Je suis en couple depuis trois ans avec quelqu’un de formidable. Au niveau du sexe, les débuts pour la plupart des couples, c’est la période topissime, mais ça n’a pas franchement été notre cas…
Un début pas très prometteur
Je sortais d’une relation qui s’était très mal finie, c’était l’été et j’étais en quête de fun. Je suis beaucoup sortie, ce qui m’a conduit un soir, légèrement imbibée désinhibée, à embrasser un garçon que je connaissais à peine, mais avec lequel j’avais bien senti une ouverture. Il avait, en plus, un physique de sex-symbol.
Il a été sympa ; il m’a rappelée, il m’a baladée dans sa Clio, il était drôle malgré lui. Ça m’occupait, ça me faisait du bien. Au départ, je croyais qu’il allait repartir loin pour six mois, je n’ai rien imaginé, et ça me convenait parfaitement. Sauf que la veille du départ, il m’a annoncé qu’il reviendrait deux mois plus, et que si je voulais bien l’attendre, il serait ravi qu’on se revoie.
Et là il m’a embrassée, puis a plongé sa tête dans mes cheveux.
Je me suis dit qu’il était trop sympa, que cela cachait quelque chose – syndrome de paranoïa post-rupture. On n’a rien fait de plus et il est parti le lendemain. Sans m’en rendre compte, je l’ai attendu durant ces deux mois, même si nous ne partagions pas plus que quelques nouvelles.
Quand il est revenu, un autre mois a passé, pendant lequel nous nous voyions régulièrement. Je trouvais notre relation cool, mais je commençais à avoir l’impression d’embrasser un ami, alors j’ai passé la vitesse supérieure. Enfin j’ai tenté ; il m’a répondu qu’il n’était pas prêt. J’étais un peu vexée, et un peu frustrée, mais j’ai compris ce qu’il voulait dire.
Mais trois semaines plus tard, je commençais vraiment à avoir envie de croquer la pomme. Je lui ai donc proposé de partir en week-end. Enthousiaste, il a dit oui.
Pour moi, c’était le top départ des hostilités : j’ai tout préparé, de l’épilation au choix méthodiques de mes tenues, de l’achat des préservatifs à celui de maillots de bains et de sous-vêtements.
Quand nous sommes arrivés dans la petite villa qu’on nous avait gracieusement prêtée, tout se présentait plutôt bien. Tout y était mignon, et il y avait même un jacuzzi ! Après avoir dîné, ni une ni deux, j’ai foncé enfiler mon maillot, je nous ai servi deux verres de vin et je l’ai invité à aller se baigner. Mais une fois dans le jacuzzi, ça s’est compliqué ; il n’osait pas me toucher. Il était assis, les mains sur les genoux, à parler sans s’arrêter – comme s’il avait peur que je lui saute dessus pendant un silence.
N’ayant connu que des hommes « chauds », qui partaient au quart de tour, je ne comprenais pas… Je me suis donc blottie contre lui pour le détendre, et nous n’avons plus parlé. On s’est câliné, il a commencé à m’embrasser passionnément, et là il m’a dit « Je t’aime » – et j’ai cru mourir de gêne. Il m’a demandé : « Tu trouves que ça va trop vite ? », et je ne me suis même pas entendue répondre « Pas du tout, moi aussi
».
J’ai fait semblant de vouloir aller aux toilettes pour me retrouver seule avec moi-même et faire un point sur la situation : aucune once de sexualité et des sentiments, ça sentait le roussi.
Dans ma tête, ça donnait à peu près ça.
Je me sentais arnaquée comme une jeune vierge : quand on a 20 ans, on n’attend plus de se dire qu’on s’aime pour le faire – comme si les sentiments étaient plus tabous que le sexe. Mais j’ai décidé que c’était LE moment ; trop réfléchir n’est pas bon. J’y suis donc retournée comme une furie et j’ai attaqué les choses sérieuses.
Il m’a proposé d’aller dans la chambre pour être « plus à l’aise ». On s’est d’abord séchés, puis il m’a portée dans ses bras, toute enroulée dans ma serviette, jusque là-bas – j’avais l’impression de faire quarante kilos, c’était génial. Sauf que nos deux corps collés ne passaient pas la porte ; mes orteils ont sévèrement morflés. On a ri, on s’est embrassés encore et on s’est déshabillés.
