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Mes seins et moi, du complexe à la liberté

Les seins de cette madmoiZelle ne correspondent pas aux stéréotypes véhiculés par la société. Cela l’a longtemps complexée à l’extrême, jusqu’à ce qu’une prise de conscience de taille change tout.

On pourrait aisément dire que selon les critères véhiculés par notre chère société, mes seins sont MOCHES.

D’abord, parce qu’ils tombent. Ils ont beau remplir un bonnet D, quand je retire mon soutien-gorge sous mon t-shirt on voit à peine que j’ai de la poitrine. En plus de cela, j’ai les tétons en gants de toilette, c’est à dire à peu près 15 cm au dessus du nombril, bien pointés vers le bas. Visualisez donc.

Il ne s’agit pas ici, cher lecteur•trice, de combler une mauvaise inclination pour l’exhibitionnisme, je vous rassure. Cet article va parler de mes seins, mais aussi du fait d’être une femme, pour parler de liberté.

Seins et féminité

Quand j’étais petite, je rêvais d’avoir des seins. Une belle paire de seins volumineux, moelleux, qui iraient avec de belles robes et des tops au-dessus du nombril, à la Britney. Je voulais avoir des seins, à tout prix.

J’attendais qu’ils poussent avec une impatience qui pouvait me tirer les larmes à chaque passage devant un miroir.

J’attendais qu’ils poussent avec une impatience qui pouvait me tirer les larmes à chaque passage devant un miroir. J’avais l’impression que quand cela arriverait, et pas avant, je serais enfin une femme pour de vrai. Pas juste un truc entre deux eaux, pas juste la binoclarde de service avec ses pantalons roses avec des têtes de bouddhas que personne d’autre n’aurait voulu porter. Une FEMME.

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J’ai attendu, attendu, et puis ça a commencé à pousser. Mais plus ça poussait, plus ça tombait. L’angoisse totale. Je n’avais pas de problèmes d’élasticité de la peau, pas traversé de grossesse, aucun problème de santé qui puisse une seule seconde être en rapport. Mes seins étaient (et sont) parfaitement sains (vous l’avez ?).

Alors est né un complexe sans nom, tenace et destructeur. Quand j’ai compris que cela ne changerait pas, que j’étais partie pour vivre avec ça, j’ai cherché des subterfuges dans la lingerie. Des soutien-gorges aux coques bien moulées et bien résistantes, des push-up, et bien d’autres. Ça faisait l’affaire ! Sous mes vêtements, au quotidien, l’illusion était là ! Le politiquement correct assuré !

Un complexe tenace et destructeur

Ça marchait jusqu’à ce que mon premier amoureux, avec qui c’était très sérieux, parle de m’enlever ces fameux vêtements… Me voilà repartie pour une nouvelle vague de stress ! Comment allais-je lui dire que je ne voulais pas qu’il m’enlève mon soutif ?

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Il était hors de question qu’il voie ma poitrine, qui risquait de le faire fuir à toutes jambes en hurlant !

Il était hors de question qu’il voie ma poitrine, qui risquait de le faire fuir à toutes jambes en hurlant ! Comment allais-je lui expliquer que malgré tout mon amour, il ne verrait jamais ce qu’il y avait là-dessous ?

Mais surtout, plus crucial que tout, que faisais-je de MON désir de le sentir les toucher ? Tout était dicté par la peur de la non-conformité, bien au delà de ma propre conscience.

Ma première fois avec lui, j’ai gardé mon tee-shirt mais j’avais retiré mon soutif en dessous pour qu’il puisse glisser sa main, m’étant arrangée pour que nous soyons dans le noir. Ce compromis dura un temps, et ce copain finit, au bout de longs mois, par voir mes seins en plein jour.

Nous n’eûmes cependant jamais de conversation à ce propos : nous étions amoureux, et son regard était globalement valorisant vis-à-vis de mon corps, ce qui me permis de passer au stade supérieur. Ce jour solennel, j’ai inventé un proverbe :

« Si tu lui fais assez confiance pour lui ouvrir ton lit, c’est que tu lui fais assez confiance pour lui montrer tes tchi-tchis ! »

J’étais désormais capable de dévoiler mes seins à quelqu’un que je désirais, dans un moment intime et privé. J’ai aussi rapidement pris conscience que savoir les montrer était important, car malgré tout, quelle que soit leur forme, mes seins participaient tout de même à la montée en température chez l’autre, et avaient leur place dans l’érotisme pouvant se créer avec quelqu’un.

Je n’eus, quelle chance divine, jamais aucune remarque dégradante sur ma poitrine, et pourtant cela aurait été facile. À croire que les personnes que je choisissais dans mon lit n’avaient pas ce genre de mauvaise éducation (ils avaient bien d’autres vices, mais c’est une autre histoire).

Le complexe des seins, boulet aux pieds de ma sensualité

Cependant, mon propre regard sur ces deux excroissances molles ballantes n’avait, lui, pas progressé. Mon rapport à cette partie de moi n’était que haine et mépris.

À 18 ans, j’errais sur Internet à la recherche d’infos sur l’opération esthétique de la ptose mammaire (visant à remonter les seins tombants), mais je m’arrêtais à l’idée qu’il était ensuite déconseillé d’allaiter, envisageant d’en avoir un jour le souhait — sans parler du coût important d’une telle intervention.

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Ce complexe restait un fléau de premier plan.

En écrivant cela aujourd’hui, je prends conscience de la boule au ventre que me créait ce complexe. J’ai vécu bien d’autres choses autrement plus graves et préoccupantes au cours de mon adolescence et de mes débuts dans la vie adulte, mais ce désamour de mes seins restait un fléau de premier plan.

