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Faut-il voir Douleur et Gloire, le nouveau film de Pedro Almodóvar en lice pour la Palme d’or ?

Douleur et Gloire est un film intime et éclatant qui rassemble toutes les inquiétudes et les obsessions de son créateur. Kalindi l’a vu à Cannes, et s’en souviendra toute sa vie. Pour autant, faut-il foncer le voir au cinéma ?

Je ne possède plus beaucoup de DVD depuis le jour où il m’a fallu en vendre quelques uns à une brocante pour arrondir une fin de mois difficile.

Ma relation avec le cinéma d’Almodovar

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Il y en a toutefois certains dont je ne me débarrasserai jamais : ceux des films d’Almodóvar.

Ils sont assis les uns à côtés des autres sur une étagère poussiéreuse que je n’utilise presque jamais mais regarde toujours amoureusement.

Certains disques argentés ont longtemps voyagé avec moi, coincés avec diligence sous des montagnes de robes à fleurs, assurant mon divertissement pendant les grandes heures que je passais l’été dans le train, pour rejoindre le sud.

Parle avec elle, Tout sur ma mère, Talons aiguilles, Dans les ténèbres, Volver : je les ai vus et revus, imaginant à chaque fois être à la place des personnages féminins.

L’esthétique colorée, vive et aujourd’hui un poil vintage de ses films titillait vraiment mon œil d’adolescente. 

Mais c’était surtout ses héroïnes inquiètes et romantiques qui me happaient et m’habitaient longtemps.

Les femmes sont au cœur des films d’Almodóvar, qui travaille d’ailleurs souvent avec les mêmes actrices. Celles-ci sont sans doute pour lui une vraie source d’inspiration.

Cette année, après une absence de 3 ans comme à l’accoutumée (Pedro réalise un film tous les 2/3 ans), le cinéaste madrilène au style très marqué a pourtant un peu délaissé les figures féminines pour fabriquer une auto-fiction centrée sur les peines et les amours de personnages masculins. 

Les hommes sensibles, romantiques et parfois fragiles sont au cœur de Dolor y Gloria, un film qui sent Almodóvar à plein nez.

En un sens, Douleur et Gloire a des airs de La loi du désir et de La mauvaise éducation, et vient renouer avec les thématiques et l’esthétique qui ont fait les grandes heures du cinéma de son créateur.

Dolor y Gloria, de quoi ça parle ?

Salvador Mallo est un réalisateur à succès en mal d’inspiration.

Rongé par différents maux comme les douleurs de dos et de crâne, l’insomnie et la dépression, ce passionné de cinéma n’a plus ni ambition ni force créative.

Loin désormais de sa prime enfance, il se remémore pourtant les instants charnières de sa vie, près de sa mère pieuse et dévouée, du premier homme qui a éveillé en lui le désir, de ceux d’après, et des journées chaudes dans « la caverne », la maison souterraine dans laquelle il a grandi et dévoré des livres sur le cinéma.

Salvador baigne dans les souvenirs et ne vit plus que dans un rêve éveillé, sorte de demi-coma brumeux qui lui grignote l’existence et l’empêche de créer. 

Mais la machine semble lentement redémarrer après que d’anciennes connaissances refont surface dans sa vie.

Entre passé et présent, souvenirs et instantanéité, Salvador se débrouille pour sauver ce qu’il reste de ses passions. 

Mais Dolor y Gloria, ça n’est pas qu’une histoire, c’est L’histoire.

LA grande histoire d’une vie dans laquelle se mêlent et s’entremêlent des problématiques universelles et propres à l’humain comme l’amour, la maladie, la mort, la parentalité et l’ambition.

Perso, j’ai tout aimé du film et n’ai plus qu’une hâte aujourd’hui : retourner le voir le plus vite possible.

Salvador, l’alter-ego filmique de Pedro Almodóvar

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Impossible de ne pas déceler les similitudes entre le personnage de Salvador et le réalisateur lui-même.