Et là, j’ai vécu le pire instant de ma vie ; après des caresses et des préliminaires, Popol n’était pas DU TOUT de la fête… J’ai fait comme si de rien n’était et on a continué encore, pensant que c’était du stress…
Ce qui était supposé être une petite histoire simple avec un garçon ne l’était en fait PAS DU TOUT. Fatiguée, vexée, blessée, j’ai fini par arrêter d’essayer. J’ai prétexté être fatiguée et avoir sommeil. Il s’est blotti contre moi, et il a dit: « Je suis désolé ». Je n’ai pas répondu et il s’est endormi avant moi, tranquille, pas perturbé – j’ai eu peur que cela soit habituel, d’où son calme.
Juste l’expression de ses inquiétudes
Le lendemain nous en avons parlé ; il m’a dit qu’il avait toujours été comme ça, qu’il n’y avait eu qu’une fille avant moi et que c’était compliqué, qu’il était stressé d’avoir des rapports et qu’il avait besoin de sentir aimé tel qu’il était avant de se lancer dans une intimité. Il m’a serrée contre lui, et il m’a demandé d’avoir de la patience, parce que ça valait la peine d’attendre.
Ça m’a touché au plus profond de mon être. Cet homme aux allures de rugbyman était un fait un petit garçon en manque d’amour apeuré par les vagins (il ignorait même carrément ce qu’était un clitoris). Si pour moi le sexe était récréatif, pour lui c’était une épreuve.
À la fin du week-end, je me suis rendue compte que je n’avais pas du tout envie de m’enfuir en courant, malgré l’avenir un peu tendu sexuellement qui m’attendait si je restais avec lui.
En y repensant maintenant, je me dis que j’étais déjà vraiment amoureuse de lui (aussi vite c’était une première), ou alors je me suis prise pour Mère Teresa, toujours prête à aider son prochain – ou bien les deux, soyons fous.
En fait, ce n’était pas du tout un sex-symbol ; il n’est pas plein d’assurance, il est maladroit, il est touchant, il adore le cinéma, il lit des livres d’Histoire juste parce qu’il aime ça, il est gentil, c’est un nounours d’un mètre quatre-vingt. Quand il me fait rire, c’est toujours sans le faire exprès, il est là pour moi et il fait très bien à manger.
J’adore tes pâtes carbo.
Aujourd’hui, plus de trois ans après, nous sommes toujours ensemble. Il s’est détendu, il n’a plus peur et nous avons de très bons rapports sexuels (je suis fière de mon poulain !).
Parfois, quand il est très stressé, il a des « coups de mou » qui le reconduisent à une peur de l’acte, parce qu’il a peur de ne pas réussir. Le tout c’est de le savoir et surtout de le SOUTENIR.
Je ne vous cache pas qu’on a eu de sales périodes, et que parfois j’en ai marre et je rêve qu’en un frifri ça soit « Let’s go c’est parti les amis ! ». Mais il est impensable que je m’en aille pour ça ! J’ai été rassurée quand il est allé voir un psychologue qui lui a dit :
« Chaque humain est unique, et vous croyez que tout le monde a des érections fabuleuses à chaque fois ? C’est comme ça, certains ont des nœuds dans le dos quand ils sont stressés ; vous, vous gérez juste votre stress autrement. Le problème est que votre gestion du stress vous fait stresser encore plus. »
Cette simple phrase l’a profondément marqué, et l’a fait réfléchir.
Parfois encore, il me dit qu’il aimerait m’offrir « la vie sexuelle d’un couple normal ». Ça me fait un pincement au cœur ; je lui réponds qu’il m’offre mieux.
Ne plus souffrir (et faire souffrir) des préjugés
J’ai failli passer à côté d’une relation formidable à cause des préjugés auxquels j’ai été soumise toute ma vie. J’ai mis un temps phénoménal à comprendre que son « souci » n’était pas dû à mon physique ; je prenais sa panique pour un manque de désir envers moi, et je me sentais rabaissée et blessée alors qu’au fond celui qui souffrait, c’était lui.
Il avait peur de faire l’amour et d’« échouer ». Il se considérait comme anormal, et moi-même je l’ai considéré comme anormal, alors qu’il tentait juste d’être lui-même dans un monde où la normalité ne veut rien dire.
Mais nous avons avancé ensemble. Et j’espère qu’on avancera encore longtemps.
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