La vie imprévisible des mannequins
On m’a souvent demandé comment mon mec gérait ma « situation ».
C’est vrai que le rythme de vie est soutenu quand on est mannequin à plein temps. Il faut être disponible à 100% au cas où un client ou une marque appelle l’agence pour vous booker du jour au lendemain, ou encore voyager un peu partout sans préparation en amont. C’est un style de vie qui demande une organisation conséquente, et parfois même aucune organisation !
Pas question de réserver une table au restaurant ou d’aller boire un verre avec un pote en happy hour. Être mannequin, c’est être aux aguets en permanence ! Alors, souvent, on dit qu’on « pose une option » sur ce Bloody Mary de 18h30 (comme je déteste cette expression)…
Après, libre à vous d’être disponible pour le cocktail et de couper votre téléphone mais ça entraînera les foudres de votre agent s’il cherche à vous appeler pour un casting de dernière minute ou un essayage rapide.
Votre agent se donne corps et âme pour remplir votre agenda et vous faire gagner de l’argent (ne vous leurrez pas, il y trouve son intérêt aussi, bien sûr) : il faut le respecter et l’écouter, il est souvent de bon conseil.
Une semi-relation à distance
Quand les jobs sont à l’autre bout de la France ou du monde, on est contents d’avoir Instagram et les iMessages.
Quand on est chez soi, on attend qu’une chose : l’appel de son agent, qui peut arriver n’importe quand, en général pour annoncer une bonne nouvelle.
Quand on ne bosse pas, on carbure quand même : on passe la journée à courir les castings, et notre vie sociale se résume souvent aux collègues mannequins ou aux gens croisés par hasard…
Peut-être que certain-e-s d’entre vous trouveront ce rythme de vie insupportable, car on doit rendre des comptes à notre agence en permanence : c’est comme être mariée très jeune à une société ! Clairement, si vous n’acceptez pas d’être contactée à n’importe quel moment ou de tout abandonner pour un job, alors le métier de mannequin n’est pas fait pour vous.
La confiance, l’élément-clé
— © Nicolas Guérin, série « Géométrie de couple », Khube Magazine
Ce qui nous amène à parler de la vie d’un couple dont l’un des membres est mannequin (je pense très honnêtement que ça doit être plus difficile lorsque les deux le sont, mais je ne connais pas suffisamment le sujet pour en parler).
Ma relation avec mon compagnon remonte presque à mes débuts dans le milieu. Il était donc au courant de mes activités.
Je conçois qu’il peut être très difficile de voir son compagnon ou sa compagne partir toute la journée en castings, sachant qu’il/elle se fera soit reluquer (professionnellement !), soit claquer la porte au nez sans aucun traitement de faveur. Lorsqu’il ne s’agit pas de castings, il/elle part faire des photos, parfois en lingerie, sur un plateau bondé. Étant donné que le mannequinat ne s’accorde pas très bien avec la pudeur, on est amené-e-s à se balader en dessous dans les backstages régulièrement et il faut donc que le couple soit bâti sur une confiance solide.
Et je ne vous parle pas des remises en question permanentes du genre « je n’y arriverai jamais », « on m’a dit que j’étais énorme, t’en penses quoi ? » (avec option sanglots), « je suis nulle, moche, personne ne m’aime »… et les périodes de questionnements peuvent durer quand un client/directeur de casting a manqué de tact ou qu’on reste longtemps sans job. Eh oui, notre corps est notre outil de travail et si on ne travaille pas, on se pose plein de questions pas forcément faciles à supporter pour l’autre membre du couple !
— © Nicolas Guérin, série « Géométrie de couple », Khube Magazine
Si le couple a des bases solides et que la confiance est établie, alors il pourra durer… comme dans la vie, quoi ! Il faut prendre le mannequinat comme un travail normal, mais très exigeant, avec des collègues, des heures sup’, des découvertes, des dîners avec son boss, des rendez-vous parfois imprévus, un agenda chargé…
Le soutien de l’autre est essentiel
Si mon compagnon n’avait pas cru en mon projet et ne m’avait pas soutenue, je n’aurais pas pu aller si loin dans ma carrière. Je l’ai invité plusieurs fois sur les shootings pour qu’il se rende compte de la détente qui y régnait, je lui ai montré les « relations » qui s’établissent entre les différentes personnes du plateau, et je ne lui cache absolument rien concernant les jobs, les castings, les collègues, etc. Certains mannequins se rendent aux castings avec leur compagnon.
Avec une personne possessive, par contre, le clash n’est jamais loin. Ce métier requiert des concessions ; il faut savoir se dire « si mon/ma chéri-e est heureu-x-se ainsi, ça vaut le coup ». C’est un métier qui demande de se défoncer au quotidien, alors je vous assure que le soutien de votre moitié est plus qu’important, au quotidien et puissance mille.
Il est clair qu’un week-end à Deauville n’est franchement pas le bienvenu. Je vous laisse le soin d’expliquer à votre agent que vous ne pouvez pas accepter le catalogue qu’il vous a trouvé car vous avez prévu d’aller faire la patate sur un ponton en bois et de vous enfiler un énorme cornet de frites sauce samouraï : mauvaise idée.
Pendant deux ans, le mannequinat était mon activité à temps plein : on a donc renoncé aux week-ends programmés en amoureux. On a réussi de temps en temps à s’évader mais c’était imprévu, furtif et pas loin de chez nous pour vite pouvoir rappliquer si une opportunité se présentait.
Je rappelle qu’il n’est pas facile de vivre correctement du métier de mannequin, voilà pourquoi il faut être disponible en permanence : on ne laisse pas un job passer sous son nez, on prend tout ce qui est intéressant pour assurer les mois creux, car c’est sûr qu’il y en aura !
Donc, si votre moitié souhaite se lancer dans ce monde sans pitié mais néanmoins magique ou si elle est déjà bien imbibée de cet univers, soutenez-la au maximum ! On a besoin du soutien des autres, et c’est également valable pour les amitiés. Le couple survivra si chacun-e fait un effort, si on évolue ensemble et si on aide l’autre à ne pas baisser les bras (et en plus ça jouera sur la motivation à décrocher des jobs !). Il faut donc ranger sa jalousie au placard…
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Malgré les contraintes, ça ne me dérangerait pas d'être en couple avec un/e mannequin