Car ce héros romantique, qui préfère les hommes mais vit au milieu de femmes et se questionne sur sa propre manière de façonner le cinéma, C’EST Almodóvar.

Par tous ses pixels, le film transpire les idées et les inquiétudes de son auteur. Celui-ci esquisse une fois de plus les contours d’un objet intime que ses partisans vont à mon avis chérir. 

Douleur et Gloire sont les aveux tristes et éclatants d’un cinéaste dont le travail ne semble finalement pas avoir pâti d’un manque d’inspiration.

Au contraire, c’est dans le manque d’inspiration de son alter-ego filmique qu’Almodóvar trouve matière à subjuguer.

Voir Douleur et Gloire, c’est voir Almodóvar tout nu, avec des décors somptueux et sanguins pour seuls habits.

Voir Douleur et Gloire, c’est pénétrer l’intimité d’Almodovar, de son amour pour sa mère à celui pour les hommes.

Voir Douleur et Gloire, c’est prendre part à la gloire et la douleur, justement, de Salvador et donc d’Almodóvar.

Douleur et Gloire, un casting habitué à la caméra d’Almodóvar

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Comme bien souvent, le réalisateur espagnol s’est entouré de visages bien connus.

C’est Antonio Banderas qui incarne Salvador lui-même, et par extension Pedro Almodóvar.

L’acteur d’aujourd’hui 58 ans (qui ressemble désormais étrangement à Alain Chabat mais seulement de 3/4) déclame avec sincérité, jusqu’à en devenir troublant.

Il n’incarne plus Salvador, il EST Salvador. 

Ce sont Asier Etxeandia et Leonardo Sbaraglia qui lui donnent la réplique avec justesse et retenue en prenant grand soin de ne pas éclipser le héros torturé.

Toutefois, chacun de ces hommes a droit à son moment de gloire, notamment Asier Etxeandia qui se révèle dans un morceau du film, en étant seul sur scène et en racontant une histoire d’amour déçue.

C’est sans doute mon passage préféré du film, celui qui l’a propulsé illico dans mon top 5 de mes Almodóvar favori. 

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Si Douleur et Gloire centre son intrigue sur des hommes, les personnages féminins ne sont pas en reste, et surtout pas celui de Penélope Cruz. C’est elle qui ouvre le film, belle comme à l’accoutumée, mais débarrassée d’une quelconque sexualisation.

Ici, elle est la mère et matriarche de la famille, qui mène fermement sa vie sans oublier d’apporter douceur et bienveillance à son enfant unique.

L’actrice est parfaite et ça n’est pas une surprise.

Devant la caméra d’un réalisateur dont elle est la muse, elle brille simplement sans jamais en faire trop.

Douleur et Gloire signe sa sixième collaboration avec un cinéaste dont elle a bien connu la mère. Aujourd’hui, elle porte cette même figure maternelle dans un film intime. 

Il y a quelques années, Pedro a avoué que la seule femme qui aurait pu le faire changer de bord est Penélope Cruz. Cette année, elle devient sa mère au cinéma.

L’actrice est donc passée de vrai quasi-fantasme à génitrice fictive, ce qui en dit peut-être long sur l’amour fou et flou que le réalisateur portait à sa mère.

Douleur et Gloire, c’est un film éclatant qui mêle cinéma et théâtre et fait fusionner fiction et réalité.

J’espère sincèrement que cette création intimiste emportera suffisamment Cannes dans son élan créatif afin que Pedro reparte, pour la toute première fois de sa longue carrière, avec la Palme d’or.

Alors oui, IL FAUT aller voir Douleur et Gloire.

À lire aussi : L’une de ces réalisatrices va-t-elle remporter la Palme d’or ?


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Les Commentaires

2
Avatar de missaaj
18 juin 2019 à 10h06
missaaj
Alors que en général je suis pas mega fan de almodovar jai trouvé ce film très beau!!
0
Voir les 2 commentaires

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