En partenariat avec Gallimard jeunesse (notre Manifeste)
Si vous suivez avec assiduité les chroniques de livres sur madmoiZelle, vous êtes au courant. Sinon, eh bien vous allez l’être : le roman Trouble vérité d’E. Lockhart est sorti en librairies et je vous en ai fait la critique ici !
En plus d’être un thriller prenant et très original dans le choix de sa narration à rebours, il invite par son intrigue et dans le récit de la relation qui unit Jule à Imogen à s’interroger sur l’amitié.
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L’amitié, c’est un vaste sujet. Si elle est plutôt vouée à permettre aux gens d’être heureux, elle peut parfois se révéler intrusive, voire nocive, lorsque la confiance est trop vite accordée à certaines personnes ou qu’on ne se rend pas bien compte qu’elles n’agissent pas respectueusement.
La rédac a été inspirée par cette thématique de l’amitié toxique et revient sur les moments où une relation amicale s’est révélée davantage contraignante que positive !
*Les prénoms ont été modifiés
Ces amies qui m’ont isolée
C’est en primaire que Mathilde* a connu sa première déception amicale, et non des moindres – il faut dire que les enfants ne sont pas toujours très tendres entre eux.
« Virginie était ma meilleure amie. On était toujours chez l’une ou l’autre, à se faire des pyjama party, à jouer à être adulte, baragouiner du Britney et à passer nos week-end à faire des tours de pâtés de maisons.
On se confiait tout, nos petits coups de cœur d’enfants, nos contrariétés, nos rêves, nos ambitions. Je pense que ce qui marchait à l’époque dans notre duo, c’était qu’elle avait beaucoup de caractère, et moi j’étais plus calme, plus compréhensive, je la tempérais.
Puis un jour, comme ça, on a eu l’envie d’intégrer une troisième personne à notre duo. Elle avait repéré une autre fille souvent isolée à la récré, que je connaissais très peu de mon côté, mais que Virginie aimait bien. On a eu envie de la prendre sous notre aile et de ne plus la laisser seule.
Sauf qu’autant ça collait très bien avec Virginie, autant avec moi, ça ne passait pas du tout. Elle ne m’intéressait pas, je n’aimais pas son caractère qui était lui aussi très fort. Un peu du jour au lendemain, elles m’ont prise pour leur bouc émissaire.
C’était le festival des moqueries, elles me rabaissaient, profitant de mon incapacité à me défendre. Ça me rendait super malheureuse : j’avais perdu ma meilleure amie, qui en préférait une autre, me mettait de côté sous son influence, et trouvait une source d’amusement en me faisant du mal.
Un jour, elles s’en sont pris physiquement à moi. Je me félicite a posteriori d’avoir trouvé que c’était la goutte d’eau de trop et d’avoir claqué la porte.
Mais je me dis aussi que j’ai accepté beaucoup trop d’humiliations avant d’en venir là, dans l’espoir de voir les choses s’arranger. Et ça a beaucoup affecté mes relations sociales et ma confiance envers les gens. »
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L’amie toxique, c’était moi
Pour Amélie*, la situation est toute autre. En effet, c’est elle qui s’est révélée être un poids pour sa meilleure amie à cause de son profond manque de confiance.
« Adolescente, je n’avais pas beaucoup d’ami·es. Je préférais la compagnie d’une seule personne plutôt que celle d’un large groupe. Et la personne que j’adorais, c’était Lola*.
Je me rappelle l’avoir rencontrée au début de l’année au collège. C’est elle qui était venue m’adresser la parole en premier, et tout de suite le courant était bien passé.
À l’époque, je la connaissais par cœur et elle savait presque tout de moi. Mais je la sentais changée depuis peu et j’avais l’impression qu’elle ne s’amusait plus autant qu’avant en ma compagnie.
La moi de 14 ans s’inquiète alors de la voir s’éloigner et se rapprocher de nouvelles personnes qui ont d’autres centres d’intérêt.
Même si Lola et moi passions toujours tous les weekends ensemble, ça devenait insuffisant pour moi. Je regardais ses nouvelles camarades d’un mauvais œil en me demandant ce qu’elle pouvait bien leur trouver.
Un jour, Lola choisit de travailler sur un exposé avec deux de ses amies en me demandant au préalable si cela me pose problème. Je bouillonne de colère et de déception.
Au fond de moi, je me sens trahie, délaissée et mal-aimée, quand Lola souhaite simplement changer d’environnement – alors que nous avons encore nos moments de complicité et de proximité qui n’appartiennent qu’à nous.
Mais quand je la vois rire avec quelqu’un d’autre que moi, une boule se forme dans mon ventre, quand je l’entends raconter une histoire qu’elle m’a dite à moi, mon cœur se serre, et toutes les fois où elle fait des activités avec ces gens que j’évite, une profonde solitude m’envahit.