En effet, l’une des rares choses que j’aimais à ce moment-là dans le fait de grandir, c’était la sensualité que je découvrais en moi, le pouvoir croissant de générer le désir chez l’autre : mon regard sur mes propres seins me freinait dans mon envie de commencer à vivre pleinement ma sexualité.

En fait, cela me gêna longtemps. Quelques années plus tard, j’entrais dans la vie active, partais vivre dans une grande ville, prenais mon envol avec succès, mais toujours avec ce boulet à la cheville dans ma façon d’habiter mon corps de femme.

Aimer son corps de femme… en aimant les femmes

J’arrive ici à un tournant de ma vie. Pour résumer, c’est à peu près à cette époque que j’ai compris que j’aimais les femmes. Après de nombreuses relations avec des garçons, j’ai compris d’un coup que j’étais attirée par les femmes, et pas qu’un peu.

Je me suis demandé ce que MOI je considérais comme beau ou sexy dans le corps d’une femme.

En comprenant ça, j’ai commencé à porter un tout autre regard sur le corps des femmes en général. Je me suis demandé ce que MOI je considérais comme beau ou sexy dans le corps d’une femme, ce par quoi MOI j’étais attirée. Et la réponse n’avait absolument RIEN à voir avec les stéréotypes médiatisés.

J’aime les filles un peu rondes, je les trouve ultra sexy dans des leggings moulants où on voit tout bouger quand elles marchent, y compris la cellulite. J’aime les filles au regard mutin qui s’habillent avec innocence, comme si elles ne voyaient pas le moindre défaut sur leur corps, quel qu’il soit. J’ai un désir fou pour les filles qui ne portent pas de soutien-gorge sous leur vêtements et le vivent bien.

Mais plus que tout, je fonds complètement pour un corps de femme qui ne ressemble en rien à celui d’un magazine, à celui d’une madame-tout-le-monde dont j’ai l’impression de déjà tout connaître. J’ADORE le corps d’une femme qui regorge « d’imperfections », de petits détails qui ne se trouvent sur aucun autre, qu’il faut découvrir pas à pas et qui rendent ce corps unique et infiniment précieux.

À lire aussi : Ces défauts physiques qui me font craquer

Cette prise de conscience fut un chambardement total dans ma tête !

Quoi ? Comment ? Moi, la complexée incorrigible ? Moi, la nana qui voulait se faire refaire les seins pour les « académiser », en fait c’était ÇA que j’aimais ?! C’était le monde à l’envers ! Si c’était ça qui me plaisait, pourquoi je n’aimais pas ça chez moi ?

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Mes seins et moi : la liberté (quasi) complète

Pas loin de deux semaines après cette prise de conscience, je rencontrais la femme de ma vie. Eh oui, marrant comment les choses se passent des fois. Pour la première fois de ma vie, j’avais une confiance vraiment aveugle en quelqu’un.

Pour la première fois, je n’ai pas eu peur de montrer mon corps.

Pour la première fois, je n’ai pas eu peur de montrer mon corps. Pour la première fois, j’ai vu dans le regard de la personne que j’aimais que mon corps était magnifique. Parfait comme il était. Mon corps de femme.

Je ne dis pas qu’en deux ans de relation, je n’ai jamais de rechute. Que je n’ai jamais eu de moments de larmes face au miroir. La société, on vit dedans. Les stéréotypes, ils nous assomment, affiche après affiche, pub après pub, vitrine après vitrine. Il y a toujours des moments où notre cerveau fuite, et où ça rentre comme un mauvais poison.

Mais cet été, pour la première fois, pendant toute une journée, je n’ai pas mis de soutien-gorge sous ma robe. Je suis sortie comme ça, dans la ville où j’ai grandi et où je croise des gens que je connais à tous les carrefours

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Pendant une journée, j’ai senti mes seins bouger à chacun de mes pas, je les ai sentis frotter contre le tissu doux de ma robe, j’ai senti le vent sur eux à travers le coton, et j’étais impressionnée par la quantité de choses si simples et agréables que cette partie de mon corps pouvait me faire ressentir.

Il faisait beau, chaud, j’étais bien, je serrais dans ma main celle de ma compagne, et mes seins, comme moi, étaient libres.

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Les Commentaires

10
Avatar de Freehug
26 octobre 2016 à 23h10
Freehug
Je ne dis pas que c'est le cas de la madmoizelle qui témoigne mais j'ai longtemps cru avoir les seins qui tombent, au point de vouloir les faire opérer pour les remonter (et plus tard pour les réduire mais j'y ai renoncé). Forcément, j'en avais jamais vu ailleurs que dans les pornos ou en dessin et ils sont gros. Dans la réalité, des seins non refaits, en bonnet G, ben fatalement la gravité les fait un peu piquer du nez... Mais on peut pas parler de ptose pour autant. En fait je pense que seul un chirurgien esthétique peut vous dire si vraiment il y a ptose ou si c'est juste le poids normal de vos seins qui les tire un peu vers le bas. Dans tous les cas, une grosse poitrine qui tient comme s'il y avait un soutien-gorge invisible pour la porter, c'est impossible sur des seins naturels. Ce serait bien de désexualiser la poitrine autour de plus de projets comme la seinte fresque parce que putain, le nombre de fois où je sortais en larmes de boutiques de lingerie parce que rien ne m'allait, où j'étais persuadée de finir seule à cause de mes seins...
Pour le coup, la sexualité file un sacré coup de pouce contre les complexes, je trouve. Les personnes avec qui on couche font rarement des remarques à la con sur notre physique, puisqu'elles nous choisissent en fonction de ce qui leur plaît ! Ça fait du bien de se sentir désirée sans conditions.
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