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Culture

Belle Toute Moche

Cette semaine, Daria Marx s’interroge sur l’émission de M6 Belle toute nue. Et si finalement, notre ami William Carminola brassait du vent avec son émission soi-disant révolutionnaire ?

Quand j’ai vu débarquer Belle Toute Nue à la télévision, j’ai cru qu’un grand vent révolutionnaire s’emparait enfin de nos médias frileux et normatifs. Le programme se présentait dans la lignée des formats déjà connus aux US et en Angleterre, où le sémillant Gok Wan sort les dodues de leurs robes housses et de leurs ballerines Isotoner. J’allais pour la première fois de ma vie pouvoir m’identifier à ces filles aux hanches trop larges et aux bedons trop ronds, j’allais pouvoir m’enthousiasmer devant mon écran devant leur transformation, j’étais prête à devenir la cheerleader officielle de l’émission. Il ne faut jamais croire ce que raconte la petite boîte à images, et de rediffusions en déception, mon verdict est officiellement négatif : Belle Toute Nue, piège à con.

belletoutenu

Oui mais pourquoi ?

1/ La théorie du tout-le-monde-il-est-beau

Je suis grosse. Cela ne fait pourtant pas de moi quelqu’un d’aveugle et d’insensible à la beauté ou à la laideur des autres, aux harmonies d’un corps ou à la présence d’une moustache disgracieuse sur la lèvre supérieure d’une de mes copines. Si on en croit les passants et les témoins interrogés lors du passage de la victime désignée sur l’autel de l’opinion publique, toutes ces femmes sont universellement belles et désirables. Cela n’existe pas. Cela ne fonctionne pas.

De la même manière qu’il est socialement acceptable de décréter qu’on préfère rouler des pelles à un grand blond aux cheveux longs, il est pour moi parfaitement normal de dire qu’on ne se sent pas attiré par une fille ronde. Il ne s’agit pas de décréter que toutes les grosses sont d’ignobles baleines uniquement bonnes à servir d’amante de secours, planquée entre quatre murs. Il s’agit des lois mystérieuses de l’attirance au premier coup d’œil. Je ne nie pas le charme des grands blonds aux cheveux longs maigrichons, mais je ne me retourne pas sur leur passage dans la rue.

J’ai donc du mal à croire que tous les hommes interrogés trouvent sexy et merveilleusement bandant les cuisses taille 46 de la jeune femme placardée devant leurs yeux. C’est normal, on n’est pas là pour montrer du négatif, on choisit et on coupe. Mais cette manière de créer une attirance lisse pour tous les corps et tous les genres me met mal à l’aise. Accepter son corps avec ses défauts, c’est aussi se dire qu’on ne plaît pas à tout le monde, mais qu’on s’en contrefout.

2/ Cachez ce bourrelet que je ne saurais voir

Si Belle Toute Nue nous sert de la grosse en maillot de bain, en lingerie ou en déguisement d’hôtesse de l’air lors du très célèbre Line Up de comparaison entre taille de fesses, on ne peut pas dire que le styliste William Carminola soit très pro-rondeurs le reste du temps. Il s’agit surtout de cacher, de lisser, d’améliorer le corps sur lequel il travaille. On attend toutes avec impatience le moment de la gaine, arme de torture, qu’il propose systématiquement sous les robes, les jupes, ou même toute nue ! Selon William, il faut montrer ce qui est classiquement acceptable et joli chez les grosses : le visage, les épaules, le décolleté. Pour le reste, vous avez la coupe empire, le bustier en élasthanne, le noir en bas, le clair en haut. On reste dans une approche très classique de la mode pour rondes : on appâte le chaland avec son nichon conquérant, en espérant qu’il oublie de s’attarder sur notre tour de taille ou sur nos différentes bouées. On met en valeur les parties du corps qui sont souvent déjà les points forts annoncés de la nana complexée, sans s’attarder sur le reste, trop difficile ou trop douloureux à traiter. La dodue au décolleté plongeant, encore un cliché véhiculé par le programme, malheureusement.

3/ Pas cap d’être à poil devant des centaines d’inconnus

Le défi ultime de l’émission, c’est la photo nue, et plus récemment le défilé nue devant des centaines de personnes dans un centre commercial. C’est évidemment le côté spectaculaire de la transformation qui est mis en avant. La pauvre fille un peu moche et un peu molle se retrouve à mener la revue d’un Fat Crazy Horse du pauvre, toute émerveillée par le travail des coiffeurs et des maquilleurs mis à sa disposition pour l’occasion. Super. Et après ? Je ne suis pas complexée, je ne l’ai jamais été. Le fait d’être grosse ne m’a jamais privée de piscine ou de plage par exemple. Mais tu ne me paieras jamais assez cher pour aller défiler à poil sur une estrade. Et ce n’est pas une question de beauté ou de volonté. C’est une question de pudeur, mais aussi peut-être de valeur. Je n’ai pas besoin de me prouver que je peux le faire. Je sais ce que je suis. Et je reste persuadée que les participantes à Belle Toute Nue n’ont pas besoin de cette parade pour garder les leçons des quelques jours passés à s’occuper d’elles. Le discours selon lequel le bien-être dans son corps passe par l’offrande de ce dernier aux yeux du monde entier me déplaît. On le retrouve chez les centaines de nanas prêtes à tout pour poser gratuitement pour un photographe amateur sur Internet. Elles cherchent la reconnaissance dans les yeux des autres, et tant pis s’il faut tomber la culotte au passage, c’est presque devenu un passage rituel obligé dans la quête de son identité. Je ne crois pas que le souvenir de ce défilé pousse les filles concernées à tomber le paréo plus facilement quand vient l’été.

Le seul intérêt de l’émission à mes yeux, c’est d’avoir permis de faire augmenter de manière incroyable le quota de femmes en surpoids à la télévision. Plus besoin d’attendre les redites du Maillon Faible ou de guetter Marianne James, plus besoin d’attendre les reportages sur la chirurgie de l’obésité ou sur les régimes de stars pour me reconnaître dans celle qui passe à la télé. Je suis toujours surprise de la différence entre la télévision anglaise et la télévision française sur les questions de représentations de la société. Dans le feuilleton fleuve hyper populaire Eastenders de la BBC, on trouve des gros, des petits, des moches, des beaux, des noirs, des pakistanais, des jeunes et des vieux, un patchwork certes caricatural mais assez représentatif de l’Angleterre d’aujourd’hui. Dans nos séries familiales et un peu nazes en France, amusez vous à compter. Combien de noirs ? Combien de gros ? Combien d’homosexuels ? Combien de vraiment moches ? Combien d’intrigues ne tournant pas autour de deux personnages plutôt bien faits ?


Les Commentaires

91
Avatar de Vavaliciious
21 août 2011 à 03h08
Vavaliciious
Comment tu peux te permettre une phrase pareille ? T'as un sacré problème avec le jugement.

Je n'ai pas envie de me justifier auprès de toi parce que franchement ce que tu viens de sortir là, c'est ridicule et irrespectueux.

Et je ne te l'ai pas demandé non plus .
0
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