Lola a essayé de m’intégrer mais très vite je lui dis que je n’apprécie pas ses nouvelles copines, et je sais que ça la déçoit.
Pour moi, rejeter ses relations extérieures est une façon de la forcer à rester avec moi uniquement.
Au lieu de garder tout ce que je ressens pour moi, je commence à me confier. Elle me rassure, me comprend et m’explique que je suis toujours une amie importante pour elle.
Ses mots auraient dû me réconforter, mais au lieu de ça, je lui dis, un peu plus souvent chaque semaine, que j’ai peur de la perdre, que je me sens seule, et que je n’aime pas ses amies.
À force de lui répéter presque quotidiennement mes insécurités, Lola ne sait plus quoi faire. Alors que je me plains pour la énième fois de la semaine, Lola ne répond plus. Elle ne me rassure pas, ne laisse rien transparaître. Puis elle m’explique :
« Je ne peux pas passer ma vie à te réconforter. J’ai de nouvelles amies que j’aime aussi. Je suis indépendante, on ne peut pas rester collées l’une à l’autre tout le temps. En tout cas, ce n’est pas ce que je veux. »
Elle ajoute qu’elle ne souhaite plus me parler pendant un temps, pour respirer un peu :
« Je serai toujours là pour toi, mais pour le moment, j’ai besoin d’être un peu seule. »
Ses mots sont un choc. Je prends conscience que je ne recherche que l’exclusivité, que tout ce que je souhaite c’est de la garder égoïstement pour moi, comme un doudou auquel on est attaché. Sauf que Lola n’est pas un doudou.
Nous nous sommes éloignées pendant quelques années avant de reprendre contact, petit à petit. Aujourd’hui, Lola et moi sommes de nouveau meilleures amies, et nous vivons même à des kilomètres de distance l’une de l’autre.
J’ai appris à respecter l’indépendance de mon entourage et à rassurer mes incertitudes. Le secret, c’est d’avoir confiance en soi, comprendre ce que l’amitié nous apporte et savoir ce qu’on donne à l’autre. »
Ces amies qui m’ont donné des complexes
Quelque chose que Sarah* a eu du mal à supporter dans son groupe d’amies au collèges, c’était les remarques incessantes sur son apparence.
« J’avais un groupe d’amies avec lequel je passais toutes mes pauses. Pas un seul anniversaire ne se passait sans qu’on soit les unes chez les autres, et les après-midi à base de crêpes-Nutella étaient routinières.
Le collège, plus j’y repense, plus je trouve que c’est la période la plus ingrate du monde. On change, on a envie de trouver sa propre personnalité, mais ça se fait rarement du premier coup !
J’étais loin d’être la plus cool du collège, sans Buffalo à flammes ni Eastpak stylé. J’étais plutôt la fille que personne ne voit, coincée et timide. Mais moi aussi, j’avais envie de changer, de grandir !
Le truc c’est que mes amies étaient loin d’être tendres, même si on se confiait tous nos secrets. La moindre petite trace d’esquisse de maquillage était pointée du doigt quand j’aurais eu juste envie qu’elle passe inaperçue.
Ma manière de m’habiller était pour elles une source de raillerie, et aucun nouveau bouton de mon acné juvénile très productive ne passait inaperçu.
Je riais avec elles de moi, mais je me dis que des amies servent plutôt à donner confiance qu’à se filer des complexes. Donc c’est naze. »
Ces amies qui m’ont influencée dans mon choix de mec
L’expérience de Pauline* n’est pas loin d’être similaire à celle suscitée, à ceci près que ses amies n’ont pas tant influé sur sa confiance que sur ses goûts.
« Au lycée, j’étais très attirée par un garçon que je croisais régulièrement dans les couloirs. Je ne savais pas qui il était, dans quelle classe il étudiait, je n’avais aucune idée de son prénom. Mais le fait est qu’à chaque fois que je le croisais, mon coeur battait la chamade.
Plutôt timide par rapport à tout ça, j’ai finalement révélé le fond de ma pensée aux amies de ma classe, qui ne se sont pas gênées pour se moquer du garçon en question et dire à haute voix tout le mal qu’elles pensaient de lui – alors qu’elles ne le connaissaient pas plus que moi !
Ça m’a beaucoup influencée, et j’ai longtemps formaté mes goûts en matière de mecs en fonction des canons de beauté unanimement reconnus, pour qu’on soit sur la même longueur d’ondes.
Mais avec le recul, je me dis que je suis sans doute passée à côté de jolies histoires en écoutant leurs conseils au lieu de me laisser vivre en suivant mes propres envies.
Et toi, as-tu connu une amitié toxique ? Comment as-tu réagi dans ces situations ?
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Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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