire ça à un-e ado de 16 ans qui vit sa première rupture, je peux encore le comprendre. Mais quand on parle à quelqu’un qui a déjà du vécu, je ne vois vraiment pas l’intérêt.
Je sais que les gens veulent bien faire, mais la rupture donne le droit à un supplément misanthropie avec pépites de mauvaise foi que je me permets d’exercer sans scrupules : sincèrement, si le temps est le remède, pourquoi me dire précisément ça deux jours après ? Voire le jour même ? Sauf à avoir une DeLorean dans la poche, ça va pas franchement rendre moins pénible la période de chiale qui précède…
Et du coup, en plus d’être jalouse en pensant à tou-te-s celles et ceux qui vont croiser le slip de mon ex à l’avenir, je suis aussi jalouse de mon moi du futur, celle qui va déjà mieux. Chienne de vie.
Ah, attendez, j’ai un bonus :
- Mais vous allez rester amis ?
Alors attends deux secondes.
Voilà, je me suis extraite de mon corps de personne en souffrance complètement obnubilée par l’échec de cette relation, et je suis fin prête à répondre à ta question en me projetant dans le futur joyeux de l’après-couple qui, comme tu le vois à mon mascara dégoulinant, me réjouit déjà.
J’envisage avec sérénité cette magnifique période de l’amitié post-couple à propos de laquelle les livres de développement personnel ne tarissent pas d’éloges. Je m’y vois déjà. On mangera des glaces, on ira au ciné, ce sera sympa. Quand je n’aurai plus envie de mourir sous ma couette chaque jour, quoi.
Petit mea culpa
Bien évidemment, cet article dégouline de mauvaise foi, et je lève mon verre à tout-es les ami-e-s du monde qui tendent mouchoirs, shots de vodka Fanta et phrases pas toujours nulles à leurs proches, transformé-e-s par la rupture en hamsters névrotiques dégoulinants de morve.
Tes potes quand ils tentent de te réconforter. Oui, c’est ça : ils rament.
Ils continuent à nous aimer même dans cette perte totale de dignité que sont les grosses chialades au réveil, les coups de fils à 4 heures du mat’ et les cuites qui commencent à poil sur le bar du Macumba Night et qui finissent, à poil toujours, dans les draps du videur, alors respectons-les.
Et puis vu qu’on a déjà perdu ses repères, autant se réfugier dans de bons gros clichés moelleux !
Tu viens de te faire plaquer ? Tu viens de larguer ta moitié ? Allez, on relit le guide de survie des premières heures post-rupture et on s’accorde le droit à un peu de mauvaise foi assumée… Après tout, « ce qui ne tue pas te rend plus fort », non ?
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Les Commentaires
Comment ça mon entourage est sadique ? (bon en général c'est mon père qui me sort ça en mode "personne n'est assez bien pour ma petite fille" :queen